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sout rien, qui rampe quand il faudrait planer, qui complique quand il faudrait simplifier, qui creuse le déficit quand il faudrait le combler, qui s'arrête aux incidents quand il faudrait devancer les événements, qui intervient inconsidérément à Rome quand les yeux de l'Europe tout entière sont fixés sur Paris pour voir comment nous nous y prendrons pour replacer la France à la tête des nations.

1849.

L'AVEUGLEMENT CONTINU.

« Ainsi, Colbert a voulu réorganiser la société tout entière, et former chacun des anneaux de cette longue chaîne de rapports qui unissent les citoyens, soit entre eux, soit avec le gouvernement, pour mieux s'emparer, par sa féconde pensée, de tous les élémenis de l'ordre et de la prospérité publique. »

MARQUIS D'AUDIFFRET. Tie de Colbert.

22 septembre 1849.

Le Constitutionnel est au gouvernement anonyme de M. Thiers, en 1849, ce que le Journal des Débats était au ministère de M. Guizot, en 1847. Le Constitutionnel n'imagine rien de mieux que ce qui est. C'est l'optimisme stéréotypé.

L'optimisme en haut, c'est le communisme en bas; l'optimisme dans le pouvoir, c'est le communisme dans le peuple; l'optimisme dans l'esprit du ministre qui s'abuse, c'est le communisme dans le cœur du prolétaire qui souffre.

Nous ne sommes les adversaires inexorables de l'optimisme que parce que nous sommes les ennemis vigilants du communisme.

Ce que nous écrivions le 16 octobre 1847, il y a deux ans, contre l'optimisme conduisant au communisme, nous pourrions le reproduire aujourd'hui sans y changer un seul mot.

Avions-nous tort de dire, le 16 octobre 1847, que la force

ne devait pas dispenser de la vigilance, et qu'il n'était pas prudent de s'obstiner à vouloir faire tenir exclusivement la société en équilibre sur la pointe d'une baïonnette?

Que ce soit par une raison ou par une autre, que ce soit parce que M. Thiers a complétement manqué, le 24 février, de présence d'esprit et de courage, parce qu'il a perdu quatre heures précieuses, de huit heures à midi, parce qu'il s'est enfui quand il aurait dû se dévouer, ou que ce soit par toute autre cause, ce qui est certain, c'est que quelques heures ont suffi pour renverser trône et gouvernement, Chambre des pairs et Chambre des députés.

Quiconque eût annoncé le 1er janvier 1848 que le 24 février suivant la République serait proclamée à l'Hôtel-deVille de Paris, eût été traité de fou et se fût exposé à ce qu'on le conduisit à Charenton.

Aujourd'hui, la même confiance règne, le même optimisme gouverne!

On dit : Nous avons à Paris et autour de Paris une armée d'occupation de cent mille hommes; cette armée est animée du meilleur esprit; elle a pour chef un général intrépide et vigilant ; nous n'avons donc rien à craindre; nous n'avons plus qu'à renouer la chaîne rompue le 24 février.

Nous répondons : Erreur ! erreur! Oui, cela est vrai, vous avez une armée de cent mille hommes parfaitement disciplinée, supérieurement commandée; mais vos dépenses ont augmenté depuis le 24 février, et vos ressources ont diminué.

Avant le 24 février, pour être électeur, il fallait donner à la société un cautionnement de 200 francs en revenu, équivalant à 60,000 francs en capital. Il ne suffisait pas qu'on possédât la capacité morale exigée pour prononcer, en qualité de juré, sur la vie, la fortune ou l'honneur d'un accusé!

Aujourd'hui, tout contribuable âgé de vingt-et-un ans est électeur.

Il y a dans le triomphe, prématuré peut-être, du suffrage

universel, toute une révolution politique, plus qu'une révo→ lution politique, une révolution sociale.

C'est ce dont vous ne paraissez pas même vous douter!

A votre langage, il semblerait que, parce que vous gouvernez sous la raison ministérielle : Barrot et Co, rien n'a été changé à ce qui existait le 23 février, à l'heure où le roi Louis-Philippe vous nommait président du conseil des ministres!

Aveugles que vous êtes tous! Ce que le Code civil a commencé il y a quarante ans, le suffrage universel va l'achever.

Vous ne le voyez donc pas !

Vos efforts seront aussi impuissants à arrêter le mouvement que le seraient tous les chevaux d'un relai de poste, attelés à l'extrémité d'un convoi de chemin de fer, et tirant en sens contraire de la locomotive ouvrant ses narines de feu et prenant son essor!

«Ne pas tarir les sources du revenu, et réduire, dans la » mesure du possible, les dépenses, ainsi se résument les >> besoins DOMINANTS de la situation : » - Tel est le programme de M. Thiers, ayant le Constitutionnel pour organe. Eh bien! nous disons que ce programme est une utopie! Plus vous le faites modeste et moins vous le faites praticable.

Ce n'est pas en persistant dans les vieux errements que vous réduirez les dépenses! Non; vous ne les réduirez pas en agissant ainsi. Les paroles de M. Passy, présentant le budget de 1850, sont là qui l'attestent.

Il disait, dans la séance du 4 août 1849 :

« A l'aspect des difficultés financières, l'Assemblée constituante fit effort pour réaliser immédiatement des économies et retrancha 43 millions des dépenses proposées; mais peut-être n'apprécia-t-elle pas suffisamment l'empire des motifs du moment, car il était impossible que la plupart des réductions qu'elle vola NE SE TRADUISISSENT PAS PROCHAINEMENT EN DEMANDES DE CRÉDITS SUPPLÉMENTAIRES. »

Vous ne réduirez pas plus les dépenses dans l'avenir que

vous ne les avez réduites dans le passé, malgré les adresses réitérées de la Chambre élective.

Ces adresses sont bonnes à rappeler :

ADRESSE DE 1832.

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« Nous regrettons que votre gouvernement ne puisse nous proposer aucune réduction sur les charges publiques; c'est pour nous un nouveau motif de réclamer de justes économies, de travailler sans relâche à mettre les dépenses de l'Etat en équilibre avec ses revenus, à sortir du provisoire qui embarrasse et complique la perception de l'impôt, et à renfermer avec plus de sévérité les dépenses dans les allocations du budget. »

ADRESSE DE 1834. - «En accordant ce qui est nécessaire aux dépenses de l'État, la Chambre a le droit d'attendre que les ministres se renfermeront avec sévérité dans les allocations du budget. »

-

ADRESSE DE 1835. a Il faut de toute nécessité obtenir cet équilibre que vous nous faites espérer entre les recettes et les dépenses publiques. Nous comptons que les ministres de Votre Majesté, s'associant aux voeux bien prononcés du pays, de renfermer les dépenses dans la limite des revenus ordinaires, prendront l'initiative de toutes les réductions possibles... Il est temps de rétablir dans nos budgets une balance exacte. »

ADRESSE DE 1836.— « La paix ne peut qu'accroître la prospérité de nos finances; leur état satisfaisant, que Votre Majesté nous annonce, permettra d'obtenir, dans toute sa vérité, l'équilibre tant désiré entre les revenus et les charges de l'État. Pour atteindre et conserver cet important résultat, nous savons tout ce qu'il faut de maturité dans les réglements de crédits, de fixité dans le maintien de leurs limites..... >>

ADRESSE DE 1840. « Nous espérons que l'état de nos finances permettra de suffire aux charges extraordinaires qui résultent de la situation présente de l'Afrique. Nous espérons qu'il nous permettra également de nous occuper, dans cette session, du projet de remboursement d'une partie de la dette publique. »

ADRESSE DE LA SECONDE SESSION DE 1840. - Nous examinerons avec soin la loi du budget. C'est parce que les États sont exposés à subir des charges inattendues, qu'une sévère économie est toujours nécessaire. En d'autres temps, la Chambre, dans l'impossibilité de diminuer les impôts qui pèsent sur le pays, avait DU MOINS recommandé de garder l'équilibre entre les recettes et les dépenses... Puisque, de fait, CET ÉQUILIBRE EST ROMPU, nous aviserons au moyen de le rétablir et de le conserver. »

-

ADRESSE DE 1842. « Toutefois, la Chambre regrette d'apprendre que l'équilibre entre les dépenses et les recettes n'a pu être immédiatement rétabli. Quand son honneur ou son intérêt l'exige, la France ne eraint pas d'engager son crédit et de se confier à l'avenir; mais cet avenir n'est assuré que par les prévoyantes réserves de la paix : l'ORDRE DANS LES FINANCES n'importe pas moins à la puissance qu'à la richesse de l'État. »

ADRESSE DE 1843.

VIII

« Qu'il serve surtout (l'accroissement du revenu)

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