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686. Nous terminerons cette section par la solution d'une question fort importante. La confusion qu'un créancier du défunt opérerait en acceptaut l'héritier pour débiteur, est-elle une véritable novation? Il faut décider la négative, quoique le Code lui donne cette dénomination au titre des successions. Un acte, de quelque nature qu'il soit, opère cette novation dont il est parlé au titre des successions s'il opère confusion; tandis que, dans le sens propre de la loi, il n'opérerait pas novation. Celle novation ne produit donc pas d'autre effet que celui de faire perdre aux créanciers le droit de demander la séparation des patrimoines. Ainsi le créaucier hypothécaire qui recevra un titre nouveau, dans lequel il acceptera l'héritier pour débiteur, sans déclaration de la volonté d'opérer novation, ou sans que cette volonté résulte des termes de l'acte, ne perdra que le droit de séparation des patrimoines, et non ses hypothèques.

SECTION III.

De l'extinction de l'obligation principale et de ses accessoires par la remise de la dette.

687. La remise de la dette éteignant l'obligation principale éteint aussi les priviléges et hypothèques qui en sout les accessoires.

La remise de la dette est ou tacite, ou expresse.

Elle se fait tacitement dans les circonstances suivantes : La remise volontaire du titre original sous signature privée par le créancier au débiteur fait preuve de la libération (1282). La remise volontaire de la grosse (1283) du titre fait présumer la remise de la dette ou le paiement, sans préjudice de la preuve contraire. La remise de l'original fait preuve de la libération, parce qu'il

n'y a plus aucun fondement de la créance. La remise vo loutaire de la grosse ne fait présumer qu'une remise, parce que la minute subsiste toujours et parle en faveur du créancier à la charge de qui est cependant la preuve contraire.

La remise du titre original (1284) sous signature privée, ou de la grosse du titre à l'un des codébiteurs solidaires, a le même effet à l'égard de ses codébiteurs.

La remise de la chose donnée en nantissement (1286) ne suffit point pour faire présumer la remise de la dette; car le créancier a pu en cela n'avoir d'autre intention que de lui remettre le nantissement, et non de lui remettre la dette. La remise expresse a lieu dans les circonstances sui

vantes :

La remise de la dette ne peut être faite par le concours seul de la volonté du créancier, parce qu'une abdicatiou métaphysique de ses droits est absurde, et qu'un don doit être accepté par le donataire; de là il résulte que la remise ou décharge doit être conventionnelle. Deux opinions se sont élevées sur la fixation du moment précis de l'acceptation. Les uus veulent qu'elle n'opère son effet qu'autant qu'elle est connue du créancier; c'est la doctrine d'Heineccius adoptée par M. Toullier dans son savaut Traité des obligations. Les autres veulent que le contrat de remise soit parfait dès que les offres ont été acceptées, et c'est l'opinion d'un professeur distingué, M. Pardessus. Quelque imposante que soit l'autorité de ce grave jurisconsulte, je crois la doctrine d'Heineccius préférable, et déjà implicitement consacrée par l'art. 932 du Code.

688. La remise ou décharge conventionnelle (1285) au profit de l'un des codébiteurs solidaires libère tous les autres, à moins que le créancier n'ait expressément réservé ses droils contre ces derniers. Dans ce dernier cas, il ne

peut plus répéter la dette que déduction faite de la part de ceux à qui il a fait remise.

Libère tous les autres, Pothier avait décidé le contraire. Le législateur a cru plus équitable d'établir la présomption en faveur de tous par la libération de l'un d'eux. Cette présomption cesse par la réserve expresse.

La remise ou décharge conventionnelle (art. 1287), accordée au débiteur principal, libère les cautions; car ce débiteur serait inutilement déchargé, si les cautions ne l'étaient pas, puisque les cautions étant obligées de payer auraient recours contre ce débiteur. Il faut excepter le cas d'une remise forcée; ainsi la remise faite par la majorité des créanciers lors d'un attermoiement ne libère point les cautions qui ne doivent point profiter non plus des effets de la cession judiciaire ou des termes de grâce accordés au débiteur.

Celle accordée à la caution ne libère pas le débiteur principal, parce que l'obligation principale peut exister sans la caution, tandis que la caution ne peut exister sans l'obligation principale.

Celle accordée à l'une des cautions ne décharge pas les autres. Si le créancier avait reçu de l'argent d'une caution pour la décharge de son cautionnement, le débi teur principal ne serait point libéré.

Ce que le créancier a reçu d'une caution pour la dé. charge de son cautionnement doit être imputé sur la dette, et tourner à la décharge du débiteur principal et des autres cautions. (Art. 1288.)

Il n'y a que le créancier capable de disposer de ses biens qui puisse remettre la dette, ou une personne foudée de son pouvoir spécial pour faire cette remise. Un procureur général de toutes les affaires, un tuteur, un curateur, un administrateur, n'a pas ce droit. Il faut excepter la remise qui se fait de partie de la dette à un débiteur en cas de faillite; car c'est moins une donation qu'un

acte d'administration. Lorsqu'il y a plusieurs créanciers solidaires, correi credendi, l'un d'eux peut sans les autres faire remise. La remise peut être faite au débiteur, au procureur fondé, au tuteur, au curateur, ou autres administrateurs de ses biens. La remise étant une donation, elle ne peut être faite aux personnes incapables de recevoir.

La remise se peut faire pour partie, même pour des choses non susceptibles de division.

689. On peut élever ici la question de savoir si le prélegs de libération du reliquat d'un compte de tutelle éteint l'obligation du tuteur, et par suite l'hypothèque légale qui pèse sur lui. Il faut décider que le tuleur n'est point censé libéré par ce prélegs de l'obligation de rendre compte, à moins qu'il n'en apparaisse autrement dans le testament; c'est la décision de Dumoulin, dans son Traité de dividuo et individuo, pag. 96, no 44, princip. La raison qu'il en donne est qu'il importe au pupille, dont le comptable a administré les biens ou les droits, d'être instruit d'iceux par l'exhibition des pièces et la reddition d'un compte.

L'obligation du tuteur, en effet, est composée et mélangée de deux chefs séparables. La reddition de compte se peut faire séparément, et quand cette obligation aura été remplie, que le compte aura été arrêté et conclu, et les pièces restituées, l'obligation de faire, qui est de rendre compte, disparaîtra, et il ne restera plus que l'obligation de donner, c'est-à-dire de payer le reliquat s'il y a lieu, et au contraire, l'obligation du reliquat peut être remise, l'obligation de faire, qui est de rendre compte, subsistant toujours. Dumoulin, ibid. 1o 43.

Or cette obligation de faire, reddendarum rationum, comprend quatre articles le premier qui est l'exhibition, la lecture et l'inspection du compte; le second,

la computation et la position des articles de ce compte ; le troisième, la preuve à l'appui qu'il doit être ajouté pleine et entière foi à tout ce qui a été géré par le tuteur; le quatrième, la restitution des pièces et livres de compte. Dumoulin, ibid., no 45.

Nous ne parlerons pas ici de la remise qui serait faite par le pupille par un contrat où un traité; car l'article 472 du Code civil porte textuellement que tout traité qui pourra intervenir entre le tuteur et le mineur devenu majeur sera nul, s'il n'a été précédé de la reddition d'un compte détaillé et de la remise des pièces justificatives, le tout constaté par un récépissé de l'oyant compte, dix jours au moins avant le traité.

690. Sur la question inverse de savoir si le prélegs de la reddition de compte emporte celui du reliquat, il faut décider la négative, et ajouter que des deux chefs séparables qui composent l'obligation mixte du tuteur, il ne reste pas seulement, par suite de ce prélegs, la pure et simple obligation de payer le reliquat s'il existe, La raison en est que le testateur n'est censé avoir fait remise que d'un examen scrupuleux et détaillé du compte. Il reste donc l'obligation modifiée de faire et de restituer les pièces, et l'entière obligation de donner, c'est-à-dire de payer le reliquat qui apparaîtra. Dumoulin, ibidem. n° 46. Dans son Traité des fiefs, tit. 1, §. 9, Gloss. 6, verbo rendre compte, Dumoulin, posant les limites de sa troisième conclusion amplifiée, que l'obligé à une reddition de compte après l'avoir livré, et la computation commencée, est tenu de prouver que les choses qu'il déclare avoir faites ou dépensées sont vraies telles qu'elles sont écrites dans son compte, si elles sont révoquées en doute limite cette conclusion en quatrième ordre à l'égard de celui à qui libération de compte à rendre a été préléguée; dans ce cas dit Dumoulin, le comptable est tenu cependant de poser son compte et de le prouver

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