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pour un dîner. Ces braves, entendant la dispute, crurent le Sénat disposé à se battre ; chacun d'eux aussitôt s'élance au milieu de la salle, voulant prendre parti dans l'assemblée, et vider ainsi. les deux querelles à la fois. A leur aspect, la discussion s'arrête, et le Sénat, tout d'une voix, ordonne aux licteurs de chasser plus loin ces misérables.»>>

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M. Thierry, dans un dernier chapitre, traite du bonheur national. Il considère ce sujet d'une manière très élevée. Il pense, et il s'étudie à prouver que le bonheur, pour l'homme, consiste sur-tout dans l'exercice, dans l'action de ses facultés. Plus le cercle dans lequel il peut les exercer utilement pour ses semblables est étendu, plus le plaisir de l'action a pour lui de vivacité, plus son bonheur est grand et pur. Cela conduit M. Thierry à considérer combien le 'bonheur des hommes devait nécessairement être restreint dans ces premiers âges, où le bonheur de chaque peuple était en opposition avec celui de tous les autres, où l'ame était de nécessité rétrécie par l'égoïsme national, où ce qu'un citoyen, un homme public faisait pour son pays, il le faisait contre tous les autres, où il ne pouvait trouver des concitoyens au-delà des bornes de la patrie, qu'en commençant par y faire des

vaincus. Il finit par montrer combien l'industrie place les hommes dans une situatiou plus douce, combien elle élargit la sphère dans laquelle ils peuvent exercer leurs facultés sans nuire, combien, par conséquent, elle étend leur bonheur(1). << Le citoyen industrieux, dit-il, n'a pas besoin, s'il jette les yeux hors de sa nation, de trouver des vaincus pour trouver des concitoyens; il en trouve partout où il y a des hommes industrieux comme lui. Que l'homme d'état ne craigne pas désormais d'agrandir ses vues et son ame qu'il ne craigne pas que son bonheur s'accorde mal avec son devoir; le bien de sa patrie est le bien de l'Europe, le bien de l'Europe est le bien de sa patrie.

» Tout ce qui se produit de richesse et de liberté au-dedans d'une nation, est gagné pour celles qui l'entourent; tout ce qui s'en produit autour d'elle, est gagné pour elle-même. Citoyens, travaillez pour le monde, le monde travaille pour vous.

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Vos armes,

ce sont les arts et le commerce; wos victoires, ce sont leurs progrès; votre patriotisme, c'est la bienveillance et non la haine.

(1) M. Thierry aurait dû dire aussi combien elle le rend plus assuré.

Voulez-vous joindre à ces vertus douces les vertus fortes et mâles auxquelles le Lacédémonien se formait en combattant? O citoyens ! vous avez des ennemis, des ennemis plus acharnés que les Perses, L'IGNORANCE et ceux qu'elle fait vivre. »

Voilà comment M. Thierry a considéré l’industrie. Voilà comment il a montré qu'en elle se trouvait la sûreté, l'honneur, le bonheur, tous les biens que l'homme recherche en s'associant à d'autres hommes; et c'est ainsi qu'il a fait voir quel était l'intérêt auquel les peuples devaient se rallier, la base sur laquelle devait se reconstituer l'Europe, le seul principe capa

ble d'en former une nation.

D....R.

ACTES DE GOUVERNEMENT.

GOUVERNEMENT DE FRANCE.

De la loi qui suspend provisoirement la liberté des écrits périodiques.

f

LA question de la liberté de la presse a été examinée, en 1814, sous le point de vue le plus général (1). En 1817, la question s'est divisée; on n'a plus mis en doute si tous les écrits seraient soumis à la censure préalable et arbitraire des agens du ministère; on s'est borné à demander la censure provisoire des écrits périodiques, et l'on a proposé une loi sur le jugement des écrits.

saisis.

La commission nommée par la chambre des

(1) Voyez le tom. 1er, du Censeur.

pairs pour examiner le projet de loi sur les journaux, en a proposé l'adoption à l'unanimité.

<< Votre commission, a dit le rapporteur (M. de Maleville), a dû consulter sur-tout la position intérieure et extérieure de la France, sur lesquelles les méprises pourraient être si funestes; et ce n'est qu'après avoir pesé toutes ces considérations qu'elle s'est déterminée à regret, mais à l'unanimité, à vous proposer l'adoption de la loi qui vous est soumise.

» Je dis à regret; elle est pénétrée en effet de tous les sentimens généreux qui ont engagé tant d'illustres orateurs à combattre ce projet ; comme eux nous aimons la liberté, et notre imagination frappée, dès l'enfance, des traits saillans de l'histoire, nous la peint toujours comme la mère des talens et des vertus, et la servitude, comme le principe ordinaire de l'ignorance et de la lâcheté.

>> Nous aimons encore la liberté comme un don du ciel, sans lequel nos actions n'auraient ni moralité, ni mérite, et nous regardons tout attentat à cette liberté comme un outrage fait à la providence.

>> Nous aimons la liberté de la presse indéfiniment, comme un moyen nécessaire, dans l'état actuel de l'Europe, pour propager les lumières et les découvertes nouvelles, et pour faire jaillir

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