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III.

INSTRUCTION D'UN AMBASSADEUR A SON FILS QUI SE DESTINAIT A LA CARRIÈRE DES NÉGOCIATIONS.

Je touche, mon cher fils, à ma dernière heure; souffrez que j'emploie le peu de momens qui me restent, à vous tracer quelques préceptes qui pourront vous être utiles dans la carrière que vous allez parcourir.

Attaché depuis trente ans au ministère, j'ai ébloui sans persuader, et mes succès ont eté l'effet du hasard, bien plus que de la politique et de la saine raison.

Les instructions que je vous donne ici, feront tout à la fois la critique de ma conduite et la base de celle devez tenir dans la place que vous allez remplir.

que vous

Persuadé de la dignité de votre titre, faites respecter l'ambassadeur, mais ne compromettez jamais la personne ; je ne veux pas dire par-là que, minutieux observateur de l'étiquette ministérielle, on ne trouve en vous que l'homme du prince sans y rencontrer l'homme aimable. Quand vous verrez un ministre concentré sans relâche dans une gravité méthodique, tout plein de lui-même, et occupé des formalités accessoires de sa place, prononcez hardiment que cet homme est un esprit médiocre, qui n'ira jamais au grand; il saura très bien comment un fauteuil doit être placé, à qui il doit donner la main, et composer son visage à l'aspect

du ministre d'une puissance ennemie, neutre, ou indécise, mais toute sa pénétration, bornée au faste, ne pourra s'étendre sur un traité essentiel, en saisir l'esprit, en prévoir les motifs, et en déterminer les conséquences.

Depuis que la plupart des souverains sont convenus de n'observer que les traités qui leur sont avantageux, on a quitté les grandes règles de la négociation, et on a voulu substituer la supercherie à l'étude de la politique et du droit des gens.

Voyez toutes les négociations du quinzième et du seizième siècle, celles que l'équité, la bonne foi, et le code diplomatique ont cimentées, ont passé jusqu'à nous dans toute leur intégrité; au lieu que les conventions des princes qui n'ont eu pour base que la surprise et l'égoïsme, sont anéanties; elles ne subsistent dans les écrits des publicistes que pour y déposer contre la gloire de ceux qui les ont signées. J'en dois excepter cependant tous les traités conclus par Louis XI, Roi de France. Ce monarque, appelé par tous les auteurs de sa nation superstitieux et fourbe, n'accorda jamais une clause de réciprocité ou d'échange dans une négociation, qu'il n'en jurât in petto la violation au moment de la signature; Louis XI réussit, parce qu'il n'avait contre lui que des souverains qui avaient de la bonne foi,

ou dont les forces étaient inférieures aux siennes.

Ce prince qui, pour me servir des expressions de Mezerai, fut le premier qui tira les rois hors de page, ne doit point servir de modèle, parce que les succès, fondés sur la violation des lois, sont toujours odieux.

Quand je lis l'histoire du dernier siècle, je suis surpris que le cardinal de Richelieu, qui avait le sens droit et l'ame élevée, ait employé, pour réussir, toutes les petites finesses qu'un esprit médiocre met en œuvre; la sublimité de son génie et les grands hommes qu'il trouva à son avènement au trône (c'est ainsi qu'on doit appeler le ministère de Riche

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