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QUESTIONS POLITIQUES.

1849.

LES ÉLECTIONS DU 13 MAI 1849.

I.

26 février 1849.

Ni en principe ni en fait, nous ne sommes partisans des comités qui ont la prétention de centraliser les élections et de dicter aux électeurs le choix de leurs représentants.

L'action de ces comités, qui dressent des listes et qui les imposent, nous paraît une atteinte à la liberté des élections et à la sincérité du suffrage universel. Que dans chaque département chaque opinion ait son comité pour empêcher les voix de ses adhérents de se diviser, de s'égarer, c'est ce que nous comprenons parfaitement; mais que des comités de Paris mettent la France électorale en tutelle, et que la France électorale s'y prête aveuglément, c'est ce que nous ne saurions concevoir, alors qu'il s'agit surtout de comités qui ne se proposent pas d'agir dans les limites d'une opinion, mais qui ne tendent à rien moins qu'à s'emparer du monopole des élections. De quel droit? à quel titre ? Nous comprenons qu'on souhaite et qu'on s'efforce de faire triompher son parti; mais que des partis opposés cachent entre eux leurs cocardes, mettent en commun leurs drapeaux et s'érigent en assurance mutuelle contre les risques électoraux, se mettent les uns les autres tous à couvert sous le

même manifeste, au lieu de se combattre franchement, loyalement, c'est ce qui ne s'accorde nullement avec les idées que nous soutenions en 1839, quand nous combattions la Coalition, ce premier germe dont on peut dire que la Révolution du 24 février 1848 est la fleur et la République le fruit. C'est faire tomber la politique dans le babélisme; c'est ajouter au labyrinthe de nouveaux détours, c'est resserrer les nœuds qu'il faudrait dénouer.

Nous venons de dire ce que nous pensions de tous les comités de Paris qui aspirent à la dictature de l'opinion en France et au monopole des élections! Nous en voyons les inconvénients; nous en cherchons vainement les avantages. Nous ne leur sommes pas favorables; il n'en est pas ainsi des comités de départements: nous en comprenons l'utilité, la nécessité. Seulement, la formation de ces comités soulève une grave et délicate question: celle de savoir si chaque opinion tranchée doit avoir son comité distinct, ou s'il ne doit y avoir dans les élections que deux drapeaux. sous l'un, les partisans de toutes nuances de la République démocratique et sociale; sous l'autre, les adhérents de toutes nuances à la République démocratique et modérée.

La question ainsi posée ne ferait l'objet d'aucun doute, si le lien du faisceau ne devait pas promptement se rompre pour faire jour à l'éclat des dissidences et à la diversité des sympathies.

Nous avons toujours eu peu de goût pour les coalitions, parce que toujours elles cachent l'inconnu sous le mensonge. La révolution de 1848 existait en germe dans la coalition de 1838, comme le chêne est contenu dans l'enveloppe du gland. De la coalition de 1838 devait sortir ou une guerre ou une révolution, peut-être l'une et l'autre.

On sait comment, le 13 mai 1839, la révolution fut contrainte de s'ajourner, et comment, le 15 juillet 1840, la guerre fut évitée par la note du 8 octobre et le rappel de l'escadre française. On ne fit que reculer pour mieux sauter, car l'insurrection, vaincue le 13 mai 1839, a été victorieuse le 24 février 1848.

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