Page images
PDF
EPUB

En effet, quelles sont les bases du traité de Paris?

1o La déclaration des alliés du 31 mars 1814, qui annonce : que si les conditions de la paix devoient renfermer de plus fortes garanties lorsqu'il s'agissoit d'enchatner l'ambition de Buonaparte, elles devoient être plus favorables lorsque, par un retour vers un gouvernement sage, la France elle-même offrira l'assurance de ce repos; QUE LES SOUVERAINS ALLIES NE TRaiteront pluS AVEC NAPOLÉON BUONAPARTE NI AVEC AUCUN DE SA FAMILLE; qu'ils respectent l'intégrité de l'ancienne France, telle qu'elle a existé sous ses rois légitimes;

2° L'acte de déchéance du 3 avril 1814, prononcé par le sénat de Buonaparte ; acte qui rappelle une partie des crimes par lesquels l'usurpateur avoit attenté à la liberté de la France et de l'Europe;

3° L'acte d'abdication du 11 avril de la même année, dans lequel Buonaparte lui-même reconnoît, qu'étant LE SEUL obstacle au rétablissement de la paix en Europe, il renonce pour lui et ses héritiers au trône de France et d'Italie;

4o La convention du même jour, qui répète

en des termes encore plus formels la renonciation exprimée par l'acte d'abdication;

5o Les conventions du 23 avril, où les puissances alliées déclarent qu'elles veulent donner la paix à la France, parce que la FRANCE EST REVENUE à un gouvernement dont les principes offrent les garanties nécessaires pour le maintien de la paix.

Ainsi, sans toutes ces conditions préalables, établies dans les actes ci-dessus mentionnés, le traité de Paris n'eût point été conclu; et toutes ces conditions se réduisent à une seule: exclure formellement Buonaparte et les siens du trône de France, tant par l'action d'une force étrangère, que par l'acquiescement de sa propre volonté.

Cela posé, Buonaparte violant des engagemens si sacrés, reprenant le titre d'Empereur des François, rompt, de fait, la paix que le traité de Paris avoit établie, et est condamné le par traité même.

Pour nous résumer : le succès momentané de Buonaparte n'a pu changer la déclaration du 13 mars dernier, comme le prouve la seconde déclaration du 12 mai.

La base, la condition sine quá non du traité

de Paris étoient l'abolition du pouvoir de Buonaparte.

Or Buonaparte venant rétablir ce pouvoir, renverse le fondement du traité; il se replace volontairement et replace la France qui le souffre, dans la situation politique antérieure au 31 mars 1814 donc c'est Buonaparte qui déclare la guerre à l'Europe, et non l'Europe à la France.

:

Ajoutons et répétons encore, que le traité de Paris, quoiqu'en dise Buonaparte, étoit nécessaire et est très-honorable à la France : c'est ce que nous croyons avoir démontré. Plus on examinera les transactions politiques qui ont préparé et suivi la restauration, plus on admirera les princes et le grand ministre qui ont si parfaitement jugé les intérêts pressans de la patrie, si bien connu les choses et les hommes. Le 31 mars 1814, des armées innombrables occupoient la France; quatre mois après, toutes les armées ennemies avoient repassé nos frontières, sans avoir emporté un écu, tiré un coup de fusil, versé une goutte de sang, depuis la rentrée des Bourbons à Paris. La France se trouve agrandie sur quelques-unes de ses frontières; on partage avec elle les vaisseaux et les magasins d'Anvers; on lui rend trois cent mille

TOME V.

17

de ses enfans exposés à périr dans les prisons des alliés, si la guerre se fût prolongée; après vingt-cinq années de combats, le bruit des armes cesse subitement d'un bout de l'Europe à l'autre. Quel pouvoir a opéré ces merveilles? Le ministre d'un gouvernement à peine établi, deux princes revenus de la terre étrangère, sans forces, sans suite et sans armes, deux simples traités signés Charles et Louis!

N° L.

Proclamation de Joachim Murat, adressée aux habitans de Naples, le 17 mai, veille de sa fuite.

HABITANS de Naples, il s'est répandu parmi vous de faux bruits, qui par eux-mêmes sont de nature à attirer sur vous des maux que j'ai le dessein de vous épargner par une déclaration franche, digne de vous et de moi.

On vous fait craindre que la guerre ne pénètre jusque dans l'intérieur de vos murs, et Fon cherche à vous inquiéter par le tableau alarmant des désastres qu'elle peut causer dans une capitale aussi vaste et aussi peuplée. Tranquillisez-vous ; je ne permettrai pas que vous soyez exposés à de tels désordres. L'ennemi est en

core fort éloigné, et l'armée napolitaine est assez forte pour l'éloigner encore davantage.

Je me flatte qu'il sera bientôt forcé d'évacuer votre territoire. Cependant, si la fortune trahissoit mon courage et celui de mon armée, mon attachement pour vous ne me permettroit jamais de continuer la guerre jusqu'à la proximité de la capitale. Si le destin doit m'accabler, je veux qu'il m'accable seul.

Les soins de vos sages magistrats, votre zèle actif, la vigilance infatigable de la fidèle et brave garde de sûreté vous mettent à l'abri de tout désordre dans l'intérieur. De mon côté, il n'y a point de sacrifice que je ne fusse disposé à faire pour vous délivrer de tout danger extérieur, pour vous conserver cette tranquillité qui a toujours été un des avantages dont vous avez joui sous mon gouvernement. J'ose espérer que le ciel m'a choisi pour y ajouter encore d'autres bienfaits.

Le langage que je viens de vous tenir est analogue aux inquiétudes auxquelles plusieurs d'entre vous sont en proie. Si je parlois d'après, mes sentimens, je me bornerois à vous dire que l'ennemi sera repoussé, et que j'acheverai au sein de la paix l'exécution déjà commencée de

« PreviousContinue »