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quelle elle se trouve; voyant que les souverains regardent l'état des choses, produit par les événemens du mois de juil let dans le royaume des Deux-Siciles, comme incompatible avec la sûreté des pays voisins, et avec la tranquillité générale de l'Europe, au maintien de laquelle ils se croient également obligés, et par leurs devoirs envers leurs sujets, et par des promesses solennelles; connaissant leur invariable détermination de faire cesser cet état de choses, soit par les moyens de persuasion, soit par la force des armes, si cette dernière ressource devenait nécessaire ; instruite en outre par les délibérations qui ont eu lieu à Troppau, que les souverains ont adopté cette détermination après un mûr examen de toutes les questions d'un intérêt général qui s'y rapportaient, et que par conséquent ils ne s'engageraient plus dans des discussions qui auraient pour objet de leur faire adopter un point de vue entièrement différent; réunissant toutes ces considérations, S. M. devait nécessairement reconnaître l'inutilité ou plutôt l'impossibilité absolue d'une négociation fondée sur des bases irrévocablement rejetées par les souverains alliés; convaincue qu'elle-même chercherait en vain à dissimuler que le seul et dernier service qu'elle pouvait dans ces circonstances rendre à ses peuples, était celui de les préserver du fléau d'une guerre qui mettrait le comble aux malheurs dont ils sont accablés;

« Que, placé ainsi entre l'alternative de les abandonner à de nouvelles calamités, et la nécessité de les déterminer à renoncer, par une prompte et complète rétraction, aux changemens politiques qui ont eu lieu dans le royaume depuis le 2 juillet, le roi ne pouvait hésiter un moment; qu'il était décidé à embrasser la seconde alternative, conviction de pouvoir répondre à Dieu et à sa conscience, du parti qu'il prenait dans une situation aussi difficile et aussi pénible, et encore avec la ferme persuasion que, quelle que puisse être l'issue de cette crise, ses augustes alliés,

avec

la

désirant eux-mêmes épuiser les mesures de conciliation pour éviter les mesures coercitives ou en légitimer l'usage, ne lui refuseraient dans aucun cas ni leurs conseils, ni leurs secours;

Que le roi pouvait se flatter encore que l'immense majorité de ses sujets ne serait pas sourde à sa voix paternelle, et qu'au lieu de se précipiter dans un abîme de dangers, elle lui confierait le soin de veiller à leurs intérêts, de les réconcilier avec leurs voisins et avec l'Europe, et de leur préparer un avenir plus heureux;

Que, guidé par de si puissans motifs, le roi se proposait d'adresser à son fils, le duc de Calabre, une lettre par laquelle il lui ferait connaître sa propre position, les déterminations des souverains alliés, et les dangers auxquels le royaume serait inévitablement exposé, si on persistait à soutenir ce qui désormais ne pourrait conduire qu'aux plus fâcheuses extrémités ; que, devant, dans cette lettre, se borner au langage simple et précis que l'urgence du moment et les circonstances dans lesquelles elle se trouvait lui dicteraient à l'égard de son fils, S. M. espérait que ses augustes alliés seconderaient ses efforts en adressant à leurs agens diplomatiques à Naples une instruction rédigée dans le même et en leur fournissant toutes les informations dont ils pourraient faire usage, afin de coopérer au résultat heureux qui mettrait un terme aux peines de S. M. et aux souffrances de ses fidèles sujets.

sens,

A la suite de ce message, le roi a donné communication de la lettre qu'il a écrite à S. A. R. le duc de Calabre, et dont V. Exc. trouvera ci-jointe une copie. S. M. a en même temps annoncé qu'elle jugeait utile, sous plusieurs rapports, d'appeler le duc de Gallo auprès de lui, afin que la conférence des plénipotentiaires lui fit connaître directement la détermination des souverains alliés qui a motivé la conduite du roi, et pour qu'il puisse en rendre compte au

TOME III.

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prince duc de Calabre. Les plénipotentiaires, ne voyant de leur côté aucun inconvénient à cette mesure, y ont consenti sans difficulté.

Tels ont été, Monsieur le comte, les résultats des communications qui ont eu lieu jusqu'ici par rapport aux affaires de Naples. Pour seconder, autant qu'il est en nous, la conduite du roi envers le prince son fils, nous vous invitons :

1o A faire connaître et certifier à S. A. R. le prince duc de Calabre, que les déterminations des souverains alliés sont en tout conformes à la lettre qui lui a été écrite par le roi son père;

2o A déclarer qu'il appartient maintenant à S. A. R. de juger et d'apprécier, de faire juger et de faire apprécier par ceux qu'il admettra à ses conseils, d'une part les avantages qu'un oubli spontané des événemens du 2 juillet et des résultats qu'ils ont eus, offrirait au royaume des Deux-Siciles; de l'autre, les calamités inévitables auxquelles le royaume serait livré, s'il refusait d'obéir à la voix paternelle de son roi;

3o A représenter à S. A. R. combien il est urgent de prendre les moyens les plus prompts et les plus convenables pour faire cesser la situation affligeante dans laquelle se trouve le royaume, tant par les convulsions qui en agitent l'intérieur, que par les dangers qui le menacent du dehors. V. Exc. voudra bien communiqner la présente dépêche au prince duc de Calabre, en assurant S. A. R. que les souverains alliés réunissent sincèrement leurs vœux à ceux de son auguste père, pour que la conduite de S. M. produise le plus heureux effet, prévienne toute mesure de rigueur que les souverains n'adopteraient qu'avec un profond regret, et rétablisse le plus promptement possible l'ordre et la paix dans le royaume des Deux-Siciles.

Laybach, 19 (31) janvier 1821.

Les dépêches adressées à M. le baron de Ramdhor, et à M. le chevalier de Mens, sont conformes à la présente.

SECONDE INSTRUCTION

Envoyée de Laybach par M. le comte de NESSELRODE, ministre des affaires étrangères de S. M. l'empereur de toutes les Russies, à M. le comte de STACKELBERG, envoyé extraordinaire et ministre plénipotentiaire de la cour de Pétersbourg près la cour de Naples.

MONSIEUR LE COMTE,

Aux instructions que je transmets à V. Exc. dans ma principale dépêche de ce jour, se trouve jointe la traduction de la lettre que S. M. sicilienne adresse à son auguste fils. J'y joins l'explication sur la nature de la garantie à laquelle S. M. sicilienne s'est vue dans l'obligation de consentir, parce qu'elle en a été requise par ses alliés, dans l'intérêt général de la péninsule italienne. Ce gage indispensable de la tranquillité de l'Italie serait la présence temporaire d'une armée d'occupation, laquelle n'entrerait dans les États de S. M. qu'au nom des puissances décidées à ne pas laisser subsister plus long-temps à Naples un régime imposé par la rébellion, et attentatoire à la sûreté de tous les États voisins. Cette armée se trouverait sous les ordres du roi; l'occupation ne serait autre chose qu'une mesure transitoire, et ne pourrait en aucun cas porter la moindre atteinte à l'indépendance politique du royaume des Deux-Siciles.

Vous pourrez avertir le prince duc de Calabre que vous êtes informé de la détermination prise sous ce rapport par les puissances alliées. Si S. A. R. vous engage à la rendre publique, vous vous conformerez à ses intentions, et vous pourrez, en ce cas, expliquer facilement la marche immédiate des troupes, et rassurer les esprits à Naples, en fai

sant connaître avec franchise le véritable but et le caractère de l'occupation. Cependant, si le prince duc de Calabre jugeait plus prudent de garder le silence sur cette garantie, V. Exc. suivrait fidèlement l'exemple de S. A. R.

Il me reste à vous prévenir que, d'après les explications qui ont eu lieu entre les cabinets alliés, aucune contribution de guerre ne sera imposée au royaume des Deux-Siciles, dans le cas où une improbation spontanée des événemens des 2 et 6 juillet permettrait aux puissances alliées de ne pas recourir à la force des armes.

Dans l'hypothèse contraire, si la guerre éclatait, alors il serait impossible d'empêcher que le royaume n'en supportât point toutes les conséquences.

Les dispositions susdites des alliés ajoutent encore à la responsabilité dont se chargerait les hommes qui feraient peser sur leur patrie les conséquences d'une obstination aveugle. Vous êtes autorisé à informer le prince duc de Calabre de ce qui a été résolu à Laybach, relativement à la dispense ou à la nécessité d'une contribution de La guerre. connaissance de ces résolutions sera sans doute utile à S. A. R., pour présenter dans toute leur étendue les avantages qu'offre aux Napolitains la preuve de confiance que le roi leur demande. Il dépendra du prince de donner aux résolutions des puissances alliées sur cette proposition une entière publicité, ou de les laisser ignorer, suivant que S. A. le trouvera plus conforme aux intérêts du roi et de ses peuples.

Cependant, comme il y a une grande différence entre rendre une mesure publique, ou en convenir, si quelque Napolitain vous interroge, soit sur la question d'une occupation transitoire, soit sur les moyens d'épargner au pays une contribution de guerre, il serait indigne d'une politique loyale de dissimuler, sous l'un ou sous l'autre rapport,

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