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RECLAMATIONS DE LA PART

libéralités inférieures à ce chiffre est autorisée par décret simple, au contraire il doit être statué par un décret délibéré en assemblée générale lorsque le chiffre de 50.000 francs est dépassé.

2322. Pour que le gouvernement soit appelé à statuer, il faut donc,mais il suffit que la disposition soulève des réclamations de la part de la famille. Si les héritiers, après mise en demeure préalable, donnent leur consentement à l'exécution de la libéralité ou s'abstiennent de réclamer, le gouvernement n'a plus à intervenir pour leur accorder une protection qu'ils ne demandent pas.

Mais au contraire toute réclamation suffit à motiver l'intervention du pouvoir central, qu'elle émane d'un membre de la famille légitime ou naturelle, ou même d'un tiers étranger à la famille, comme un légataire universel. L'ancien article 111 de la loi du 5 avril 1844 se servait d'un terme plus large, les prétendants droit à la succession. La loi du 4 février 1901 a substitué une autre expression déjà consacrée par les textes; mais en parlant des réclamations des familles, elle n'a pas entendu attribuer à la nouvelle formule une signification différente.

Aucun texte n'indique la forme dans laquelle doit se produire la réclamation. L'article 2 du décret du 1er février 1896 déclare simplement que les héritiers sont invités à produire leurs moyens d'opposition. Il n'est donc pas nécessaire que les tribunaux soient saisis d'une contestation. Une simple réclamation extra-judiciaire, le seul refus de consentir à l'exécution du testament, constitue une opposition suivant l'esprit de la loi. Les circulaires du 3 mai 1885, du 15 mars 1896 et du 10 juin 1901 ont même reconnu ce caractère aux transactions et arrangements intervenus avant toute autorisation entre la commune et les héritiers, parce que ces conventions supposent l'existence antérieure d'une réclamation.

Il n'est pas nécessaire d'ailleurs que la réclamation porte sur l'ensemble des libéralités. Le gouvernement doit être saisi, même au cas où le désaccord existe sur une seule des dispositions contenues dans le testament.

Le décret du 1er février 1896 renferme diverses dispositions en vue d'assurer l'application de ces prescriptions. Pour mettre les

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héritiers en demeure de se prononcer, l'article 2 enjoint au préfet de les inviter à prendre connaissance du testament et à déclarer s'ils adhèrent ou s'ils s'opposent à l'exécution de la libéralité. Au cas où les héritiers sont inconnus, l'article 3 a organisé un système de publicité à l'effet de provoquer leurs déclarations. Enfin l'article 4 dispose que les héritiers ne sont plus recevables après trois mois à partir de l'accomplissement des formalités prescrites par l'article 3. Leur silence est interprété comme une renonciation à formuler leurs réclamations devant l'autorité administrative. Mais il ne met pas obstacle à ce qu'ils fassent valoir leurs droits devant les tribunaux judiciaires, en vue de contester la validité ou l'interprétation du testament, ou même à ce qu'ils s'adressent au préfet, en vue de faire prononcer la nullité de la délibération du conseil municipal, conformément à l'article 65 de la loi de 1884, si cette délibération, en raison des conditions imposées par le testateur, a été prise en violation de la loi (Circ. minist. 10 juin 1901).

2333. Les règles relatives à l'acceptation des dons et legs reçoivent exception au cas où la libéralité est faite à un hameau ou à un quartier de commune qui n'est pas encore à l'état de section ayant la personnalité civile. Antérieurement à 1884, le sort de la libéralité était incertain. Si l'on pouvait induire des termes de l'acte que la disposition s'adressait à la commune, à charge de lui donner une destination spéciale, le conseil municipal, en qualité de représentant de l'ensemble de la commune, avait le droit d'accepter, sauf à se conformer ensuite aux intentions du testateur. Mais s'il résultait de l'acte que le donateur avait entendu gratifier directement un hameau ou un quartier sans existence légale, la libéralité devait être considérée comme nulle, par application des articles 906 et 911 du Code civil.

La loi du 5 avril 1884 s'est attachée à régler cette situation dans un sens libéral. La disposition est valable dans tous les cas. Si le hameau ou le quartier n'est pas encore à l'état de section, la libéralité devient une cause créatrice de vie civile. Les habitants du hameau ou du quartier sont appelés à élire une commission syn

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dicale, conformément à l'article 129, pour délibérer sur l'acceptation. Mais comme l'exécution du testament doit avoir pour conséquence de créer une nouvelle personne civile, une section de commune, la délibération portant acceptation est toujours soumise à l'approbation du pouvoir central, et l'autorisation ne peut être accordée que par un décret rendu dans la forme des règlements d'administration publique (art. 111 § 2). Après l'accomplissement des formalités, l'acte est réalisé par le maire (art. 90 no 7) et non par le président de la commission syndicale, dont la mission finit avec la délibération relative à l'acceptation (art. 129).

Ces règles ne sont plus applicables au cas où le don ou le legs. au lieu de s'adresser à un hameau ou à un quartier dépourvu de la personnalité civile, est fait à une section de commune déjà existante. Le conseil municipal est alors chargé de délibérer. S'il se prononce pour l'acceptation, tout se passe comme au cas où la commune elle-même a été gratifiée.

Mais si le conseil municipal est d'avis de refuser, la loi n'a pas voulu que la section fût privée du bénéfice de la disposition par une décision qui a pu être inspirée par un sentiment de malveillance ou de rivalité. Il est alors procédé comme au cas où il y a opposition d'intérêts entre la section et la commune. La section a droit à une représention distincte. Une commission syndicale, élue dans les conditions prescrites par l'article 111 § 2, est appelée à délibérer. Si elle se prononce pour l'acceptation, il est statué par un décret en Conseil d'Etat, et l'acceptation peut être autorisée malgré l'avis contraire du conseil municipal. Si la délibération conclut au refus, les lois de 1884 et de 1901 ayant négligé de s'expliquer sur ce point, on peut se demander s'il faut appliquer à la section les règles générales concernant les établissements publics ou les dispositions spéciales relatives aux communes. Dans le premier cas, le refus de la commission syndicale serait définitif, lorsqu'il s'agit de dons et legs faits sans charges, conditions, ni affectation immobilière. Pour les libéralités grevées de charges, le refus devrait être autorisé par arrêté du préfet, conformément à l'article 4 de la loi de 1901; en d'autres termes, l'acceptation pourrait être autorisée d'office, malgré le refus de la commis

D'UN HAMEAU OU QUARTIER DE COMMUNE

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sion. Dans le second cas, la délibération portant refus ne serait jamais soumise à l'approbation de l'autorité supérieure. Le préfet aurait simplement le droit d'exiger une seconde délibération, en vertu de l'article 112 § 1 de la loi de 1884.

Dans le silence des textes, nous inclinons à faire participer, à ce point de vue, la section au droit particulier de la commune : non seulement parce que cette assimilation est dans l'esprit de la loi, la commission syndicale étant chargée de remplir l'office de conseil municipal; non seulement parce que les articles 111 et 112 paraissent s'être proposé de régler, en matière de dons et legs, la situation des communes et des sections d'une manière complète; mais aussi parce qu'il y aurait contradiction à appliquer à la section les règles ordinaires des établissements publics au cas de refus, alors qu'elle est soumise aux règles spéciales des articles 111 et 112 au cas d'acceptation; et enfin parce que, depuis 1901, les établissements publics ayant reçu le droit de refuser librement les libéralités faites sans charges, la commission syndicale se trouverait sur ce point avoir des pouvoirs plus étendus que le conseil municipal, dont le refus définitif est toujours subordonné aux conditions indiquées dans l'article 112 § 1.

2334. b) Refus des dons et legs. L'article 910 du Code civil avait conféré au gouvernement le droit de statuer non seulement sur l'acceptation, mais aussi sur le refus des dons et legs faits aux communes. Ce droit lui fut maintenu par la loi du 18 juillet 1837 (art. 48 § 2). Les décrets de décentralisation ne firent que transférer la décision aux préfets (Tab. A no 49).

La loi du 24 juillet 1867 permit aux conseils municipaux de régler par leurs délibérations « l'acceptation ou le refus desdons. et legs sans charges, conditions ni affectation immobilière, lorsque ces dons et legs ne donnent pas lieu à réclamation » (art. 1 n° 9). Par cette disposition, la loi avait entendu réserver à l'autorité. un droit de contrôle sur les libéralités soumises à des charges. Mais elle n'avait pas évité une certaine inconséquence, en plaçant sur la même ligne l'acceptation et le refus, car s'il est logique de soumettre l'acceptation des dispositions grevées de char

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REFUS DES DONS ET LEGS

ges à des conditions plus rigoureuses que celle des libéralités pures et simples, il n'est plus rationnel de permettre à un conseil de refuser définitivement une libéralité pure et simple, et de lui dénier ce droit lorsqu'il s'agit d'une disposition grevée de charges.

La loi du 5 avril 1884 a conféré dans tous les cas aux conseils municipaux le pouvoir de refuser. Seulement, en vue de sauvegarder les intérêts des communes, elle a cru devoir réserver à l'administration, non plus un droit de décision, mais un droit d'intervention officieuse. Comme il est à craindre que le refus du conseil soit parfois inspiré par des influences étrangères, plus favorables aux intérêts des béritiers qu'à ceux de la commune, elle a décidé que le préfet pourrait toujours, par arrêté motivé, inviter le conseil municipal à revenir sur sa première délibération. Le refus n'est définitif que si le conseil, par une secondedélibération, déclare y persister. Sans exagérer la portée de cette mesure, il n'est pas douteux qu'un arrêté dont les termes établissent nettement les avantages d'une acceptation est de nature à faire réfléchir le conseil avant qu'il s'engage par un refus irrévocable.

Dans la discussion de la loi de 1901, il avait été question de supprimer la faculté accordée au préfet et d'attribuer aux conseils municipaux, comme aux conseils généraux, le droit de statuer définitivement sur le refus dans tous les cas. Il semblait peu logique, du moment où l'on concédait aux établissements publics le droit absolu de refuser les dons et legs faits sans conditions (art. 4), de conserver à l'égard des communes une formalité à laquelle les autres établissements n'étaient pas assujettis. On remarquait en outre que cette faculté conférée au préfet, n'étant soumise à aucun délai, avait l'inconvénient de laisser en suspens la décision du conseil municipal. La disposition de l'article 112 fut néanmoins maintenue. On considéra qu'elle avait l'avantage de permetre aux conseils de revenir sur un refus imprudent, <«< résultat possible d'apparences trompeuses ou de l'étude incomplète d'une situation ». Mais en vue de hâter la solution, l'article 3 de la loi de 1901 a fixé à un mois le délai dans lequel le préfet peut requérir une nouvelle délibération, ajoutant que,

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