Notre départ de la Poulie a été accompagné de tristes circonstances. Quoique nous eussions donné quelque chose pour payer la visite, hommes et femmes se mirent à nous suivre jusqu'au rivage, en mendiant à grands cris quelques paras, sans excepter le moine, qui demandait encore pour son fils. Nous pensions être délivrés quand notre barque prit le large; mais un homme se jeta à la nage et vint nous tendre encore le long du bord une main suppliante ! C'est à ce degré d'avilissement qu'est pourtant réduite la caste la plus éclairée, ou, pour dire mieux, la moins ignorante de l'Egypte, celle qui fournit presque tous les employés aux écritures des maisons de commerce et de l'administration. Un dernier mot sur les Coptes. Ils se prétendent les descendants directs des Egyptiens de Thèbes et de Memphis. Quoique ce ne soit pas le lieu de discuter la question, nous dirons simplement qu'ils n'ont aucune ressemblance avec les ancêtres qu'ils se donnent et que l'opinion générale leur accorde. Leur physionomie, qui se rapproche du type blanc, s'éloigne d'autant du type égyptien antique, qui a tous les caractères africains, et que l'on retrouve, du reste, fort accentué chez les fellahs. Cela s'explique d'ailleurs rationnellement. Les Egyptiens coptes, ayant embrassé le christianisme, n'ont pas craint de s'allier avec leurs coreligionnaires de Grèce, de Syrie, de Palestine, et ont dû conséquemment, plus que les fellahs, altérer en eux le sang de la race primitive. Les autres sectes chrétiennes, comme les Arméniens et les Grecs, possèdent de temps immémorial des monastères et des églises en Egypte; les juifs, dont le nombre s'élève à peu près à 7,000, possèdent aussi des synagogues. Les mahométans ont cela de commun avec les catholiques qu'ils méprisent toute autre religion que la leur; mais ils ont sur eux l'avantage de laisser chacun librement professer la sienne. Nous avons vu des processions grecques, avec croix et bannières, dans les rues de Péra, à Constantinople. C'est en Turquie que les juifs, odieusement persécutés par toute l'Europe, trouvèrent refuge pour leur foi et pour eux-mêmes. A côté des chrétiens schismatiques, on va voir bientôt en Egypte de purs catholiques romains. Les lazaristes construisent en ce moment à Alexandrie un couvent et une église. Le vice-roi leur a non-seulement permis de s'établir (permission qu'obtiennent tous les cultes dans l'empire ottoman), mais encore il leur a donné le terrain avec des matériaux provenant de vieilles démolitions. Méhémet-Ali n'était pas homme à négliger une aussi belle occasion de faire parade, à peu de frais, tout à la fois de libéralisme et de libéralité. CHAPITRE V. Le Coran. S Ier. Mahomet Hégire ou fuite Les Arabes conservent la généalogie de Mahomet depuis Adam par Ismaël. naquit pauvre. de la Mecque. Juifs. - Admirable attachement des Juifs pour leur religion. Coran, ne fit point de miracles. S II. Le croyant a une Mahomet, en prêchant l'unité de Dieu, fondait une unité politique. patrie partout où règne le Coran. partie du monde suit la loi du prophète. Mahomet était ignorant. Sa cosmogonie. Les Arabes possédaient la tradition d'un Dieu unique; mais ils étaient devenus idoLe Dieu de Mahomet est celui d'Abraham, de Moïse et de Jésus. L'idée fondamentale de la réforme religieuse du prophète est l'unité de Dieu. L'adoration des anges, des saints et de Jésus est de l'idolâtrie. Avant tout, Mahomet veut détruire le Il s'appuie constamment sur les traditions bibliques. Mahomet croit aux anges et au diable. Les esprits qui écoutent Saint Augustin croyait aux relations des démons avec les devins. Moïse n'a rien dit de la résurrection des corps. Mahomet annonce le jugement dernier. Les paradis sont toujours la réalisation de ce que les homPlaisirs sensuels promis aux élus, même par le christiaLa loi chrétienne ne donne pas plus de place au libre arbitre Les premiers chrétiens fatalistes. Les jansénistes. teuque et l'Evangile, le cachet des passions humaines. lue dans un livre. · L'esprit du Coran est plein de mansuétude et de justice. Sa prescription fondamentele est la charité. La pauvreté a blessé tous les bons esprits. Plus d'aumônes, du travail. Charité des musulmans. - Le Coran commande aussi d'aimer tous les hommes sans distinction de culte ; il prêche le pardon des injures et la donceur, même envers les animaux, - La Bonté des musulmans pour les animaux. morale du Coran, comme celle de l'Evangile, a élevé l'âme humaine à sa plus haute puisKhabil, hatem. Préceptes de conduite, même de politesse. Blâme des Ordonnances hygiéniques pleines de sagesse. Les ablutions. EduLes mahométans ont répandu de grandes lumières dans le monde. Code La Mahomet bligation du pèlerinage à la Mecque indique les vues d'un homme d'Etat. Les fêtes commémoratives ravivent la foi. Mahomet éloigne toute cérémonie du culte. criminel barbare. Mahomet n'a rien fait pour les femmes ni pour les esclaves. polygamie rationnelle en Orient, où il naît trois femmes contre un homme. ne la resserre pas dans des bornes suffisantes, Mariage, Mahomet avait neuf femmes. Cette passion effrénée, cause du misérable rôle des femmes dans l'islamisme. Le Christ était tombé dans un excès contraire, Le Dieu de Mahomet, à l'exemple de Jehova, règlemente l'esclavage, - S IV. Mahomet n'a rien apporté de nouveau à l'humanité. Il laisse au pouvoir paternel son autorité absolue, La fraternité universelle est un dogme essentiellement moderne. Les deux révélateurs chrétien et arabe ne parlent qu'à une nation privilégiée. nouvelle consacre le droit de tous les hommes au bonheur. -La science S Ier. Après avoir parlé, dans le chapitre précédent, des habitudes religieuses des musulmans, il ne sera pas sans intérêt, pour quelques lecteurs, de donner sommairement ici une idée générale du Coran et de ses doctrines. Disons d'abord quelques mots du prophète : Mahomet prêchait il y a 1300 ans. Il est le dernier prophète, le dernier révélateur qui ait obtenu créance. Il naquit à la Mecque vers la fin du vie siècle de notre ère, l'an 570 ou 578, Les Arabes conservent sa généalogie depuis Adam par Ismaël; si bien que les fondateurs des deux religions qui ont le plus occupé le monde moderne se rattachent à Abraham, Jésus par la voie d'Isaac, Mahomet par celle d'Ismaël. La famille du prophète appartenait à la tribu des coreishtes. Elle remplissait héréditairement, en Arabie, les fonctions sacerdotales, et avait, entre autres charges, la garde du temple de la Mecque, comme la tribų des lévites chez les Hébreux. Né dans la pauvreté, le jeune Mahomet se livra d'abord au commerce, se mit ensuite au service d'une femme riche de la Mecque, qui faisait le négoce, et, à l'âge de vingt-cinq ans, il l'épousa, quoi qu'elle en eût quarante. A l'abri du besoin par ce mariage, il disparut tout à coup, et, pendant quinze années, il demeura, dit-on, au fond d'un antre à préparer son rôle religieux. Il commença, au sortir de la retraite, par convertir sa femme et un de ses esclaves, qui n'eurent point d'objection, on le pense bien, à lui accorder qu'il était prophète de Dieu. A peine voulutil aller plus loin, qu'on se moqua de lui; mais, par artifice ou par promesses, et surtout par le charme irrésistible de son éloquence, il sut gagner plusieurs habitants de la Mecque, où il résidait. « C'était un grand poète, dit M. Eusèbe de Salles, orientaliste compétent. Les premiers surates (chapitres) du Coran << furent jugés supérieurs, par leur élégance, aux poèmes sus<«< pendus aux portes de la Caaba, par les lauréats de Lou<< kodz1». Il paraît qu'Omar fut principalement converti par le superbe style du livre. Mahomet séduisit, entre autres, à la Mecque, Abu-becr, le personnage le plus riche de la ville. C'était, en pareil cas, une précieuse conquête : les hommes suivent l'argent, la persécution fit le reste. Les juifs et les chrétiens répandus en Arabie commencèrent à se déchaîner contre le nouveau révélateur. Selon la coutume, ils crièrent à l'imposture. D'un autre côté, tandis que les idolâtres continuaient à rire du prophète qu'ils avaient vu enfant, puis conducteur de chameaux et marchand, les coreishtes, les prêtres des idoles, se voyant attaqués dans leur suprématie et leurs bénéfices, conçurent des craintes et firent la faute de le persécuter, comme les pharisiens et les docteurs de la loi avaient persécuté Jésus. Bientôt ils voulurent le tuer par les mêmes motifs qu'avaient eus les prêtres d'Israël pour tuer Jésus; ils parvinrent à le faire condamner à mort, mirent à prix la tête de cet hérétique, et, treize ans après le commencement de sa prédication, Mahomet fut obligé d'abandonner la Mecque, où on allait l'assassiner. L'hégire (en arabe fuite) commence à cette époque. Ce n'est donc pas de la naissance de Mahomet, mais de sa fuite de la 1 1er vol. des Pėrėgrinations. |