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Monsieur, qu'il n'y a point de sacrifices que je ne fasse, avec le secours de Dieu, pour réparer mes torts et obtenir ma réconciliation. Vous y concourrez vous-même, en rendant publique cette foible expression de mes sentimens, ce foible témoignage de mon repentir. J'aurois pu l'accompagner d'une dissertation contre la constitution civile du clergé ; mais, outre que cette piece est maintenant sans crédit aux yeux des plus simples parmi les chrétiens, vos Annales ont renfermé jusqu'ici de si fortes raisons et des preuves si sensibles contre ce nouveau chef-d'oeuvre de la philosophie, que j'ai pensé que toute discussion sur cet objet étoit maintenant inutile.

Je suis avec reconnoissance et respect,
Vatre affectionné concitoyen,

QUESTIO N.

GALLOIS.

La réponse M. que vous avez faite, no. 23 de vos Annales, à la quatrieme question, concernant le devoir des paroissiens à l'égard d'un curé légitime, mais assermenté, appuyée sur le bref du 19 mars 1792, et sur la réponse des cardinaux en 1793, peut paroître décisive et suffisante en genre d'autorité; mais cependant elle ne résout pas les difficultés de ceux qui consultent les principes en cette matiere.

1o. Un principe incontestable et qui fait partie du droit ancien, que l'église de France a maintenu et conservé plus constamment et plus fidelement qu'aucune autre partie de l'église, est qu'un pasteur titulaire, canonique

ment institué, ne peut être privé de son titre, ou de l'exercice des fonctions attachées à son titre, que par un jugement canonique.

2o. Il est constant aussi qu'il n'y a pas eu de jugement canonique qui ait destitué les curés jureurs. Je ne m'arrête pas au défaut des formes ordinaires que je sens bien ne pouvoir avoir lieu dans l'état présent des choses; mais je dis que le saint-pere, ni les évêques de France n'ont point déclaré formellement exclus du sein de l'église les intrus même, quoique leur schisme soit évident et réel, puisqu'ils se sont séparés enx-mêmes, et qu'ils ont rompu l'unité; à plus forte raison les curés assermentés ne sont-ils pas jugés, eux qui font partie de la hiérarchie, à la différence des usurpateurs et des intrus..

Le premier de ces deux points n'a pas besoin de preuve ; j'espere donner, ci-après, celles du second.

Or, dans cet état, la faute que ces curés ont commise, ne les privant point de la qualité de pasteurs, ils ne la conservent que pour l'utilité des fideles. Il s'ensuit donc nécessairement que les paroissiens peuvent et doivent faire usage de leur ministere; et que dans les cas de mariage, baptême, sépulture, eux seuls peuvent exercer ces actes de jurisdiction.

M. l'évêque de Soissons, dans une lettre du 19 mai 1796, adressée à M. Couchot, son grand vicaire, établit de la maniere la plus absolue ce même principe, et il ajoute : « Con»sultez les procédés, la doctrine et la pratique » des canonistes et jurisconsultes les plus cé» lebres de nos jours, la pratique constante des

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» tribunaux ecclésiastiques et des cours sécu»lieres, alors il ne vous restera aucun doute » que les dispositions de la bulle de Martin V, » sont reçues, sans y admettre même dans la pratique les exceptions qu'elle énoncé. Vous » serez convaincu que toute censure générale » n'a d'autre effet que de peser sur la cons»cience de celui qui est frappé, et de rendre >> criminels et illicites les actes du ministere qu'il exerce, hors le cas de nécessité, tant » qu'il est dans les liens de la censure; qu'à » l'égard de la perte de jurisdiction et de l'in

>>

validité de ces actes, la censure non précédée » d'un jugement pour son exécution, ne produit >> aucun effet extérieur qui tende à ôter par le » seul fait la jurisdiction et à les frapper de » nullité. C'est la doctrine de l'église gallicane; >> elle est constante et uniforme ».

» Pesez bien, continue -t-il, les paroles » de la résolution du pape : il interdit aux » fideles la communication avec les prêtres

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jureurs, mais il ne va pas au-delà. Pas un » mot dans ses réponses, dont on doive inférer, » qu'il prononce la destitution, la perte de ju>> risdiction des prêtres jureurs, ni la nullité, » ni l'invalidité des actes illicites qu'ils se » permettroient de faire. Par ces sages tem» péramens, le pape concilie à-la-fois et ce » qu'exigeoient les besoins des fideles, et les égards dûs à la discipline de l'église et à l'intégrité des regles

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M. de Soissons reconnoît donc qu'en 1796, les curés simplement jureurs ne sont ni destitués, ni interdits, ni suspens. Les actes de leur ministere sont illicites pour eux, mais valides à l'égard

de leurs paroissiens. Il reconnoît que le pape a voulu, par cette conduite sage, concilier Pintégrité des regles et les besoins des fideles. Ces besoins sont impérieux. Il faut que la brebis qui a encore un pasteur, puisse user de son ministere, en quelque état que soit la conscience du pasteur. La jurisdiction seroit anéantie de fait, s'il étoit défendu aux fideles de la reconnoître.

Le bref du 13 avril 1791, n'est qu'une lettre monitoriale, ainsi que la qualifient les évêques réfugiés. Celui du 19 mars 1792 n'est point un jugement canonique. Sa défense est un avis paternel, applicable selon les circonstances. Car autre est la conduite d'un curé jureur à la vérité, mais qui n'a eu aucune communication avec l'évêque intrus, qui n'a publié aucun mandement ou autre acte, qui n'a jamais mis ses paroissiens en danger de communiquer avec l'usurpateur; autre, celle d'un curé lié avec les schismatiques; autre, celle d'un curé qui a tenu la conduite opposée. Cette différence en exige nécessairement une dans la conduite. des fideles; et s'ils doivent user de grandes précautions à l'égard d'un curé lié avec les schismatiques, ils sont exempts de danger avec celui qui ne les reconnoît pas, quoiqu'il ait fait le serment par foiblesse ou par quelqu'autre motif en apparence plus excusable.

et que

L'auteur de l'Avis aux catholiques en réponse à cinq questions, qui a paru en 1791, l'on croit être d'un supérieur de séminaire, dit page 25: « Quelque grande que la faute des curés assermentés, ils n'en sont » pas moins incontestablement pasteurs légi

soit

» times. S'ils exercent leurs pouvoirs en état » de péché, c'est un grand malheur pour eux, » sans doute, mais ils ne les exercent pas >> moins validement..... Si mon pasteur commet » un sacrilege chaque fois qu'il administre un » sacrement en mauvais état, ce n'est pas ma » faute. En le lui demandant, lorsque je ne puis recourir à d'autre, je ne fais qu'user » de mon droit ».

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Comme la conduite des premiers pasteurs doit toujours être dirigée vers le plus grand bien des fideles, et qu'il est essentiel, selon M. de Soissons, de concilier cette utilité avec l'inté grité des regles de l'église; je crois que les principes que je viens de vous exposer, et les témoignages dont ils sont appuyés, méritent bien d'être pesés dans les décisions qui interviennent sur cette matiere; et qu'il seroit nécessaire qu'ils fussent présentés aux fideles d'une maniere si claire et si précise, qu'il ne pût leur rester aucun embarras pour la conduite qu'ils ont à tenir.

Réponse.

de

Nous convenons avec vous, monsieur, qu'il n'est intervenu aucun jugement de l'église qui dépouille les pasteurs simplement jureurs leur titre; que les censures dont ils sont frappés ne les privent point de la jurisdiction; en un mot, que tous les actes qu'ils font en qualité de pasteurs sont valides. Nous convenons encore avec vous, qu'à ne considérer les que regles générales et la pratique constamment suivie dans l'église depuis la bulle ad vitanda scandala, il seroit permis aux fideles d'avoir

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