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ments, de jardins, parcs de chasse, de domestiques; la construction d'ouvrages de fantaisie, tels qu'un château, etc., etc. Les engagements ainsi contractés ont cela de particulier que quand ils sont excessifs (c'est-à-dire peu proportionnés à la fortune de l'émancipé et inutiles à sa position), ils doivent être réduits par les tribunaux, s'il y a faute ou grave imprudence de la part des fournisseurs ou autres parties

contractantes.

Notre article a tort, évidemment, de présenter l'inutilité de la dépense, sa disproportion avec la fortuue, et la mauvaise foi du contractant, comme trois éléments qui restent à considérer après que l'engagement aurait été reconnu excessif. Il est clair qu'il n'en reste alors qu'un seul, la mauvaise foi, car l'inutilité de la dépense et sa disproportion avec la fortune sont précisément ce qui en constitue l'excès. Du reste, cette mauvaise foi, cette faute imputable, existera la plupart du temps; car il s'agira presque toujours d'actes qui, vu leur prix élevé et leur peu d'utilité, ne devaient pas être consentis par un homme prudent vis-à-vis d'un jeune homme inexpérimenté.

Restent enfin les actes pour lesquels l'émancipation ne produit aucune espèce d'effet (1). Ce sont: 1° le compromis, qui est absolument interdit à tous mineurs (combin. les art. 1004 et 83-6o, Code proc.); 2o toute disposition à titre gratuit, eut-elle pour objet des capitaux ou autres meubles, laquelle leur est également interdite, en principe du moins.

Nous disons que les dispositions à titre gratuit ne sont interdites au mineur (émancipé ou non) qu'en principe. En effet, le mineur peut disposer valablement par testament, pourvu 1° qu'il ait seize ans, et 2o qu'il ne donne que la moitié de ce que pourrait donner un majeur (art. 903, 904). Quant aux donations entre-vifs, il n'en peut faire que dans son contrat de mariage; là, par faveur pour le mariage, la loi lui accorde la même capacité qu'à un majeur, sous la seule condition d'être assisté des personnes du consentement desquelles il a besoin pour se marier (art. 1095, 1398, 1309; l'oy. aussi l'explication de l'art. 149 no IV). Mais cette capacité exceptionnelle du mineur pour les dispositions gratuites n'a aucun rapport avec l'émancipation; elle est identiquement la même pour le pupille que pour le mineur émancipé.

Au reste, l'incapacité de donner, qui frappe en principe tout mineur, n'empêcherait pas l'émancipé, on le conçoit, de faire valablement les petits dons manuels, les cadeaux et présents d'usage dans mille circonstances; ce n'est pas là-dessus que la loi a entendu faire porter sa

(1) Nous donnons pour signe distinctif à cette cinquième catégorie la circonstance que, pour les actes qu'elle comprend, l'émancipation ne produit aucun effet : cette catégorie est effectivement la seule pour laquelle il en soit ainsi. Même dans la quatrième catégorie, quoiqu'il s'agisse d'actes pour lesquels l'émancipé a besoin des mêmes formalités que le pupille, l'émancipation produit cependant un effet très-sensible: c'est que l'acte est fait par le mineur lui-même, tandis que s'il y avait encore tutelle, il le serait par son tuteur, sans que lui, mineur, y figurat en rien.

prohibition de minimis non curat Prætor. Il faudrait déclarer valable aussi la remise de loyers que l'émancipe ferait à son fermier pour de graves et justes causes, par exemple, la perte d'une récolte. Ce n'est pas là une vraie douation; c'est un acte d'administration loyale et prudente, qui a pour but de maintenir le fermer en état de bien exploiter la ferme.

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III. 301. On doit comprendre facilement maintenant les cinq catégories d'actes que nous avions indiquées sous l'art. 481; et nous ne saurions nous ranger sur cette matière à la doctrine enseignee par M. Demante (t. I, nos 475 à 481). D'après le savant professeur, il faudrait admettre non pas seulement cinq catégories d'actes, mais six. En effet, il reconnaît; 1° les actes de pure administration que le inineur fait comme le ferait un majeur (no 475 du Progr. ; c'est notre 11e catégorie); 2o ceux qu'il ne fait qu'avec l'assistance du curateur (n's 476 et 477: c'est notre 3 catégorie); 3o ceux pour lesquels il faut certaines formes (nos 476 et 477; c'est notre 4o catégorie); 4o ceux qui lui sont interdits (nos 477 et 488; c'est notre 5′′ catégorie); 5o des actes qui ue sont pas de simple administration, que cependant il peut faire seul; mais sauf rescision pour simple lésion, d'après l'art. 1305 (nos 476 et 481, alin. 1; c'est la catégorie que nous n'admettons pas); 6o enfin, les actes d'administration qu'il fait seul, mais qui peuvent être frappés de réduction (nos 476 et 481, alin. 2; c'est notre catégorie).

Nous ne voyons pas de quels actes pourrait se composer la 5e classe présentée par M. Demante; cette classe nous parait arbitraire et prise en dehors de la theorie de la loi. M. Demante dit qu'il s'agit d'actes qui ne sont pas de pure administration, et que cependant l'emancipé peut valablement faire seul (no 481). Mais quel est donc l'article du Code qui permet à l'émancipé de faire seul d'autres actes que ceux de pure administration?... M. Demante ajoute que ces actes seront rescindables pour simple lésion, d'après l'art. 1305. Mais s'il s'agit d'actes que l'émancipé peut valablement faire seul, ils n'excèdent donc pas sa capacité; or, l'art. 1305 ne permet la rescision pour lésion que contre les actes qui excèdent les bornes de la capacité du mineur emancipé........ Telle n'est donc pas la theorie de la loi La loi presente deux grandes classes d'actes: 1o les actes d'administration, pour lesquels le mineur est personnellement capable, et qui dès lors ne peuvent jamais étre rescindés pour simple lésion d'après l'art. 1305; quelques-uns d'entre eux peuvent seulement être réduits quand il y a excès d'une part et mauvaise foi de l'autre ; 2o les actes qui dépassent les bornes d'une simple administration et pour aucun desquels le mineur n'a capacité ; c'est pour tous ceux-là que l'emancipé peut être restitué d'après l'article 4305. En effet, cet art. 1505 revient à dire que le mineur (émancipé ou non) est restituable contre tout acte qu'il ne peut faire seul: et c'est parce que le mineur non émancipé ne peut faire seul aucuns actes, qu'il est restituable pour tous.

Aussi, la doctrine de M. Demante n'est-elle partagée par aucun auteur. Toullier (t. II, nos 1297 et suiv.), M. Duranton (t. III, n°* 668 et

suiv.), M. Zachariæ (t. I, p. 264 et suiv.), etc., présentent tous des systèmes qui, sauf les différences de formes, sont complétement d'accord avec celui que nous avons adopté.

485. Tout mineur émancipé dont les engagements auraient été réduits en vertu de l'article précédent, pourra être privé du bénéfice de l'émancipation, laquelle lui sera retirée en suivant les mêmes formes que celles qui auront eu lieu pour la lui conférer.

486. Dès le jour où l'émancipation aura été révoquée, le mineur rentrera en tutelle et y restera jusqu'à sa majorité accomplie.

SOMMAIRE.

1. C'est l'excès des engagements et non leur réduction qui permet la révocation. Elle doit se faire dans les formes par lesquelles Pemancipation pourrait actuellement se couférer. Elle n'est pas possible pour le mineur actuellement marié ou qui a des enfants de son mariage.

II. Comment se règle alors la délégation de la tutelle.

I.-502. Quand le mineur émancipé abuse de la demi-capacité qu'on lui avait conferée, et la tourne contre lui-même, il est juste que, dans son propre intérêt, on la lui retire. C'est ce que veulent nos deux articles.

Mais le premier de ces articles est mal rédigé et rend mal la pensée des législateurs, quand il indique et la cause et les formes de la révocation. Ce n'est pas la réduction des engagements excessifs, c'est leur excès même, qui doit motiver cette révocation; de même, ce n'est pas le mode d'après lequel l'émancipation a été conférée qu'il faut suivre pour la retirer, mais celui qu'il faudrait suivre s'il s'agissait de la donner aujourd'hui. Ainsi, 1 supposons que des engagements grandement excessifs n'ont cependant pas été réduits, vu la bonne toi de la partie contractante (aux yeux de laquelle le mineur, par de petits moyens de fraude, s'était fait passer pour beaucoup plus riche qu'il n'était), il est clair qu'on n'ira pas récompenser le mineur de sa fraude en lui conservant sous prétexte qu'il n'y a pas eu réduction, une capacité qu'on lui eût enlevée s'il eût été plus loyal et que la faute eût été chez son cocontractant; 2° le second vice de rédaction est plus évident encore; il est palpable qu'un enfant émancipé par la déclaration de son père ou de sa mère, lesquels sont morts postérieurement, ne peut plus perdre le bénéfice de l'émancipation que par une délibération du conseil de famille.

Au reste, l'état de mineur non émancipé étant, dans la pensée de la loi, incompatible avec la qualité d'époux, il s'ensuit que quand l'enfant est actuellement marié (soit qu'il ait été émancipé par son mariage même, ou qu'il se soit marié après l'émancipation), l'émancipation ne pourra pas lui être retiree. Si la loi n'avait pas regardé le mariage comme compiétement incompatible avec la qualité de mineur en tutelle, elle aurait au moins permis aux parents de maintenir en tutelle

l'enfant qu'ils marient, au moyen d'une déclaration formelle; elle ne les aurait pas mis dans l'alternative absolue ou de lui conférer taciten.ent l'émancipation, ou de manquer une union avantageuse pour lui. Elle aurait dit dans l'art. 476 le mineur sera émancipé par so.. mariage, s'il n'y a déclaration contraire de la part de ceux dont il dépend. Le mineur marié sera donc toujours émancipé forcément.

Il en serait de même s'il était veuf, mais qu'il eût des enfants de son mariage; puisque la loi lui accorde, vis à-vis de ces enfants, des droits incompatibles avec la qualité de pupille.

Entin, une dernière consequence de cette incompatibilité de l'état de mariage avec l'état de mineur en tutelle, c'est que l'enfant qui a perdu l'émancipation se trouverait émancipé de plein droit s'il venait à se marier ensuite. L'art. 486, quand il dit que l'enfant restera en tutelle jusqu'à sa majorité, signifie donc seulement qu'il ne pourra plus être l'objet d'une émancipation formelle.

Quant au mineur émancipé par mariage, mais qui n'est plus époux et qui n'a pas d'enfants, il peut être remis en tutelle, malgré la cause d'où provenait son émancipation. L'article du projet, qui ne parlait que du « mineur émancipé autrement que par mariage, » a perdu ces derniers mots lors de la rédaction définitive (Fenet, X,

p. 566).

On a voulu argumenter de la suppression de ces mots pour prouver que le mineur marié peut tout aussi bien qu'un autre ètre privé de l'émancipation. Mais cette conclusion n'a rien de logique; ces mots devaient être retranches dans notre système, aussi bien que dans le système contraire. En effet, ils auraient eu pour résultat : 1o d'empêcher la révocation pour le mineur veuf sans enfants, laquelle est permise; 2o de l'autoriser par a contrario pour le mineur actuellement marié, dont le mariage n'aurait eu lieu que postérieurement à son émancipation.

II. 303. Un point nous reste à examiner: comment se réglera la délation de la tutelle lors de la révocation de l'émancipation?... Remarquons, d'abord, que quand l'enfant était déjà en tutelle au moment de l'émancipation, ce n'est pas la même tutelie qui continue lors de la révocation. La tutelle antérieure a cessé; il y a eu reddition de compte; c'est une tutelle nouvelle qui commence. Donc, l'ancien tuteur n'a jamais droit, en cette seule qualité, de rentrer en fonctions. "Voyons maintenant si cette tutelle nouvelle (ou cette première tutelle, quand l'enfant a été émancipé pendant le mariage de ses auteurs) doit toujours être déférée par le conseil de famille, ou bien si (et quand) il peut y avoir lieu à la tutelle légitime.

Quand c'est par le conseil de famille que l'émancipation est retirée, à defaut des père et mère, c'est à ce conseil, selon nous, de nommer. un tuleur, encore bien qu'il existe des ascendants. En effet, le conseil étant alors le seul dépositaire de l'autorité sur l'enfant, et se trouvant le maître d'ouvrir ou non la tutelle en révoquant on en maintenant l'émancipation, il n'y a pas plus lieu à la tutelle légale de ces ascendants, que quand ce même conseil a rendu la tutelle légale vacante

en excusant ou en destituant le survivant des père et mère (art. 404, no II). Il en serait de même, évidemment, encore que l'émancipation fût retirée par le survivant des père et mère, si ce survivant était déchu ou excusé de la tutelle légale; puisque par là le droit de nomination serait passé au conseil de famille. Mais si l'émancipation est retirée par le survivant des père et mère qui exerçait la tutelle légale dès le moment de l'émancipation, ou qui s'y est trouvé appelé depuis par la mort de son conjoint (survenue après cette émancipation); alors, comme aucune autorité sur l'enfant n'a passé encore au conseil de famille, le droit de nomination ne saurait lui appartenir, et c'est le survivant qui deviendra (ou redeviendra) tuteur légal, et s'il mourait, la tutelle passerait soit au tuteur testamentaire par lui élu, soit aux autres ascendants, soit à un tuteur datif, d'après les règles ordinaires.

304. Nous avons dit plus haut que, suivant nous, la révocation de l'émancipation ne fait pas reparaître l'usufruit légal.

487. Le mineur émancipé qui fait un commerce est réputé majeur pour les faits relatifs au commerce.

305. Les conditions sous lesquelles le mineur émancipé peut faire le commerce sont indiquées par l'art. 2, C. comm. Le mineur commerçant peut, pour son commerce, consentir toute espèce d'actes, même l'hypothèque de ses immeubles (C. comm., art. 6, alin. 1), mais non pas cependant leur aliénation (ibid., alin. 2.).

Pour le cas de contestation sur la commercialité de l'acte, appliquez ce que nous avons dit sous l'art. 220, no III.

Ainsi, le mineur commerçant pour les actes de son commerce comme l'émancipé ordinaire pour les actes de la première catégorie, peut toujours agir seul, et ne peut pas dès lors invoquer la restitution pour lésion dont parle l'art. 1305.

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I. On appelle mineur, c'est-à-dire plus jeune que l'âge légal, l'individu qui n'a pas encore atteint l'âge auquel la loi fixe, par présomption générale, la capacité des personnes. Cet âge est celui de vingt et un ans, lequel se compte d'heure à heure (art. 368).

II.

La loi divise les mineurs en deux classes: les mineurs ordinaires et les mineurs émancipés.

Tant qu'il n'est pas émancipé, le mineur est en général incapable

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