Page images
PDF
EPUB

Tous ceux qui ont demandé et qui veulent servir, doivent s'adresser à MM. les lieutenans-généraux ci-dessus désignés. Les personnes déjà revêtues de grades militaires, qui se présenteront au nombre des volontaires, dont elles garantiront le dévouement et la fidélité, en prendront immédiatement le commandement.

Signé, LOUIS.

CHAMBRE DES PAIRS DE FRANCE.

Compte rendu à la Chambre des Pairs par M. le chancelier, en vertu des ordres de S. M.

Séance du 11 mars 1815. Messieurs, conformément au you de la Chambre des Pairs, je me suis retiré par-devers le Roi, et S. M. m'a autorisé à vous communiquer franchement et sans réserve toutes les nouvelles relatives à celle dont j'ai eu hier l'honneur de vous donner connoissance.

C'est dimanche, 5 de ce mois, que nous avons reçu la première information du débarquement opéré par l'ennemi. D'après des rapports sur l'exactitude desquels nous croyons pouvoir compter, il n'avoit que 700 hommes de la vieille garde, à peu près 300 Corses, et 140 étrangers venus avec lui de l'ile d'Elbe; c'est-à-dire, en tout 1140 hommes.

C'est avec cette poignée de monde qu'il est débarqué, le 1. mars, à Cannes, près Antibes; il débarqua sans résistance, parce qu'il n'y avoit pas de troupes suffisantes pour s'y opposer, n'y ayant pas même de troupes sur un point qui n'étoit pas menacé. Buonaparte paroît avoir échoué dans ses tentatives sur Antibes; il s'est avancé vers Digne, où il étoit le 4, sans recevoir de nouveaux renforts.

Le préfet du Var a dépêché des courriers à tous les préfets voisins, et notamment à Lyon, pour instruire des événemens. C'est par un de ces courriers que le préfet de Lyon a reçu la nouvelle du débarquement, qu'il nous a transmise, le 5, par une première dépêche télégraphique; une seconde du même jour, rectifiant la première, réduisoit à 1000 ou 1100 hommes le nombre des troupes qu'on avoit d'abord évaluées à 1600. D'après ces premières nouvelles, MONSIEUR, frère du Roi, est parti dans la nuit du dimanche au lundi.

Des courriers expédiés de tous côtés ont ordonné des mou◄ vemens de troupes pour rassembler, sous les ordres de Mon

SIEUR, une armée qui devoit être, après sa réunion, de 30,000 hommes, dont 3 à 4 de cavalerie.

Des ordres ont été expédiés en même temps à Mgr. le duc d'Angoulême de se rendre de Bordeaux vers Nîmes, et y commander, avec le maréchal duc de Tarente sous ses ordres, l'armée du Gard, dont le principal noyau ne devoit être que de 3 à 4000 hommes, mais qui pouvoit être portée à 13, en y joignant les troupes éparses dans les 8. et ge. divisions militaires.

Ces dispositions ont rempli les journées des dimanche et lundi, et une partie des nuits. Nous avons eu, le 6, une dé→ pêche télégraphique qui contenoit peu de détails nouveaux; mais un courrier, arrivé dans la nuit du 6, nous en a donné davantage sur les événemens en nous apportant des lettres directes du préfet du Var, dans lesquelles nous avons puisé les faits relatifs à la descente de Buonaparte, et à sa marche sur Digne et sur Gap.

C'est aussitôt après la réception de ce courrier que le Roi a rendu l'ordonnance qui contient les mesures de sûreté générale et la proclamation qui appelle les deux Chambres.

Les bulletins télégraphiques se sont succédés lentement; le ministre de la guerre a continué d'expédier des courriers relatifs à la marche des troupes. Le service des estafettes a été sur-le-champ rétabli; nous en avons reçu quelques-unes les 7 et 8, qui nous ont apporté des lettres du préfet du Var, de celui des Basses-Alpes, et qui toutes annoncent le meilleur esprit, la plus ferme volonté de résister à l'ennemi, et promettent de bonnes dispositions de la part des troupes.

Nous n'avions aucune nouvelle que Buonaparte eût reçu des renforts; nous avions donc tout lieu d'espérer que sa téméraire entreprise n'auroit d'autre esset que d'affermir l'autorité légitime en débarrassant la France de l'éternel ennemi de son repos et de son bonheur.

Quel a donc été notre étonnement, quand la dépêche télégraphique du 8 nous a informé qu'il étoit attendu à Grenoble le soir même, et qu'une seconde du même jour annonçoit que Grenoble devoit être rendu!

Cette dépêche, contrariée par le mauvais temps, ne nous est pervenue que le 9 au soir.

Hier 10, nous avons reçu celle de Lyon du 8, huit heures t demie du matin, portant ces seuls mots : Les Princes par

tent à l'instant; Buonaparte est attendu à Lyon ce soir; je pars pour Clermont. (C'est le préfet qui parle.)

Il n'étoit pas question de Grenoble dans cette lettre, et nous aimions à nous flatter qu'il résistoit encore; mais cette espérance vient d'être détruite par une lettre de MONSIEUR, du 8 au soir, que S. M. n'a reçue que ce matin par un courrier, et dont elle a daigné me permettre la lecture, pour que j'en donnasse connoissance à la Chambre des Pairs.

Son altesse royale commençoit sa lettre par le récit de son voyage, et de l'activité avec laquelle, arrivée à Lyon sans arrêter, elle avoit commencé par rassembler les troupes et les gardes nationales, et recevoir avec leur nouveau serment de fidélité, des témoignages non équivoques de dévouement. Le Prince leur avoit indiqué le départ pour la nuit, et devoit, à leur tête, marcher au secours de Grenoble; mais il avoit appris, quelques heures plus tard, que la ville s'étoit rendue presque sans résistance, et n'étoit plus occupé que de de la défense de Lyon, pour laquelle il prenoit toutes les mesures convenables; il n'est que trop vraisemblable qu'elles ont été infructueuses, puisque la dépêche d'hier annonçoit si formellement le départ des Princes, et même celui du préfet, trop dévoué pour s'être éloigné sans ordre formel.

Ici, Messieurs, finissent nos nouvelles du midi; nous en attendons de plus fraîches d'heure en heure; mais il est difficile que nous en recevions avant la nuit.

On m'apporte à l'instant une lettre du préfet de Laon, d'hier au soir, 10 mars, qui m'annonce une nouvelle trahison tentée à La Fère, et heureusement déjouée par la fermeté courageuse du commandant de l'école d'artillerie, du comte d'Aboville. Je vais mettre sous vos yeux cette lettre entière, qui vous tranquillisera sur le sort d'un de nos plus grands dépôts d'artillerie, en même temps qu'elle vous prouvera la défection d'un général qui est parvenu à égarer quatre ou cinq escadrons de chasseurs royaux, obligés d'abandonner leur coupable entreprise, mais qui osent marcher sur Paris.

Telle est donc, Messieurs, la position réelle où se trouve aujourd'hui la France; Buonaparte, arrivé avec onze cents bommes, fait de rapides progrès. Nous ne savons pas au juste jusqu'à quel point les défections ont pu grossir sa troupe; mais ces défections ne sont pas douteuses, quand on voit Grenoble occupé, et la seconde ville du royaume prête à

tomber, et probablement déjà tombée au pouvoir de l'en

nemi.

De nombreux émissaires de Buonaparte se portent auprès de nos régimens; quelques-uns sont dans leurs rangs if est à craindre que beaucoup d'hommes égarés ne cèdent à ces perfides insinuations, et cette crainte seule affoibliroit nos moyens de défense.

On ne peut guère arrêter l'effet des mauvaises dispositions qui nous alarment qu'en s'aidant beaucoup de cette bonne et fidèle garde nationale, généralement composée de manière à la mettre à l'abri du danger de la séduction. Le Roi s'est empressé de la mettre en réquisition dans tout le royaume. Le général Dessolles, qui la commande, va vous lire l'ordonnance du Roi rendue à cet effet. Une seconde ordonnance met en permanence les conseils-généraux de département et d'arrondissement pour régulariser ce grand mouvement.

Voici enfin une ordonnance du ministre de la guerre, qui appelle aux drapeaux tous les militaires qui ont déjà servi, et leur associe cette jeunesse nombreuse qui brûle de défendre le trône et la patrie.

Telles sont, Messieurs, les mesures de défense que le gouvernement a cru nécessaires, et par lesquelles il s'empresse de pourvoir à la sûreté de l'Etat.

Il exerce en même temps la plus exacte surveillance sur tous les traîtres qui pourroient tenter de séduire ou de corrompre nos troupes, et des conseils de guerre en feront une prompte justice.

Nous allons veiller avec un soin particulier pour empêcher la publication et la distribution des pamphlets incendiaires. La Chambre conçoit que ce n'est pas le moment d'user d'indulgence pour tous ceux qui, abusant de la liberté d'écrire, voudroient en faire une arme meurtrière de la liberté publique. Nous avions songé d'abord à vous demander une loi provisoire, qui étendît à cet égard les précautions prises par la loi répressive des abus de la presse, et nous autorisât aussi à prévenir, par tous les moyens, tous les complots des conspirateurs; mais la lenteur inséparable des formes législatives ne nous permet pas d'ajourner les mesures que le salut de l'Etat commande, et aucun des ministres du Roi ne craindra d'ordonner, sous sa responsabilité, tout ce que peut exiger un intérêt si pressant.

Je viens donc moins vous proposer des mesures que vous

soumettre celles qui ont été prises, et vous demander pour elles ce vœu approbatif qui fortifiera le courage des ministres sans pouvoir rien ajouter à leur zèle et à leur dévouement pour la chose publique.

Oui, Messieurs, c'est votre væu, c'est le vœu des deux Chambres qui donnera au gouvernement cette force morale dont il a besoin; c'est l'union des Chambres et du gouvernement qui fera la force commune, le désespoir et la perte de mos ennemis, la gloire et le salut de la nation.

Après avoir entendu ce discours et la lecture des pièces y mentionnées, la Chambre charge son président de se retirer par-devers le Roi pour lui renouveler l'hommage de son dévouement, et le remercier de la communication qu'il lui a donnée des sages mesures qu'il a prises pour la sûreté de l'Etat.

CHAMBRE DES DÉPUTÉS.

[ocr errors]

Séance du 13 mars. — A trois heures après mídi la séance devient publique. Le banc des ministres est occupé par M. l'abbé de Montesquiou, ministre de l'intérieur; M. le baron Louis, ministre des finances; M. le comte Beugnot, mipistre de la marine, et M. Dandré, directeur-général de la police.

M. l'abbé de Montesquiou prend la parole, et rend compte à la Chambre des mesures prises, et de l'esprit qui règne dans les départemens.

M. l'abbé de Montesquiou a ensuite donné la teneur du projet de loi suivant :

Louis, etc.

Voulant éviter à nos peuples le fléau d'une guerre étran→ gère qui peut éclater à la nouvelle au congrès de l'apparition de Napoléon Buonaparte sur le territoire françois;

Voulant donner à l'armée françoise une marque de notre satisfaction et de notre confiance, et à nos fidèles sujets uné nouvelle garantie de tous leurs droits politiques et civils, fondés sur la charte constitutionnelle,

Nous avons ordonné et ordonnons que le projet de loi dont la teneur suit sera porté à la Chambre des Députés des départemens par notre ministre de l'intérieur.

Art. 1. Les garnisons de La Fère, de Lille et de Cambrai ont bien mérité de la patrie; il leur sera décerné une récom→ pense nationale.

« PreviousContinue »