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Cette défense ne peut être levée qu'en observant les mêmes formalités.

335 Cet article parle des personnes qui peuvent demander un conseil, et l'article précédent nous a dit que les actes par lui indiqués peuvent être défendus; il n'y a donc jamais que simple faculté de provoquer une nomination de conseil. En conséquence, le ministère public n'est jamais forcé d'agir, il peut seulement le faire; et on sait qu'il ne le peut que quand il n'existe ni conjoint, ni parents (art. 491).

Puisque la demande doit être instruite, d'après notre article, de la même manière que celle en interdiction, il devra donc toujours être procédé à l'interrogatoire du défendeur, conformément à l'art. 496; et c'est avec raison qu'un arrêt de la Cour d'Agen, qui avait jugé que cet interrogatoire est inutile pour le cas de nomination de conseil, a été cassé par la Cour suprême (1).

515. Aucun jugement, en matière d'interdiction, ou de nomination de conseil, ne pourra être rendu, soit en première instance, soit en cause d'appel, que sur les conclusions du ministère public.

336. Il est bien entendu que la sentence n'a pas besoin d'être rendue conformément aux conclusions, mais sur les conclusions du ministère public.

RESUME DU TITRE ON ZIÈME.

DES MAJEURS.

I. - Le majeur est l'individu parvenu à l'âge voulu pour la capacité légale. Cet âge, pour les actes civils ordinaires (il en est autrement pour le mariage et l'adoption), est celui de vingt et un ans (art. 488).

Les majeurs étant placés sous l'empire du droit commun, leur état n'appelle aucune règle spéciale, aucune observation particulière; c'est donc seulement pour le cas où une cause exceptionnelle les soustrait au droit commun, que nous avons à nous en occuper ici. Or, trois causes peuvent soustraire les majeurs à l'application des règles ordinaires et les frapper d'une incapacité plus ou moins grande. Ce sont : 1° pour les femmes, l'état de mariage, 2° l'interdiction; 30 la nomination d'un conseil, ou interdiction imparfaite.

L'incapacité des femmes mariées ayant été expliquée dans le Résumé du titre du Mariage (10s XXXIX et XL), nous n'avons à parler ici que de l'interdiction et de la nomination d'un conseil.

(1) Cassal,, 26 janv. 1848 (Dev, 48, 1, p. 177).

CHAPITRE PREMIER.

DE L'INTERDICTION.

II. — On ne peut interdire que celui qui se trouve dans un état habituel d'imbécillité ou de démence. Il n'importe pas, du reste, que cet état présente ou non des intervalles lucides, ni que la démence soit ou non accompagnée de fureur (art. 489).

La provocation de l'interdiction est imposée comme un devoir au conjoint et aux parents du malade; elle n'est pas permise à ses alliés. Quand il n'existe ni conjoint ni parents, le procureur de la République a toujours la faculté d'agir; mais si la démence est furieuse, cette faculté se change en un devoir qu'il doit accomplir, alors même qu'il existerait des parents et un conjoint, si ceux-ci n'agissent pas. Du reste, rien n'empêche une personne de demander elle-même, dans un intervalle lucide, sa propre interdiction; mais il est évident qu'elle ne pourrait pas s'interdire de son autorité privée (art. 490-491).

III. La demande d'interdiction se forme devant le tribunal civil du domicile du malade, au moyen d'une requête adressée au président. Cette requête doit indiquer, article par article, les faits propres à justifier l'imbécillité ou la démence, et faire connaître les témoins qui pourront en déposer; elle doit être accompagnée des différents actes qui pourraient contribuer à faire la preuve (art. 192-493).

Le président charge l'un des juges de faire un rapport sur la requête et les pièces qui l'accompagnent. Si, d'après ce rapport, le tribunal ne trouve pas la demande suffisamment fondée (quoique régulière d'ailleurs), il peut la rejeter de suite; s'il croit devoir y donner suite, il commence par ordonner la formation du conseil de famille, qui doit donner son avis sur l'état de la personue. Ce conseil se forme d'après les règles indiquées au précédent Résumé (no XXXV); ainsi, on y appelle les descendants mâles de la personne et les conjoints des descendantes; la loi y appelle aussi, comme de raison, le conjoint de cette personne. Toutefois, on en exclut, comme suspects de partialité, ceux qui ont provoqué l'interdiction, à l'exception du conjoint et des descendants, lesquels y sont admis malgré cette circonstance, mais alors sans voix délibérative (art. 494-495).

Après avoir reçu l'avis de la famille, conforme ou non, le tribunal entier interroge le défendeur en la chambre du conseil; si ce défendeur ne peut pas s'y présenter, il est interrogé dans sa demeure par un juge à ce commis assisté du greffier. Dans les deux cas, le procureur de la République doit être présent à l'interrogatoire. Ce premier interrogatoire peut être renouvelé, si le tribunal le juge à propos (art. 496).

Après le premier interrogatoire, le tribunal nomme, si c'est nécessaire, un administrateur provisoire qui prenne soin de la personne et des biens de l'infirme, sans pouvoir faire d'autres actes que ceux de pure administration et pour lesquels il y a urgence (art. 497).

Le jugement est rendu à l'audience après plaidoiries des deux parties, ou elles dûment appelées, et sur les conclusions du ministère public (art. 408).

IV. Quand le jugement prononce l'interdiction, il doit être signifié à l'interdit, et alors même qu'il serait frappé d'appel, les demandeurs doivent le faire afficher, le dixième jour au plus tard, dans l'auditoire du tribunal et dans les études des notaires de l'arrondissement (art. 511).

Quand il y a appel, la cour peut, si elle le juge nécessaire, interroger de nouveau le défendeur ou le faire interroger par un commissaire (art. 500).

V. S'il n'y a pas appel ou si sur l'appel la cour confirme, on procède à l'organisation de la tutelle. Si la personne interdite est une femme mariée, son mari en est le tuteur légal; dans tous les autres cas, il y a lieu à nomination du tuteur par le conseil de famille, lequel nomme toujours aussi le subrogé tuteur. Le premier acte de gestion du tuteur, c'est de recevoir le compte de l'administrateur provisoire, si ce n'est pas lui-même qui l'a été (art. 505-506).

La femme peut être nommée tutrice de sou mari. Qand le conseil de famille juge à propos de la choisir, elle n'en reste pas moins incapable, comme femme mariée, et soumise à la nécessité de l'autorisation de la justice pour tous les actes dans lesquels elle agit proprio nomine; pour ceux qu'elle fait comme tutrice du mari, elle a, ni plus ni moins, la même capacité que tout autre tuteur. Si cette femme se trouve trop gênée et croit ses droits lésés, par l'arrêté que prend le conseil de famille sur les différents points qu'il est appelé à régler (notamment le chiffre des dépenses à faire pour les besoins de l'interdit, et pour l'entretien de la femme et des enfants), elle peut en appeler aux tribunaux (art. 507).

C'est surtout à adoucir la position de l'interdit et à accélérer sa guérison, que ses revenus doivent être employés ; ce n'est pas ici le lieu, comme dans la tutelle des mineurs, de se préoccuper d'économies à faire. C'est au conseil à décider si le malade devra être traité chez lui ou dans une maison de santé (art. 510).

La tutelle d'un interdit pouvant durer cinquante et soixante années, nul, à l'exception du conjoint, des ascendants et descendants, n'est tenu de l'exercer pendant plus de dix ans (art. 508).

VI. L'interdiction affecte la personne d'une incapacité absolue, qui entache de nullité tous les actes qu'elle pourrait passer ; et cet effet se produit du jour même de la sentence, pourvu, bien entendu, que cette sentence (quand elle n'émane pas de la cour) ne soit pas frappée d'appel ou soit confirmée sur l'appel. Ainsi, il y aura nullité des actes passés dans l'intervalle entre le jugement frappé d'appel et l'arrêt qui le confirme, nonobstant l'absence de tutelle dans cet intervalle. Cette nullité est également indépendante de l'apposition des affiches dont on a parlé plus haut, puisqu'elle a lieu avant l'expiration du délai accordé pour cette apposition. Mais ceux que le défaut d'affiches, à une époque 5 ÉDIT., T. 11.

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où elles devaient exister, aurait induits en erreur sur l'état de l'interdit, auraient leur recours contre les demandeurs en faute de n'avoir pas fait afficher (art. 502).

Du reste, ce n'est pas là une nullité proprement dite, c'est une cause d'annulation qui laisse subsister l'acte, et permet à l'interdit ou à ses ayants cause de l'attaquer pendant dix années à partir de la cessation de l'interdiction (ibid.)..

Outre cette annulation des actes passés par l'interdit, laquelle doit nécessairement être prononcée, l'interdiction autorise encore les tribunaux, en dehors du droit commun, à déclarer nuls les actes passés avant le jugement, à une époque où l'imbécillité ou la démence existaient déjà notoirement. Celui qui a contracté avec l'imbécile ou le dément aujourd'hui interdit ne peut échapper à cette annulation qu'en prouvant qu'il a vraiment agi de bonne foi, et que son cocontractant était dans un intervalle lucide au moment de l'acte (art. 503).

Par une autre dérogation au droit commun, toute contraire à la première, et pour punir des parents négligents, la loi ne permet pas, après la mort d'une personne, d'attaquer pour défaut de raison les actes par elle faits à titre onéreux, quand l'interdiction de cette personne n'a été ni prononcée, ni même provoquée de son vivant. La loi ne fait cesser cette règle que quand l'acte porte en lui-même la preuve de la déraison; dans ce cas, l'acte peut être proclamé nul, non pas seulement pendant dix années, mais à toute époque. Il en serait de même de l'acte accompli pendant l'interdiction, si, en outre de cette circonstance, l'interdit ou ses ayants cause prouvaient qu'il a eu lieu à un moment précis où il y avait absence de raison (art. 504).

VII. Si, pendant la tutelle de l'interdit, il s'agit de marier l'un de ses enfants, c'est au conseil de famille de cet interdit à déterminer la dot qui peut être prise sur ses biens : et ce conseil, dès lors, doit concourir au règlement des conventions matrimoniales. Mais ces conventions n'en doivent pas moins être consenties par l'enfant lui-même, seul s'il est majeur, et dans le cas contraire, assisté de ses ascendants ou de son propre conseil de famille. La délibération par laquelle la famille de l'interdit consent cette dot et ces conventions doit être homologuée par le tribunal sur les conclusions du ministère public (art. 544). VIII. L'interdiction ne cesse que par la mainlevée qui en est prononcée. Le jugement de mainlevée doit, quand l'imbécillité ou la démence ont cessé, être rendu dans les mêmes formes et sur la demande dles mêmes personnes que celui d'interdiction (art. 512).

Outre l'interdiction judiciaire ou civile, il existe une interdiction légale ou criminelle qui frappe, pendant toute la durée de leur peine, tes condamnés aux travaux forcés à temps, à la détention ou à la reclusion. Ces condamnés sont aussi pourvus d'un conseil de famille, d'un tuteur et d'un subrogé tuteur; et il faut appliquer, en général, à leur tutelle les règles indiquées pour la tutelle des mineurs et des individus interdits judiciairement.

CHAPITRE II.

DU CONSEIL JUDICIAIRE.

IX. On peut pourvoir judiciairement d'un conseil, sans l'assistance duquel ils seront incapables de certains actes, 1° les prodigues; 2° ceux qui, sans être dépourvus de raison, se trouvent cependant hors d'état de gérer leurs affaires, soit par la faiblesse de leur intelligence, soit (comme le sourd-muet non instruit) par l'impossibilité matérielle d'exercer leurs facultés (art. 499 et 513).

La nomination du conseil peut se faire, soit, dans les deux cas, sur la demande des personnes qui pourraient, s'il y avait lieu, provoquer une interdiction; soit, dans le second cas seulement, d'office par les tribunaux qui rejettent une demande d'interdiction. La demande se poursuit devant les mêmes tribunaux et dans les mêmes formes que dans le cas d'interdiction; le jugement doit être rendu et publié suivant les mêmes règles, et il produit aussi ses effets du jour même de sa date (ibid.).

Le conseil est toujours nommé par le tribunal, jamais par la famille. A l'exemple du curateur, il n'est jamais chargé d'agir, mais seulement d'assister l'incapable agissant lui-même; comme lui, il ne répond que de ses fautes et de sa négligence grave (ibid.).

X.-L'individu pourvu d'un conseil judiciaire ne peut, sans son assistance, 1° plaider; 2° transiger; 3° emprunter; 4° recevoir un capital et en donner décharge; 5o aliéner ou hypothéquer ses immeubles. L'assistance du conseil consiste dans son concours à l'acte.

Ces différents actes, quand ils sont consentis sans l'assistance du conseil, sont annulables au profit de l'incapable, et sur sa demande, pendant dix ans à partir de la cessation de l'incapacité. Quant aux actes antérieurs au jugement, ils ne peuvent jamais être attaqués sous le prétexte que la cause de la nomination existait notoirement quand on les a passés (art. 513).

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XI. Pour tous autres actes, le majeur pourvu d'un conseil conserve sa capacité ordinaire. Ainsi il peut, sans assistance, faire tous actes d'administration, et dès lors, aliéner ses meubles, faire son testament, se marier, ce qui le soumet comme tout autre à l'hypothèque légale de la femme. Il n'en a pas non plus besoin (en ce qui concerne le côté pécuniaire de l'association conjugale) pour se marier sans contrat, et se soumettre ainsi à la communauté légale (ibid).

XII. La soumission à un couseil judiciaire et l'incapacité qui en résulte, ne disparaissent qu'au moyen d'un jugement rendu après l'observation des formalités voulues pour la nomination (art. 514).

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