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faites par l'interdit est une conséquence de la preuve légale du défaut de consentement; attendu que le mariage et le contrat qui en règle les conventions purement civiles, ne sont pas et ne doivent pas être rigoureusement soumis aux mêmes règles : en effet, le mariage tient essentiellement à l'ordre public et au droit public, tandis que les conventions civiles ne peuvent être régies que par le droit civil, et souvent des mariages ont été privés des effets civils sans être annulés; attendu qu'il n'existe aucune loi qui ait tellement lié le contrat de mariage et le mariage, qu'il soit légalement impossible de maintenir le mariage sans maintenir aussi les conventions civiles; ainsi, en annulant, dans l'intérêt des héritiers, les dispositions faites par un interdit, quoique faites dans un contrat de mariage, l'arrêt, loin de mé-connaitre les règles du droit civil, en a, au contraire, fait une juste application; rejette, etc. » (Arrêt du 28 décembre 1831, ch. des requêtes. Sirey, t. 32, 1, 358.)

[HOLLANDE. Art. 204 du nouveau Code civil.]

1396. Les changements qui y seraient

faits avant cette célébration doivent être constatés par acte passé dans la même forme que le contrat de mariage. Nul changement ou contre-lettre n'est, au surplus, valable sans la présence et le consentement simultané de toutes les personnes qui ont été parties dans le contrat de mariage.

Avant celle célébration. Des changements peuvent être faits au contrat jusqu'au jour de la célébration, parce qu'elle seule y met le sceau de l'irrévocabilité, et qu'il n'existe qu'autant qu'elle a lieu (art. 1088).

Dans la même forme. C'est-à-dire avec minute, et non en brevet, parce que cet acte pourrait être supprimé, ce qui changerait après le mariage les conditions de l'association conjugale.

Ou contre-lettre. Voyez la définition (art. 1321). Simultané. Parce que des consentements séparés pourraient s'obtenir plus facilement, et qu'il peut importer aux intérêts des époux et des familles que les changements soient parfaitement discutés et appréciés; mais on exige seulement le consentement des personnes qui y ont été réellement parties, et non de celles qu'on y a appelées simplement par déférence, honoris causa. La loi exige la présence des parties; il ne suffirait donc pas, comme dans beaucoup d'autres cas, qu'elles y fussent appelées; ce n'est pas le cas d'appliquer la maxime, que celui qui se tait consent, qui tacet consentire videtur; enfin, il faut bien remarquer que dans l'absence dé toutes ces conditions le changement est absolument sans effet à l'égard de tous.

[HOLLANDE. Art. 203 du nouveau Code civil.]

1397. Tous changements et contre-lettres, même revêtus des formes prescrites par l'article précédent, seront sans effet à l'égard des tiers, s'ils n'ont été rédigés à la suite de la minute du contrat de mariage; et le notaire ne pourra, à peine des dommages et intérêts des parties, et sous plus grande peine, s'il y a lieu, délivrer ni grosses ni expéditions du contrat de mariage, sans

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Sans transcrire à la suite. Il suit de la disposition finale de l'article, que les changements rédigés à la suite de la minute, mais non transcrits dans les expéditions, sont valables à l'égard des tiers, nonobstant l'omission commise par le notaire; en effet, les parties contractantes qui ont exigé la rédaction de la contre-lettre à la suite de la minute, ont fait dans l'intérêt des tiers tout ce que la loi pouvait exiger d'eux; n'avoir pas exigé cette rédaction, est un fait, une omission dont la loi punit les parties, en déclarant nuls à l'égard des tiers les changements dont il s'agit. Mais elle ne pouvait sans injustice les rendre responsables de la négligence du notaire qui omet dans son expédition quelque clause importante insérée dans la minute; seulement les tiers, trompés par l'infidélité de l'expédition, ont leur recours contre le notaire aussi la loi dit-elle, à peine de dommages et intérêts. Si les époux ou l'un d'eux sont commerçants, il faut en outre remplir les formalités prescrites par les articles 67, 68, 69, 70 du Code de

commerce.

[HOLLANDE. Cette disposition a été remplacée par l'article 207 du nouveau Code civil, conçu en ces termes: Aucune stipulation, dans les conventions matrimoniales, par laquelle il est dérogé en tout on en partie à la communauté légale, n'aura d'effet, à l'égard des tiers, que du jour de son inscription dans un registre public, qui sera tenu à cet effet au grefle de l'arrondissement dans lequel le mariage aura été contracté, ou dans lequel l'acte de mariage aura été transcrit, si le mariage a été contracté en pays étranger. »]

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1398. Le mineur habile à contracter mariage est habile à consentir toutes les conventions dont ce contrat est susceptible; et les conventions et donations qu'il y a faites sont valables, pourvu qu'il ait été assisté, dans le contrat, des dont le consentement personnes est nécessaire pour la validité du mariage.

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= Habile à contracter mariage. Ainsi, il faut que le mineur ait l'âge compétent, non-seulement au jour de la célébration, mais encore au jour du contrat de mariage, c'est-à-dire que l'homme doit avoir dix-huit ans révolus, et la femme quinze ans révolus. Le législateur aurait inutilement permis le mariage à cet age, s'il n'avait pas également permis aux époux de consentir les conventions sans lesquelles souvent le mariage ne pourrait pas avoir lieu.

Dont le consentement est nécessaire. Ainsi, bien qu'un mineur soit sous la tutelle d'un autre que ses père et mère, ce sont eux qui doivent donner le consentement dont il s'agit. Par exemple, si la mère survivante n'a pas voulu être tutrice (art. 594), c'est elle cependant qui devra consentir aux conventions matrimoniales, et non le conseil de famille et le tuteur, puisque c'est elle serle qui doit donner son

consentement au mariage (art. 148). Si, dans ce cas, ou dans tout autre semblable, on avait exigé le con · sentement du conseil de famille pour les conventions matrimoniales, il aurait pu, en le refusant, rendre illusoire le consentement donné par le père ou la mère au mariage même.-Lorsque, à défaut des ascendants, le conseil de famille doit donner son consentement au mariage, c'est lui aussi qui doit assister le mineur dans les conventions matrimoniales. Mais on pense généralement qu'il n'est pas nécessaire que le conseil de famille soit présent, il suffit qu'il approuve les conventions: le mot assistance n'est pas synonyme de présence (art. 212): la délibération approbative n'a pas besoin d'être homologuée; car les ascendants, s'ils existaient, pouvant consentir les conventions matrimoniales sans homologation, pourquoi l'exigerait-on pour l'approbation du conseil de famille.

[HOLLANDE. Art. 206 du nouveau Code civil.]

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CHAPITRE II.

Du Régime en Communauté.

- On définit la communauté, une société de biens entre époux. Elle ne peut exister qu'entre époux, parce que la faveur du mariage à seule permis qu'elle renfermât plusieurs clauses exorbitantes du droit commun, que nous aurons occasion de remarquer.

1399. La communauté, soit légale, soit conventionnelle, commence du jour du mariage contracté devant l'officier de l'état civil: on ne peut stipuler qu'elle commencera à une autre époque.

=Soit légale, soit conventionnelle. Ainsi, la communauté elle-même se divise : la communauté légale est celle qui existe sans contrat, ou par la simple déclaration qu'on se marie sous le régime de la communauté; elle forme seule le droit commun de la France (art. 1393), et toutes les règles qui la concernent sont renfermées dans la première partie du chapitre II. Si on la nomme légale, ce n'est pas qu'elle dérive immédiatement de la loi; car elle résulte, lors même qu'il n'y a pas de contrat, de la convention tacite des époux qu'ils entendent que leur association sera régie par les règles propres à cette communauté; mais on lui donne ce nom, parce que les époux n'ayant apporté aucune modification aux règles tracées par la loi, c'est elle seule qui régit les effets de la communauté établie entre eux. La communauté conventionnelle est celle qui n'existe qu'autant que les époux ont positivement stipulé telles ou telles clauses. La loi, dans la deuxième partie du chapitre II, indique les principales modifications que les époux peuvent faire à la communauté légale;

mais ils peuvent en établir d'autres s'ils le jugent à propos (art. 1527).

Du jour du mariage. Dans l'ancien droit, eile ne commençait que le lendemain du mariage, et lorsqu'il y avait lieu de présumer que ie mariage avait été consommé. Afin de prévenir des contestations sur la question de savoir si le mariage a été consommé et les fraudes qu'on pourrait pratiquer pour soustraire certains objets à la communauté qui commencerait à une autre époque que celle de la célébration, on a décidé qu'elle commencerait à l'instant même où le consentement qui forme le mariage serait inter

venu, et qu'on ne pourrait fixer une autre époque. Mais on est généralement d'accord que la communauté pourrait être soumise à une condition suspensive qui ne devrait se réaliser qu'après la célébration; car la condition ayant un effet rétroactif au jour où le contrat a été passé (art. 1179), il s'ensuit que la communauté aura existé ou n'aura pas existé, à partir du jour de la célébration.

[HOLLANDE. Art. 202 du nouveau Code civil.]

PREMIÈRE PARTIE.

De la Communauté légale.

1400. La communauté qui s'établit par la simple déclaration qu'on se marie sous le régime de la communauté, ou à défaut de contrat, est soumise aux règles expliquées dans les six sections qui suivent.

SECTION PREMIÈRE. De ce qui compose la Communaulė activement et passivement.

[HOLLANDE. Toute cette première section a été remplacée par les dispositions générales des articles 175, 176, 177 et 178 du nouveau Code civil, conçues en ces termes : «Art. 175. La communauté comprend, quant à l'actif, tous les biens meubles et immeubles des époux, tant présents qu'à venir, lors même qu'ils sont acquis à titre gratuit, à moins que le testateur ou le donateur n'en ait disposé autrement.-Art. 176. Elle comprend, quant au passif, toutes les dettes contractées par chacun des époux, soit avant, soit pendant le mariage.-Art. 177. Tous les fruits et revenus, ainsi que tous gains et pertes, échoient, pendant le mariage, au bénéfice ou au préjudice de la communauté.-Art. 178. Les dettes du mort, échues après le décès, sont supportées par les héritiers seuls du prédécédé. » ]

SI. De l'Actif de la Communauté.

-L'actif de la communauté est la masse des biens qui profitent à la communauté, le passif est la masse des dettes et charges qui pèsent sur la communauté; l'actif et le passif sont corrélatifs : c'est une balance exacte de profits et de charges, de recettes et de dépenses.

1401. La communauté se compose activenient,-1° De tout le mobilier que les époux possédaient au jour de la célébration du mariage, ensemble de tout le mobilier qui leur échoit pendant le mariage, à titre de succession ou même de donation, si le donateur n'a exprimé le contraire; -2° De tous les fruits, revenus, intérêts et arrérages, de quelque nature qu'ils soient, échus ou perçus pendant le mariage, et provenant des biens qui appartenaient aux époux lors de sa célébration, ou de ceux qui leur sont échus pendant le mariage, à quelque titre que ce soit; 5° De tous les immeubles qui sont acquis pendant le mariage.

De tout le mobilier. Il semble que le législateur voulant faire tomber dans la communauté les meu

bles, il lui suffisait pour cela de cette expression mobilier, qui comprend tout (art. 535), et que dès lors l'énumération de cet article est inutile; mais il n'en est pas ainsi, car, comme nous l'observerons tout à l'heure, tous les objets mobiliers n'entrent pas en communauté.-QUESTION. La valeur d'une charge d'officier ministériel, d'un notaire, par exemple, entre-t-elle dans la communauté? L'affirmative paraît constante: la loi ne distingue que deux espèces de biens, les meubles et les immeubles; or les charges des officiers ministériels ne sauraient être considérées comme des immeubles, tels que la loi les définit (art. 517 et suiv.); ce sont donc des meubles qui, à ce titre et malgré leur importance, tombent dans la communauté.

A titre de succession ou même de donation. Entre-vifs, ou testamentaire. Il est clair aussi que le mobilier acquis à un autre titre appartient également à la communauté, par exemple, les meubles achetés avec l'argent de la communauté: ces meubles tiennent la place de l'argent qui faisait partie de la communauté.

De tous les fruits, revenus, intérêts et arrérages. Cette énumération était nécessaire; car, comme nous venons de le dire, il est des meubles qui, bien que provenant d'un immeuble, n'entrent pas en communauté ainsi, les futaies abattues pendant le mariage, quoique meubles aussitôt qu'elles sont séparées du fonds, n'entrent pas en communauté, car elles ne sont pas des fruits (art. 592), à moins qu'elles n'eussent été mises en coupes réglées (art. 591). Ainsi la moitié du trésor que la loi attribue au propriétaire du fonds dans lequel il est trouvé (art. 716) n'entrerait pas en communauté, parce que ce n'est pas un fruit du fonds (art. 598): mais si c'était le propriétaire lui-même qui le trouvât, la moitié qu'il a comme inventeur (art. 716) tomberait dans la communauté, parce que l'invention peut être considérée comme une espèce d'industrie. Du reste, il faut bien observer qu'il ne suit nullement de l'énumération que fait la loi, des revenus, intérêts, arrérages, que les capitaux eux-mêmes ne tombent pas dans la communauté; ils se trouvent compris dans l'expression mobilier, du n° 1er. Ainsi, toutes les choses incorporelles, meubles par la détermination de la loi (art. 529), telles que les obligations, les créances, les rentes, l'usufruit des choses mobilières, etc., font partie de la communauté. Quant à la différence des mots intérels et arrérages, voir l'article 385.

Echus ou perçus. Echus, si ce sont des fruits civils, perçus, s'il s'agit de fruits natureis.

De tous les immeubles. Ils tiennent la place de l'argent qui a servi à les acquérir, et qui faisait partie de la communauté.

Acquis. A titre onéreux; car les immeubles acquis à titre gratuit ne tombent pas dans la communauté, à moins que le donateur n'ait expressément voulu qu'ils y tombassent (art. 1404, 1405).

bable qu'il a été acheté avec l'argent de la collabo→ ration commune.

Ou possession legale. C'est-à-dire une possession qui peut servir de base à la prescription; paisible, publique, à titre de propriétaire (art. 2229). Toute possession garantie par la loi, telle que l'usufruit, par exemple, est légale, et il est évident que ce n'est pas de celle-là que l'article a entendu parler. Si la prescription vient à s'accomplir durant le mariage, l'immeuble reste propre à celui des époux qui avait la possession, car elle a un effet rétroactif au jour où la possession a commencé.

1403. Les coupes de bois et les produits des carrières et mines tombent dans la communauté, pour tout ce qui en est considéré comme usufruit, d'après les règles expliquées au titre de l'Usufruit, de l'Usage et de l'Habitation. Si les coupes de bois qui, en suivant ces règles, pouvaient être faites durant la communauté, ne l'ont point été, il en sera dû récompense à l'époux non propriétaire du fonds ou à ses héritiers.- Si les carrières et mines ont été ouvertes pendant le mariage, les produits n'en tombent dans la communauté que sauf récompense ou indemnité à celui des époux à qui elle pourra être due.

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Comme usufruit. Ces règles se trouvent tracées dans les articles 590, 591, 593, 594, 598. Comme l'article 592 déclare que l'usufruitier n'a aucun droit aux futaies, c'est de là qu'il faut conclure que, bien qu'abattues pendant le mariage, elles ne tombent pas en communauté, à moins, comme nous l'observons sous l'article précédent, qu'elles n'eussent été mises en coupes réglées avant le mariage (art. 591).

Il en sera du récompense. Disposition entièrement contraire à celle de l'article 590, et qui a pour but de prévenir les avantages indirects entre époux.

A l'époux non propriétaire, Cette rédaction paralt inexacte. Ce n'est pas à l'époux non propriétaire, mais à la communauté, que la récompense est due: en effet, supposez qu'une coupe valant 20,000 fr. n'ait pas été faite par l'époux lorsqu'elle devait l'être, si la récompense était donnée à l'époux, il obtiendrait 20,000 fr., tandis que si la coupe eût été faite, et fût tombée dans la communauté, il eût seulement partagé cette somme avec tout le reste, et obtenu 10,000 fr.: c'est donc à la communauté que les 20,000 fr. sont dus, pour être partagés comme si la coupe eût été faite.

Ont été ouvertes pendant le mariage. Comme l'article 598 ne donne aucun droit à l'usufruitier sur les mines et carrières non encore ouvertes, elles ne peuvent tomber dans la communauté sans récompense; mais elle peut être due, selon les cas, à l'époux non

1402. Tout immeuble est réputé acquêt propriétaire, ou à la communauté; à l'époux si la

de communauté, s'il n'est prouvé que l'un des époux en avait la propriété ou possession légale antérieurement au mariage, ou qu'il lui est échu depuis à titre de succession ou donation.

Est réputé. Ainsi la présomption est en faveur de la communauté; si aucun des époux ne peut prouver que tel immeuble lui appartient, il est pro..

carrière est épuisée par la communauté; à la communauté, si elle a fait des dépenses considérables pour l'exploitation, et qu'elle vienne à se dissoudre au commencement de l'exploitation.

1404. Les immeubles que les époux possèdent au jour de la célébration du mariage, ou qui leur échoient pendant son cours à titre de succession, n'entrent point en commu

nauté. — Néanmoins, si l'un des époux avait acquis un immeuble depuis le contrat de mariage, contenant stipulation de communauté, et avant la célébration du mariage, l'immeuble acquis dans cet intervalle entrera dans la communauté, à moins que l'acquisition n'ait été faite en exécution de quelque clause du mariage, auquel cas elle serait réglée suivant la convention.

Les immeubles. Corporels et incorporels : ainsi l'usufruit d'une chose immobilière, une action tendant à revendiquer un immeuble, n'entrent pas en communauté (art. 526). La loi, en fixant le régime qui serait le droit commun de la France, devait le composer des règles qui conviendraient principalement à tous. Or les immeubles formant surtout la fortune des familles, il aurait été à craindre que personne ne voulût se marier sans contrat et adopter le droit commun, si les immeubles fussent entrés dans la communauté de plein droit.

Ou qui leur échoient. Ces immeubles ne proviennent pas de la collaboration commune, ils ne devaient donc pas faire partie de la communauté. Comme la condition suspensive a un effet rétroactif au jour du contrat (art. 1179), les immeubles acquis sous cette condition, bien qu'elle s'accomplisse durant le mariage, n'entrent pas en communauté : l'époux est censé en avoir été propriétaire du jour du contrat, et conséquemment avant le mariage.

Entrera dans la communauté. Le contrat étant déjà passé, l'autre époux a dû compter que la communauté se composerait de la somme d'argent employée depuis l'acquisition d'un immeuble. Si cet immeuble devait rester propre à l'époux, sous le prétexte que le contrat de mariage n'a d'effet que du jour de la célébration, ce serait protéger la fraude: si une clause du contrat avait prévu ce cas, et déclaré que l'immeuble que l'époux se proposait d'acheter lui serait propre, il est clair qu'elle devrait être exécutée, puisqu'il n'y aurait plus fraude; mais si dans le même intervalle, un immeuble appartenant à l'un des époux était vendu, il semble que le prix ne devrait pas davantage entrer en communauté que l'immeuble lui-même; car, si la communauté ne doit pas être appauvrie par suite de l'acquisition faite dans l'intervalle, elle ne doit pas s'enrichir par suite de la vente faite d'un immeuble qui serait resté propre.

1405. Les donations d'immeubles qui ne sont faites pendant le mariage qu'à l'un des deux époux, ne tombent point en communauté, et appartiennent au donataire seul, à moins que la donation ne contienne expressément que la chose donnée appartiendra à la communauté.

= Les donations. Entre-vifs ou testamentaires. L'expression est générale, et le motif est toujours le même.

Qu'à l'un des deux. Si même l'immeuble était donné aux deux époux, et non à la communauté, il n'y entrerait pas, et appartiendrait pour moitié aux deux époux, et le mari ne pourrait l'aliéner en totalité sans le consentement de sa femme (art. 1428) (arrêt de la cour de Toulouse du 23 août 1827. Sirey, ì, 28. 2, 211); tandis que, s'il etait déclaré par le

donateur qu'il appartiendra à la communauté, le mari pourrait l'aliéner seul (art. 1421).

1406. L'immeuble abandonné ou cédé par père, mère ou autre ascendant, à l'un des deux époux, soit pour le remplir de ce qu'il lui doit, soit à la charge de payer les dettes du donateur à des étrangers, n'entre point en communauté; sauf récompense ou indemnité.

= Abandonné ou cédé par père, etc. Cet immeuble n'entre point en communauté, bien que des sommes soient données par elle pour payer les dettes du donateur, parce que ces abandon et cession sont considérés comme des arrangements de famille et comme une succession anticipée, puisque l'époux auquel l'abandon a été fait eût recueilli également cet immeuble à la mort du donateur, et en fût resté propriétaire, aux termes de l'article 1404, nonobstant le payement des dettes par la communauté, et sauf récompense: il suit de là que, si l'arrangement était fait avec un étranger, l'immeuble tomberait dans la communauté; car on ne pourrait pas dire que l'immeuble se fût également trouvé dans la succession: aussi la loi dit-elle, abandonné ou cédé par père, mère, ou autre ascendant; et ces termes sont même si formels, que l'article ne s'appliquerait pas à un arrangement fait avec un collateral dont l'époux serait héritier présomptif; l'immeuble ne se serait pas nécessairement trouvé dans la succession, puisqu'il aurait pu en disposer au préjudice de l'époux auquel il ne devrait aucune réserve.

De ce qu'il lui doit. Par exemple, si un père ayant eu pour son fils l'administration de la succession de sa mère prédécédée, il lui abandonne un immeuble pour le remplir de ce qu'il lui doit comme administrateur de ladite succession.

Sauf récompense ou indemnité. Comme ces opérations ont coûté quelque chose à la communauté, elle doit en être indemnisée : ces expressions récompense, indemnité, sont synonymes, et signifient tout ce qui est dû à la communauté par l'un des époux, en retour de ce qu'elle a dépensé pour lui ou à l'un des époux, par la communauté, en retour de ce qu'il a dépensé pour elle (art. 1433, 1437).

1407. L'immeuble acquis pendant le mariage à titre d'échange contre l'immeuble appartenant à l'un des deux époux, n'entre point en communauté, et est subrogé au lieu et place de celui qui a été aliéné; sauf la récompense s'il y a soulte.

= Et est subrogé. C'est ce qu'on nomme la subrogation réelle.

S'il y a soulle. Ainsi le nouvel immeuble, quoique plus considérable, n'appartient pas à la communauté. Mais comme l'argent donné en sus de la valeur de l'autre immeuble est pris sur la communauté, il lui est dû récompense pour cette soulte payée par elle.

1408. L'acquisition faite pendant le mariage, à titre de licitation ou autrement, de portion d'un immeuble dont l'un des époux était propriétaire par indivis, ne forme poins un conquêt; sauf à indemniser la commu

nauté de la somme qu'elle a fournie pour cette acquisition. Dans le cas où le mari deviendrait seul, et en son nom personnel, acquéreur ou adjudicataire de portion ou de la totalité d'un immeuble appartenant par indivis à la femme, celle-ci, lors de la dissolution de la communauté, a le choix ou d'abandonner l'effet à la communauté, laquelle devient alors débitrice envers la femme de la portion appartenant à celle-ci dans le prix; ou de retirer l'immeuble, en remboursant à la communauté le prix de l'acquisition.

Ou autrement. C'est-à-dire, soit que l'acquisition soit faite dans les formes de la licitation ou à l'amiable; car le motif est le même, comme nous allons le voir.

Ne forme point un conquêt. Il appartiendra donc à l'époux, propriétaire déjà par indivis de cet immeuble, avant la licitation ou le partage. Ainsi, j'ai avant mon mariage hérité avec mon frère d'un immeuble valant 100,000 francs : quelque temps après mon mariage, nous procédons au partage ou à la licitation, et, moyennant 100,000 francs l'immeuble m'est adjugé; bien que les 50,000 francs formant la part de mon frère dans le prix aient été donnés par la communauté, il me reste propre, sauf indemnité; la raison en est qu'aux termes de l'article 883, le partage ou la licitation sont déclaratifs et non translatifs de propriété, de telle sorte que je suis sup posé avoir été propriétaire de la totalité de l'immeuble, non du jour de la licitation, mais du jour de l'ouverture de la succession, et conséquemment avant mon mariage. Il résulte de ce principe qu'un mari ne pourrait, pendant le mariage, non-seulement aliéner, mais mème hypothéquer un immeuble appartenant à sa femme, dans les circonstances pré-vues par le présent article. (Arrêt de la cour de cassation du 20 juillet 1816, ch. des req. Sirey, t. 17, 1, 68.) Ces expressions conquels, acquels sont à peu près synonymes, et signifient toutes les acquisitions qui tombent dans la communauté le mot conquêt exprime plus spécialement ce qui est produit par la collaboration commune. On appelle, au contraire, propres de communauté les choses qui n'y tombent pas, et qui appartiennent aux époux en propre.

A le choix. Ainsi un mari se rend adjudicataire, moyennant 100,000 francs, d'un immeuble apparte nant à sa femme par indivis avec un tiers; celle-ci peut exiger, à ia dissolution de la communauté, que l'immeuble lui soit donné en abandonnant les 100,000 francs à la communauté, et dans ce cas, son mari est supposé avoir agi comme son mandataire; ou bien elle peut consentir que l'immeuble reste à la communauté; mais la communauté doit lui tenir compte de 50,000 francs formant le prix de sa part dans l'immeuble. Le motif de ce choix donné à la femme n'est plus ici le principe que le partage ou la licitation sont déclaratifs de propriété, puisque ce n'est pas la femme copropriétaire, mais le mari non propriétaire qui s'en est rendu adjudicataire; mis ce motif a sa source dans la crainte que le mari n'use de la puissance que la loi lai donne sur sa femme, pour l'empêcher d'acheter cet inimeuble, l'acquérir pour lui-même en son nom personnel. QUESTION. La faculté accordée à la femme par notre article peut-elle être exercée par les créanciers? La

et

cour suprême a embrassé la négative: Vu l'article 1408; attendu que le droit de retrait accordé à la femme par cet article constitue un privilége; que tout privilége doit, de sa nature, ètre soigneusement restreint dans les limites qui lui sont données par la loi; que l'exercice de ce droit est purement facultatif, et que la concession de cette faculté a pour unique objet de la prémunir contre le préjudice qui pourrait résulter pour elle de l'administration de son mari, et que dès lors le droit de l'exercer est exclusivement attaché à sa personne; attendu que si le droit de retrait accordé à la femme ne lui a point été concédé dans l'intérêt de l'ordre public et de la morale, il ne s'ensuit pas, comme semble l'induire l'arrêt attaqué, qu'il puisse être exercé par les créan ciers de la femme; qu'en effet, les articles 1166 et 1167 du Code civil n'autorisent point d'une manière générale les créanciers à exercer les droits et actions de leurs débiteurs, toutes les fois qu'ils pourront le faire sans blesser la morale ni l'ordre public; que ces articles, au contraire, exceptent des droits et actions qui peuvent être exercés par les créanciers au nom de leurs débiteurs, les actions et droits qui sont exclusivement attachés à la personne du débiteur, etc., casse, etc.» (Arrêt du 14 juillet 1834, ch. civ. Sirey, t. 34, I, 534.) La cour de Colmar a jugé que la revendication par la femme devrait être admise lors même que l'immeuble appartenant à la femme par indivis aurait été acquis par la femme et le mari conjointement, parce que la première partie de l'article pose le principe du droit de revendication d'une manière générale. (Arrêt du 20 janvier 1831, Sirey, t. 32, II, 355.)

SII. Du Passif de la Communauté et des Actions qui en résullent contre la Communauté.

1409. La communauté se compose pas

sivement: 1° De toutes les dettes mobilières dont les époux étaient grevés au jour de la célébration de leur mariage, ou dont se trouvent chargées les successions qui leur échoient durant le mariage, sauf la récompense pour celles relatives aux immeubles propres à l'un ou l'autre des époux; - 2o Des dettes, tant en capitaux qu'arrérages ou intérêts, contractées par le mari pendant la communauté, ou par la femme du consentement du mari, sauf la récompense dans les cas où elle a lieu; 3o Des arrérages et intérêts seulement des rentes ou dettes passives qui sont personnelles aux deux époux; -40 Des réparations usufructuaires des immeubles qui n'entrent point en communauté; 5o Des aliments des époux, de l'éducation et entretien des enfants, et de toute autre charge du mariage.

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De toutes les delles mobilières. Nous avons déjà observé que l'actif et le passif de la communauté étaient corrélatifs : le mobilier entrant dans la com-munauté, les dettes mobilières doivent également y tomber. Une dette mobilière est celle qui à des meubles pour objet, quæ tendit ad quid mobile : ainsi l'obligation de payer 10,000 francs provenant de l'acquisition d'une partie des meubles entrés en communauté est mobilière, et tombe dans la com

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