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(Arrêt de la cour de cassation de France du Saoût 1839. Gazelle des Tribunaux du 20 août 1839.)] [HOLLANDE. Art. 1217 du nouveau Code civil, cité plus haut sous l'art. 2122 du Code français.]

2128. Les contrats passés en pays étranger ne peuvent donner d'hypothèque sur les biens de France, s'il n'y a des dispositions contraires à ce principe dans les lois poli

tiques ou dans les traités.

Ne peuvent donner d'hypothèque. Parce que l'autorité des officiers publics d'un pays étranger ne peut s'étendre sur un pays non soumis au prince qui leur a donné leur caractère d'hommes publics; mais les traités pourraient modifier ce principe: toutefois, il ne suffirait pas qu'un pays, par ses lois, accordât aux Français le droit d'obtenir hypothèque sur les biens composant son territoire, pour que les habitants de ce pays eussent le même droit en France. Il ne saurait être permis à un souverain, en accordant aux Français tels ou tels droits, d'attribuer en France les mêmes droits à ses sujets : cette réciprocité qu'un prince établirait ainsi à volonté pourrait être souvent fort onéreuse pour l'un des pays.

[HOLLANDE. Art. 1218 du nouveau Code civil.]

2129.Il n'y a d'hypothèque conventionnelle valable que celle qui, soit dans le titre authentique constitutif de la créance, soit dans un acte authentique postérieur, déclare spécialement la nature et la situation de chacun des immeubles actuellement appartenant au débiteur, sur lesquels il consent l'hypothèque de la créance. Chacun de tous ses biens présents peut être nominativement soumis à l'hypothèque.- Les biens à venir ne peuvent pas être hypothéqués.

= Spécialement. Ainsi que nous venons de le remarquer, tout acte authentique passé devant notaire emportait autrefois hypothèque générale sur tous les biens du débiteur, encore que les parties n'en fussent pas convenues. Il résultait de là qu'une dette quelconque affectant l'universalité des biens d'un débiteur, il lui devenait très-difficile de faire aucun acte d'aliénation, et que son crédit se trouvait en quelque sorte anéanti. C'est pour obvier à tous ces inconvénients, que la loi a posé comme l'une des bases du système hypothécaire actuel, la spécialité, au moyen de laquelle tous les biens du débiteur qui ne sont pas nominativement soumis à l'hypothèque restent libres dans les mains du débiteur, et peuvent être ou hypothéqués ou aliénés par lui. Observez, du reste, que la spécialité n'existe que pour l'hypothèque conventionnelle. Sur la nécessité de la spécialité, voir un arrêt de la cour de cassation du 20 février 1810, qui annule une stipulation d'hypothèque par laquelle le débiteur déclarait hypothéquer tous les biens situés dans la commune de Saint-Quentin. (Dall., ann. 1810, I, 107.) La nature. Si c'est une maison ou une pièce de

terre.

Les biens à venir. Ils ne peuvent pas être hypotheques, parce qu'ils ne sont pas susceptibles de

spécialité; il est impossible de déclarer à l'avance leur nature et leur situation.

[HOLLANDE. Cette disposition a été reproduite dans les §§ premiers des articles 1219 et 1220 du nouveau Code civil.]

2130. Néanmoins, si les biens présents sûreté de la créance, il peut, en exprimant et libres du débiteur sont insuffisants pour la cette insuffisance, consentir que chacun des biens qu'il acquerra par la suite, y demeure affecté à mesure des acquisitions.

=

Sont insuffisants. - QUESTION. Celui qui n'a aucun bien présent peut-il consentir hypothèque sur chacun de ses biens à venir? La négative semble résulter du mot insuffisants, qui suppose l'existence de biens présents, et la cour de Riom a en effet consacré cette opinion. (Arrêt du 25 novembre 1830. Sirey, t. 33, II, 526.) Mais la cour de Besançon a établi en ces termes l'opinion contraire : « Considérant que l'article 2130 du Code porte que si les biens présents et libres du débiteur sont insuffisants pour la sûreté de la créance, il peut, en exprimant cello insuffisance, consentir que chacun des biens qu'il acquerra par la suite y demeure affecté, à mesure des acquisitions; que cette exception à l'art. 2120, qui défend d'hypothéquer les biens à venir ne doit pas être restreinte au cas où le débiteur possède et hypothèque, au moment de l'obligation, des biens présents qui sont insuffisants; mais qu'elle doit avoir lieu, et à bien plus forte raison, dans le cas où le débiteur n'a, à cette époque, aucun immeuble à offrir pour sûreté à son créancier, parce qu'alors il est évident qu'il y a insuffisance entière et absolue; que le législateur, en modifiant la défense d'hypothéquer les biens à venir, ayant voulu venir au secours du débiteur dont les facultés présentes sont trop faibles pour se procurer du crédit et des ressources, n'a certainement pas entendu refuser cette faveur à celui qui, n'ayant aucune fortune présente, se trouve dans une position d'autant plus favorable qu'elle est malheureuse; qu'il résulte de là que la veuve Marquet a consenti valablement à ce que chacun des biens qu'elle acquerrait par la suite demeurât affecté à la créance de l'avoué Désavaux, quoique à l'époque de l'obligation elle ne possédât aucun immeuble; que ce dernier a eu conséquem ment le droit de prendre inscription, et que les premiers juges ont eu raison d'admettre sa créance. > (Arrêt du 29 août 1811. Sirey, t. 33, II, 526.) — I faut remarquer, au reste, que les biens à venir ne sont frappés d'hypothèque qu'à mesure de leur acquisition, sans stipulation nouvelle, et du jour seulement où le créancier a pris inscription sur chacun de ces biens. (Arrêt de la cour de Lyon du 18 février 1829. Dall., ann. 1829, II, 109.) Mais il en est différemment à l'égard des hypothèques judiciaires: une seule inscription prise au bureau d'un arrondissement s'étend à toutes les acquisitions qui sont faites successivement dans cet arrondissement. (Voir le susdit arrêt de Lyon de 1829 et celui de la c. de cass. du 3 août 1819, cité sous l'art. 2148.)[L'hypothèque conventionnelle générale sur les biens à venir n'est valable que par des inscriptions successives au fur et à mesure des acquisitions faites par ie deLiteur : « Attendu qu'aux termes des arti cles 2134 et 2148 du Code civil, l'hypothèque conventionnelle ne peut avoir d'effet à l'égard de tiers que le jour de l'inscription au bureau des hypo

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thèques, et quant aux biens seulement qui sont spécialement désignés dans l'inscription par l'indication de leur nature et situation; que ces dispositions sont générales et par conséquent applicables à toutes les hypothèques conventionnelles indistinctement; qu'il n'existe d'ailleurs aucune disposition quelconque qui ait dispensé le créancier d'accomplir ces formalités, dans le cas prévu par l'art. 2130 du Code civil, relativement aux biens que le débiteur aura acquis depuis l'obligation primitive; que non-seulement telle n'est pas la conséquence de cet article, mais qu'il résulte au contraire de ces termes, que chacun des biens que le débiteur acquerra par la suite demeure affecté à mesure des acquisitions, que les biens à venir ne sont pas frappés de l'hypothèque immédiatement, mais seulement au moment où ils entrent en la possession du débiteur; qu'ainsi l'hypothèque elle-même ne précxiste pas à l'acquisition; d'où la conséquence nécessaire que l'inscription, qui ne peut pas devancer l'hypothèque, mais qui doit la suivre, ne peut pas non plus préexister à l'acquisition ni atteindre les biens qui adviendraient par suite au débiteur, mais qu'il faut une inscription nouvelle au fur et à mesure de chaque acquisition. (Arrêt de la cour de cassation de Belgique du 5 juillet 1837.)]

En exprimant cette insuffisance. Ainsi la preuve de cette insuffisance résulte de la seule déclaration; il n'y a aucune vérification à faire. La loi a voulu permettre d'étendre par là, autant que possible, le crédit de ceux qui, ayant des espérances, n'ont encore que peu de biens présents.

[HOLLANDE. Cette disposition a été remplacée par le 2 § de l'article 1220 du nouveau Code civil, ainsi conçu Cependant, lorsque la femme a stipulé hypothèque par contrat de mariage, ou, en général, lorsqu'un débiteur s'est obligé à donner hypothèque à son créancier, le mari ou le débiteur peuvent être contraints à remplir leur obligation, en donnant inscription même sur les biens qu'ils ont acquis depuis l'existence de cette obligation. » ]

2132. L'hypothèque conventionnelle

n'est valable qu'autant que la somme pour
laquelle elle est consentie est certaine et dé-
terminée par l'acte si la créance résultant de
l'obligation est conditionnelle pour son exis-
tence, ou indéterminée dans sa valeur, le créan-
cier ne pourra requérir l'inscription dont
il sera parlé ci-après, que jusqu'à concur-
rence d'une valeur estimative par lui dé-
clarée expressément et que le débiteur
y a lieu.
aura droit de faire réduire,
Est certaine et déterminée. Suite du système
de spécialité et de publicité des hypothèques : ces
dispositions eussent été illusoires si les tiers n'avaient
pu connaître la quotité de la créance.

=

s'il

Conditionnelle pour son existence. Si, par exemple, l'obligation est subordonnée à la condition que tel vaisseau arrivera des Indes.

Indéterminée dans sa valeur. Si l'hypothèque est consentie pour dommages-intérêts non encore liquidés. [L'hypothèque qu'un négociant consent en faveur de l'administration des accises, afin d'obtenir un crédit permanent, étant une hypothèque conventionnelle, pour une créance indéterminée, l'administration doit, à peine de nullité, déclarer, dans l'inscription, jusqu'à quelle valeur estimative elle entend exercer éventuellement ses droits d'hypothèque. (Arrêt de la cour de cassation de Belgique du 22 janvier 1838.)] QUESTION. Lorsqu'un banquier ouvre un crédit à son correspondant, celui-ci peut-il garantir, par une hypothéque, l'obligation d'indemniser le banquier? La cour de Douai a adopté l'affirmative Attendu que l'acte par lequel un banquier ouvre un crédit à son correspondant, forme entre eux un lien de droit, par suite duquel le premier met ses écus à la disposition du second, qui contracte, de son côté, l'obligation d'indemniser le banquier de ses avances, avec intérêts et droits de commission d'usage; que cette obligation du corres

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2131. Pareillement, en cas que l'im- pondant se forme au moment même de l'acte,

meuble ou les immeubles présents, assu-
jettis à l'hypothèque, eussent péri, ou
éprouvé des dégradations, de manière qu'ils
fussent devenus insuffisants pour la sûreté du
créancier, celui-ci pourra ou poursuivre dès
à présent son remboursement, ou obtenir
un supplément d'hypothèque.

=Devenus insuffisants. Cet article paraît d'abord
en contradiction avec l'article 1188, qui dit que le
débiteur est privé du bénéfice du ternie lors seule-
ment que c'est par son fait qu'il a diminué les sûre-
tés;
mais il faut entendre l'article actuel en ce sens,
que si les sûretés se trouvent diminuées sans le fait
du débiteur, il ne sera privé du bénéfice du terme
qu'autant qu'il n'offrira pas un supplément d'hypo-
thèque, supplément que le créancier ne peut refuser
pour exiger le payement de sa créance avant
l'échéance, tandis qu'il le pourrait si c'était par le
fait du débiteur que cette diminution eût eu lieu.

[HOLLANDE. Cette disposition a été remplacée par
l'article 1222 du nouveau Code civil, ainsi conçu :
Le créancier ne peut, dans aucun cas, exiger une
augmentation d'hypothèque, à moins que le contraire
n'ait été stipulé ou établi par la loi. » ]

et

peut être valablement garantie par une hypothèque,
pourvu que le titre constitutif de cette hypothèque
soit authentique, et que la somme à concurrence de
laquelle le crédit est ouvert soit déterminée dans
l'acte; attendu que l'inscription prise en exécution
d'une telle convention a son effet, non du jour où
les écus sont réellement sortis de la caisse du ban-
quier pour entrer dans les mains du correspondant,
ou pour acquitter ses traites, mais du jour où ils
ont été mis à sa disposition par l'acte qui lui ouvre
un crédit; que la numération des deniers n'est que
l'exécution de la promesse, la suite nécessaire de
l'obligation garantie par hypothèque, dont l'effet
doit nécessairement se reporter au jour où elle a été
rendue publique par une inscription régulière. »
(Arrêt du 17 décembre 1833. Sirey, t. 34, II, 279.)
[HOLLANDE. Art. 1221 du nouveau Code civil.

Il n'est pas parlé dans cet article du droit du débi-
teur de faire réduire la valeur estimative, que les
parties doivent, du reste, indiquer elles-mêmes dans
l'acte.]

2133. L'hypothèque acquise s'étend à

toutes les améliorations survenues à l'immeuble hypothéqué.

=

Améliorations. Parce que les améliorations

forment les accessoires de la chose principale. Il est meme décidé que l'hypothèque s'étendrait aux accroissements provenus par alluvion (art. 556), mais non à un fonds nouveau ajouté au premier fonds par quelque événement extraordinaire (art. 559 ). QUESTION. Peut-on considérer comme une des améliorations frappées de l'hypothèque, des maisons construites sur un terrain nu? La cour de Paris a consacré la négative: Considérant, en droit, que si, aux termes de l'article 2133 du Code civil, l'bypothèque s'étend à toutes les améliorations survenues à l'immeuble hypothéqué, cet article n'est pas applicable au cas où, comme dans l'espèce, des maisons entières ont été élevées sur un terrain entièrement nu; que de telles constructions ne peuvent être considérées comme ayant le caractère d'une amélioration; qu'il est vrai de dire qu'elles constituent une chose tout autre que celle qui existait originairement; que les principes généraux du droit, en matière de privilége, et les règles de l'équité, s'op-posent à ce que le privilége du vendeur ait l'extension réclamée par les intimés; d'où il suit que le vendeur n'a pu stipuler en sa faveur un privilége destructif de celui que la loi confère aux ouvriers et constructeurs qui remplissent les conditions prescrites par l'article 2103 du Code civil. » (Arrêt du 6 mars 1834. Sirey, t. 34, II, 308.)

[HOLLANDE. Art. 1211 du nouveau Code civil, cité sous l'art. 2118 du Code français.]

SECTION IV. Du rang que les Hypothèques ont entre

elles.

premier de ces articles, qu'entre les créanciers l'hypothèque conventionnelle n'a de rang que du jour de l'inscription prise par le créancier sur les registres du conservateur, dans la forme et de la manière prescrites par la loi ; qu'aux termes de l'article 2148, pour opérer l'inscription de l'hypothèque qui lui a été consentie, le créancier doit représenter, soit par lui-même, soil par un tiers, au conservateur des hypothèques, l'original en brevet ou une expédition authentique du jugement ou de l'acte qui donne naissance à l'hypothèque, et qu'il doit y joindre deux bordereaux écrits sur papier timbré, dont l'un peut être porté sur l'expédition de l'acte; considérant que, de la combinaison des articles précités, il résulte la conséquence que le créancier, soit par lui-même, soit par un tiers qu'il en a specialement chargé, peut seul, en remplissant les formalités prescrites par lesdits articles, acquérir et prendre inscription de l'hypothèque conventionnelle qui lui a été conférée; que cette formalité de l'inscription que la loi impose au créancier, pour la conservation de la créance, il peut, par divers motifs, soit en différer l'accomplissement, soit même omettre volontairement de la remplir; qu'il suit de là que le conservateur qui, d'office, ferait sur son registre l'inscription d'une hypothèque conventionnelle pourrait agir tout à la fois contre la volonté du créancier qui ne requiert pas formellement ladite inscription, et contrairement aux intérêts des autres créanciers; considérant que si, dans l'espèce, le conservateur de Niort était tenu, conformément aux dispositions de l'article 2108 du Code civil, transcrivant le contrat de vente du 20 février 1823, de faire d'office, sur son registre, l'inscription de la

en

2134. Entre les créanciers, l'hypothèque. créance privilégiée résultant dudit acte, en faveur

soit légale, soit judiciaire, soit conventionnelle, n'a de rang que du jour de l'inscription prise par le créancier sur les registres du conservateur, dans la forme et de la manière prescrites par la loi, sauf les exceptions portées en l'article suivant.

=

- Que du jour de l'inscription. C'est dans cette inscription que consiste la publicité, qui forme un des principaux éléments du systeme hypothécaire actuel; c'est au moyen de cette inscription que les tiers peuvent connaître les charges qui pèsent sur les biens des personnes avec lesquelles ils veulent traiter. Du reste, cette formalité est tellement essentielle à l'hypothèque, qu'elle n'existe qu'autant qu'elle est inscrite, à l'exception des deux hypothèques légales qui suivent ainsi les créanciers qui n'ont pas fait inscrire leurs hypothèques ne jouissent pas de droits plus étendus que les simples créanciers chirographaires.

Prise par le créancier. QUESTION. Le conservaleur des hypothèques peut-il, en même temps qu'il prend inscription d'office pour le vendeur, comme le lui prescrit l'article 2108, prendre valablement inscription pour un créancier ? La cour de Poitiers a consacré la négative : « Considérant que l'hypothèque consentie à André Jean, dit Fabien, par les époux Potron, pour supplément de garantie du prix de la maison par eux acquise, aux termes de l'acte du 20 février 1825, sur celle qu'ils ont vendue au sieur Baudet, par acte du 19 décembre 1828, est une hypothèque conventionnelle dont l'inscription, pour qu'elle pût conserver son rang, devait être prise dans les formes prescrites par les articles 2154 et 2148 du Code civil; qu'il résulte du

ROGRON.-C. CIV.

de Fabien, vendeur, là se bornaient ses obligations et son pouvoir; qu'en effet, en imposant aux conservateurs l'obligation de conserver le privilége par l'inscription d'office, sous peine de tous dommages et intérêts envers les tiers, le but du législateur a été d'avertir les tiers de se mettre en règle et d'empêcher qu'ils ne soient évincés par suite d'un concert frauduleux qui pourrait être pratiqué entre le vendeur et l'acquéreur; mais que ni dans ledit art. 2108, ni dans aucun autre article du Code, le législateur n'a conféré le pouvoir au conservateur de suppléer d'office le créancier qui négligerait de requérir l'inscription de l'hypothèque conventionnelle qui lui a été consentie; d'où il suit que l'inscription prise d'office le 6 mars 1823, par le conservateur de l'arrondissement de Niort, sur la maison acquise des héritiers Lecointre de Puyravault, et revendue par les époux Potron au sieur Baudet, doit être considérée comme n'ayant jamais été prise, l'ayant été par un individu qui n'avait ni caractère ni attribution pour la prendre.» (Arrêt du 1er juillet 1851. Sirey, t. 51, II, 241.)

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immeubles de leur mari, et à compter du jour du mariage.-La femme n'a hypothèque pour les sommes dotates qui proviennent de successions à elle échues, ou de donations à elle faites pendant le mariage, qu'à compter de l'ouverture des successions ou du jour que les donations ont eu leur effet. Elle n'a hypothèque pour l'indemnité des dettes qu'elle a contractées avec son mari, et pour le remploi de ses propres aliénés, qu'à compter du jour de l'obligation ou de la vente. Dans aucun cas, la disposition du présent article ne pourra préjudicier aux droits acquis à des tiers avant la publication du pré

sent titre.

Indépendamment de toute inscription. Cette faveur a été accordée aux mineurs et aux femmes mariées, parce qu'étant, les uns sous la dépendance de leurs tuteurs, les autres sous celle de leurs maris, il a pu leur être impossible de prendre ir scription; mais il n'y a que ces deux sortes d'hypothèques légales qui soient dispensées de l'inscription; celles des communes, des établissements publics (art. 2121), des privilégiés devenus simples créanciers hypothécaires (art. 2113) et des légataires (art. 1017), n'en sont point affranchis, et même le législateur attache tant d'importance à la publicité, qu'il prend encore tous les moyens possibles d'obliger à faire inscrire les hypothèques légales des mineurs et des femmes mariées (art. 2136); mais enfin si, nonobstant ces dispositions, elles n'ont point été inscrites, elles n'en produisent pas moins leur effet.

A leur tuteur. Nous avons vu, sous l'article 389, que l'hypothèque légale ne frappe pas les immeubles du père, administrateur, durant le mariage, des biens de ses enfants. (Arrêt de la cour suprême du 3 décembre 1821. Dall., ann. 1822, I, 62.)

A raison de sa gestion. C'est-à-dire pour tout ce dont il peut se trouver reliquataire à raison de la tutelle l'hypothèque s'étendrait même aux dettes personnelles exigibles durant la tutelle, parce qu'il est supposé les avoir exigées de lui-même comme il aurait dû les exiger d'un autre débiteur. Mais si elles n'étaient exigibles qu'après l'expiration de la tutelle, elles ne seraient pas garanties par l'hypothèque légale; car sa qualité de tuteur ne doit pas changer sa position; si l'hypothèque avait été consentie avec le père du pupille par un acte authentique, il devrait prendre inscription lui-même. QUESTION. Lorsque le pupille a atteint sa majoritė, ou l'interdit obtenu mainlevée de son interdiction, l'hypothèque légale continue-t-elle d'exister sans inscription? Oui; car elle est parfaite, dès le principe, sans inscription, et tout ce qui peut arriver dans la suite ne peut porter atteinte aux droits acquis aux mineurs et aux interdits pendant leur minorité et leur interdiction. Voir l'arrêt de la cour de Montpellier cité plus bas et un arrêt de la cour de cass. du 1er déc. 1824. (Dall., ann. 1827, I, 480.)

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De leurs dot et conventions matrimoniales. On entend par dot tout ce que la femme apporte à son mari pour supporter les charges du mariage, qu'elle soit mariée sous le régime de la communauté ou sous le régime dotal (art. 1540); on nomme conventions matrimoniales toutes celles qui ont pour objet de procurer quelque avantage aux époux, par exemple, les donations faites par le contrat de ma

riage, les gains de survie, le préciput, etc. Ainsi la égale, du jour de la célébration du mariage, pour femme a sur les biens de son mari une hypothèque toutes ces sortes de conventions, comme pour sa dot, bien que ces conventions n'aient souvent leur effet qu'à la dissolution du mariage: mais ces conventions peuvent avoir déterminé la femme à contracter mariage, et le législateur n'a pas voulu qu'elle pût perdre, par la dissipation de son mari, des droits sur lesquels elle a compté. Il y a cependant exception à ce principe à l'égard des femmes des faillis (article 549 C. com.). QUESTION. Les femmes ontelles hypothèque légale pour sûreté de leurs créances paraphernales (article 15 C. civ.), comme pour leurs autres droits? La cour suprême a établi l'affirmative: Vu les articles 2121, 2155, 2193, 2194 et 2195 du Code civil; attendu que l'article 2121 dit d'une manière générale et absolue, que les femmes ont une hypothèque légale sur les biens de leurs maris, pour sûreté de leurs droits et créances; que par ces mots, droits et créances, l'on doit nécessairement entendre tout ce que les femmes sont en droit de réclamer contre leurs maris, à quelque titre que ce soit; que l'article 2135 porte également, et sans restriction, que les femmes ont une hypothè que indépendante de toute inscription sur les biens de leurs maris; que si cet article fixe diverses époques auxquelles remonte cette hypothèque des femmes, suivant la nature des droits qu'elles ont à réclamer, ce n'est pas pour en soustraire aucun à l'hypothèque qu'il leur accorde, mais uniquement pour établir que tous ne doivent pas remonter à la date de leur mariage; qu'il résulte, en effet, des dispositions des articles 2193, 2194 et 2195, que les acquéreurs des immeubles des maris ne purgent les hypothèques non inscrites des femmes mariées, pour leurs dots, reprises et conventions matrimoniales, qu'en observant les formalités qu'ils prescrivent; que les créances paraphernales des femmes rentrent nécssairement dans les dispositions générales de ces articles; qu'elles constituent, en effet, un des genres de reprise qu'elles ont à exercer sur leurs maris, lorsque ceux-ci en ont employé le montant à leur profit; d'où il suit que les femmes mariées ont une hypothèque légale indépendante de toute inscription, sur les biens de leurs maris, pour la sûrêté de leurs paraphernaux, comme pour toutes leurs autres reprises, lorsque ceux-ci en ont reçu le montant et qu'ils en sont restés débiteurs envers elles; qu'il y a même raison de décider relativement aux créances paraphernales des femmes, que relativement à tous leurs autres droits; que le même empê chement moral existe à cet égard de la part des femmes mariées sous le régime dotal, pour la conservation de ces cicances par la voie de l'inscription, qu'à l'égard des femmes mariées sous le régime de la communauté, puisque, comme celles-ci, elles ne peuvent disposer de leurs biens qu'avec l'autorisation de leurs maris.» (Arrêt du 11 juin 1822, ch. civ. Dall., ann. 1822, I, 596.) Voy. encore un arrêt identique de la même cour, en date du 6 juin 1826, ch. civ. (Dall., ann. 1826, 1, 295.)-QUESTION. L'hypothèque legale de la femme doit-elle nécessairement étre inscrite après le dissolution du mariage? La cour de Montpellier a consacré la négative: Altendu que l'article 2155 du Code civil établit en faveur des femmes une hypothèque indépendante de toute inscription, pour raison de leurs dot et conventions matrimoniales, sur les immenbles de leurs maris, à compter du jour du mariage; que ce droit accordé à la femme n'est modifié par aucune dispa

sition de la loi qui puisse faire cesser l'effet de son hypothèque légale à l'époque de la dissolution du mariage, ou à aucune autre époque déterminée; que l'hypothèque de la femme n'est pas un privilége purement personnel, attaché à sa qualité actuelle de femme mariée, et qui, par sa nature, doive cesser avec cette qualité; mais que cette hypothèque est au contraire, un droit inhérent à la nature de sa créance même, qui continue de subsister après la dissolution du mariage, et qui est transmissible aux héritiers de la femme; que, par la dissolution du mariage, la créance de la femme ne change pas de nature, et ne peut être soumise, pour la conservation de l'hypothèque, à la formalité de l'inscription, qui n'est pas requise pour son établissement; qu'il suit de là que l'hypothèque de la femme étant dispensée d'inscription, la disposition législative qui fixe à dix années la durée des inscriptions hypothé caires ne lui est point applicable, et que cette hypothèque doit durer autant que la créance dont elle est l'accessoire; que le législateur n'a soumis la femme à faire inscrire son hypothèque que dans le cas exprimé dans l'article 2195, et après l'accomplissement des formalités prescrites par l'article 2194; qu'il suit de là que, hors ce cas, et sans l'accomplissement de ces formalités, l'hypothèque légale des femmes demeure toujours exempte d'inscription; attendu que cette doctrine se trouve appuyée de deux avis du conseil d'Etat, approuvés par le chef du gouvernement, en date du 15 décembre 1807 et du 8 mai 1812, ainsi que d'un arrêt de la cour de cassation du 1er décembre 1824, qui, le décidant pour l'hypothèque légale des mineurs, le décide implicitement pour celle des femmes, puisqu'elle est de la même nature, et que c'est aussi ce que la cour a décidé par ses arrêts des 1er février et 21 août 1828; attendu que c'est en vain que l'on oppose, pour le soutien de l'opinion contraire, les inconvénients auxquels les tiers se trouveraient exposés; qu'il suffit de considérer, par rapport aux acquéIcurs, que le mode établi par l'article 2194, et l'avis du conseil d'Etat du 9 mai 1807, pour purger les hypothèques légales à l'égard de toutes personnes connues ou inconnues qui en auraient de pareilles à faire valoir, offre un moyen aussi simple que solide pour forcer la femme, on ses représentants, à faire connaître leurs droits par la voie de l'inscription; qu'à l'égard des créanciers ordinaires, rien ne les dispense de s'enquérir des charges de toute nature qui peuvent peser sur les biens de ceux avec qui ils désirent contracter.» (Arrêt du 14 fév. 1829. Sirey, t. 51, II, 46.) Voir, dans le même sens, un arrêt de la même cour du 1er février 1828. (Dall., ann. 1828, II, 158.)

Les sommes dotales. Si la succession renfermait des immeubles, c'est seulement du jour de l'aliénation que l'hypothèque légale commencerait, aux termes du second alinéa : la raison qui fait donner hypothèque aux femmes, du jour de la succession, pour les sommes que le mari peut dissiper, ne s'applique plus aux immeubles. Pour savoir si la femme mariée sous le régime dotal a, pour la restitution de sa dot, tout à la fois l'action en résolution de la vente et hypothèque légale sur les biens de son mari, voyez nos explications sur l'article 1560.

Le remploi de ses propres aliénés. Ainsi, bien que des immeubles apportés pour soutenir les charges du mariage fissent partie de la dot, ce ne serait que du jour de la vente, et non du jour du mariage, que l'hypothèque commencerait, car c'est de ce jour seulement qu'elle se trouve exposée à

--

perdre son bien, faute par son mari de faire le remploi (art. 1433). — QUESTION. La femme mariće peut-elle céder son hypothèque légale? Les auteurs paraissent aujourd'hui d'accord pour dire qu'elle ne le peut pas, si les époux sont mariés sous le régime dotal, parce que cette renonciation serait une aliénation directe de sa dot, cui est inaliénable (art. 1554) (voir cet article et les arrêts que nous avons cités); mais qu'elle peut faire cette renonciation si les époux sont mariés sous le régime en communauté, parce que, sous ce régime, pouvant aliéner ses immeubles (art. 1428), et contracter toutes sortes d'obligations du consentement de son mari, on ne voit pas pourquoi elle ne pourrait pas renoncer à son hypothèque (argum. art. 1451). Voir cet article et l'arrêt de la cour suprême que nous avons cité.

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2136. Sont toutefois les maris et les tuteurs tenus de rendre publiques les hypothèques dont leurs biens sont grevés, et, à cet ellet, de requérir eux-mêmes, sans aucun délai, inscription aux bureaux à ce établis, sur les immeubles à eux appartenant, et sur ceux qui pourront leur appartenir par la suite. Les maris et les tuteurs qui, ayant manqué de requérir et de faire faire les inscriptions ordonnées par le présent article, auraient consenti ou laissé prendre des priviléges ou des hypothèques sur leurs immeubles, sans déclarer expressément que lesdits immeubles étaient affectés à l'hypothèque légale des femmes et des mineurs, seront réputés stellionataires, et, comme tels, contraignables par corps.

-Seront réputés stellionataires. Sans pouvoir, à la différence des autres débiteurs (art. 2059), invoquer leur boune foi. (Arrêts de la cour de cassation du 29 novembre 1826, ch. civ. Dall., ann. 1827, 1, 253; et de la cour de Bordeaux du 15 mars 1833. Sirey, t. 33, II, 364.)

2137. Les subrogés tuteurs seront tenus, sous leur responsabilité personnelle, et sous peine de tous dommages et intérêts, de veiller à ce que les inscriptions soient prises, sans délai, sur les biens du tuleur, pour raison de sa gestion, même de faire faire lesdites inscriptions.

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Responsabilité personnelle. En général, c'est dans l'intérêt des mineurs que les subrogés tuteurs sont astreints à remplir certaines formalités : ici c'est dans l'intérêt des tiers, qui ont mème une action subsidiaire contre le subrogé tuteur, person▾ nellement responsable à leur égard du défaut d'inscription dont ils seraient victimes.

2138. A défaut par les maris, tuteurs, subrogés tuteurs, de faire faire les inscriptions ordonnées par les articles précédents, elles seront requises par le procureur du roi près le tribunal de première instance du do

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