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Ainsi, précisément aux bouches du Danube, la déviation, apportée par le Congrès de Berlin aux principes de l'ancien droit de navigation fluviale, a entrainé un état de choses, qui paraît se trouver en dehors de toute règle de droit:

A. à titre international, un droit spécial de navigation fluviale pour l'embouchure de Soulina et la section principale jusqu'à Braïla ;

B.

C.

à titre national, un droit riverain sur certaines. parties du bras de Kilia, et

un régime mixte de droit exceptionnel à titre international, et de droit riverain à titre national, sur une autre partie du même bras.

Si l'on considère en outre la région en amont des embouchures, à compter au dessus de Braïla, on rencontre, en dehors de ces trois régimes différents, les règlements de navigation suivants:

D. le droit de navigation des trois Etats Riverains

du cours supérieur, Wurtemberg, Bavière et Au-
triche, en vertu de l'Acte de Navigation du Da-
nube du 7 Novembre 1857, lequel, à défaut
d'une sanction générale internationale, attestant,
qu'il en a été pris acte, pourrait être modifié par
une entente commune des trois états intéressés,
et, sur ce point, subsiste encore en droit le doute
de savoir, si la Porte, en sa qualité de partie
contractante à l'origine, aurait encore aujourd'hui
à donner son adhésion;

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E. le droit spécial de navigation entre l'Autriche et

-

la Serbie, en vertu du Traité de navigation Austro-Serbe, du 22/10 Février 1882, et sur ce point, subsiste encore en droit le doute de savoir jusqu'à quel point des traités spéciaux entre les Etats Riverains peuvent intervenir dans la réglementation homogène et permanente prévue, quant au Danube, par le Congrès de Paris; F. le droit riverain de la Roumanie sur la partie de la rive du Danube située en amont des Portesde-Fer jusqu'à la frontière Hongroise, et comprise dans les stipulations de l'Acte de Navigation du Danube du 7 Novembre;

G. le droit riverain de la Serbie, aux Portes de-Fer, dans la partie en amont où le territoire Hongrois ne confine plus au Danube, mais où la ligne médiane du fleuve forme la frontière entre la Serbie et la Roumanie;

H. le droit spécial de navigation sur la région en aval des Portes-de-Fer jusqu'à Galatz (ou Braïla), lequel attend encore son organisation définitive conformément à l'art. 55 du Traité de Berlin. Le principe de l'Acte du Congrès de Vienne, précisé par le Congrès de Paris, était, comme nous l'avons montré: 1. Égalité de droits pour toutes les nations sur les fleuves internationaux, 2°. Communautés de droits pour les Etats riverains, quant à l'adoption de règles uniformes de navigation fluviale sur la base du commun accord. 3°. Autonomie des Etats riverains, quant à l'exécution des règlements communs de navi

gation. 4. Uniformité des règlements de navigation fluviale pour l'ensemble du cours navigable du fleuve jusqu'à la mer.

L'expression la plus parfaite au point de vue pratique de ces principes est l'Acte révisé de la navigation du Rhin du 17 Octobre 1868). Abstraction, faite de différences de moindre importance, les autres fleuves internationaux suivent les prescriptions du droit international.

Quant à la règlementation du Danube, il appert des conjonctures récentes, à quel degré elle s'est trouvée au cours des dernières 25 années, avoir reçu des déviations qui, l'ont éloignée des principes du Congrès de Vienne.

Tous les principes du Congrès de Vienne sont lésés dans la réglementation appliquée jusqu'à ce jour au Danube.

Au lieu de l'uniformité sur tout le parcours du fleuve, des différences fondamentales, même dans la région des embouchures, et une demi-douzaine de règlements divers de navigation, sur le cours moyen et supérieur.

1) L'Acte revisé de la navigation du Rhin prévoit des décisions à la majorité, mais ces décisions n'ont aucune force obligatoire, si les Etats Riverains ne veulent pas les accepter. L'instance d'appel pour les parties en litige est une instance élective, à côté des tribunaux territoriaux. Cette ,,Jurisdictio in appellatorio" est combattue, quant à la théorie par des juristes Hollandais. V. Asser, over de nieuwe Rynvartconventie, 1869. Godefroi, Les tribunaux de la navigation du Rhin (Revue de droit intern. I, 494).

Au lieu de la permanence du droit matériel, conforme au droit international général, le renouvellement et la prolongation de règlements provisoires de navigation fluviale, se rattachant à la Commission Européenne.

Au lieu de la communauté de droits des Etats riverains, l'institution, successivement prolongée, et étendue géographiquement d'Isaktscha jusqu'à Braïla, d'un Etat fluvial international indépendant, dans lequel les Etats non-riverains forment la majorité.

Au lieu de l'autonomie des Etats riverains, leur dépossession partiellement accomplie, ou l'essai d'altérer au préjudice des Etats Riverains, par une Commission Mixte, la norme établie pour le Rhin, quant à la surveillance fluviale, dès l'année 1868.

Au lieu de la réciprocité entre les Etats riverains, laquelle implique l'égalité des droits, l'octroi de privilèges à des Etats non-riverains, en considération de la prépondérance territoriale.

L'état actuel du Danube offre donc, si non en fait et au point de vue économique, du moins juridiquement, plus de ressemblance avec l'ancien état de choses, antérieur à la Révolution Française, qu'avec l'état de droit tel, qu'il s'est développé pendant la période de 1815 à 1856.

Huitième question.

La Roumanie, en vertu de sa triple qualité d'Etat Riverain, de membre, sur le pied d'une entière égalité, de la Commission Européenne, et de cosignataire de l'Acte Additionnel à l'Acte Public de 1881, a-t-elle le droit de participer à toutes les conférences relatives à la navigation du Danube, en vue de délibérer et de statuer?

Le droit des anciennes Principautés Danubiennes, non- souveraines, de participer en 1857 à l'élaboration et même à la signature de l'Acte de Navigation du Danube n'a pas été contesté, même par la Puissance Suzeraine; a fortiori ne saurait-il être actuellement dénié à la Roumanie, devenue Souveraine, et se trouvant en présence de la Conférence de Londres. Pour autant que je sache, la co-opération au moins n'a été contestée d'aucune part. On doit donc, dans le sens de la question susénoncée, considérer le droit de délibérer et de statuer comme un droit indivisible à exercer dans des Conférences.

A envisager d'abord la Conférence, pour ainsi dire permanente, formée par la Commission Européenne de Galatz, deux points sont hors de toute contestation: 1°., dans toutes les questions, qui ne présentent pas le caractère de questions courantes d'ordre intérieur, et abstraction faite des cas spécialement défini, où il a été

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