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tionnelle au prix de la vente, sans avoir égard à la diminution de la chose. Le Code en décide autre. ment, parce qu'ici le prix de la vente n'ayant pas été payé sans cause, puisque l'acheteur reste propriétaire de la majeure partie de la chose, il ne peut pas le répéter; il n'a que le droit de demander qu'on le dédommage du préjudice causé par l'éviction part'elle, et pour cela il suffit de lui rembourser le prix de la portion qui lui est enlevée.

1638. Si l'héritage vendu se trouve grevé, sans qu'il en ait été fait de déclaration, de servitudes non apparentes, et qu'elles soient de telle importance qu'il y ait lieu de présumer que l'acquéreur n'aurait pas acheté s'il en avait été instruit, il peut demander la résiliation du contrat, si mieux il n'aime sc contenter d'une indemuité.

Non apparentes. Mais si elles sont apparentes, par exemple, si c'est un aqueduc qui porte de l'eau dans le champ voisin, l'acheteur les a pu connaître par lui-même (art. 1642), sans que le vendeur ait cu besoin de les lui déclarer.

1639. Les autres questions auxquelles peuvent donner lieu les dommages et intérêts résultant pour l'acquéreur de l'inexécution de la vente, doivent être décidées suivant les règles générales établies au titre des Contrats ou des Obligations conventionnelles en général.

1640. La garantie pour cause d'éviction cesse lorsque l'acquéreur s'est laissé condamner par un jugement en dernier ressort, ou dont l'appel n'est plus recevable, sans appeler son vendeur, si celui-ci prouve qu'il existait des moyens suffisants pour faire reje

ter la demande.

= Pour faire rejeter la demande. L'acquéreur

doit alors imputer son éviction à sa négligence. Mais il faut que le vendeur prouve l'existence de ces moyens, parce que la demande est présumée juste dès qu'un jugement l'a déclarée telle. Il faut de plus que l'acquéreur n'ait pas opposé ces moyens, parce que, s'il l'a fait, le vendeur ne peut pas prétendre qu'il s'est laissé condamner par négligence, et que le jugement eût été différent si on l'avait appelé en garantie.

[HOLLANDE. Toutes les dispositions de ce § ont été reproduites dans les articles 1527-1559 du nouveau Code civil. L'action mentionnée en l'article 1656 du Code français doit être intentée dans le délai d'un an à partir du jour où le jugement d'éviction a acquis force de chose jugée. ]

SII. De la Garantie des défauts de la chose vendue.

1641. Le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cct usage, que l'acheteur ne l'aurait pas

acquise, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus.

N'en aurait donné qu'un moindre prix. Il s'agit ici de vices inhérents à la chose même, attachés à sa qualité, et qui la rendent défectueuse à un tel point que l'usage auquel on la destinait est dimi nué considérablement. (Arrêt de la cour de Caen du 22 novembre 1826. Sirey, t. 27, II, 223.) Car s'il s'agissait d'un vice entraînant seulement une diminution partielle dans la propriété, sans la rendre défectueuse, comme dans le cas d'une servitude (art. 1658), ou d'une éviction partielle (art. 1636), il faudrait qu'on dût présumer que si l'acquéreur les avait connus, il n'aurait pas acheté.

1642. Le vendeur n'est pas tenu des vices apparents et dont l'acheteur a pu se convaincre lui-même.

1643. Il est tenu des vices cachés, quand même il ne les aurait pas connus, à moins que, dans ce cas, il n'ait stipulé qu'il ne sera obligé à aucune garantie.

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Il ne les aurait pas connus. Car le dommage souffert par l'acquéreur est toujours le même, qu'il soit causé par l'ignorance ou par la faute du vendeur Neque enim interest emptori cur fallatur, ignorantia venditoris an calliditate.

Dans ce cas. C'est-à-dire, si, ne connaissant pas la chose qu'il vend, et craignant qu'il n'existe un certain vice, il a stipulé que s'il existe il ne le garantira pas. Mais si, ayant, lors du contrat, une pleine connaissance de ce vice, au lieu de le déclarer, it stipule qu'il ne le garantit pas, cette dissimulation est un dol qui le rend responsable du vice qui existait.

1644. Dans le cas des articles 1611 et 1643, l'acheteur a le choix de rendre la chose et de se faire restituer le prix, ou de garder la chose et de se faire rendre une partie du prix, telle qu'elle sera arbitrée par

experts.

1645. Si le vendeur connaissait les vices de la chose, il est tenu, outre la restitution du prix qu'il en a reçu, de tous les dommages et intérêts envers l'acheteur.

1646. Si le vendeur ignorait les vices de la chose, il ne sera tenu qu'à la restitution du prix, et à rembourser à l'acquéreur les frais occasionnés par la vente.

1647. Si la chose qui avait des vices a péri par suite de sa mauvaise qualité, la perte est pour le vendeur, qui sera tenu envers l'acheteur à la restitution du prix, et aux autres dédommagements expliqués dans les deux articles précédents. Mais la perte arrivée par cas fortuit, sera pour le comple de l'acheteur.

= Par cas fortuit. Parce qu'il n'y a, dans ce cas, aucune faute de la part du vendeur, et l'on doit appliquer ce principe, que la chose périt pour son maitre, Res peril domino.

1648. L'action résultant des vices redhibitoires doit être intentée par l'acquéreur, dans un bref délai, suivant la nature des vices redhibitoires, et l'usage du lieu où la vente a été faite.

=Suivant la nature. Ainsi, le délai de l'action redhibitoire varie suivant les différents pays et suivant la nature des choses vendues et des vices qu'on leur reproche. A Paris, par exemple, elle n'est plus reçue pour les vices ou maladies des chevaux et des vaches après quarante jours depuis la tradition. D'après la coutume du Bourdonnais, on ne doit avoir que huit jours. —[D'après l'usage suivi en Belgique, ce délai est de six semaines, à compter du jour même de la vente, lorsqu'il s'agit de chevaux atteints de la morve. (Arrêt de la cour de Bruxelles du 28 février 1828.) - Quand l'action redhibitoire est exercée dans le terme prescrit, la présomption légale est-elle que le vice redhibitoire constaté existait lors de la vente? La cour de Besançon a résolu cette question aflirmativement par arrêt du 13 juillet 1808; mais la cour de Bruxelles a décidé que l'acquéreur doit toujours prouver que le vice dont il se plaint existait à l'époque du contrat. (Arrêt du 29 messidor an XIII.)]-QUESTION. La constatation du vice redhibitoire dans le délai voulu suffit-elle pour rendre recevable l'action récursoire intentée plus tard contre le premier vendeur? La cour suprème a consacré la négative: «Vu l'art. 1648 du Code civil et l'arrêt du 30 janvier 1728; attendu que le législateur a voulu, dans l'intérêt du commerce, que l'action résultant des vices redhibitoires fût intentée par l'acquéreur dans un bref délai; que la loi se règle d'après la nature des vices redhibitoires et l'usage du lieu où la vente a été faite; qu'en Normandie, ce délai était de trente jours, aux termes d'un arrêt du 50 janvier 1728; que la loi ne distinguant pas entre l'action principale et récursoire, l'une comme l'autre doivent être dirigées contre le premier vendeur, dans le délai fixé par la coutume, l'usage du lieu de la vente, ou les règlements intervenus à ce sujet; que, dans l'espèce, si le vice a été constaté à l'occasion d'une vente faite en Normandie avant l'expiration de trente jours, l'action récursoire en résultant n'a été exercée contre le premier vendeur qu'après l'expiration de ce délai; que, dès lors, elle ne l'a pas été en temps utile; que, en décidant le contraire, le jugement attaqué a expressément violé la loi précitée; casse, etc. (Arrêt du 18 mars 1853, ch. civ. Sirey, t. 33, I, 277.)

L'usage du licu. QUESTION. L'usage du lieu a-t-il changé avec l'ancien ressort dans lequel il était autrefois suivi? La cour de cassation a consacré la négative: Attendu que les usages sont dans une autre catégorie que les lois; qu'ils sont permanents de leur nature, parce qu'ils sont l'expression des intérêts et des besoins locaux; qu'ainsi le délai de neuf jours accordé pour l'action redhibitoire par la coutume de Paris, dans le ressort de laquelle la commune de Blangy avait été placée, n'a pu, depuis sa distraction de ce ressort, être changé d'après d'autres usages qui ne sont pas les siens; que, en la maintenant dans celui qui est observé chez elle de temps immémorial, le jugement attaqué a fait une juste

application de l'art. 1648 du Code civil: rejette, etc.. (Arrêt du 13 décembre 1832, ch. des req. Sirey, t. 33, I, 198.)

1649. Elle n'a pas lieu dans les ventes faites par autorité de justice.

Dans ces ventes, ce n'est pas le propriétaire qui vend, c'est la justice qui tient lieu de vendeur : on ne peut donc avoir un recours en garantie contre le propriétaire.

(HOLLANDE. Art. 1540-1548 du nouv. Code civil.]

CHAPITRE V.

Des Obligations de l'Acheteur. 1650. La principale obligation de l'acheteur est de payer le prix au jour et au lieu réglés par la vente.

La principale obligation. Outre cette obligation principale, l'acquéreur en contracte d'autres qui ne sont qu'accessoires: celles d'enlever la chose vendue, de payer les frais et loyaux coûts du contrat, de rembourser au vendeur les dépenses qu'il aura faites pour la conservation de la chose, etc.

1651. S'il n'a rien été réglé à cet égard lors de la vente, l'acheteur doit payer au lieu et dans le temps où doit se faire la déli

vrance.

= Au lieu. Il a été décidé que si la vente est faite à terme, cet article n'est plus applicable; il faut revenir à l'article 1247: ainsi le payement doit se faire au domicile du débiteur. L'article 1651 ne s'applique qu'au cas d'une vente au comptant, parce que les parties, dans cette vente, sont présumées avoir entendu que le payement se ferait en même temps que la délivrance, et, par conséquent, au même lieu: ce qui n'existe pas dans une vente à terme. (Arrêt de la cour de cassation du 24 juin 1813, ch. civ. Sirey, t. 13, I, 353.)

[HOLLANDE. Art. 1549 et 1550 du nouveau Code civil.]

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Produit des fruits, etc. S'il s'agit, par exemple, d'une terre, d'une maison, d'un troupeau, etc. Mais si la vente est d'une bibliothèque, d'une tapisserie, ou autres choses qui ne produisent pas de fruits, les intérêts ne sont dus que dans le cas où il en a été stipulé, sinon à partir du jour de la sommation.

[HOLLANDE. Cette disposition a été modifiée de la manière suivante par l'article 1551 du nouveau Code civil: «L'acheteur est obligé, même en l'absence de stipulation expresse, de payer les intérêts du prix de la vente, lorsque la chose vendue et livrée produit des fruits ou autres revenus. » } 28.

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Ou a juste sujet de craindre. - QUESTION. Des inscriptions hypothécaires sur l'immeuble vendu sont-elles une juste crainte de trouble? La cour de Riom a consacré l'affirmative: «Attendu que, d'après l'article 1653 du Code civil, l'acquéreur qui a de justes craintes d'être troublé doit garder en ses mains le prix de son acquisition lorsqu'on ne lui offre pas de caution; que les vingt-sept inscriptions qui frappent l'immeuble vendu sont un juste sujet de crainte; mais que le principe doit être restreint au prix principal et ne peut être étendu aux intérêts qui restent toujours la propriété du vendeur lorsqu'ils n'ont pas été immobilisés. » (Arrêt du 2 janvier 1850. Sirey, t. 33, II, 41.) Voyez, en ce sens, un arrêt plus explicite encore de la cour de cassation en date du 7 mai 1827, ch. civ. (Dall., ann. 1827, 1, 322.)

Il peut suspendre le payement du prix. Mais on a jugé avec raison que ces intérêts ne faisant pas partie du prix et représentant les fruits que l'acheteur retire de l'immeuble, ce dernier ne pouvait se dispenser de les payer. Il ne saurait les garder sous prétexte qu'il les payera aux créanciers hypothécaires; car tant que ces intérêts n'ont pas été immobilisés ils appartiennent au vendeur. (Arrêt de la cour de Turin du 18 janvier 1811. Sirey, t. 12, II, 281.) [HOLLANDE. Art. 1552 du nouveau Code civil.]

1654. Si l'acheteur ne paye pas le prix, le vendeur peut demander la résolution de la

vente.

= Demander la résolution. Notre article ne fait aucune distinction entre la verte des biens meubles et celle des immeubles pour l'exercice de l'action résolutoire. (Arrêt de la cour de Paris du 18 août 1829, Sirey, t. 30, II, 10.) Le vendeur peut, s'il l'aime mieux, contraindre l'acheteur à lui payer le prix de la chose (art. 1184, 2105). Dans le droit romain il n'avait même que cette action; mais, comme le plus souvent on ne peut, sans de grands frais, se faire payer de ses debiteurs, on a donné au vendeur le droit de faire résilier la vente. Mais la cour de cassation a jugé avec raison que cette action en résolu tion de la vente, contre l'acquéreur direct qui n'en a pas payé le prix, ne peut plus être utilement exercée contre le tiers détenteur, après qu'il a picscrit la propriété. (Arrêt du 12 janvier 1851, ch. des req. Sirey, t. 31, I, 133.) — [II a été jugé par une multitude d'arrêts que l'action en résolution de la vente à defaut de payement peut être intentée directement contre le detenteur on tiers acquéreur du bien vendu. (Arrêts de la cour de Bruxelles du 11 mars 1851, de la cour de Paris du 15 nov. 1816, de Montpellier, 29 mai 1827, de Péronne, 20 janvier 1826, et de Limoges, 19 janvier 1824.) Celle action peut être exercée, mème après une revente faite par autorité de justice, et encore que le vendeur ait déjà exercé l'action hypothécaire, si cette dernière action est restée sans ellet utile. (Arrêt de

-

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la cour de cassation de France du 30 avril 1827.)]QUESTION. Les intérêts du prix de la vente résoluc peuvent-ils être accordés à l'acquéreur, si on ne dit pas que c'est à titre de dommages-intérêts? La cour suprême a embrassé la négative: Considérant que la résolution de la vente remet les choses au même et semblable état où elles auraient été s'il n'était point intervenu de vente; que, dès lors, le prix de la vente et la chose vendue retournent à leurs propriétaires; que si celui qui restitue la chose est tenu de restituer les fruits qu'il a perçus, il peut obtenir des dommages-intérêts selon les circonstances de la cause, et dans le cas où la restitution lui préjudicierait; que, néanmoins, la cour royale de Lyon a, dans l'espèce, adjugé les intérêts du prix à l'acquéreur pendant un temps determiné, sans qu'elle eût reconnu, en fait, qu'ils lui étaient dus à titre de dommages-intérêts; qu'elle a ainsi supposé que, malgré la résolution, la vente avait subsisté durant un certain temps (jusqu'à l'époque du séquestre ); en quoi elle a manifestement violé les lois précitées; casse, etc. (Arrêt du 23 juillet 1834, ch. civ. Sirey, t. 34, 1, 620.) QUESTION. Le vendeur qui a perdu son privilége peut-il encore exercer son action résolutoire? La cour suprême a établi l'affirmative: « Vu les articles 1184 et 1654 du Code civil; attendu que l'hypothèque on privilége du vendeur sur l'objet par lui vendu est entièrement différent et indépendant du droit résolutoire appartenant audit vendeur, et que la perte de son privilége ou de son hypothèque, par défaut d'inscription ou par défaut de production dans l'ordre, n'exclut nullement son droit de rentrer dans sa propriété, pour défaut de payement, en vertu de l'action résolutoire; que, en décidant que le vendeur avait perdu son droit de résolution, par le seul fait du défaut de production dans l'ordre du prix de son immeuble et par la forclusion prononcée contre lui, l'arrêt a violé les articles précités; casse, etc.» (Arrêt du 24 août 1851, ch. civ. Sirey, t. 31, I, 315.) · Toutefois un arrêt de la même cour du 16 juillet 1818 enlève au vendeur le droit de demander la résolution, lorsqu'il s'est pourvu à l'ordre pour se faire colloquer. (Dall., ann. 1818, I, 598.) Au reste, l'action résolutoire peut être exercée tant contre l'acquéreur primitif que contre les acquéreurs subséquents, soit que les ventes aient été volontaires, soit qu'elles aient eu lieu par adjudication en justice. (Arrêt de la cour de cassation du 30 avril 1827, ch. civ. Dall. ann. 1827, I, 221.)-QUESTION. Le vendeur peut-il exercer cumulativement l'action en résolution de la vente et son droit de créancier privilégié? Non, aux termes de l'arrêt suivant de la cour suprême: Attendu que, si la jurisprudence établie sur l'art. 1654 adinet l'option successit, des deux actions, l'arrêt attaqué n'offre rien de contraire à cette jurisprudence, en se bornant à décider que le vendeur ne peut pas exercer cumulativement les deux actions; rejette, etc. » (Arrêt du 26 avril 1831, ch. des req. Sirey, t. 31, I, 198.) — QUESTION. Des actes de licitation peuvent-ils donner lieu à l'action résolutoire? La cour de cassation a consacré la négative :

Sur le moyen fondé sur la violation des art. 1184, 1650 et 1654, en ce que l'arrêt attaqué aurait rejeté l'action résolutoire fondée sur les dispositions de ces articles; attendu que l'arrêt attaqué, en décidant que des actes de licitation entre cohéritiers n'étaient pas des actes d'aliénation; et qu'ils n'étaient point attributifs, mais simplement déclaratifs de propriéte, n'a pas violé les articles ci-dessus cités, et n'a fait qu'une juste application de l'article 885 du Code

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civil; rejette, etc. (Arrêt du 9 mai 1832, ch. des req. Sirey, t. 32, I, 367.) Mais il en serait différemment de la cession de droits successifs qui constitue une véritable vente. (Arrêt de la cour de Pau du 14 juin 1831. Sirey, t. 32, II, 153.) Un autre arrêt de la cour suprême donne le motif de droit contre les acquéreurs subséquents: « Que ce droit de vendeur étant un droit réel qui affecte et suit la chose par lui vendue, en quelque main qu'elle passe, son acquéreur ne peut y porter aucune atteinte en revendant cette chose, parce qu'il ne peut transmettre à autrui plus de droits qu'il n'en a lui-même; qu'ainsi, quelle qu'ait pu être la bonne foi du tiers acquéreur, il n'a acquis que la même propriété qu'avait son vendeur, laquelle était modifiée par le droit réel qu'avait le vendeur primitif de la revendiquer, si le prix ne lui en était pas payé. » Le même arrêt ajoute. « Qu'il ne faut pas confondre le privilége qu'a le vendeur pour le recouvrement du prix qui lui est dû avec le droit qu'il a de demander la résolution de la vente, si ce prix ne lui est pas payé; que si ce privilége a besoin d'être conservé par une inscription régulière, pour n'être pas purgé par la transcription, il n'en est pas ainsi du droit de demander la résolution, parce que son exercice étant hors du régime hypothécaire, son effet ne peut recevoir d'atteinte par la transcription, qui ne purge que les priviléges et les hypothèques sans rien ajouter aux droits qui ont été transmis à l'acquéreur sur la chose vendue. (Arrêt du 26 mars 1828, ch. civ. Dall., ann. 1828, I, 194.)

[HOLLANDE. L'art. 1553 du nouveau Code civil, qui reproduit cette disposition, y ajoute ces mots : «Conformément aux dispositions des articles 1302 et 1303. Ces deux articles cités plus haut sous l'article 1184 du Code français, rendent inutiles les articles 1655 et 1656 ci-après.]

D

1655. La résolution de la vente d'immeubles est prononcée de suite, si le vendeur est en danger de perdre la chose et le prix. Si ce danger n'existe pas, le juge peut accorder à l'acquéreur un délai plus ou moins long, suivant les circonstances.Ce délai passé sans que l'acquéreur ait payé, la résolution de la vente sera prononcée.

La chose et le prix. Si, par exemple, la chose vendue est une maison que l'acquéreur fait démoli", une forêt qu'il fait abattre. Mais la résolution n'a pas lieu de plein droit, et l'acquéreur peut toujours l'empêcher en payant avant que le jugement l'ait prononcée.

1656. S'il a été stipulé, lors de la vente d'immeubles, que, faute de payement du prix dans le terme convenu, la vente serait résolue de plein droit, l'acquéreur peut néanmoins payer après l'expiration du délai, tant qu'il n'a pas été mis en demeure par une sommation; mais, après cette sommation, le juge ne peut pas lui accorder de délai.

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chose aussi importante qu'un immeuble, sans avoir été sommé préalablement de payer le prix, mais s'il ne le paye pas, la vente est résolue de plein droit, et le juge ne peut plus accorder de délai. Cependant il semble qu'on ne doit pas appliquer cette disposition avec une rigueur telle, que si l'acquéréur ne payait pas à l'instant même de la sommation, il ne pût pas offrir le prix quelques heures après.

1657. En matière de vente de denrées et effets mobiliers, la résolution de la vente aura lieu de plein droit et sans sommation, au profit du vendeur, après l'expiration du terme convenu pour le retirement.

Sans sommation. Il n'en est pas ici comme pour les immeubles, parce ce qu'il y a dans les prix des denrées et effets mobiliers une telle variation, que le moindre retard peut amener une diminution sensible, et causer au vendeur un préjudice irré→ parable.

Au profit du vendeur. Il est bien évident que l'acquéreur ne pourra pas argumenter de sa faute pour faire réaliser la vente, si le vendeur n'y consent pas.

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Pour le retirement. Ainsi, il s'agit du cas où les choses n'ont pas été livrées. Si elles l'avaient été, le vendeur n'aurait plus que l'action en payement contre l'acheteur, et un privilége sur les choses vendues (art. 2102, no 4). — QUESTION. L'article 1657 régilil les marchés entre marchands comme ceux passés entre particuliers? La cour suprême a consacré l'affirmative: Vu l'article 1657; attendu que cet article est général, et ne porte aucune exception; que la matière ne paraît exiger aucune différence entre les marchés de denrées, entre les particuliers, et ceux de pareille nature entre marchands; attendu, au surplus, que le Code de commerce, promulgué plusieurs années après la promulgation de tous les titres du Code civil, ne contient aucune exception à la disposition de l'article 1657, et qu'en créant cette exception, l'arrêt de la cour de Nancy a violé cet article du Code civil; casse, etc.» (Arrêt du 27 février 1828, ch. civ. Dall., ann. 1828, I, 145.)

[HOLLANDE. Art. 1554 du nouveau Code civil.]

CHAPITRE VI.

De la Nullité et de la Résolution de la Vente.

1658. Indépendamment des causes de nullité ou de résolution déja expliquées dans ce titre, et de celles qui sont communes à toutes les conventions, le contrat de vente peut être résolu par l'exercice de la faculté de rachat et par la vilité du prix.

SECTION PREMIÈRE. De la Faculté de Rachat.

1659. La faculté de rachat ou de réméré est un pacte par lequel le vendeur se réserve de reprendre la chose vendue, moyennant la restitution du prix principal, et le remboursement dont il est parlé à l'article 1675.

Est un pacte. Nous avons, article 1107, rappelé que les Romains appetaient pacte un accord ou convention qui n'était obligatoire qu'autant que l'une

des parties aurait exécuté l'engagement : cette distinction n'existant pas chez nous, le législateur ne se sert jamais de cette expression, et si on la voit ici pour la première fois, c'est à cause de l'usage, qui a donné ce nom particulier à la clause de réméré. Le pacte de réméré doit être inséré dans le contrat de vente, comme une clause de cette vente. L'acheteur alors n'acquiert que des droits résolubles, et ne peut transférer à d'autres que des droits résolubles. Si le pacte de rachat n'est pas inséré dans l'acte de vente, il doit être regardé comme une nouvelle vente, et ne doit pas être exercé au préjudice des droits acquis par des tiers sur la chose vendue, parce que rien n'avertissait les tiers que la clause de réméré existait. (MODÈLE d'acte de vente avec pacte de rachat ou réméré, form. No 29.)

La chose vendue. · QUESTION. Le vendeur a-t-il le droit de reprendre tout ce qui est venu augmenter la chose par accession, comme l'alluvion, l'ile qui s'est formée près du champ? On peut dire que l'effet de la condition résolutoire étant de remettre les choses au même état que si l'obligation n'avait jamais existé, tous ces accroissements doivent retourner au vendeur avec la chose qu'il rachète. — La cour suprême a jugé que le droit même de réméré pouvait être cédé par le vendeur, si aucune restriction ne se trouve dans l'acte à cet égard. (Arrêt du 24 avril 1812, ch. des req. Dall., ann. 1812, 1,607.)

1660. La faculté de rachat ne peut être stipulée pour un terme excédant cinq années. Si elle a été stipulée pour un terme plus long, elle est réduite à ce terme.

Cing années. Il est d'intérêt public que l'on ne prolonge pas une incertitude qui ne peut que nuire à la culture et au commerce.

1661. Le terme fixé est de rigueur, et ne peut être prolongé par le juge.

1662. Faute par le vendeur d'avoir

exercé son action de réméré dans le terme prescrit, l'acquéreur demeure propriétaire irrévocable.

Propriétaire irrévocable. Sans qu'il soit nécessaire, comme autrefois, que l'acheteur obtienne un jugement qui déclare qu'il est propriétaire, et que le vendeur est déchu de la faculté de rachat. Est-il nécessaire de faire déchoir un vendeur d'une action qui n'existe plus, puisque sa durée était limitée par le contrat?

1663. Le délai court contre toutes personnes, même contre le mineur, sauf, s'il y a lieu, le recours contre qui de droit.

= Même contre le mineur. Toujours à cause de l'intérêt public, qui exige que le délai ne soit pro-longé par aucun motif.

1664. Le vendeur à pacte de rachat peut exercer son action contre un second ucquéreur, quand même la faculté de réméré n'aurait pas été déclarée dans le second contrat.

=

Un second acquéreur. Car celui qui, ayant acheté un bien sur lequel le vendeur s'était réservé la faculté de rachat, l'a vendu ensuite, n'a pu transférer que les droits qu'il avait. Le second acquéreur ne peut pas se plaindre qu'on exerce contre lui la faculté de rachat; en voyant le premier contrat de vente, qui était le titre de propriété de son vendeur, il a dû voir que cette propriété était résoluble par la clause de réméré. Ainsi, le premier vendeur lui restituera le prix qu'il avait reçu lors de la première vente, et reprendra la chose. C'est au second acquéreur à se pourvoir contre celui qui a vendu, si le prix qu'on lui restitue est plus faible que celui qu'il a donné.

1663. L'acquéreur à pacte de rachat exerce tous les droits de son vendeur; il peut prescrire, tant contre le véritable maitre que contre ceux qui prétendraient des droits ou hypothèques sur la chose vendue.

=

Exerce tous les droits de son vendeur. L'acquéreur doit exercer tous les droits de propriétaire, car la propriété de la chose vendue lui est transférée du moment du contrat, la faculté de rachat n'étant qu'une clause résolutoire qui ne suspend pas la vente, mais qui la résout, si le vendeur rachète la chose. QUESTION. Le vendeur, à pacte de rachat, peut-il valablement hypothéquer l'immeuble vendu? La cour de Bordeaux à consacré la négative : « Attendu que l'hypothèque est un droit réel sur les immeubles; que l'hypothèque conventionnelle ne peut être valablement prise que par celui qui est propriétaire de l'immeuble au moment où elle est constituée; attendu que la vente à pacte de rachat transmet à l'acquéreur tous les droits réels sur l'immeuble ainsi vendu; qu'elle en dépouille le vendeur pour les transmettre à l'acquéreur; que celui-ci, jusqu'à l'exercice du rachat, peut seul constituer une hypothèque sur ces immeubles; que si la vente vient à être résolue par l'exercice du rachat, il en résulte que le vendeur reprend l'immeuble exempt de toutes les charges et hypothèques dont l'acquéreur l'aurait grevé, mais non qu'il ait pu l'hypothéquer lorsqu'il n'en était plus propriétaire. » (Arrêt du 5 janvier 1833. Sirey, t. 53, II, 188.) Voyez encore, en ce sens, un arrêt non moins explicite de la cour suprême, du 21 décembre 1825, ch. des req. (Dall. ann. 1826, I, 43.)

1666. Il peut opposer le bénéfice de la dis

cussion aux créanciers de son vendeur.

=

Le bénéfice de la discussion. C'est-à-dire qu'il pourra renvoyer les créanciers à se pourvoir préala

blenient sur les autres biens de leur débiteur. En effet, les choses vendues avec faculté de rachat ne sont plus dans les biens du vendeur (in bonis). Les créanciers de ces derniers ne peuvent donc plus les prendre pour gage de leurs créances; et s'ils veulent exercer sur ces choses les droits de rachat de leur débiteur (art. 1166), il est juste que ce ne soit qu'en cas d'insuffisance des autres biens. Mais, s'ils avaient une hypothèque sur l'immeuble vendu avec faculté de rachat, l'acquéreur ne pourrait leur opposer le bénéfice de la discussion que dans le cas où il y aurait dans la possession de leur débiteur d'autres immeubles hypothéqués à la même dette (article 2170).

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