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la reine Caroline l'avoit comblé de biens. Aussi on avoit été fort surpris de le voir se livrer à leurs ennemis. Le gouverneur de Rome a pris aussi quelques mesures contre des espions aux gages de l'étranger. On auroit pu en faire un exemple. On s'est contenté de les mettre hors d'état de nuire.

-Le cardinal Maury mène toujours ici une vie trèsretirée, sortant très-rarement le jour et ne se promenant que la nuit. Il a pris pour confesseur le P. Vattier, Jésuite, Suisse d'origine, homme estimable. Quelques malins ont regardé un tel choix comme un calcul assez adroit; mais on ne sauroit raisonnablement s'arrêter à de tels soupçons, quand on connoît la droiture de S. Em. Elle va tous les samedis au collége de Jésus. Elle reçoit très-peu de monde chez elle, et ceux qui fréquentent sa maison ne sont pas précisément ceux dont le souverain Pontife a eu le plus à se louer. Quant à l'examen de la conduite de ce cardinal, il paroît qu'il se poursuit toujours. Mais la congrégation de cardinaux, qui en est chargée, observe le silence le plus rigoureux. Elle

dit-on, accordé au cardinal un traitement de deux mille piastres par an sur les revenus de son évêché. C'est bien peu de chose. Heureusement que S. Em. a fait dans ses années d'abondance des provisions pour les temps de disette. Elle jouit actuellement des fruits de sa sage économie. Le prélat Maury, neveu du cardinal, et ci-devant chanoine de Saint-Pierre, a quitté cette capitale. On dit qu'il s'est brouillé avec son oncle pour des discussions d'intérêt. Le neveu passe pour s'être fait aussi une fortune très-honnête. Nous craignons de ne le plus revoir. Il a moins de courage que d'autres, et n'ose affronter l'opinion dans un pays où elle n'est pas fort en sa faveur. PARIS. Nous avons fait connoître dans notre dernier numéro l'existence d'une association d'ecclésiastiques qui se disposent à donner des missions en France. L'utilité, ou plutôt la nécessité de cette bonue œuvre, sauroit être contestée, et elle s'est offerte à l'esprit de tous les hommes religieux. Il existe en général pour

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tout ce qui tient à la religion un engourdissement si profond, qu'il faut pour nous ranimer tous les efforts' du zèle. Nous sommes des malades invétérés qu'il faut éclairer sur les dangers de leur état. Retombés dans des ténèbres peu différentes de celles du paganisme, nous avons besoin que de nouveaux apôtres viennent nous réveiller de notre assoupissement, et nous tirer de notre honteuse ignorance, et de notre corruption déplorable. Aussi le projet d'un établissement de missionnaires a-t-il été accueilli avec bonté par le Prince religieux qui nous gouverne. Un des missionnaires, qui a eu l'honneur de s'en entretenir avec S. M. a reçu d'elle des assurances d'intérêt et de protection. S. M. est même entrée avec lui dans des détails qui prouvent qu'elle a réfléchi sur cet objet important, et qu'elle en a le succès à cœur. Les missionnaires encouragés par un si puissant appui, vont donc mettre la main à l'oeuvre. Quelques-uns se sont déjà réunis, et vivent en communauté. Leurs statuts sont rédigés. Ils ne font ni voeu, ni promesse, et restent sous la juridiction des ordinaires. Ils ont un supérieur qui est assisté par un conseil. Ils ne s'occuperont en ce moment que des missions de France; mais si les besoins du royaume devenoient moins pressans, ils pourroient travailler aussi à l'oeuvre des missions étrangères. La société s'engage à conserver dans son sein ceux de ses membres qui deviendroient infirmes. Les autres articles des statuts regardent l'administration intérieure. Ceux qui veulent entrer dans l'association, sont soumis à plusieurs années d'épreuves, dont la première est consacrée à l'étude de l'Ecriture sainte, et règles de la vie spirituelle. Les réglemens pour les exercices de la journée laissent tout le temps de s'occuper. Ceux pour les missions dépendent beaucoup des travaux des missionnaires. On dit que sous peu de temps des ecclésiastiques partiront de la maison chef-lieu pour aller évangéliser dans quelques diocèses. Déjà de plusieurs endroits on réclame les secours de ces ouvriers laborieux, et on ne doute pas que lorsqu'on aura éprouvé

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les heureux effets de leur présence et de leur prédication, on sera encore plus empressé à procurer aux peuples ces moyens extraordinaires de salut. Il est permis d'espérer que la Providence bénira cette œuvre. Après avoir sauvé le monde politique par des coups puissans et inattendus, elle réserve peut-être au monde religieux et moral, sinon une régénération complète, au moins le retour d'un grand nombre d'égarés, et la guérison de beaucoup d'aveugles. C'est à quoi les missionnaires vont travailler, et c'est aussi ce que tous les fidèles doivent demander dans leurs prières.

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Un prêtre constitutionnel du Jura nous a écrit une lettre qu'il a jugée sans doute fort plaisante, et qui, en effet, apprête un peu à rire, mais à ses dépens. Il est fort scandalisé que nous ayons quelquefois annoncé des rétractations. Il n'y a, dit-il, que des ignorans et des hypocrites qui puissent parler de rétractations. Une telle proposition est fausse dans sa généralité; car, sans doute, on ne peut regarder comme un ignorant et un hypocrite celui qui rétracteroit une erreur ou une démarche condamnable. Notre correspondant paroît encore fort épris de la constitution civile du clergé, quoique son temps soit passé. Il prétend que ceux qui ont occupé des places en vertu de cette constitution, étoient élus et institués suivant toutes les formes canoniques. Ceci est un peu fort. Le clergé, en 1791, n'avoit aucune part dans les élections. Il pouvoit se faire qu'il n'y eût pas un ecclésiastique parmi les électeurs, tandis que les protestans et les juifs pouvoient s'y trouver en majorité, comme on dit que cela est arrivé dans le Midi. Je ne crois pas que ce fut là tout-à-fait l'ancien usage des élections. La constitution de 1791 n'étoit pas plus heureuse à rétablir l'ancienne discipline pour les institutions. Car le droit d'instituer étoit attribué autrefois aux métropolitains on aux conciles provinciaux. Or, quel est le métropolitain ou le concile provincial, qui a institué le premier constitutionnel? Un évêque de Bourgogne avoit-il le droit de sacrer et de confirmer un évêque

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de l'extrémité de la Bretagne? Quand on parle de formes canoniques, encore faut-il les connoître. Notre constitutionnel assure que les brefs de Pie VI contre cette constitution renferment des choses fausses et ridicules. Cette décision est assez fâcheuse pour le Pape qui les a signés, et pour l'Eglise qui les a adoptés. L'un et l'autre doivent être un peu confus de voir qu'il se trouve dans le Jura un prêtre qui approuve ce qu'ils ont osé condamner. C'est évidemment à eux à se rétracter. Il est cependant à croire qu'ils ne le feront pas, puisque l'auteur de la lettre leur a fait à savoir qu'il n'y avoit que les ignorans et les hypocrites qui se rétractassent. Saint Augustin n'en jugeoit pas ainsi, lui qui a composé un livre de ses rétractations. Nous conseillons à notre correspondant du Jura de se régler sur un si beau modele, et d'abandonner sa vieillerie schismatique dont personne ne se soucie plus, pas même ceux qui l'ont faite. Nous lui renvoyons d'ailleurs ses complimens et ses avis, dont nous sommes décidés à nous passer. Nous sommes en bonne compagnie, tandis qu'il n'a que pour lui que quelques entêtés qui prennent leur parti pour l'Eglise, et leur opiniâtreté pour du courage.

FRANCFORT. M. de Spiegel, grand-doyen du chapitre de Munster, et qui avoit été appelé à Vienne pour travailler aux arrangemens ecclésiastiques, vient de retourner à Munster. Son départ a fait croire que les principales bases de cette organisation étoient posées; car c'étoit lui qui représentoit la Prusse dans les nombreuses conférences qui ont eu lieu à ce sujet.

NOUVELLES POLITIQUES.

PARIS. Le mardi 7, S. M. s'est promenée sur les boulevards. La voiture alloit au pas. S. M. paroissoit prendre plaisir à se montrer à la foule qui, de son côté, témoignoit sa joie de nombreuses et bruyantes acclamations; on n'étoit pas tout-à-fait aussi gai l'année dernière à pareille époque. A

par

six heures, toute la famille royale s'est réunie pour le diner. MONSIEUR et les Princes ses fils, MADAME, M. le duc et Mme. la duchesse d'Orléans, M. le prince de Condé, M. le duc et Mme, la duchesse de Bourbon étoient du repas. S. M. paroît affectionner particulièrement ces réunions de famille.

- Le Roi a donné 3000 francs aux habitans de Méry-surSeine, qui ont souffert des ravages de la guerre de l'année dernière. Il leur sera fourni en outre les bois et matériaux nécessaires pour la réconstruction de leurs maisons.

Les travaux pour la confection de la statue de Henri IV. continuent. Les fonds perçus s'élèvent à 235,615 francs. On espère que cette somme augmentera journellement. On reçoit tous les dons au-dessous comme au-dessus de 20 francs, et il est à croire que peu de François, parmi ceux auxquels leur fortune permet quelque sacrifice, se dispenseront de concourir à la dépense d'un monument en l'honneur du bon Roi.

La Martinique a été remise à nos troupes, le 9 novembre, et la Guadeloupe le 2 décembre. Des navires de France commençoient à y arriver, et tout faisoit espérer un grand succès aux opérations commerciales. Le 10 décembre, M. le comte de Vaugirăud, gouverneur-général de la Martinique, y débarqua de la frégate la Duchesse d'Angoulême, sur laquelle il avoit fait la traversée. Il fut reçu avec beaucoup de pompe, et installé solennellement. On chanta un Te Deum en remercîment du retour de S. M. dans ses Etats, et de la restitution de la colonie à la France.

DRESDE. On parle d'une mission secrète et importante de M. Mérian, conseiller russe à Frédérichsfeld, pres Berlin. Il étoit chargé d'engager le roi de Saxe à accepter l'indemnité que les souverains lui offrent. On ne sait trop quelle est cette indeinnité. Les uns la placent sur la rive gauche du Rhin; les autres disent qu'il étoit question de donner au roi les évêchés de Munster, de Paderborn et de Corvey, et même une partie de l'ancien électorat de Cologne. Ses Etats se seroient étendus jusqu'au Rhin, et auroient eu Bonn pour capitale. On y trouvoit cet avantage que ces pays étant catholiques convenoient mieux à un prince de cette religion. Mais il paroît que le roi n'a point consenti à cette échange. L'attachement que lui témoignent ses sujets l'a déterminé sans doute à ne pas séparer sa cause de la leur, quelques instances qu'on lui ait faites à cet égard.

BALE. L'ancien roi de Suède, qui se trouve dans cette ville,

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