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(Barrès C. Payen et Fuzier.) Les sieurs Payen et Fuzier sont propriétaires d'usines mises en mouvement par la rivière d'Ouvèze. Trouvant leur moyen de dérivation insuffisant en ce qu'il laissait échapper une partie de l'eau qu'il avait pour objet de recueillir, ils pratiquèrent de nouveaux ouvrages afin d'éviter toute déperdition. Mais au-dessous d'eux se trouvent les frères Barrès, qui profitaient, pour le jeu de leur usine, des eaux que l'imperfection primitive du barrage de leurs voisins laissait échapper, et qui s'en virent ainsi privés. Ils prétendirent alors avoir la possession plus qu'annale « des infiltrations qui s'échappaient, soit à travers les graviers,

soit à travers le barrage en pierres mobiles des sieurs Payen et Fuzier »; et, en conséquence, ils les citèrent en complainte possessoire, pour voir dire qu'ils prenaient leurs travaux comme trouble à leur possession, et pour en voir ordonner la suppression et le rétablissement des lieux dans leur état primitif.

15 oct. 1858, jugement du juge de paix du canton de Chomérac, qui repousse la demande des sieurs Barrès.

Appel, par ceux-ci, au tribunal civil de Privas, et, le 28 mars 1860, jugement de ce tribunal qui confirme la décision du premier juge par les motifs suivants :

« Attendu que, si l'action des frères Barrès

tenir dans la possession qu'il aurait de l'eau cou-nouvelle. M. Troplong l'examine et la discute dans rante qui borde sa propriété.-Ce n'est pas toutefois sans difficulté que celte doctrine est parvenue à s'établir; car il a été jugé, dans un sens opposé, que le riverain d'un cours d'eau ne donne point lieu contre lui à l'exercice de l'action possessoire, bien que, en usant du droit que lui confère l'art. 644, C. Nap., il se trouve contrarier un autre riverain dans l'usage qu'il aurait eu jusque-là du même cours d'eau, lorsqu'il n'est reproché au premier ni abus, ni extension de droit, ni aucun fait autre que celui d'une jouissance conforme à son litre: Cass. 17 fév. 1858 (1858, p. 445). L'arrêt que nous recueillons est, en principe, dans le sens général de la nouvelle jurisprudence inaugurée par un arrêt du 4 mars 1846 (t. 1 1846, p. 387). Toutefois, la doctrine contraire, qu'avait d'abord adoptée la Cour de cassation, a reçu l'approbation de MM. Pardessus, Sereit., t. 2, n. 326; Bélime, Possession, n. 246 bis: Garnier, id., p. 314; Massé et Vergé, sur Zachariæ, t. 2, § 319, n. 42, qui ne sont pas, il est vrai, en accord parfait avec M. Demolombe, Servit., t. 4, D. 184. On voit, par ce tableau des décisions et des opinions auxquelles la question a donné lieu, combien elle est encore sujette à controverse.

son Traité de la prescription, sur l'art. 2226, n. 168, et il la résout en ce sens que, là où la possession se borne à un surpe flu, os rencontre le vice de précarité qui rend la jouissance insuffisante pour prescrire. Et cette docrine a été récemment confirmée par un arrêt de la chambre civile de la Cour de cassation du 20 août 1861 (1864, p. 1073), rendu dans une espèce où il s'agissait de l'eau d'une fontaine communale s'écoulant sur la voie publique, et dont les riverains de cette voie prétendaient avoir prescrit l'usage à l'encontre de la commune ellemême, qui avait résolu d'utiliser ce qu'elle avait jusque-là laissé perdre. Les eaux d'une fontaine publique sont, à la vérité, imprescriptibles de leur nature; mais on prétendait ici que cette imprescriptibilité protégeait bien ce qui servait aux besoins des habitants, mais non ce qui les excédait, et que cet excédant était prescriptible. Et, à l'appui de cetle thèse, on invoquait un arrêt de la chambre des requêtes, en date du 9 janv. 1860 (1861, p. 1073), qui juge formellement que les eaux d'une fontaine publique sont prescriptibles pour la portion qui excède les besoins des habitants. Malgré ce précédent, la chambre civile, par l'arrêt du 20 août 1861, s'est prononcée, au contraire, pour l'imprescriptibilité absolue même de cet excédant, la possession n'en pouvant être considérée que comme un acte de simple tolérance de la part de celui qui l'abandonne.Cette même question de savoir si la jouissance d'un excédant, d'un superflu, d'un trop plein d'eau, peut constituer une possession utile a été encore résolue dans le sens de la négative, par un arrêt d'admission de la chambre des requêtes, rendu le 8 mai 1861, au rapport de M. le conseiller Férey et sur les conclusions conformes de M. l'avocat général de Pey

«La Cour, pour se montrer fidèle à ses précédents, devait protester, comme elle le fait, contre la doctrine de la prétendue inadmissibilité du droit des riverains à l'usage de l'eau courante; mais elle se place, aussitôt après, au point de vue des faits constatés par le jugement attaqué, et se fonde, pour rejeter le pourvoi, sur ce que la possession dont on se prévalait dans l'espice ne réunissait pas les caractères de la possession utile à prescrire. Ce n'était pas, en effet, de la totalité ou d'une partie du cours d'eau que le propriétaire inférieur lui-même se prétendait en possession, mais seulement de l'eau qui s'échap-ramont (Kérouartz C. Arnoult). La réunion postépait à travers les interstices d'un batardeau mal construit, on par-dessus ses bords en cas de surabondance. La question se trouvait, conséquemment, placée sur un tout autre terrain; car, le propriétaire supérieur étant reconnu avoir la possession du cours d'eau tout entier, le propriétaire inférieur n'élevait de prétention que sur la portion que laissait échapper le premier, soit qu'elle excédât ses besoins, soit par suite de l'imperfection de son moyen de dérivaLion. Dès lors, il s'agissait uniquement de savoir quel est le caractère de la possession du riverain qui profite seulement de l'eau qu'un autre ne juge pas à propos d'utiliser et qu'il laisse en quelque sorte perdre. Quel droit le premier pent-il acquérir sur cette eau surabondante, sur cet excédant, ce superflu, ce trop plein, qu'on abandonne parce qu'on n'en a pas un besoin actuel, mais pour le reprendre ou plutôt pour le garder, lorsqu'on voudra s'en servir ?... A ce point de vue, la question n'était pas

rieure dans les mêmes mains des deux propriétés à l'occasion desquelles la difficulté s'était élevée n'a pas permis que le pourvoi fût porté devant la chambre civile.-C'est aussi la doctrine qui résulte de l'arrêt ci-dessus; car la première des constatations de fait sur lesquelles il s'appuie, c'est que les complaignants n'avaient joui que des eaux surabondantes de la rivière, et seulement lorsque leur volume dépassait les exigences des usines supérieures. C'est donc une confirmation de la doctrine de M. Troplong sur l'insuffisance de la possession d'un superflu pour servir de base, soit à une action possessoire, soit à la prescription.»

V. aussi les observations de M. le conseiller Lévêque en note, au Journal du Palais, d'un arrêt du 20 mars 1860 (1860, p. 689). - Rep. gén. Pal. et Supp., v° Cours d'eau, n. 422 et suiv., et v° Complainte, n. 6 et suiy.

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réunit quelques-unes des conditions requises mais qu'une possession de simple tolérance pour autoriser la complainte, elle ne les réunit de la part du propriétaire supérieur, toujours pas toutes; qu'elle manque notamment de la en droit d'y mettre un terme, possession dès plus essentielle, de la possession à titre non lors essentiellement précaire et ne pouvant servir de base soit à une action possessoire, précaire ;-Attendu, en effet, que s'il est un principe généralement reconnu et non con- soit à la prescription.-Cette théorie du jugetesté, c'est que le droit consacré par l'art. 644, ment attaqué est insoutenable, en présence C. Nap., au profit du riverain d'un cours d'eau d'une jurisprudence qui considère, au conconstitue une faculté inamissible par le non- traire, comme une possession utile et acquisiusage: d'où il suit que ce riverain, fût-il resté tive celle que le propriétaire aurait eue de vingt, trente ou quarante ans sans user de la tout ou partie d'un cours d'eau à l'encontre faculté que la loi lui accorde, peut toujours du propriétaire supérieur qui n'aurait point l'exercer dans l'instant que ses intérêts ou ses | usé lui-même du droit qu'il avait de s'en serconvenances l'y invitent;-Attendu que si la vir, point irréfragablement établi par les arrêts possession que le riverain inférieur a pu avoir de la Cour de cassation des 4 mars 1846 (t. de ces eaux ainsi délaissées, pendant un temps 1 1846, p. 387); 24 avr. 1850 (t. 1 1851, p. plus ou moins long, par le propriétaire supé-85); 18 juin 1850 (t. 2 1851, p. 652); 2 août rieur, ne fait pas obstacle à ce que celui-ci 1853 (t. 1 1855, p. 81); 29 déc. 1857 (1859, use à l'avenir de la faculté imprescriptible qui p. 157), et 20 mars 1860 (1860, p. 680).—C'est lui est accordée, la conséquence nécessaire donc à tort que le jugement attaqué a qualifié de ces prémisses, c'est que le riverain infé- de précaire la possession des demandeurs : rieur n'a eu qu'une possession de simple tolé- c'était au contraire, de leur part, en qualité rance, c'est-à-dire une possession essentielle de riverains inférieurs, une possession effiment précaire; que si cette proposition est cace, et leur action en complainte était par Peu importe que le incontestable et si l'argument a toute sa force, conséquent recevable. lorsqu'il s'agit d'un riverain qui a négligé d'u- riverain supérieur ait négligé son droit d'une ser de son droit d'une manière absolue, ne manière absolue, ou que, tout en usant des sera-t-il pas plus puissant encore alors que eaux dans la mesure de ses besoins, il en ait le propriétaire supérieur, comme dans l'es- laissé sans emploi une quantité plus ou moins pèce, a constamment joui des eaux, et qu'il considérable : la jurisprudence n'établit aucune s'est appliqué dans tous les temps à recueillir | distinction entre la possession totale et la postoutes celles nécessaires soit au jeu de ses session partielle du cours d'eau par le riverain usines, soit à l'irrigation de ses propriétés?- inférieur; dans un cas comme dans l'autre, Attendu qu'on ne saurait admettre d'excep- celui-ci est admis à exercer l'action possessoire tion à la règle que pour le cas d'une jouis- pour ce qui a fait l'objet de sa possession. La sance abusive, c'est-à-dire sans profit pour le seule différence entre le riverain supérieur qui propriétaire supérieur, et au détriment de s'est entièrement abstenu de se servir des eaux l'inférieur; Mais attendu que le reproche et celui qui n'a jamais cessé d'en jouir au d'abus n'a été articulé ni dans le cours de la moins partiellement, c'est que l'un ne peut en discussion orale, ni dans les notes écrites qui faire usage pour quelque quantité que ce soit, ont été fournies par les plaidoiries;-Adop- sans provoquer l'action possessoire, tandis que tant au surplus les motifs du premier juge l'autre ne s'y expose qu'autant qu'il dépasse, (dans lesquels étaient longuement exposés les comme ont fait les défendeurs dans l'espèce, divers faits de possession allégués, et dont la quantité d'eau dont il a joui jusqu'alors. l'arrêt ci-après de la Cour de cassation renferme le résumé), etc. »>

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On a répondu pour les défendeurs : Le système du pourvoi consiste à mettre dans l'omPOURVOI en cassation de la part des frères bre les constatations de fait qui justifient le Barrès, pour violation des art. 23, Cod. proc. jugement attaqué, et à présenter la partie civ., et 6 de la loi du 25 mai 1838, en ce que théorique de ce jugement, relative à la préle juge du possessoire a refusé de les mainte- tendue précarité de la possession du riverain nir en la jouissance plus qu'annale qu'ils inférieur vis-à-vis du droit du riverain supéavaient de la quantité d'eau qui, avant l'en-rieur, comme en opposition avec la jurisprutreprise des sieurs Payen et Fuzier, servait à faire marcher leur usine.-La doctrine du jugement attaqué, a-t-on dit, est en opposition manifeste avec une jurisprudence parfaitement établie. Quelle est en effet cette doctrine? Que si, conformément à l'art. 644, Cod. Nap., ceux dont la propriété borde une eau courante, ont le droit de s'en servir, ils ne sauraient le perdre en n'en usant pas: d'où la conséquence que le propriétaire inférieur n'en saurait jamais acquérir aucun au préjudice du propriétaire supérieur, et que l'usage plus ou moins prolongé qu'il aurait pu faire de tout ou partie de cette eau, la jouissance qu'il en aurait eue, ne constituerait ja

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dence. Mais ce point de doctrine ne fût-il pas conforme aux principes admis sur les droits respectifs des riverains d'un cours d'eau, la décision n'en serait pas moins irréprochable: car elle constate, en fait, d'une part, que les demandeurs ne jouissaient que des eaux surabondantes de la rivière, quand leur volume excédait les besoins des défendeurs; et, d'autre part, que ceux-ci étaient en possession légale des eaux de la rivière. Ainsi se trouvent caractérisées la possession incertaine, équivoque des uns, et la possession paisible et continue des autres; d'où il résultait que la complainte des premiers devait être, comme elle l'a été, déclarée non recevable.

ARRÊT.

(Luton et autres C. Gaigneau.) Les sieurs Luton et autres, créanciers des

frères Gaigneau, faillis, dont l'état d'union avait cessé conformément à l'art. 537, C.

LA COUR;-Sur le moyen tiré de la violation des art. 23, C. proc. civ., et 6 de la loi du 25 mai 1838 : — Attendu que, si la jouissance en commun d'un cours d'eau qui borde deux héritages constitue au profit des rive-comm., et qui avaient repris leurs affaires, se

paiement intégral des créanciers, c'est-à-dire par la réhabilitation (V. MM. Renouard, Faillites, t. 2, p. 504 et suiv.; Pardessus, 6o éd., t. 3, des députés sur la loi de 1838). Il est, d'ailn. 1314; Rapport de M. Quénault à la Chambre leurs, complétement distinct et indépendant de la procédure spéciale organisée pour arriver à la liquidation et à la répartition de l'actif; il préexiste à cette procédure et il peut lui survivre. Celle-ci commence seulement par le jugement déclaratif de la faillite; elle à-dire, si l'actif est suffisant pour désintérescesse aussitôt que son but est atteint, c'est

rains, sans distinction entre le riverain su- Cour de Paris, du 23 nov. 1861, que nous sont pourvus en cassation contre l'arrêt de la périeur et le riverain inférieur, un droit utile avons rapporté au vol. de 1862, p. 228, pour viodans la possession duquel chacun d'eux est lation des art. 437, 522, 528 et 604, C. comm., autorisé à se faire maintenir en cas de trou- et fausse application des art. 538 et 539 du ble, il résulte, en fait, du jugement attaqué même Code, en ce que l'arrêt attaqué avait dé1° que les frères Barrès, avant l'action en cidé qu'après la dissolution de l'union, les opécomplainte, n'avaient joui que des eaux surabondantes de la rivière de l'Ouvèze, et seu- tribuer aux créanciers un nouvel actif acquis rations ne pouvaient pas être reprises, pour dislement lorsque leur volume dépassait les exi- par le failli.-Ce qui constitue l'état de faillite, gences des usines supérieures de Payen et de a-t-on dit, c'est la cessation de paiement. Par Fuzier;-2° Que la possession des frères Bar-conséquent, cet état ne peut cesser que par le rès était vague, incertaine, à ce point qu'il était impossible d'établir la quantité d'eau dont ils auraient été privés par les travaux de Payen et Fuzier, ou même si le volume d'eau réclamé par lesdits frères Barrès avait été possédé par eux depuis plus d'un an et un jour -3° Qu'ils n'ont nullement établi le fait d'une possession plus qu'annale;-4° Que, de leur côté, Payen et Fuzier avaient eu la possession légale, continue, non interrompue, paisible et non précaire, des eaux de la rivière; que s'il est arrivé quelquefois que, par suite de l'imperfection de leurs travaux de dérivation, le volume d'eau qui leur était nécessaire n'arrivait pas en entier dans leur canal, un nouveau travail exécuté par eux était bientôt venu remédier à ce déficit, et sans qu'ils éprouvassent la moindre opposition de la part des riverains inférieurs;-Que de ces faits le tribunal de Privas a conclu avec raison que la possession des frères Barrès avait été précaire, discontinue, balancée par la possession contraire de Fuzier et Payen; qu'enfin elle n'avait pas réuni toutes les conditions voulues par la loi; -Rejette, etc.

Du 12 mai 1862.-C. cass., ch. civ. — MM. Troplong, 1er prés.; Glandaz, rapp.; de Raynal, av. gen. (concl. conf.); Aubin et Béchard, av.

CASSATION (REQ.) 13 août 1862. FAILLITE, UNION, DISSOLUTION, RÉOUVERTURE, ACTIF NOUVEAU, ACTION INDIVIDUELLE.

cordat entre le failli et ceux-ci, ou encore si tout l'actif réalisé a été distribué; elle reprend 10 au cas où, après clôture pour insuffisance son cours, sans nouvelle déclaration de faillite: d'actif, il survient un nouvel actif au failli; 20 au cas de résolution du concordat pour inexécution des conditions sous lesquelles il avait été consenti. On peut donc poser en principe que l'etat de faillite est permanent, et que la

ser les créanciers, ou s'il intervient un con

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Code de commerce, l'envisage aussi, dans ses motifs, 1838, c'est-à-dire du nouvel art. 537, C. comm.au point de vue de la loi modificative du 28 mai MM. Bédarride, Faillites, t. 2, n. 821 et 822, et Esnault, id., t. 2, n. 501, enseignent également la doctrine consacrée par l'arrêt que nous recueillons et qui paraît être adoptée encore par M. LaroqueSayssinel, Faillites, t. 2, p. 423, n. 15, et p. 426, n. 5.. V. en outre MM. Renouard, Faillites, t 2, p. 208 et suiv., et Alauzet, Comment. C. comm., La dissolution de l'union, si elle ne fait past. 4, n. 1837.)-Mais, tout en refusant aux créancesser complétement l'état de faillite, le modifie du moins si profondément que les créanciers, au cas de survenance d'un nouvel actif, ne peuvent plus demander la réouverture des opé- | rations de la faillite avec nomination d'un nouveau juge-commissaire et de nouveaux syndies, mais seulement exercer leurs actions individuelles contre le failli ou sur ses biens (1). (Cod. comm., 537 et s.)

(1) V. dans le même sens, Paris, 23 nov. 1861 (1862, p. 228); Cass. 4 août 1841 (l. 2 1841, p. 565). Ce dernier arrêt (qui casse un arrêt de la Cour de Rouen du 10 août 1838 [t. 2 1838, p. 535]), en résolvant la question par application de l'ancien

ciers le droit de faire nommer un nouveau syndic,
l'arrêt précité de 1841 et MM. Bédarride et Esnault
(loc. cit.) leur reconnaissent celui de se réunir et de
s'entendre pour se faire représenter par un manda
taire commun, conformément aux dispositions du
Code Napoléon sur le mandat, afin d'éviter les frais
considérables que pourraient entraîner des poursui-
tes individuelles. - M. Esnault va même plus loin,
car il admet que le failli auquel il est survenu de
nouveaux biens après la dissolution de l'union, et
qui ne paye pas alors ses créanciers, peut être mis
une seconde fois en faillite, ce qui paraît contraire à
la maxime: Faillite sur faillite ne vaut. V. sur l'ap-
plication de cette maxime, Paris, 13 août 1831.
V. au surplus Rép. gén. Pul., v° Faillite, n. 1873
et suiv., 1935.

qu'il est naturel que, lorsque ce contrat a péri, la faillite se rouvre et procède sur ses anciens errements;-D'où il suit qu'en décidant qu'il n'y avait lien, dans l'espèce, de nommer un nouveau juge-commissaire et de nouveaux syndics, l'arrêt, loin de violer les dispositions de loi invoquées par le pourvoi, a fait à la cause une juste application de l'art. 537, Cod. comm. ;-Rejette. etc.

Du 13 août 1862.-C. cass., ch. req.-MM. Hardoin, f. f. prés.; Nachet, rapp.; de Peyramont, av. gén. (concl. conf.); Collet, av.

CASSATION (Civ.) 20 août 1862.

procédure, au contraire, se ferme et se rouvre selon l'intérêt des créanciers.-L'arrêt attaqué refuse d'appliquer ce principe au cas prévu par l'art. 539, Cod. comm., par le motif que cet article, en disposant que la cessation de l'union rend aux créanciers l'exercice de leurs actions individuelles, clot par cela même irrévocablement le régime de la faillite. Mais cela ne saurait être vrai qu'autant que l'idée d'action individuelle serait exclusive de l'idée de réouverture des opérations de la faillite. Or, il n'en est pas ainsi, car, au cas de clôture pour insuffisance d'actif, l'art. 527 rend aussi aux créanciers l'exercice de l'action individuelle, et cependant l'art. 528 n'en déclare pas moins que les opérations pourront être reprises, s'il est justifié de l'existence d'un actif, ou même EXPROPRIATION FOUR UTILITÉ PUBLIQUE, OFsimplement si l'un des intéressés consent à FRES, DÉCLARATION EXPLICATIVE, DÉLAI. faire l'avance des frais. Objectera-t-on que la La déclaration par l'expropriant que les loi qui s'est expliquée formellement sur le cas offres qu'il a faites s'appliquent tout à la fois prévu par l'art. 527, s'est tue sur celui prévu à l'immeuble exproprié et au fonds industriel par l'art. 539? Mais il faut remarquer que la exploité dans cet immeuble par le propriétaiclôture pour insuffisance d'actif étant pronon-re, avec détermination du chiffre pour lequel cée par jugement, une disposition expresse de la loi était nécessaire pour autoriser la rétractation de ce jugement, tandis que le principe de la permanence de la faillite suffit, quand la clôture a eu lieu de plein droit par suite de la dissolution de l'union, pour autoriser à reprendre une procédure qui s'est arrêtée d'elle-même faute d'objet. L'arrêt attaqué s'appuie encore sur la maxime: faillite sur faillite ne vaut. Mais il est évident que cette maxime est ici sans application, puisque les créanciers demandent simplement la continuation des opérations de la faillite déjà déclarée, et non pas une nouvelle déclaration de faillite.

ARRÊT.

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le fonds industriel est compris dans ces offres, n'est point soumise, alors d'ailleurs qu'elle a été acceptée par l'exproprié, au délai de quinzaine entre les offres et la convocation du jury: une telle déclaration n'ayant le caractère, ni d'offres nouvelles, ni de modification des offres originaires, mais constituant une simple explication des premières offres (1). (L. 3 mai 1841, art. 23, 24, 28 et 37.)

(Bouze C. Ville de Marseille.)-ARRÊT. LA COUR; Sur les deux moyens tirés de la violation des art. 37, § 1, 23 et 24 de la loi du 3 mai 1841 : Attendu que la ville de Marseille avait régulièrement offert aux époux Bouze expropriés une somme de 18,500 fr.;Que, devant le jury, la ville de Marseille, représentée par son maire, a fait connaître que cette indemnité s'appliquait tout à la fois à l'immeuble expropric et au fonds industriel que Bouze y exploitait, qui s'y trouvait compris pour une somme de 2,500 fr.;—Que les époux Bouze n'ont pas repoussé cette distinction, qu'ils l'ont acceptée au contraire, et se sont bornés à demander pour chacun des chefs de l'expropriation une indemnité plus forte; Qu'il n'y a eu, dès lors, de la part de la ville de Marseille, ni modification de ses offres originaires, ni offres nouvelles, mais une simple explication des premières offres, explication à laquelle les époux Bouze ont adhéré;-D'où il suit qu'en statuant, dans cet état des débats, sur les pré

LA COUR ;-Attendu qu'aux termes de l'art. 537, Cod. comm., lorsque la liquidation de la faillite est terminée, la dernière répartition faite, le compte des syndics rendu, l'avis des créanciers sur l'excusabilité ou l'inexcusabilité du failli donné, l'union est dissoute de plein droit ;-Qu'aux termes de l'art. 539, les créanciers rentrent, à partir de ce moment, dans l'exercice de leurs actions individuelles, tant contre sa personne que sur ses biens, s'il n'est pas déclaré excusable, et sur ses biens seulement, dans le cas contraire; Que, s'il est vrai que la réhabilitation seule fait complètement disparaître l'état de faillite, il n'en faut pas moins reconnaitre que la dissolution de l'union modifie profondément cet état ;-Qu'on ne peut assimiler cette dissolution ni avec la clôture provisoire autorisée par l'art. 527, ni avec le cas d'inexécution du concordat; (1) La jurisprudence décide même que le délai -Que, dans le premier cas, la clôture provide quinzaine n'a pas besoin d'être observé à l'égard soire des opérations de la faillite peut être des changements ou augmentations des offres prieffacée par un nouveau jugement, parce que 72 et 325), et les renvois; mitives; V. Cass. 6 mars et 5 juin 1861 (1862, p. ces opérations sont seulement suspendues, gard des divisions, faites à l'audience, d'une offre -...non plus qu'à l'éque les syndics n'ont pas rendu leurs comptes, collective signifiée d'abord à plusieurs copropriétaiet qu'ils demeurent en fonctions ainsi que le juge-commissaire; que, dans le cas de l'art. taient pas déterminés : Cass. 10 juill. 1861 (1862, 519, la clôture de la faillite est subordonnée à p. 1184), et le renvoi.-V. Rep. gen. Pal. et Supp., l'existence et à l'exécution du concordat, etv Expropriation pour utilité publique, n. 532.

res dont les droits dans l'immeuble exproprié n'é

tentions respectives des parties, le jury n'a | violé aucune loi;- Rejette, etc.

Du 20 août 1862.-C. cass., ch. civ.- MM. Pascalis, prés.; Glandaz, rapp.; de Marnas, 1er av. gén. (concl. conf.); de la Chère et Hérisson, av.

CASSATION (CIV.) 10 novembre 1862.

VICE RÉDHIBITOIRE, ACTION, DÉLAI. Le délai fixé par les art. 3 et 4 de la loi du 20 mai 1838, pour intenter l'action rédhibitoire, est frane; de telle sorte que l'action est utilement introduite le lendemain du dernier | jour du délai (1).

(Lehmann C. Lagoutte.)-ARRÊT.

Le 7 janv. 1862, jugement du tribunal de commerce de Dijon, qui décidait le contraire dans les termes suivants :-« Attendu qu'aux termes des art. 3 et 4 de la loi du 20 mai 1838, le délai pour intenter l'action résolutoire était, en raison des distances, de dix jours, non compris le 8 décembre;-Attendu que ce dé- | lai doit être entendu en ce sens que, tant que le nombre de jours qu'il comporte n'est pas écoulé, l'action est toujours recevable, mais qu'elle ne saurait l'être au delà de ce nombre; que le décider autrement serait admettre pour cette action un jour supplémentaire, en dehors du texte des articles précités ;-Attendu que l'action de Lehmann frères n'a été exercée que le onzième jour; qu'elle est donc non recevable, etc. »

POURVOI en cassation par les sieurs Lehmann frères, pour violation des art. 1033, C. proc., 3 et 4 de la loi du 20 mai 1838.

ARRÊT.

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CASSATION (CIV.) 12 novembre 1862. DISPOSITION A TITRE GRATUIT, LEGS, FIDÉI– COMMIS, ETABLISSEMENT PUBLIC, AUTORISATION, COMPTE D'ADMINISTRATION.

faisance) qui prétend qu'un legs fait à un L'établissement public (un bureau de bientiers constitue un fideicommis à son propre profit, ne peut, avant d'être autorisé à accepter cette libéralité, demander au légalaire ap parent le compte d'administration des biens compris dans le prétendu fideicommis: ce n'est pas là une mesure purement conservatoire de la nature de celles autorisées par l'art. 11 de la loi du 13 août 1851 (2). (Cod. Nap., 910.)

Mais il pourrait faire juger par l'autorité judiciaire, avant l'autorisation administrative d'accepter la libéralité, la question préjudicielle d'existence du fideicommis. (Résol. impl.) (3)

(2-3) Aux termes de l'art. 940, C. Nap., les libéralités faites au profit des établissements publics n'ont d'effet qu'autant qu'elles ont été autorisées par l'administration supérieure. Mais des monuments législatifs postérieurs, tels que l'art. 4 de l'arrêté du Gouvernement du 4 pluv. an XII et l'art. 5 de l'ordonnance du 2 avr. 1847, ont permis à ces établisments de faire, avant toute autorisation, des actes conservatoires de leurs droits. L'art. 48 de la loi du 18 juill. 1837, sur l'organisation communale, a été LA COUR;-Vu les art. 3 et 4 de la loi du plus loin, en permettant au maire d'accepter, à titre 20 mai 1838 et l'art. 1033, Cod. proc.;-At-conservatoire et en vertu d'une délibération du contendu que, aux termes des deux premières dis-seil municipal, les dons et legs faits à une commupositions visées, les délais pour intenter l'ac-hospices et hôpitaux, a étendu la même faculté aux ne; et l'art. 44 de la loi du 13 août 1851, sur les tion rédhibitoire doivent être entiers ou francs; qu'ainsi il y a lieu de les compter sans y comprendre soit le jour à partir duquel ils commencent à courir, soit le jour de l'échéance; que cette interprétation est conforme au principe général énoncé en l'art. 1033, Cod. proc.;-Attendu que le jugement attaqué, tout en reconnaissant que, dans l'espèce, à raison des distances et de la nature du vice rédhibitoire, le délai est de dix jours, et que le cheval dont il s'agit a été vendu et livré le 8 déc. 1861, a néanmoins déclaré non l'existence du fidéicommis attaqué par le bureau de recevable, comme tardive, la demande en ré-bienfaisance de la commune des Planches, existence siliation introduite par exploit du 19 déc., c'està-dire le lendemain du jour de l'échéance du dé

(1) V. conf., Cass. 24 janv. 1849 (t. 1 4849, p. 419); Rouen, 27 mars 1858, et Cass. 3 mai 1859 (1860, p. 824).-Massé et Vergé, sur Zachariæ, t. 4, § 686, note 14; Buileux, Comment. Cod. civ., t. 5, sur l'art. 4648.-V. cependant les observations critiques de M. Rodière sous Rouen, 27 mars 1858, et Cass. 3 mai 1859 (précités).-V. Rép. gén. Pal. (Supp.), vo Vices rédhibitoires, n. 115.

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établissements charitables. D'où il suit que ces établissements peuvent faire tous les actes nécessaires à la conservation des droits résultant des libéralités qu'il leur est permis d'accepter provisoirement, de manière à empêcher que ces droits ne soient compromis par les délais nécessaires de l'autorisation administrative; et même qu'ils peuvent faire reconnaitre judiciairement l'existence contestée des libéralités dont ils se prévalent, de manière que l'autorisac'est en ce sens qu'il a été jugé, tout au moins imtion administrative puisse utilement intervenir. Et plicitement, par l'arrêt que nous rapportons, que

contestée par le légataire apparent, constituait une question préjudicielle qui pouvait être vidée par l'autorité judiciaire avant l'autorisation administrative. C'est également en ce sens qu'il a été jugé par la Cour de cassation, le 5 mai 1856 (1858, p. 1113), que la nécessité de l'autorisation préalable du Gouvernement pour l'acceptation de legs faits en faveur d'un établissement public, n'est pas un obstacle à ce que l'établissement légataire intervienne, avant d'avoir été autorisé à l'accepter, dans une instance en nullité du testament, pour conclure à sa validité. Mais peut-on conclure de là que, avant toute auto

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