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Couvertes ni par ratification, ni par prescription. Telles sont celles qui résultent d'un mariage qui n'a pas été contracté devant un officier civil (art. 163), ou d'une donation faite sous seing privé (art. 1339). Les tribunaux doivent les prononcer, par cela seul que l'acte nul ne peut produire aucun effet, et sans examiner si les parties sont lésées ou ne sont pas lésées par cet acte; les rescisions, au contraire, peuvent être couvertes par la ratification ou le silence des parties, et l'une d'elles ne peut demander la rescision, qu'en prouvant que l'acte lui est nuisible. Malgré ces différences, qui existent dans les choses, le Code, fort souvent, n'en met aucune dans les mots, et emploie indifféremment les expressions de nullité et de rescision.

1304. Dans tous les cas où l'action en

nullité ou en rescision d'une convention n'est pas limitée à un moindre temps par une loi particulière, cette action dure dix ans.

Ce temps ne court, dans le cas de violence, que du jour où elle a cessé; dans le cas d'erreur ou de dol, du jour où ils ont été découverts; et pour les actes passés par les femmes mariées non autorisées, du jour de la dissolution du mariage.-Le temps ne court, à l'égard des actes faits par les interdits, que du jour où l'interdiction est levée; et à l'égard de ceux faits par les mineurs, que du jour de la majorité.

= Par une loi particulière. Dans le mariage, par exemple, si les parents demandent la nullité pour défaut de consentement, ils doivent le faire dans l'année (art. 183).

De la dissolution du mariage. Parce que c'est à cette époque seulement que la femme, étant devenue maîtresse de ses droits, a pu intenter l'action en rescision; car il faut toujours que le délai de dix ans soit utile, c'est-à-dire qu'il ne coure que contre ceux qui sont en état d'agir. C'est aussi pour cette raison qu'il ne commence que du jour où la violence a cessé, où le dol et l'erreur ont été découverts, où l'interdiction a été levée, où la minorité a fini.-Au reste, le Code ne porte rien de contraire à cette maxime, que l'action pour demander la rescision d'un acte peut être temporaire, mais que l'exception doit être perpétuelle: Quæ temporalia sunt ad agendum, perpetua sunt ad excipiendum. En sorte que si la convention a été exécutée, la partie qu'elle lèse n'aura que dix ans pour en demander la rescision; mais si elle n'a pas été exécutée, tant qu'on aura le droit d'en demander l'exécution, la partie lésée pourra opposer l'exception provenant de la cause de rescision. S'il en était autrement, il serait trop facile de surprendre un interdit: on lui ferait pendant son interdiction consentir un acte dont il perdrait le souvenir; on garderait le silence pendant les dix ans qui suivraient la mainlevée de l'interdiction. puis l'on produirait alors cet acte dont le débiteur ignorait l'existence si l'acte a été exécuté par l'interdit, l'absence de la chose le frappera quand il recouvrera la raison; et si, dans ce cas, il laisse passer dix ans sans réclamer, c'est qu'il juge à propos de maintenir l'acte qu'il a consenti, et il n'y a alors aucune surprise à redouter. Voyez, à l'appui de cette doctrine, un arrêt de la cour de cassation du 24 janvier 1855, ch. des req. (Sirey, L 33, 1, 268.)

Par les mineurs. Ou par leurs représentants légaux, leurs tuteurs, d'après le principe: Factum tuloris, factum pupilli (art. 450).—QUESTION. Si une vente de biens appartenant à un mineur a été faite par son ancien tuteur, la tutelle étant finie, l'action ne dure-t-elle que dix ans? Elle dure trente ans; car ce n'est plus, de la part de cette personne, la vente d'un bien faite au nom du mineur par son représentant, c'est la vente de la chose d'autrui, puisqu'elle est faite par une personne étrangère, dans la réalité, au mineur. (Arrêt de la cour de cassation du 8 décembre 1813, ch. civ. Dall., ann. 1814, I, 277.) L'action ne durerait toujours que dix ans, lors même que le tuteur aurait vendu sans observer les formalités prescrites par la loi pour l'aliénation des biens des mineurs, car la loi ne distingue pas. (Arrêt de la cour de cassation du 14 novembre 1826, ch. civ. Sirey, t. 27, I, 306). Voyez, cependant, contre cette opinion, un arrêt de la cour de Riom du 13 décembre 1826 (Sirey, t. 27, II, 147.) Il est de principe que l'inobservation des formalités prescrites pour la validité de l'aliénation des biens des mineurs peut être le motif de l'action en nullité qu'on doit intenter dans les dix ans, à compter de la majorité acquise par les mineurs. (Arrêt de la cour de cassation du 5 décembre 1826, ch. des req. Dall., ann. 1827, I, 81.)

[HOLLANDE. Art. 1490 du nouveau Code civil. La durée de l'action a été limitée à cinq ans, et il a été statué expressément que ce terme n'est pas applicable aux nullités invoquées par voie de défense ou d'exception, lesquelles on peut toujours faire valoir.]

1305. La simple lésion donne lieu à la

rescision en faveur du mineur non émancipé, contre toutes sortes de conventions; et, en faveur du mineur émancipé, contre toutes conventions qui excèdent les bornes de sa capacité, ainsi qu'elle est déterminée au titre de la Minorité, de la Tutelle et de l'Émancipation.

= La simple lésion. Ainsi la minorité seule n'est pas une cause de nullité radicale, mais seulement un motif de rescision. Il faut donc que le mineur prouve qu'il est lésé, restituitur non tanquàm minor sed tanquàm læsus. Si, par exemple, il a emprunté une somme d'argent qu'il a employée utilement à des réparations nécessaires, il ne pourra pas demander la nullité de cet emprunt. La femme mariée, au contraire, n'a pas besoin de prouver qu'elle est lésée pour demander la nullité de l'acte qu'elle a passé sans autorisation, parce qu'étant sous la dependance de son mari, elle n'a pu donner de consentement valable. Il en est de même de l'interdit, parce qu'il est incapable d'avoir une volonté raisonnable. On doit en dire autant des enfants en bas âge. Chez les Romains, jusqu'à l'âge de sept ans, leurs contrats étaient radicalement nuls et comme non

avenus.

[HOLLANDE. Cette disposition a été remplacée, dans Je nouveau Code civil, par la première partie de l'art. 1482, ainsi conçue : « Toutes obligations contractées par un mineur ou interdit sont nulles de plein droit, et doivent être déclarées nulles sur une action intentée par eux ou en leur nom, par le seul fait de la minorité ou de l'interdiction. La seconde partie de cet article embrasse les mineurs émancipés

et les femmes mariées autorisées, et déclare nulles les obligations par eux contractées, pour autant qu'elles excèdent leur capacité. Les trois dispositions suivantes du Code français ont été supprimées.]

1306. Le mineur n'est pas restituable pour cause de lésion, lorsqu'elle ne résulte que d'un événement casuel et imprévu.

Casuel et imprévu. Si, par exemple, la maison que le mineur avait fait réparer, avec l'argent emprunté, a été détruite par l'incendie. C'est un événement dont le prêteur ne doit pas être responsable.

1307. La simple déclaration de majorité, faite par le mineur, ne fait point obstacle à sa restitution.

La simple déclaration. Si donc le mineur avait pratiqué quelque manœuvre pour tromper celui qui contracte avec lui; si, par exemple, il lui avait présenté un faux acte de naissance, il n'y aurait plus une simple déclaration, mais un dol, c'est-à-dire une espèce de délit (art. 1310); et par suite, sa déclaration environnée de telles circonstances empêcherait sa restitution.

Ne fait point obstacle. C'est à la personne qui contracte avec quelqu'un, de bien s'assurer de son état, de sa capacité. D'ailleurs, sans cette précaution, les personnes qui auraient passé des actes avec des mineurs n'auraient pas manqué de faire toujours déclarer à ces derniers qu'ils étaient majeurs, et de rendre ainsi leurs conventions inattaquables.

1308. Le mineur commerçant, banquier ou artisan, n'est point restituable contre les engagements qu'il a pris à raison de son commerce ou de son art.

N'est point restituable. Nous avons vu (art. 487), que quand le mineur est émancipé, et autorisé par ses parents à faire le négoce, il est capable de tous les actes qui concernent ce négoce.

1309. Le mineur n'est point restituable contre les conventions portées en son contrat de mariage, lorsqu'elles ont été faites avec le consentement et l'assistance de ceux dont le consentement est requis pour la validité de son mariage.

Parce que nous avons vu, article 1095, qu'avec le consentement de ces personnes, il est capable de disposer dans son contrat de mariage aussi bien qu'un majeur. Voir aussi l'article 1398.

[HOLLANDE. Art. 1483, § 2 du nouveau Code civil.]

1310. Il n'est point restituable contre les obligations résultant de son délit ou quasi

délit.

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son délit; ces obligations sont celles de réparer lo préjudice causé par le délit (art. 1382). Mais si le mineur prend des arrangements à ce sujet, passe une transaction et y contracte des engagements, il pourra les attaquer pour lésion.

[HOLLANDE. Article 4483, § 1er du nouveau Code civil.]

1311. Il n'est plus recevable à revenir contre l'engagement qu'il avait souscrit en minorité, lorsqu'il l'a ratifié en majorité, soit que cet engagement fût nul en sa forme, soit qu'il fut seulement sujet à restitution.

= - Ratifié en majorité. Parce que ayant ratifié cet engagement à une époque où il est capable de contracter, le premier vice disparaît, et le mineur est valablement obligé du moment de la ratification. Il n'est pas même nécessaire que cette ratification soit expresse. Si, par exemple, il exécute, étant majeur, l'obligation qu'il avait contractée dans sa minorité, il ne peut plus en demander la rescision. (MODÈLE d'acte de ratification, form. N° 18.)

[HOLLANDE. L'art. 1492 du nouveau Code civil, qui remplace cette disposition, embrasse dans sa généralité le mineur, l'interdit et la femme mariée, et les cas de violence, d'erreur et de dol. L'obligation ne peut plus être attaquée, toutes les fois qu'elle a été ratifiée expressément ou tacitement après le jour de la majorité, de la levée de l'interdiction, de la dissolution du mariage, de la cessation de la violence, ou de la découverte de l'erreur ou du dol. Les deux dispositions suivantes du Code français ont été supprimées.]

1312. Lorsque les mineurs, les interdits

ou les femmes mariées sont admis, en ces qualités, à se faire restituer contre leurs engagements, le remboursement de ce qui aurait été, en conséquence de ces engagements, payé pendant la minorité, l'interdiction ou le mariage, ne peut en être exigé, à moins qu'il ne soit prouvé que ce qui a été payé a tourné à leur profit.

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Ne peut en être exigé. Ainsi, les personnes qui traitent avec des incapables sont exposées à se voir obligées de rembourser à l'incapable ce qu'elles ont reçu, sans pouvoir se faire rendre ce qu'elles lui ont donné, si l'incapable l'a dissipé ou perdu.

A tourné à leur profit. Parce que personne ne doit s'enrichir aux dépens d'autrui.

1313. Les majeurs ne sont restitués pour cause de lésion, que dans le cas et sous les conditions spécialement exprimés dans le présent Code.

= Les majeurs. Nous avons donné le motif de cette disposition (art. 1118). Il importe au repos de la société que les conventions ne soient pas trop facilement ébranlées.

Spécialement exprimés. Dans un partage, pour lésion de plus du quart (art. 887); dans une vente, pour lésion des sept douzièmes (art. 1674).

1314. Lorsque les formalités requises à l'égard des mineurs ou des interdits, soit

pour aliénation d'immeubles, soit dans un partage de succession, ont été remplies, ils sont, relativement à ces actes, considérés comme s'ils les avaient fails en majorité, ou avant l'interdiction.

- En majorité. Ils ne peuvent donc être restitués contre ces actes, que dans les cas où un majeur le serait lui-même.

[HOLLANDE. Art. 1484 du nouveau Code civil.]

CHAPITRE VI.

De la Preuve des Obligations et de celle du Payement.

1313. Celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver.-Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le payement ou le fait qui a produit T'extinction de son obligation.

-Doit la prouver. C'est un principe de droit naturel, que celui qui prétend qu'un autre est obligé envers lui doit établir cette obligation: Onus probandi incumbit actori.

Doit justifier. Une fois la preuve faite de la part du demandeur, le défendeur doit à son tour établir qu'il est libéré; il est alors demandeur dans le moyen ou l'exception par lesquels il prétend repousser la demande; c'est ce que les auteurs entendent par ces mots: Reus excipiendo, fit actor. Ces expressions actor et reus signifient, l'une, le demandeur, l'autre, le défendeur.[Lorsque le créancier d'une rente viagère en réclame les arrérages, si le débiteur oppose qu'il existe une convention portant qu'il aura le droit de rembourser le capital, et qu'en effet il l'a remboursé, le juge ne peut ordonner que le créancier prouvera le contraire en rapportant la conven.. tion invoquée par le débiteur. Ce serait violer l'article 1315 du Code civil, en ce que le débiteur se trouverait par là déchargé de la preuve d'un fait par lui allégué pour établir sa libération. (Arrêt de la cour de cassation de France du 3 août 1818.)]

[HOLLANDE. Art. 1902 du nouveau Code civil.]

1316. Les règles qui concernent la preuve littérale, la preuve testimoniale, les présomptions, l'aveu de la partie et le serment, sont expliquées dans les sections. suivantes.

Comme on le voit par l'énumération.que fait cet article, il y a cinq manières de prouver les obligations.

[HOLLANDE. Art. 1903 du nouveau Code civil.]

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élé reçu par officiers publics ayant le droit d'instrumenter dans le lieu où l'acte a été rédigé, et avec les solennités requises.

=Par officiers publics. Tels que les juges de paix, les officiers de l'état civil, les notaires, les huissiers, etc.; la loi entend principalement parler ici des actes reçus par les notaires, qui sont des fonctionnaires publics établis pour recevoir tous les actes et contrats auxquels les parties doivent ou veulent donner le caractère d'authenticité attaché aux actes de l'autorité publique, et pour en assurer la date, en conserver le dépôt, en délivrer les grosses ou expéditions. Ils sont institués à vie, et tenus de prê ter leur ministère lorsqu'ils en sont requis (art. 1, 2 et 5 de la loi du 25 ventôse an xi).

D'instrumenter. C'est-à-dire de rédiger les actes. Dans le lieu. Les notaires exercent leurs fonctions, savoir ceux des villes où est établie la cour royale, dans l'étendue du ressort de cette cour; ceux des villes où il n'y a qu'un tribunal de première instance, dans l'étendue du ressort de ce tribunal; ceux des autres communes, dans l'étendue du ressort du tribunal de paix. Il est défendu à tout notaire d'instrude ses fonctions pendant trois mois, d'être destitué menter hors de son ressort, à peine d'être suspendu en cas de récidive, et de tous dommages et intérêts (art. 5 et 6, même loi).

Avec les solennités. Telles que la présence des témoins, la signature du notaire, des parties, etc. Cette expression, solennités, convient surtout aux actes solennels, c'est-à-dire qui ne seraient pas vaJables sans certaines formalités, tels que la donation; mais elle est prise ici pour les formalités en général.

[HOLLANDE. Art. 1905 du nouveau Code civil.]

1318.L'acte qui n'est point authentique, par l'incompétence ou l'incapacité de l'officier, ou par un défaut de forme, vaut comme écriture privée s'il a été signé des parties.

= Par l'incompétence. Le notaire est incompétent, s'il instrumente hors de son ressort; il a perdu en quelque sorte son caractère d'officier public, et il ne peut plus donner l'authenticité à l'acte.

Ou l'incapacité. Si, par exemple, il est interdit ou suspendu de ses fonctions. L'incapacité commence du moment que le jugement d'interdiction et de suspension a été signifié à l'officier interdit ou suspendu.

Comme écriture privée. La personne qui écrit étant indifférente, lorsque la signature des parties y est apposée, pour qu'un acte ait force d'écriture privée, il importe peu dans ce cas que le notaire qui l'a écrit fût dépouillé de son caractère d'homme public, ou que l'acte fût atteint de quelque vice de forme; par exemple, signé d'un seul témoin. Mais comme c'est uniquement la signature des parties qui rend l'acte valable, il s'ensuit que l'article ne s'applique pas aux actes qui doivent être passés nécessairement devant notaires, tels qu'une donation; la signature des parties, dans ce cas, n'empêcherait pas l'acte d'être radicalement nul (art. 1339). QUESTION. Si l'acte nul par l'incompétence ou l'incapacité de l'officier public, mais signe des parties, esi synallagmatique, devra-t-il, pour être valable, être fait en autant d'originaux qu'il y a de parties, comme l'exige l'article 1325, pour ces sortes d'acles, lorsqu'ils sont sous seing privé? Non; les actes que

font les notaires n'étant jamais faits en doubles originaux, il s'ensuivrait que l'article 1318 ne recevrait jamais d'application; en second lieu, le motif de l'article 1325 n'existe plus dans le cas de notre article; car ce motif a été d'empêcher que l'une des parties, ayant seule un original, pût changer à son gré sa position en le faisant disparaître : or, cet inconvénient ne se rencontre pas ici, puisque l'acte, bien que reçu par un homme public incompétent, n'en est pas moins en dépôt chez lui, et conséquemment à la disposition de toutes les parties. La cour suprême, qui adopte cette opinion, ajoute à ces considérations qu'on ne peut aux actes de cette nature appliquer les dispositions de l'article 1523, puisque les parties ayant l'intention, lorsque la convention a été faite, de suivre la forme authentique, ne peuvent en même temps suivre les formes prescrites pour les actes sous signature privée, etc. » (Arrêt du 8 mai 1827, ch. des req. Sirey, t. 27, I, 235.)

[HOLLANDE. Art. 1906 du nouveau Code civil.]

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= Fait pleine foi de la convention. Mais l'acte ne prouve que la convention elle-même, c'est-à-dire les choses qui étaient de nature à être attestées par le notaire, telles que la présence des parties, la déclaration de leur volonté, etc.; il ne prouverait pas les choses pour la constatation desquelles les officiers publics n'ont pas qualité ainsi, c'est en vain que l'acte contiendrait l'attestation que les parties sont saines d'esprit; on pourrait établir le contraire sans prendre contre l'acte la voie de l'inscription de faux. De même si on prétendait qu'il y a eu simulation de la part des parties, par exemple, que la numération des espèces n'a été que fictive, on n'aurait pas besoin, pour le prouver, de s'inscrire en faux; car on n'attaque pas la foi due à l'acte, puisqu'on ne nie pas que le notaire n'ait vu compter les espèces.

Ou ayants cause. Nous avons déjà défini ce qu'on entend par ayants cause (article 1122), et nous avons dit que ce mot, après celui d'héritiers, s'entendait particulièrement des légataires et autres successeurs universels du défunt.

En faux principal. Le faux principal est celui dans lequel on traduit le faussaire devant les tribunaux criminels; le faux incident est celui par lequel, dans le cours d'un procès, on demande devant les juges civils la nullité d'une pièce produite, comme entachée de faux (art. 214 du Code de procédure). Dans le premier cas, comme la chambre des mises en accusation doit d'abord prononcer, la loi a pu indiquer cette époque pour suspendre l'exécution de l'acte; mais dans le second cas, comme l'instruction est toute civile, et qu'il n'y a conséquemment point de mise en accusation, aucune époque de cette instruction ne pouvant être particulièrement indiquée, la loi a laissé aux juges la faculté de suspendre cette exécution suivant les circonstances. Le mot inscription de faux vient de ce que la partie qui

attaque l'acte s'inscrit au greffe pour suivre cette procédure (art. 218 du Code de procédure).-QuesTION. Est-on obligé de prendre la voie de l'inscription de faux contre un acte authentique qu'on attaque, comme arraché par la violence? La cour de cassation a consacré la négative: « Sur le moyen résultant d'une prétendue violation de l'article 1319 du Code civil, et des articles 1er et 19 de la loi du 25 ventôse an xr sur le notariat; attendu, en droit, que s'il est vrai que les faits matériels que le notaire atteste de visu et auditu, ne peuvent être démentis et attaqués que par la voie de l'inscription de faux, il est vrai aussi que, lorsqu'un acte authentique est attaqué, non comme faux, mais comme arraché par violence, et dénué du consentement réel des parties, les faits de violence et d'extorsion peuvent, comme tous ceux qui constituent des délits et quasi-délits, être établis par la preuve testimoniale, par les présomptions graves, précises et concordantes, de nature à former la conviction des magistrats.» (Arrêt du 5 février 1828, ch. des req. Dall., ann. 1828, I,122.)

QUESTION. Pourrait-on juger qu'il n'est pas prouvé qu'une personne est majeure, bien que dans un acte notarié la majorité fût attestée? La cour suprême a adopté l'affirmative: « Attendu que, quand même il serait prouvé que cet acte a été produit devant le tribunal et devant la cour royale, celle-ci avait encore le droit de prononcer que la minorité de la demoiselle Brognies n'était pas prouvée puisque, dans les actes des notaires, il n'y a d'authentique que ce dont le notaire a pu juger par le témoignage de ses sens; que, dans l'espèce, le notaire n'a fait autre chose que relater ce que les parties ont jugé à propos de lui dire, et que cela ne suffit pas pour prouver ce qui ne pouvait l'être que par un acte de naissance ou par tous autres actes équivalents; rejette, etc. (Arrêt du 14 février 1828, ch. des req. Dall., ann. 1828, I, 132.)

[HOLLANDE. Art. 1907 et 1909 du nouveau Code civil.]

1320. L'acte, soit authentique, soit sous seing privé, fait foi entre les parties, même de ce qui n'y est exprimé qu'en termes énonciatifs, pourvu que l'énonciation ait un rapport direct à la disposition. Les énonciations étrangères à la disposition ne peuvent servir que d'un commencement de preuve.

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A la disposition. On entend par là l'opération que les parties ont eu principalement en vue, et par énonciation, ce qui pourrait en être retranché sans altérer la substance de l'acte. Je reconnais devoir à telle personne une rente de 1,000 francs, dont deux années d'arrérages ont été payées d'avance: la disposition est la reconnaissance de la rente, l'énonciation est le payement anticipé de deux années d'arré rages; et comme cette énonciation a un rapport direct à la disposition, l'acte en fait également foi. Mais si, dans la vente d'une maison, je déclarais dans mes qualités que je suis héritier de telle personne, cette énonciation n'ayant aucun rapport direct à la disposition, l'acte n'en ferait pas foi.

Ne peuvent. Ainsi les juges pourraient même ne pas admettre ces énonciations étrangères à la dispo-sition comme un commencement de preuve.

[HOLLANDE. Art. 1908 du nouveau Code civil.]

1321. Les contre-lettres ne peuvent avoir

leur effet qu'entre les parties contractantes: elles n'ont point d'effet contre les tiers.

Les contre-lettres. Ce sont des actes destinés Qrdinairement à rester secrets, et qui annulent ou modifient un acte ostensible. Par une contre-lettre, deux parties déclarent qu'une vente passée entre elles n'est pas réelle; si l'acquéreur vend la chose à une autre personne, cette seconde vente est valable; car si une contre-lettre pouvait nuire à un tiers, la loi eût toléré un moyen de fraude. Remarquons aussi que les tiers peuvent, au contraire, opposer les contre-lettres aux parties qui les ont souscrites. La loi du 22 frimaire an vii déclarait nulles les contrelettres; elle est en cela abrogée par le Code. (MODÈLE de contre-lettre, form. No 19.)

(HOLLANDE. Art. 1910 du nouveau Code civil.].

SII. De l'Acte sous seing privé.

1322. L'acte sous seing privé, reconnu par celui auquel on l'oppose, ou légalement tenu pour reconnu, a, entre ceux qui l'ont souscrit et entre leurs héritiers et ayants cause, la même foi que l'acte authentique.

C Reconnu. Par un acte authentique. Car si c'était par un acte sous seing privé, il pourrait encore désavouer la reconnaissance qu'on lui opposerait.

Légalement. C'est-à-dire lorsqu'un jugement, après une instruction qu'on nomme vérification d'écritures (art. 1324 du Code civil; art. 193 du Code de proc.), ou sans vérification, si le défendeur ne dénie pas l'acte, ou ne comparaît pas (art. 194 du Code de proc.), a décidé que tel acte a réellement été fait par telle personne.

La même foi. En effet, l'authenticité ne sert qu'à prouver qu'un acte a été consenti par la personne qui a comparu devant l'officier public. Si elle recon

ait cet acte, ou si un jugement déclare qu'il est émané d'elle, il devient aussi certain que l'acte lui appartient que si un officier public l'eût attesté.

1323. Celui auquel on oppose un acte sous seing privé est obligé d'avouer ou de désavoner formellement son écriture ou sa signature. Ses héritiers ou ayants cause peuvent se contenter de déclarer qu'ils ne connaissent point l'écriture ou la signature de leur auteur.

= Ou de désavouer formellement. Il ne peut pas, en effet, prétendre ne pas connaitre son écriture.[Les articles 1323 et 1324 du Code civil et 195 du Code de procédure ne sont applicables qu'à ces actes, qui sont le fondement de l'action dirigée contre celui auquel ils sont opposés. Par ce motif celui auquel on oppose une écriture privée, présentée comme pièce de comparaison, n'est pas tenu de déclarer formellement s'il la reconnaît, la dénie ou la méconnaît. (Arrêt de la cour de cassation de Belgique du 28 février 1837.)]

Qu'ils ne connaissent point. Ils peuvent ne pas avoir une connaissance assez complète de l'écriture de leur auteur. Ils ne doivent donc pas être obligés de l'avouer ou de la désavouer formellement.

1324. Dans le cas où la partie désavoue con écriture ou sa signature, et dans les cas

où ses héritiers ou ayants cause déclarent ne les point connaître, la vérification en est ordonnée en justice.

- La vérification. C'est l'examen fait au moyen de titres, de témoins, ou par experts, d'une écriture privée, pour décider si elle appartient à la personne à qui elle est attribuée (art. 193 et suiv. du Code de proc.). Il y a cette différence entre l'acte authentique et l'acte sous seing privé, que celui qui invoque à l'appui de sa demande un acte authentique n'est pas obligé d'en prouver la vérité; c'est à celui qui prétend que l'acte est faux à le prouver au moyen d'une voie de procédure qu'on nomme inscription de faux. Au contraire, celui qui invoque un acte sous seing privé est obligé de prouver la vérité de cet acte, au moyen de la vérification, si le défendeur dénie l'écriture; la raison de cette différence résulte de ce que, dans le premier cas, un officier public ayant attesté la vérité de l'acte, foi lui est due tant qu'il n'est pas démontré faux; dans le second cas, le juge n'étant pas obligé d'accorder plus de confiance à la partie qui présente l'acte, et qui prétend qu'il appartient à l'autre partie, qu'à cette dernière qui le dénie, on retombe naturellement dans le principe général, qui veut que le demandeur prouve sa demande ou son obligation: Ei incumbil probatio qui dicit, non qui negat.

En est ordonnée. Äux termes de l'article 195 du Code de procédure, qui déroge aux dispositions absolues du présent article, les juges ont la faculté d'ordonner ou de refuser la vérification, et ils peuvent tenir l'écriture ou la signature pour vraies si leur conviction est formée sans recourir à cette preuve. (Arrêt de la cour suprême du 9 février 1830, ch. des req. Sirey, t. 30, 1, 235.) Mais il parait qu'il en serait différemment d'après l'arrêt suivant, si c'étaient des héritiers qui déclarassent ne pas reconnaître l'écriture de leur auteur.-QUESTION. Lorsque les héritiers déclarent ne point reconnaître la signature de leur auteur, la vérification doit-elle nécessairement être ordonnée? La cour suprême a consacré l'affirmative: « Vu les articles 1522, 1323 et 1324 du Code civil; attendu que, si celui auquel on oppose un acte sous seing privé est obligé d'avouer ou de désavouer formellement sa signature ou son écriture, il en est autrement lorsqu'un pareil acto est opposé à des héritiers comme la preuve d'une obligation qu'aurait contractée celui dont ils recueillent l'hérédité; que ceux-ci peuvent se contenter de déclarer qu'ils ne reconnaissent pas l'écriture et la signature de leur auteur; que dans ce cas, la preuve de l'obligation par la vérification d'écriture doit être nécessairement ordonnée préalablement à toute condamnation, et d'olice, lors même qu'il n'y aurait pas eu de conclusions prises à ce sujet; que, dans l'espèce, ainsi que le constatent les qualités de l'ar rêt attaqué, les héritiers Paret ont déclaré qu'ils ne reconnaissent ni ne méconnaissent l'écriture de leur auteur; que, en cet état, la cour royale de Bourges devait ordonner la vérification de l'écriture et de la signature de Paret, et que, en se dispensant de prescrire cette vérification, et en ordonnant le payement du billet litigieux en l'absence de cette preuve, elle a expressément violé les lois précitées; casse, etc. (Arrêt du 15 juillet 1854, ch. civ. Sirey, t. 54. I, 649.)

(HOLLANDE. Les trois dispositions qui précèdent ont été reproduites textuellement dans les articles 1912, 1915 et 1914 du nouveau Code civil.Į

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