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» sa puissance. Un envoyé de paix cherchait à éta» blir son pouvoir, en flattant les uns et en mena>> çant les autres. Il nous imposait l'obligation de » déclarer la guerre à la Grande-Bretagne. La situa» tion de la Suède m'affligea vivement, sans néan» moins m'effrayer. Mon âme s'éleva jusqu'à la >> hauteur des périls que vous couriez. Malgré mon penchant pour la retraite, au moment de l'élection » nationale je pris l'engagement de vous retirer de » l'état accablant où vous vous trouviez; et cet en»gagement fut scellé, dans ma pensée, avec un cri » intérieur qui me parut inspiré du ciel. Je suis » parvenu à vous servir, sans m'attacher exclusive» ment à parler votre langue. Celle de l'humanité, qui indique même à l'homme privé l'obligation » d'être utile à son semblable, fut le nouveau code » de mes devoirs. Je l'ai gravé dans tout mon être » en caractères de feu. La connaissance de votre lan» gue, de vos habitudes, de vos vertus nationales et » de vos erreurs, est celle de votre histoire. Elle ⚫ consiste dans les succès et dans les monuments » que je laisserai à ma mort; voilà ma principale gloire (1). Ces monuments sont les ressources que » vous ne possédiez pas à mon arrivée; ces monu

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(1) Cette phrase est peu intelligible, mais nous nous sommes fait un devoir de ne jamais altérer le texte, généralement diffus et incorrect, des discours et des lettres de Bernadotte.

«

»ments sont l'extinction de votre dette extérieure » et de la presque totalité de celle de l'intérieur; un ⚫ excédant du revenu annuel de la banque, élevé du - chiffre de 248,000 rixdales de banque à celui de près de 700,000 basé sur des créances réelles; » ces monuments sont le creusement de vos canaux; » le déblayement des fleuves et des rivières; le per» cement de nouvelles routes; les forteresses qui » s'élèvent; les ports et les môles qui ont été con>>struits; vos magasins et vos arsenaux ; une armée » de plus de cent mille hommes, composée non de » vieillards et d'enfants, mais de vétérans et d'a>>dultes; une flotte entière d'environ deux cent

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cinquante chaloupes et yoles canonnières; une augmentation de la grande flotte, en frégates et » vaisseaux neufs; une agriculture qui se perfec»tionne chaque année; une industrie manufacturière plus que doublée dans plusieurs branches essentielles; les revenus des douanes presque » triplés, en diminuant les droits d'entrée et de sortie; une population approchant de celle de la » Suède et de la Finlande avant la perte de cette province, c'est-à-dire, plus d'un quart au delà de » celle que j'ai trouvée à mon arrivée. Je ne vous parlerai pas du plus étonnant de tous celui de la » réunion d'un peuple qui, dans les premières épo»ques de votre histoire, était presque » ment en opposition avec vous.

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T. II.

continuelle

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» Dieu qui m'entend, Dieu que j'invoque pour » la continuation de vos prospérités présentes, » connaît le désir ardent que j'ai eu de vous ren» dre heureux. Si je n'ai pu y parvenir compléte»ment, par suite de l'inconstance de notre humanité, j'ai au moins réussi, par sa divine protec» tion, à vous arracher du malheur où vous étiez réduits, et à diminuer les souffrances et les be» soins.

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Forcé de répondre à des attaques provocatrices, » le Tout-Puissant a permis que la grande partie » des soldats qui franchirent la Baltique avec moi, >> revint au milieu de ses concitoyens, après avoir » contribué à la délivrance de l'Allemagne et fixé l'indépendance de leur patrie. Cette indépen» dance, Messieurs, se perpétuera, car vous le vou» drez avec votre roi. Ne sortez jamais des bornes » que la nature, et, plus encore, ses révolutions ma» térielles ont posées pour vous. Rentrez dans vos limites, si vous êtes forcés de les dépasser, après » avoir rejeté les injures sur les agresseurs. Insulaires sur les neuf dixièmes du territoire des deux » royaumes, nous ne tenons au continent que par » une région presque stérile. Notre position. trace » notre politique. Sillonner toutes les mers avec » nos vaisseaux et désirer la paix du monde, voilà »notre vocation!

» Les puissances étrangères continuent de nous

» donner des preuves de leur confiance et de leurs bonnes dispositions.

Conservez ces avantages que votre gouverne» ment a procurés aux deux royaumes. La prospé» rité intérieure et l'indépendance au dehors ne » peuvent se consolider que par l'amour de la concorde, de la justice et la soumission aux lois. Je prie la Providence de vous maintenir dans ces » heureux sentiments.

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Appelé bientôt dans une autre vie par le cours » de la nature, j'implorerai encore la bénédiction » du Créateur, pour deux peuples que tant de vertus » honorent quand ils sont laissés à eux-mêmes, et

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qui m'ont donné un témoignage si touchant de leur affection et de leur gratitude. »

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CHAPITRE XI.

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At

Réaction de la révolution de juillet sur la Suède. - Réveil de ce peuple. Adresse énergique des États-généraux à la Couronne. Ils demandent des réformes et des garanties. Guerre contre la presse. taques contre le roi. — Condamnation capitale pour délit de presse. État des partis. Politique de Charles-Jean dans les affaires d'Orient. Dislocation du ministère. Demande d'une chambre unique. — Résistance de la Couronne. Ajournement de la question. — Échecs éprouvés par le gouvernement. - Chagrins de Charles-Jean.-Conduite équivoque dans la question égyptienne. Clôture de la diète de 4840. -Rétablissement du calme.- Affaiblissement de la santé de Charles

Jean.

Pour bien apprécier la situation intérieure et extérieure de la Suède au moment où nous sommes arrivés, il faut reporter nos regards sur les années précédentes.

En 1834, époque de l'ouverture de la dernière diète, presque tous les États de l'Europe étaient travaillés par une sourde agitation. On avait comprimé le développement de la révolution de juillet, mais on n'avait pas étouffé le besoin de réformes et de progrès qui agitait tous les esprits. Les couronnes ne tombaient plus sous les pavés, mais les peuples restaient à l'état de lutte morale contre les vieilles monarchies, les principes de la liberté contre les traditions de l'absolutisme.

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