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D'accepter ou de répudier cette donation pour le tout. Si l'on omet l'état des dettes et charges qui sert à distinguer la donation des biens présents et celle des biens à venir, ces donations ne sont pas nulles, mais elles se confondent, et il n'existe plus qu'une donation de biens à venir entièrement soumise aux règles de ces donations.

Existants au jour du décès. Sans pouvoir demander la nullité des aliénations que le donateur aurait faites des biens existants lors de la donation, puisqu'il n'y a plus qu'une donation de biens à venir, et que le donateur, par conséquent, pouvait disposer A titre onéreux (art. 1083).

1086. La donation par contrat de mariage, en faveur des époux et des enfants à naitre de leur mariage, pourra encore être faite, à condition de payer indistinctement toutes les dettes et charges de la succession du donateur, ou sous d'autres conditions dont l'exécution dependrait de sa volonté, par quelque personne que la donation soit faite; le donataire sera tenu d'accomplir ces conditions, s'il n'aime mieux renoncer à la donation; et en cas que le donateur, par contrat de mariage, se soit réservé la liberté de disposer d'un effet compris dans la donation de ses biens présents, ou d'une somme fixe à prendre sur ces mêmes biens, l'effet ou la somme, s'il meurt sans en avoir disposé, seront censés compris dans la donation, et appartiendront au donataire ou à ses hiri

tiers.

Toutes les delles et charges de la succession. Cette condition peut être insérée dans une donation de biens présents, comme dans une donation de biens à venir. Ainsi je puis donner le quart, la moitié de mes biens à venir, et cependant assujettir le donataire à payer toutes les dettes de ma succession; ainsi, je puis lui donner tous mes biens présents, et exiger qu'il paye toutes les dettes que je laisserai à mon décès. La donation de biens presents se trouverait modifiée par une pareille condition; aussi perdrait-elle ses principaux caractères. Le donataire ne serait pas forcé de l'accepter irrévocablement; et s'il mourait avant le donateur, la donation serait caduque (art. 1089).

Dont l'exécution dépendrait de sa volonté. Comme nous l'avons dejà remarqué, on n'applique pas aux donations en faveur de mariage la règle donner et retenir ne vaul. Le donateur peut disposer sous des conditions potestatives de sa part, comme celle qu'on payera les dettes qu'il laissera, car il dépend de lui de les augmenter ou de les restreindre. C'est pour rendre les libéralités en faveur de mariage inoins onéreuses aux donateurs, et engager ces derniers à donner, qu'on a fait cette exception importante aux règles des donations.

Renoncer à la donation. Il est évident que la denation est faite sous des conditions dépendantes entièrement du donateur, il faut donner au donataire le droit de la refuser, car le donatenr peut l'avoir rendue onéreuse.

Au donataire ou à ses héritiers. La différence qui existe entre cette disposition et celle de l'article 945 provient de ce que les donations entre vifs étant

nuiles lorsqu'elles sont faites sous une condition dépendante de la volonté du donateur (art. 944), si celui-ci s'est réservé la faculté de disposer d'un objet, la donation est nulle à l'égard de cet objet, car il dépendrait du donateur de le donner au donataire ou de l'en priver. Mais dans les donations par contrat de mariage, de pareilles conditions sont valables, elles doivent donc avoir leur effet; si celui qui s'est réservé la faculté de disposer de certains objets ne dispose pas, ils passent au donataire.

[HOLLANDE. Cette disposition a été remplacée par l'article 226 du nouveau Code civil, qui statue tout simplement que pareilles donations peuvent être faites sous conditions dont l'exécution dépend de la volonté du donateur; et l'article suivant (227) ajoute que toutes donations de biens présents et déterminés sont irrévocables, excepté dans le cas de non-exécution des-conditions sous lesquelles elles ont été faites. Les donations de tout où partie d'une succession sont également révocables pour non-exécution des conditions (art. 228, § 2).]

1087. Les donations faites par contrat de mariage ne pourront être attaquées, ni déclarées nulles, sous prétexte de défaut d'acceptation.

De défaut d'acceptation. C'est-à-dire que la loi n'exige pas ici, comme dans les donations ordinaires, l'acceptation en termes exprès (art. 932). L'acceptation résultera suffisamment de la présence du donataire à l'acte et de sa signature. Cette disposition a encore été dictée par la faveur due au mariage.

[HOLLANDE. Art. 232 du nouveau Code civil.]

1088. Toute donation faite en faveur du mariage sera caduque, si le mariage ne s'ensuit pas.

=Toute donation. Quelle que soit la nature de la donation, qu'elle comprenne des biens présents ou des biens à venir, puisqu'elle n'était faite qu'en faveur du mariage, si ce mariage n'a pas lieu, elle doit devenir nulle: cessante causá, cessat effectus. Par le même motif, il faut décider que si le mariage est annulé après sa célébration, la donation l'est aussi. [HOLLANDE. Cette disposition résulte implicitement de l'art. 231 du nouveau Code, cité plus haut.]

1089. Les donations faites à l'un des époux, dans les termes des articles 1082, 1084 et 1086 ci-dessus, deviendront caduques, si le donateur survit à l'époux donalaire et à sa postérité.

Des articles 1082, 1084 et 1086. Cet article 1089 ne comprend pas les donations de biens présents faites dans les termes de l'article 1081. En effet, ces donations, comme nous l'avons dit, dépouillent le donateur actuellement et irrévocablement. Mais si la donation est faite dans les termes de l'article 1086, c'est-à-dire si elle est modifiée par une condition dépendante de la volonté du donateur, ce n'est qu'à la mort de ce dernier que les droits du donataire sont ouverts; et si le donataire meurt avant le donateur, il n'a jamais eu de droits sur les biens de la donation.

A sa postérité. La loi suppose que l'intention du

donateur, si le donataire ne peut recueillir les biens, a été de les donner à ses enfants; ce n'est donc qu'à défaut de ceux-ci que la donation devient caduque. Cependant il ne faut pas conclure de ces expressions générales, sa postérité, que tous les enfants du donataire, de quelque mariage qu'ils soient issus, sont appelés à recueillir les biens à défaut de leur père. L'article 1082 indique par ces expressions, du mariage, que ce droit n'est accordé qu'aux enfants issus du mariage en faveur duquel la libéralité a été faite.

[HOLLANDE. Art. 233, § 2 du nouveau Code civil.]

1090. Toutes donations faites aux époux par leur contrat de mariage seront, lors de l'ouverture de la succession du donateur, réductibles à la portion dont la loi lui permettait de disposer.

Réductibles. Quelle que soit la faveur due au mariage, elle ne devait pas l'emporter sur les motifs puissants qui réclamaient une quotité toujours réservée pour les ascendants ou descendants du défunt. - Il faut observer que les donations en faveur de mariage sont toujours irrévocables de la part du donateur; car, bien qu'il puisse les modifier à volonté dans les cas des articles 1082, 1084, 1086, il ne pourrait jamais les détruire directement par un acte contraire les seules causes de révocation sont l'inexécution des conditions (art. 955), et la survenance d'enfants (art. 960); l'ingratitude n'en serait pas une nous en avons expliqué la raison, art. 959.

[HOLLANDE. Voyez l'art. 231 du nouveau Code civil cité sous l'article 1081 ci-dessus.]

CHAPITRE IX.

Des dispositions entre époux, soit par contrat de mariage, soit pendant le mariage.

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Parmi les donations que les époux peuvent se faire l'un à l'autre, le Code distingue celles qui sont faites avant le mariage, et celles qui sont faites pendant le mariage. Les dispositions qui les régissent ne sont pas toutes les mêmes dans ces deux cas.

1091. Les époux pourront, par contrat de mariage, se faire réciproquement, ou l'un des deux à l'autre, telle donation qu'ils jugeront à propos, sous les modifications ci-après exprimées.

- Telle donation. Ces donations pourront être de biens présents, de biens à venir, où de biens présents et à venir. Le Code s'explique successivement sur chacune d'elles.

[HOLLANDE. Cette disposition a été modifiée dans sa dernière partie par l'article 225 du nouveau Code civil, qui se termine de cette manière: «Sauf la réduction de ces donations, pour autant qu'elles lèseraient les droits de ceux auxquels est due une portion légale.]

1092. Toute donation entre-vifs de biens présents, faite entre époux par contrat de mariage, ne sera point censée faite sous la condition de survie du donataire, si cette con

ROGRON.-C. CIV.

dition n'est formellement exprimée; et elle sera soumise à toutes les règles et formes ci-dessus prescrites pour ces sortes de donations.

Sous la condition de survie. On avait prétendu autrefois que toute donation, même celle de biens presents, faite par contrat de mariage, par un époux à son conjoint, était soumise à la condition de survie; c'est-à-dire qu'elle serait caduque si l'époux donataire mourait avant le donateur. C'est pour enlever tous les doutes à cet égard que le Code s'est expliqué formellement. Ainsi, comme les autres donations de biens présents (art. 1081), celle que se font les époux par contrat de mariage est parfaite, la propriété est transmise au conjoint donataire, et s'il vient à mourir avant l'autre, ses héritiers, quels qu'ils soient, et bien qu'on ait pu croire que l'époux donateur n'eût pas intention de les préférer à luimême, recueillent dans sa succession les biens qui lui ont été donnés, à moins que le donateur n'ait slipulé formellement le droit de retour (art. 951). On a pensé qu'ayant la faculté de s'exprimer positivement sur ce point, s'il ne l'a pas fait, c'est qu'il a entendu faire une donation ordinaire.

[HOLLANDE. Art. 229 du nouveau Code civil.]

1093. La donation de biens à venir, ou

de biens présents et à venir, faite entre époux par contrat de mariage, soit simple, soit réciproque, sera soumise aux règles établies par le chapitre précédent, à l'égard des donations pareilles qui leur seront faites par un tiers; sauf qu'elle ne sera point transmissible aux enfants issus du mariage, en cas de décès de l'époux donataire avant l'époux donateur.

=

Sauf qu'elle ne sera point transmissible. Ainsi les enfants ne sont point appelés à recueillir cette donation à défaut de leur mère ou de leur père prédécédés, comme cela a lieu pour les donations de biens à venir faites par des étrangers (art. 1082); la différence provient de ce que les biens retournant au père ou à la mère qui survit, les enfants les retrouveront dans leur succession. D'ailleurs, il serait peu convenable d'enrichir les enfants en dépouillant d'avance les pères; car ce serait diminuer l'autorité de ces derniers, et leur enlever un moyen puissant de récompense ou de punition.

[HOLLANDE. Art. 250 du nouveau Code civil.]

1094. L'époux pourra, soit par contrat de mariage, soit pendant le mariage, pour le cas où il ne laisserait point d'enfants ni descendants, disposer en faveur de l'autre époux, en propriété, de tout ce dont il pourrait disposer en faveur d'un étranger, et, en outre, de l'usufruit de la totalité de la portion dont la loi prohibe la disposition au préjudice des héritiers. Et pour le cas où l'époux donateur laisserait des enfants ou descendants, il pourra donner à l'autre époux, ou un quart en propriété et un autre

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quart en usufruit, ou la moitié de tous ses biens en usufruit seulement.

- Disposer en faveur de l'autre epoux. Cet article modifie à l'égard des époux la quotité disponible fixée par les articles 913, 915; de telle sorte qu'un époux peut recevoir quelquefois moins, quelquefois plus qu'un étranger. Si, par exemple, un homme a un enfant et une fortune de 24,000 fr., il pourrait donner à un étranger la moitié (art. 913), 12,000 fr.; il ne pourra donner à son épouse que 6,000 fr. en propriété, 6,000 fr. en usufruit. Si, au contraire, il a trois enfants, il ne pourrait donner à un étranger que le quart (art. 913), 6,000 francs; il pourra toujours donner à son conjoint 6,000 fr. en propriété, 6,000 fr. en usufruit. On ne peut expliquer ces différences que par l'utilité de fixer positivement, et sans variation, la quotité que les époux peuvent se donner.[QUESTION. L'époux qui a disposé par contrat de mariage, en faveur de son conjoint, de la moitié de ses biens en usufruit, peut-il, dans le cas où il y a trois enfants ou plus, donner encore la nue propriété du quart de ces biens à l'un de ses enfants, sans excéder la quotité disponible? Cette question a été pendant longtemps controversée. Mais la jurisprudence est maintenant fixée dans le sens négatif. Outre l'arrêt que nous allons rapporter, voyez deux arrêts antérieurs de la cour de cassation de France des 7 janvier 1824 et 21 mars 1857. (Voyez Conf. Duranton, t. 9, n° 796; Proudhon, Usufruit, t. 1, no 360; Contr., Toullier, t. 5, n° 870; Delvincourt, t. 2, p. 221, et Grenier qui, après avoir, dans sa première édition du Traité des dona tions, t. 3, no 584, embrassé l'opinion consacrée par notre arrêt, s'est rétracté dans les éditions suivantes. Voyez 2° édition, t. 2, no 384; 3° édition, t. 2, p. 335.) Arrêt : « Vu les articles 915 et 1094 du Code civil; attendu que l'art. 913, au chapitre de la portion disponible et de la réduction, fixe les limites des libéralités faites par celui qui, à son décès, laisse un ou plusieurs enfants légitimes, et déclare que ces limites ne pourront être dépassées; que, lors de ce décès, la disposition générale et prohibitive de cet article devient la règle des droits des enfants et de l'action en réduction qui leur est ouverte par les articles 920 et 921 du même Code, soit contre les étrangers, soit contre l'un d'entre eux; attendu que la seule exception à cette règle réside dans l'art. 1094, au chapitre des dispositions entre époux; que cette disposition spéciale, introduite en faveur de l'époux, ne peut devenir, pour aucun autre que lui, la règle de la réserve légale des enfants, et par suite, de leur action en réduction; qu'en effet le principe de la loi est que la quotité disponible et, par suite, la réserve doivent être fixées, après le décès du disposant, eu égard à la qualité des héritiers qu'il laisse, ainsi que s'exprime formellement l'article 922; que l'époux n'est pas héritier de son conjoint décédé laissant des enfants, et ne peut réclamer, dans la succession, que les dons et legs qui auraient été faits à son profit; attendu que si les dons et legs peuvent dépasser, en certain cas, la quotité disponible ordinaire, la nature même de ces extensions, aussi bien que la qualité même de celui au profit de qui elles sont autorisées par l'art. 1094, démontrent que c'est là un privilége personnel, limité à l'époux, et qui, par suite, peut profiter qu'à lui seul, et ne doit jamais réagir sur les enfants pour la fixation de leur réserve, soit entre eux, soit à l'égard des étrangers; attendu, dans l'espèce, que Goyne père est décédé le 21 mai 1821, Jaissant trois enfants légitimes; que la donation par

ne

lui faite au profit de sa femme, par le contrat do mariage du 7 frimaire an vIII, était de la moitié en usufruit de tous les biens qu'il laisserait au jour de son décès; que l'arrêt attaqué ne déclare pas qu'à raison de circonstances particulières, et par exception à la base généralement admise à cet égard, la donation dont il s'agit ne fût pas, au jour du décès du sieur Goyne père, équivalente au quart en-pleine propriété qui formait la portion disponible de sa succession, eu égard à la qualité des héritiers qu'il laissait; que, cette donation prélevée, il ne restait donc plus dans ladite succession que la réserve légale des trois enfants; que néanmoins l'arrêt attaqué a ordonné, outre ce prélèvement, celui d'un quart en nue propriété au profit de l'un des trois enfants, auquel ce quart avait été légué par préciput et hors part par Goyne père, suivant son testament du 13 mars 1821; en quoi ledit arrêt a porté atteinte à la réserve légale des enfants, et commis une fausse application de l'art. 1094 du Code civil et une violation formelle de l'article 915 du même Code; casse.» (Arrèt de la cour de cassation de France du 24 juin 1839. Gazelle des tribunaux du 3 août 1839.)]

Lorsque l'époux n'a que des ascendants pour héritiers à réserve, il peut toujours donner à son conjoint plus qu'à un étranger, car il peut lui donner la quotité disponible, et, en outre, l'usufruit de la réserve des ascendants. On observe à ce sujet que la jouissance des ascendants étant suspendue jusqu'à la mort de leur gendre ou de leur belle-fille, toujours plus jeunes qu'eux, ils n'auront d'autre moyen pour retirer quelque profit de leur réserve que d'en vendre la nue propriété. · Si le testateur a disposé

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en faveur d'un étranger de la quotité disponible, il pourra encore donner à son épouse l'usufruit de la quotité réservée aux ascendants; car l'article 1094 ne fait aucune distinction entre le cas où la portion disponible serait donnée à l'épouse ou à toute autre personne; sa disposition est au contraire générale et absolue, et les magistrats ne peuvent se dispenser de l'appliquer dans tous les cas. » (Arrêt de la cour de Lyon du 29 janvier 1824, et de la cour de cassation du 3 janvier 1826, ch. des req. Dall., ann. 1826, I, 99.)

La moitié de tous ses biens en usufruit. On pourrait croire que cette disposition est inutile, celui qui peut donner le quart en propriété, et le quart en usufruit, pouvant à plus forte raison donner la moitié en usufruit seulement : c'est que le Code a voulu prévenir les contestations qui auraient pu s'élever, par exemple, si l'on avait prétendu que le don des deux tiers en usufruit n'excédait pas, à raison de l'âge du donataire, celui d'un quart en propriété et un quart en usufruit. Toutes les fois que la quotité disponible a été dépassée, la donation n'est pas nulle, mais elle doit être réduite. Il est clair qu'un époux ayant un enfant, par exemple, ne pourrait pas, après avoir donné la totalité de la quotité disponible à un étranger, donner en outre valablement à son conjoint la quotité fixée ici par la loi, car l'enfant se trouverait ainsi réduit à presque rien; mais lorsque les dispositions faites en faveur d'un étranger concourent avec celles faites au conjoint, il est très-difficile de fixer la quotité disponible. Comme cette quotité est tantôt plus considérable en faveur des étrangers et tantôt plus considérable en faveur du conjoint, selon le nombre des enfants, ainsi que nous l'avons déjà remarqué, on est généralement d'accord qu'il faut dans ce cas s'attacher à la plus forte des deux quotités, et réduire les dons qui ont été faits d'après la portion disponible que la loi déter

mine pour l'étranger et pour le conjoint. Ainsi supposez un enfant, la quotité disponible en faveur d'un étranger est de la moitié des biens, celle en faveur du conjoint d'un quart en propriété et d'un quart en usufruit; c'est la quotité fixée pour l'étranger qui servira de base pour opérer les réductions; s'il y avait trois enfants, on prendrait au contraire pour base la quotité disponible fixée en faveur du conjoint.

[HOLLANDE. Cette disposition et toutes celles qui suivent ont été retranchées de ce chapitre.]

1095. Le mineur ne pourra, par contrat de mariage, donner à l'autre époux, soit par donation simple, soit par donation réciproque, qu'avec le consentement et l'assistance de ceux dont le consentement est requis pour la validité de son mariage; et, avec ce consentement, il pourra donner tout ce que la loi permet à l'époux majeur de donner à l'autre conjoint.

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= Le mineur. Même de quinze ans révolus, car les femmes peuvent contracter mariage à cet âge (art. 144). Le législateur, par les donations qu'il autorise ici, fait une exception à l'article 904, en faveur du mariage; mais le mineur une fois marié ne pourrait plus faire de donation à son conjoint, que lorsqu'il serait parvenu à sa majorité.

1096.Toutes donations faites entre époux pendant le mariage, quoique qualifiées entrevifs, seront toujours révocables.-La révocation pourra être faite par la femme, sans y être autorisée par le mari ni par justice. Ces donations ne seront point révoquées par la survenance d'enfants.

=

Toujours révocables. On a attribué à ces donations ce caractère de révocabilité, parce qu'elles pourraient avoir été surprises à l'époux donateur par la séduction, ou arrachées par la crainte qu'un refus n'amenât des dissensions dans sa famille. Le Code n'impose aucune formalité particulière pour la révocation; d'où l'on peut conclure qu'elle peut se faire par testament ou par acte sous seing privé, aussi bien que par acte authentique.

Par la survenance d'enfants. Les donations faites par des époux l'un à l'autre ne sont jamais révoquées par survenance d'enfants; nous en avons indiqué les motifs, art. 960. Mais lorsqu'elles sont faites pendant le mariage, il existe encore une autre raison, c'est que, la donation étant toujours révocable au gré du testateur, s'il la laisse subsister malgré la survenance d'un enfant, il manifeste l'intention de persévérer dans sa volonté.

1098. L'homme ou la femme qui, ayant des enfants d'un autre lit, contractera un second ou subséquent mariage, ne pourra donner à son nouvel époux qu'une part d'enfant légitime le moins prenant, et sans que, dans dans aucun cas, ces donations puissent excéder le quart des biens.

= Ne pourra donner à son nouvel époux. La quotité disponible est ici diminuée dans l'intérêt des enfants issus d'un premier mariage; on a craint que le père ou la mère ne fussent trop facilement entralnés, en convolant à de secondes noces, à gratifier leur nouvel époux au détriment de leurs enfants, et l'on a diminué à cet égard leur faculté de disposer: Lex autem prohibet quod facilius fieri pulal.

Le moins prenant. Si donc un des enfants a été avantagé, et que sa part soit plus grande que celle de ses frères, ce n'est pas sur cette part qu'on calculera la quotité disponible, mais sur la portion de l'enfant qui a le moins. On observera que l'époux qui, contractant un second mariage, aurait épuisé en faveur de son conjoint la quotité fixée par cet article, ne pourrait plus disposer de rien en faveur d'un nouvel époux, s'il convolait à de troisièmes noces. [HOLLANDE. Art. 256 et 257 du nouveau Code civil.]

1099. Les époux ne pourront se donner indirectement au delà de ce qui leur est permis par les dispositions ci-dessus. donation, ou déguisée, ou faite à personnes interposées, sera nulle.

- Toute

onéreux, comme d'une vente, d'un échange, etc. Déguisée. Sous la forme d'un contrat à titre Ainsi on pourrait demander la nullité de tous les contrats qui présenteraient un avantage indirect, excédant la quotité disponible, et la jurisprudence a toujours été sévère à cet égard. Mais si les époux n'avaient point d'enfants, ils pourraient se faire des avantages sous la forme de donations déguisées. (Arrêt de la cour de cassation du 1er avril 1819. Dall., ann. 1819, I, 426.) QUESTION. Les donations déguisées, défendues par notre article, sontelles seulement réductibles? Elles sont nulles pour le tout, comme le juge la cour suprême par l'arrêt suivant: «Attendu qu'aux termes de la disposition finale de l'article 1099, toute donation faite par un époux ayant des enfants d'un premier lit, à son nouvel époux, et qui excède la quotité prescrite par l'article 1098, n'est pas seulement réductible, mais est frappée d'une nullité absolue, lorsque cette donation est déguisée ou faite à personnes interposées, rejette, etc. (Arrêt du 30 novembre 1851, ch. civ. Sirey, t. 52, 1, 134, et du 11 nov. 1834, ch. civ.

1097. Les époux ne pourront, pendant Sirey, t. 54, 1, 769.)

le mariage, se faire, ni par acte entre-vifs, ni par testament, aucune donation mutuelle et réciproque par un seul et même acte.

= Par un seul et même acle. Parce que, toutes

ces donations étant révocables, il a fallu prévenir l'inconvénient que nous avons signalé article 968, et qui existerait si on les faisait dans un seul et même acte.

[HOLLANDE. Art. 238 du nouveau Code civil.]

1100.Seront réputées faites à personnes interposées, les donations de l'un des époux, aux enfants ou à l'un des enfants de l'autre époux issus d'un autre mariage, et celles faites par le donateur aux parents dont l'autre époux sera héritier présomptif au jour de la

donation, encore que ce dernier n'ait point survécu à son parent donataire.

=

- Issus d'un autre mariage. Et non les donations faites à ses propres enfants, car on doit les supposer plutôt dictées par l'amour paternel.

Héritier présomptif. On s'est attaché à cette qualité parce que l'époux est supposé avoir donné, dans l'espérance que son conjoint recueillerait les objets donnés, en venant à la succession des donataires. Ces présomptions légales n'empêchent pas que l'on ne puisse chercher à prouver contre d'autres personnes que celles désignées par le Code, qu'elles ont été interposées; mais c'est un fait qui n'est plus légalement présumé, et dont il faudrait fournir la preuve certaine. (Arrêt de la cour de cassation du 27 mars 1816. Dall., ann. 1816, I, 274.)

[HOLLANDE. Art. 259 du nouveau Code civil.]

TITRE III.

DES CONTRATS OU DES OBLIGATIONS CONVENTIONNELLES EN GÉNÉRAL.

Convention, contrat, obligation, ne sont pas des termes synonymes, quoique, dans l'usage, on les emploie indifféremment les uns pour les autres.

Le mot convention ou pacte est un terme général qui signifie toute espèce d'accord de deux ou plusieurs personnes sur une même chose, soit avec intention, soit sans intention de s'obliger: Pactio cst duorum pluriumve in idem placitum consensus. -Le contrat est une espèce de convention faite avec intention de s'obliger d'une manière parfaite, animo contrahendæ obligationis. Une convention peut ne pas être obligatoire, le contrat l'est toujours: je conviens d'aller visiter telle personne avec vous, c'est une convention mais non un contrat, car vous ne pouvez me contraindre à exécuter ma promesse, je ne suis pas lié légalement envers vous; je m'oblige à vous donner 10,000 francs, voilà un contrat, car je suis légalement obligé, vous pouvez exiger l'exécution de ma promesse. Comme il n'y a pas de contrat sans un accord entre deux ou plusieurs personnes, un contrat est toujours une convention; mais une convention n'est pas toujours un contrat, puisqu'elle peut ne pas être obligatoire : le Code, qui ne trace que des règles obligatoires pour tous, ne s'occupe évidemment que de cette espèce de convention qu'on appelle contrat. Il faut d'ailleurs distinguer le contrat de la pollicitation, qui est la promesse non encore acceptée; solius offerentis promissum: elle ne produit aucune obligation, car notre seule volonté ne peut nous lier envers quelqu'un. · L'obligation est le lien qui résulte du contrat, et au moyen duquel nous sommes astreints à l'exécuter Vinculum juris quo necessitate adstringimur alicujus rei solvenda.

Mais l'obligation qu'on nomme encore engagement, vinculum juris, peat provenir aussi d'une autre cause que le contrat; elle peut résulter, sans qu'il y ait aucune convention, de la loi, ou d'un fait personnel à celui qui se trouve obligé. De la loi: par exemple, l'obligation d'être tuteur; d'an fait personnel: par exemple, l'obligation de réparer le dommage que nous avons causé par notre faute on par notre délit. Dans le titre actuel, le législateur s'occupe des obligations qui résultent des conventions, et qu'il nomme obligations conventionnelles ou contrais : dans le titre, il s'occupera des obli

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gations sans convention, qui résultent de la loi ou d'un fait personnel. Les faits personnels d'où découlent ces sortes d'obligations se nomment quasicontrats, délits ou quasi-délits (art. 1370). Les obligations se divisent encore en parfaites et im · parfaites les premières sont celles dont on peut exiger l'accomplissement par les voies de droit; ce sont toutes celles qui résultent des contrats et des quasi-contrats, ou des délits; les secondes sont celles qui n'enchaînent que la conscience : par exemple, l'obligation de faire l'aumône, la recon-naissance d'un service rendu. Il est mème de ces sortes d'obligations qui ne lient pas la conscience : par exemple, la promesse faite par un père à son fils de lui donner une somme pour faire un voyage de récréation. Enfin les obligations se divisent en civiles et naturelles les premières sont celles qui donnent une action pour en exiger l'exécution; les secondes sont celles qui ne donnent pas d'action, mais qui different de l'obligation imparfaite en ce qu'elles produisent quelques effets civils. Par exemple, si j'ai sauvé la vie à quelqu'un, l'obligation que lui impose la reconnaissance est imparfaite; aussi n'ai-je pas d'action pour le forcer à me récompenser, et s'il me prête une somme d'argent, je ne pourrai pas la regarder comme le prix du service que je lui ai rendu, et me dispenser de la rendre. Si j'ai gagné au jeu une somme quelconque à un individu, l'obligation qu'il a de me la payer est naturelle, je n'ai pas non plus d'action pour le forcer à s'en acquitter; mais s'il le fait, je ne serai pas obligé de lui rendre ce qu'il m'aura payé (article 1967).

CHAPITRE PREMIER.

Dispositions préliminaires.

1101. Le contrat est une convention par laquelle une ou plusieurs personnes s'obligent, envers une ou plusieurs autres, donner, à faire ou à ne pas faire quelque chose.

S'obligent. Voilà l'essence du contrat, l'obligation: Obligationum substantia consistit ut alium nobis obstringat, ad dandum aliquid, vel faciendum, vel præstandum. On appelle créancier celui au profit de qui l'obligation est contractée, et débiteur celui qui la contracte.

(HOLLANDE. Art. 1270 et 1549 du nouveau Code civil.]

1102. Le contrat est synallagmatique ou bilatéral lorsque les contractants s'obligent réciproquement les uns envers les autres..

Les uns envers les autres. Par exemple, dans la vente, le vendeur est obligé à transférer la propriété, l'acheteur à payer le prix. Le contrat est synallagmatique, bien qu'une des parties exécuté sur-le-champ son obligation, comme lorsque l'acheteur paye son prix comptant, car il suffit qu'il y ait un instant de raison pendant lequel les deux obligations ont existé ensemble. Les contrats synallagmatiques se divisent eux-mêmes en parfaits et imparfaits: parfaits lorsque les deux obligations principales résultent, à l'instant même, du contrat; ainsi, dans la vente, le vendeur est à l'instant même

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