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J. Bentham soutient l'affirmative, avec toute la vigueur et toute la hardiesse de son génie (1). Je me garderai bien de lui opposer ces maximes coutumières de notre ancienne France: «Voirs est que un home tant seulement ne peut fére un jugement... Encore convient-il a jugement fére, quatre homes, a tout le meins (2). » Le philosophe anglais me renverrait à ses sophismes du pouvoir, et me dirait avec Bacon « que nos aïeux étaient des enfants au maillot; que nous seuls sommes les barbes grises, les sages, nous qui avons accaparé, pour en faire notre profit, tout ce que la vie humaine peut recueillir d'expérience (3). » Cela peut être vrai, sous beaucoup de rapports. Les générations qui nous ont précédés avaient une jeunesse relative; nous avons ajouté à leur instruction celle des siècles suivants. Mais dans ces trésors dont s'enrichit le dernier venu, c'est à dire, le plus vieux des siècles, le nôtre a-t-il compris le système d'unité en judicature (4)? Les publicistes sont fort éloignés de s'accorder sur ce point.

L'opinion de Bentham contre la pluralité des juges se fonde sur deux motifs principaux :

1o L'influence que l'un des juges exerce ordinairement sur les autres, ce qui rend inutile le concours de ceux-ci;

2o Le défaut d'une responsabilité qui, laissant à la charge de tout le corps l'odieux de l'iniquité, ne pèse directement sur aucun de ses membres.

Le savant M. Comte est venu prêter à cette thèse l'appui de son esprit géométrique et de sa puissante argumentation: « Multiplier le nombre des hommes, dit-il, n'est pas nécessairement un moyen d'accroître la masse des

(1) De l'organisation judiciaire et de la codification, extraits de divers ouvrages de J. Bentham, par E. Dumont, chap. 10.

(2) Beaumanoir, chap. 61; Pierre de Fontaines, chap, 21.

(3) Revue britannique, 2e année, p. 250. (4) Expression de Bentham.

(5) Considérations sur le pouvoir judiciaire,

lumières, dans aucun genre de connais. sances; deux demi-savants ne font point un savant.Cela est vrai dans les sciences morales, comme dans les sciences physiques ou mathé matiques; dans les unes comme dans les autres, le nombre ne prouve rien que lui-même. Il serait aussi ridicule de prétendre obtenir la capacité d'un profond jurisconsulte en réunissant en corps trois médiocres légistes, qu'il serait ridicule de prétendre obtenir un savant mathématicien en réunissant quelques maîtres d'école de village, qui n'ont jamais su faire que des additions et des soustractions (5). »

Les défenseurs de la pluralité répondent que le premier motif de Bentham se détruit par lui-même. Arguer de l'influence de l'un des juges sur les autres, c'est appréhender que le jugement ne soit dicté par une seule voix; c'est donc changer en une funeste conséquence le principe du système de l'unité (6).

Quant au défaut de responsabilité, on trouverait pour y porter remède un moyen moins tranchant, et que les meilleurs esprits appellent de tous leurs vœux : c'est le retour à la loi qui obligeait les juges d'opiner à voix haute.

Les chances d'erreur ou de vérité, dans les décisions judiciaires, ne se doivent pas calculer comme des équations d'algèbre. Il faut, pour administrer la justice, une connaissance profonde des lois, une probité à toute épreuve, une grande indépendance de caractère, un esprit droit et une expérience consommée. Or, s'il est rare de trouver une unité composée de ces précieuses fractions, il faut bien les chercher dans la pluralité.

Le contraste des opinions éclaire tous les aspects d'une question. Le dernier mot d'un avis suffit quelquefois pour faire ressortir la nuance que la première impression d'un autre

chap. 2, p. 68. M. Comte a placé ces considérations en tête de la seconde édition de sa traduction des pouvoirs et des obligations des jury ́s, par sir Richard Phillips.

(6) Voyez dans les Annales de jurisprudence et de législation, p. 315 et suiv., un article sur l'Organisation judiciaire, traduit de l'italien de M. Ferini, avocat à Naples.

115.

Art. avait absorbée. Il y a un pouvoir d'opposition dans la pluralité, et ce pouvoir sert puissamment à déconcerter les voix partiales ou corrompues.

Il est possible de corrompre un seul juge; les chanceliers d'Angleterre, qui jugent seuls à la cour de chancellerie, en ont fourni des exemples (1). Il est à peu près impossible de corrompre une compagnie tout entière.

Muratori n'accordait que le mérite d'une consultation, consulto di un avvocato, à la sentence d'un juge unique; sa plus haute estime était pour les décisions émanées d'un corps de magistrats (2).

M. de Feuerbach en Allemagne, et M. Bérenger en France, tous deux renommés par d'excellents écrits sur la législation (3), se sont fortement déclarés contre l'unité en judicature. « C'est, dit M. Bérenger, une premiére règle que les tribunaux soient composés d'un grand nombre de juges. Ce concours augmente les lumières, il contribue à dissiper les préventions, et il devient la meilleure garantie de la bonté des jugements. »

Je dois encore citer ce passage de l'Histoire des Républiques italiennes du moyen age, par M. de Sismondi : « Dans presque toute l'Italie, le jugement des causes tant civiles que criminelles est abandonné à un seul juge. Peut-être s'est-on trompé dans les autres pays, lorsqu'on a cru multiplier les lumières en multipliant les juges. Plus le nombre des juges est restreint,plus chacun d'eux sent augmenter sa responsabilité, et se fait un devoir d'étudier une cause sur laquelle son seul suffrage peut avoir une si grande influence. Mais on dénature un tribunal en le réduisant à un seul homme : on ne laisse plus à celui-ci le moyen de distinguer entre ses affections privées, ses passions, ses préjugés, et les opinions qu'il forme en sa qualité

(1) Le lord Macclesfield, entre autres, au commencement du siècle dernier.

(2) « Quelle decisioni che vengono da un solo giudice, poco o nulla s'han da credere differenti da i consulti di un avvocato. Più stima di gran lunga meritano, quelle che escono da un corpo di varij giudici.» Dei defetti della giurisprudenza.

(3) Betrachtungen über die Oeffentlichkeit und

d'homme public. On expose les parties à souffrir de son humeur, de son impatience, et on lui ôte le frein salutaire que lui impose la nécessité d'exposer ses motifs à ses collègues, pour les amener à son opinion. Il y a souvent dans le cœur de l'homme des mouvements contraires à la justice ou à la morale, qui contribuent à ses déterminations, sans qu'il s'en rende compte. Celui même qui les ressent reconnaîtrait leur turpitude et rougirait de se soumettre à leur influence, s'il était obligé de les exprimer (4). »

M. Meyer, après avoir rapporté les raisons pour et contre, arrive à cette conclusion: qu'il ne faut pas perdre de vue les usages établis (5). »

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M. Cooper pense de même. Il lui semblait d'abord (6) qu'il était plus conforme aux principes d'une bonne organisation, de faire siéger plusieurs juges dans un tribunal; mais un ouvrage qu'il a publié depuis, sur l'administration de la justice en Angleterre, lui a fourni le sujet d'examiner de nouveau la question (7); il a trouvé que les arguments se balançaient, et il croit, à présent, qu'on aurait tort de changer l'ancien usage, qui fait siéger un seul juge dans les différentes sections de la cour de chancellerie.

Le nom de Bentham, les lumières soudaines qui s'échappent du nuage de ses opinions, et le rare talent de son interprète, donnent de prime abord au système qu'il a embrassé, une importance que la réflexion décompose facilement, et que ses disciples eux-mêmes renoncent à généraliser. Il faut donc conclure comme eux laisser le lord chancelier juger seul en Angleterre, et nos tribunaux juger chez nous en nombre compétent.

Le président d'un tribunal et les vice-présidents doivent être, en cas d'empêchement,

Mündlichkeit, etc. Observations sur l'avantage d'une procédure publique et orale, par A. Van Feuerbach. De la justice crim. en France, par M. Bérenger. (4) Chap. 127, t. 16, p. 457.

(5) Inst. jud., t. 5, p. 558 et suiv.

(6) Lettres sur la chancellerie d'Angleterre, p. 58. (7) A brief account of some of the most important proceedings in parliament, etc., p. 561.

Art

116.

Art. remplacés, pour le service de l'audience, par 116. le juge présent le plus ancien dans l'ordre des nominations.

Si c'est un juge qu'il est indispensable de remplacer, on appelle, pour compléter le nombre, soit un autre juge disponible, soit un des juges suppléants, en observant dans tous les cas, autant que faire se peut, l'ordre des nominations.

A défaut de suppléants, on appelle un avocat attaché au barreau, et à défaut d'avocats, un avoué, en suivant toujours l'ordre du tableau (1) (a).

Le but de ces dispositions est facile à saisir. On n'a pas voulu que l'absence d'un juge pût donner lieu à des arrangements de faveur, pour la composition du tribunal.

Il suit de là que le jugement doit énoncer, à la fois, l'empêchement du juge titulaire et des suppléants, et celui des avocats ou des avoués qui précèdent, dans l'ordre légal, le dernier appelé (2).

Il arriva, du temps de M. d'Aguesseau, que des juges eurent la prétention de forcer un avocat dont ils avaient besoin pour se compléter, à entendre la plaidoirie de la cause sur les bancs du barreau, sauf à lui permettre de venir jusqu'à leurs siéges, lorsqu'il serait temps d'opiner. Il fallut que l'autorité du chancelier intervînt, pour leur faire entendre raison (3).

C'est pour compléter, et non pas pour constituer un tribunal, que des avocats ou des avoués peuvent être appelés. Ainsi, un juge resté seul après des récusations, ou des empêchements, n'aurait pas la faculté de

(1) Décret du 30 mars 1808, art. 48 et 49.

(a) Un avocat stagiaire est inhabile à remplacer les juges dans leurs fonctions ; le jugement auquel il serait intervenu pourrait être annulé. (Bruxelles, 2 juin 1829. Jurispr. de Brux., 1829, 2-57. Jurisp. du XIXe siècle, 1829, 3-160.)

(2) La jurisprudence n'est pas fixée sur la nécessité de cette énonciation. V. le Journal des avoués, t. 51, p. 308, 32 et 320 *.

La cour de Liége s'est prononcée pour la nullité par trois arrêts des 12 déc. 1826, 3 avril 1827 et 3 mars 1829. (Jurispr. du XIXe siècle, 1828, 3-10; 1829, 3-118. Rec. de Liége, 10-31343.) - La cour de Bruxelles a jugé en sens contraire par

s'adjoindre deux avocats ou avoués, parce qu'ils seraient en majorité (a).

un

Cela ne s'applique point aux suppléants. Tels qu'ils sont institués par les lois et par les règlements relatifs à l'ordre judiciaire, les suppléants font partie de la composition des tribunaux de première instance (4). De même que les juges en titre, ils sont nommés par le roi, et ils reçoivent, comme eux, caractère qui les attache à l'administration de la justice; ils doivent avoir les mêmes qualités, ils prètent le même serment avant d'entrer en fonctions. S'ils ne sont pas des juges habituels, il n'est pas moins vrai qu'ils ne sont point exceptionnellement appelés, comme les avocats ou les avoués, pour compléter un tribunal.

Remarquez toutefois qu'un suppléant n'a pas le droit de prendre part à un jugement, lorsque les titulaires se trouvent au nombre requis. Son concours devient illégal, dès qu'il est inutile. Il faut en dire autant du juge attaché à l'une des chambres d'un tribunal, qui viendrait, sans nécessité, siéger et juger dans un autre. Ce bénévole empressement que rien ne pourrait justifier, rendrait sa voix suspecte, et le jugement serait nul.

Il n'y a plus rien à dire sur les juges auditeurs, ils vont être supprimés. Cette magistrature expectante était en permanence dans les tribunaux; les suppléants y montent seulement lorsqu'ils sont appelés, et c'est la nécessité qui les appelle. La différence en est grande. Quoi qu'il en soit, et généralement parlant, cette position des suppléants n'est

(5) Lettre 330 de M. d'Agnesseau, sur les matières civiles.

(a) La peine de nullité est attachée à ce principe. V. l'arrêt de la cour de Br. du 29 oct. 1830. (Jurisp. de Brux., 1850, 2-129. Jurispr. du XIXe siècle, 1831, 3-57,-Dalloz, t. 22, p. 48.)

(4) Voyez la loi du 27 ventôse an vin, celle du 20 avril 1810, et le décret du 18 août de la même année.

arrêts des 8 déc. 1826, et 2 fév. 1829. (Jurispr. de Brux., 182, 1-191; 1829, 1-53. Jurispr. du XIXe siècle, 1829, 3-66.V. aussi Dalloz, t. 22, p. 44 et 47

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guère propre à les élever au-dessus de toutes les craintes et de toutes les espérances. Mieux vaudrait peut-être les supprimer aussi, et augmenter le nombre des véritables juges (a).

Les jugements sont rendus à la pluralité des voix. Quod judicum major pars judicaverit, id jus, ratumque esto.

Cette pluralité est toujours une pluralité absolue; elle se compose de la moitié des voix, et d'une voix en sus, pour le moins.

Il importe de distinguer la pluralité des voix, de la pluralité des avis. Celle-ci n'est souvent qu'une pluralité relative, qui s'obtient en comptant les avis, sans avoir égard au nombre des votants. Elle pourrait faire prévaloir l'opinion de la minorité. Par exemple: il y a sept juges; trois sont pour un avis, deux pour un autre, et deux pour un autre encore. L'avis des trois a bien la pluralité, relativement aux avis différents qui n'ont réuni chacun que deux voix; mais si l'on faisait un jugement avec cette pluralité, il serait formé par trois voix sur quatre, c'està-dire, par moins de la moitié des juges.

On va dire que mon principe et mon hypothèse conduisent à une conséquence inaccordable. En effet, si le jugement ne peut être rendu qu'à la pluralité absolue, et si la délibération ne produit qu'une pluralité relative, ou bien encore si les voix sont égales de part et d'autre, la cause ne sera donc jamais jugée ?

Ces difficultés ont été prévues.
Plusieurs cas peuvent se présenter.

1° Deux opinions se sont formées; chacune d'elles est soutenue par le mème nombre de juges: il y a partage. Alors le tribunal appelle 3. un juge départiteur, pour faire pencher la balance de l'un ou de l'autre côté. C'est ce qu'on exprime au palais par ces mots : Vider le partage. Je dirai plus loin les formes et les précautions que la loi prescrit en pareille cir

constance.

2o Il s'est forméplus de deux opinions; aucune n'a la pluralité absolue. « La moindre doit

(a) Les juges auditeurs ont été supprimés de fait en Belgique, en 1814.

Art. 116.

se réunir à l'une des grandes,» disait l'article 86 de l'ordonnance de 1555. Telle est aussi la disposition du Code. Mais on a cru devoir ajouter que les voix seraient recueillies de nouveau, avant d'obliger les juges plus faibles en nombre à adopter l'une des opinions dominantes. L'affaire en reçoit un plus mûr examen; il peut arriver d'ailleurs que des avis 117. changent, que la minorité, ramenant à soi quelques suffrages, devienne à son tour la majorité, et fasse le jugement.

Soit un tribunal composé de cinq juges : deux admettent les conclusions du demandeur, deux les rejettent, le cinquième ne veut en adjuger qu'une portion. Il faut que ces trois avis soient réduits à deux, afin que la pluralité absolue puisse être acquise, parce que, en définitive, il faut qu'il y ait jugement. Et si une seconde collecte des voix n'y apporte aucune modification, le cinquième juge sera forcé d'abandonner sa propre opinion, et d'accorder tout, ou de n'accorder rien.

3o En suivant l'exemple pris d'un tribunal composé de cinq juges, supposez deux avis semblables, et trois autres avis qui soient isolés et divers entre eux. Ici encore, point de pluralité absolue, et mème, point de moyen d'y arriver; car ce n'est pas à une seule opinion dominante que chaque juge dissident est obligé de sacrifier son opinion particulière : un choix lui est imposé, et pour qu'il choisisse, il est nécessaire que deux opinions dominent; autrement deux voix sur cinq feraient le jugement. Ce serait juger à la mineure, suivant l'expression de Montesquieu. Il n'y aura pas d'autre moyen, pour lever la difficulté, que d'appeler un départiteur; c'est comme s'il y avait partage.

On se tromperait donc, si l'on croyait qu'il ne peut exister un partage d'opinions que dans les cas où les juges siégent en nombre pair. Les avis sont partagés toutes les fois qu'il y a une division telle, qu'il n'en est aucun, ou qu'il n'en est qu'un seul, qui compte plus de voix que les autres. Trois juges sont sur le tribunal; chacun a son opinion distincte ; ni le premier, ni le second, ni le troisième, ne sont obligés de céder. C'est une balance avec

Art. 117.

trois bassins du même poids. Quelques combinaisons que l'on puisse imaginer, tenons pour certain qu'il y aura lieu à déclarer le partage d'opinions, toutes les fois que le résultat de la délibération ne donnera pas aux voix les plus faibles en nombre un choix à faire entre les plus fortes. « Au reste, comme disait le tribunat dans ses observations sur l'art. 117 du Code, il faut se confier à la prudence des juges qui seront excités par le zèle de leurs fonctions à trouver le moyen de s'entendre. »

Les règles du droit romain, sur cette matière, ne ressemblaient point aux nôtres. Dans l'hypothèse de trois juges, dont l'un aurait condamné à quinze écus, le second à dix, et le troisième à cinq, la sentence s'arrêtait à la plus faible somme, parce que le moins étant dans le plus, les voix étaient réputées unanimes pour les cinq écus: Quia in hanc summam omnes consenserunt (1).

Quand le nombre des voix était égal des deux côtés, le défendeur gagnait son procès, à moins qu'il ne fût question de dot, de testament, de liberté. Alors on ne considérait plus les qualités des parties; c'était le parti de la liberté, du testament, ou de la dot, qui l'emportait (2).

Chez nous, c'est dans les affaires criminelles seulement que le partage d'opinions équivaut à un acquittement : In pœnalibus, humanitatis ratione (a).

Le premier devoir d'un juge est écrit dans ces mots : Si judicas cognosce; ce qui s'entend, non d'une simple notion qu'il peut avoir de l'affaire par des circonstances qui lui sont personnelles, mais d'une connaissance judiciaire acquise dans les formes que prescrit la loi. En ce qui concerne la juridiction contentieuse, il est obligé de décider secundum

(1) Si ex tribus arbitris, unus quindecim, alius decem, tertius quinque condemnent, cui sententiæ stetur? Et Julianus scribit quinque debere præstari, quia in hanc summam omnes consenserunt. L. 27, § 5, ff. de receptis, etc.

(2) Inter pares numero judices, si dissonæ sententiæ proferantur, in liberalibus quidem causis pro libertate statutum obtinet; IN ALIIS AUTEM CAU

116.

allegata et probata. Il doit ne rien savoir Art. des faits de la cause que par ce qu'il apprend à l'audience, et ne pas se donner pour témoin à lui-même.

Un jugement sera donc nul si parmi les magistrats qui prennent part à la délibération et à la prononciation, il en est qui n'avaient pas assisté à toutes les audiences de la cause (5).

Inférer de là que les mêmes juges qui assistaient à l'audience, dans une enquête, une expertise ou toute autre vérification ont été ordonnées, doivent nécessairement se retrouver sur le siége, pour entendre les discussions qui suivent l'interlocutoire, et pour rendre le jugement dernier, ce serait outrer l'application du principe, ce serait souvent exiger l'impossible. Les conclusions que reprennent les avoués, les plaidoiries qui rappellent tous les errements antérieurs, forment une instruction distincte de ce qui avait été dit ou écrit d'abord, pour fixer les questions du procès; et des juges nouveaux peuvent, en définitive, venir statuer sur ces questions, sans qu'on puisse leur reprocher de ne pas les connaitre légalement.

Les alliances qui s'étaient formées entre les gens de robe, les survivances anticipées qui faisaient siéger le fils à côté du père, avaient, presque partout, fait des tribunaux le patrimoine de quelques maisons; l'opinion d'une famille y jugeait les procès. Dès l'année 1750, les états assemblés avaient remontré, dans leurs doléances, les dangers de cette parentéle, et le chancelier de l'Hôpital avait cru y avoir mis bon ordre par l'ordonnance d'Orléans. «Ne seront reçus, disait l'article 32, en un mème parlement, chambre des comptes, ou autres cours souveraines, ni en un mème siége, le père et le fils, deux frères, l'oncle

SIS, PRO REO. L. 58, ff. de re judicatâ. Voyez aussi L. 79, ff. de jure dotium, 85 ff. de regulis juris, et 10 ff. de inofficioso testamento.

(a) En cas de dissentiment, la minorité des juges ne peut ni protester ni refuser de signer la minute des jugements. (Dalloz, t. 22, p. 25.) (3) Loi du 20 avril 1810, art. 7.

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