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siècles de façon à ne plus former que quatre Commanderies un peu considérables: la Feuillée en Cornouaille-Carentoir en pays Vannetais la Guerche dans le diocèse de Rennes et Nantes en la ville de ce nom.

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Dans ce travail historique sur les Commanderies de Nantes, nous nous proposons d'étudier: la Commanderie du Temple. Sainte-Catherine depuis son origine jusqu'à l'époque de son union avec l'Hôpital Saint-Jean la Commanderie de l'Hôpital Saint-Jean avant cette union la Commanderie de Nantes, enfin, composée du Temple Sainte-Catherine, de l'Hôpital Saint-Jean et des annexes Maupertuis, Faugaret et Grée, telle qu'elle subsista depuis la fin du XV siècle jusqu'à l'époque de la Révolution française.

I

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Peu d'années après avoir fondé à Jérusalem l'Association de la Milice du Temple, Hugues des Payens passa en Occident, l'an 1127, pour solliciter du Saint-Siège la confirmation de son nouvel institut; il l'obtint l'année suivante au Concile de Troyes. Aussitôt après, le premier Grand Maître des Templiers parcourut une partie de la France, passa en Angleterre, puis en Espagne et en Italie. Ayant, dans ces pérégrinations, recruté de nombreux prosélytes et recueilli d'abondantes aumônes, il regagna la Terre-Sainte, où il mourut en 1136.

Pendant son séjour en France, Hugues des Payens vint en Bretagne et y reçut vers 1130 diverses donations de la part de Pierre de la Garnache et de Garsire de Machecoul, grands seigneurs du pays de Retz; ce fut le noyau de la Commanderie des Biais unie plus tard à celle de Coudrie en Poitou (1).

(1) Voy. le Cartulaire de Coudrie publié dans les Archives du Poitou, tome II.

Il est vraisemblable que Hugues des Payens ne vint pas si près de Nantes sans entrer dans cette ville et sans saluer le duc Conan III, dit le Gros, qui régnait alors en Bretagne. Il nous paraît même probable que ce prince fit alors aux Templiers un premier don avec l'assentiment de sa mère la vénérable duchesse Ermengarde, de sa femme Mathilde et de sa fille Berthe, il concéda à l'Ordre du Temple une vaste île voisine de Nantes, formée par les eaux de la Loire et appelée la Hanne. La charte qui renferme cette donation n'est pas datée (1), mais elle est antérieure à une autre charte de 1141 (2) dans laquelle Conan rappelle ce don de la Hanne, ajoutant qu'ensuite « postea », éclairé par le Saint-Esprit, il a voulu compléter son aumône.

Il la compléta dignement à Nantes devant ses hauts barons les sires de Fougères, de Châteaubriant, de la Garnache et de Guérande, en faveur du Grand Maître du Temple Guillaume Faucon. Celui-ci se trouvait alors à Nantes avec deux chevaliers de son Ordre nommés Alfred et Henri. Le duc leur concède d'abord cent sols de rente sur les revenus des halles de la boucherie à Nantes et y ajoute le don d'un emplacement dans le pré d'Anian pour construire en cette ville une maison de demeure; puis il affranchit d'impôt tout ce que les Templiers possèdent déjà ou pourront à l'avenir posséder en Bretagne. Il défend à ses justiciers de les inquiéter d'aucune manière; au nom de ses barons, comme au sien propre, il assure que leurs propriétés seront partout respectées; il lance enfin les plus redoutables imprécations contre qui oserait s'opposer à ses bonnes intentions (3).

Cet acte important est daté de 1141 et constitue la fondation du Temple de Nantes. La prairie de la Hanne appelée

(1) Archiv. de la Vienne, 3 H, 764.

(2) D. Morice, Preuv. de l'Hist. de Bret., I, 583.

(3) Ibidem.

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communément à cause de sa vaste étendue, la GrandeHanne forma le domaine proche du nouvel établissement; dans le pré d'Anian furent bâties, au confluent de l'Erdre et de la Loire, une maison d'habitation et une chapelle dédiée à sainte Catherine; les rentes et les fiefs concédés par le prince permirent aux Templiers de subvenir aux besoins de leur Ordre en Terre-Sainte.

L'exemple de pieuse générosité de Conan III envers la Milice du Temple fut imité par d'autres princes bretons : Alain-le-Noir, comte de Penthièvre, et Hoël, comte de Nantes

puis les ducs Conan IV et Geoffroy II (1); mais on ignore en quoi consistèrent leurs libéralités.

Il existe une charte datée de 1182 (2) et attribuée au duc de Bretagne Conan IV, par laquelle ce prince confirme aux Templiers tous les biens qu'ils possédaient en Bretagne. Cette charte est apocryphe, le duc Conan IV étant mort dès 1161; cependant elle ne manque pas de valeur, car elle doit être de la fin du XIIIe siècle ou du commencement du XIVe, et ayant été peut-être composée au profit des Chevaliers de Saint-Jean de Jérusalem, héritiers des Templiers, elle a tout au moins la force d'une vieille tradition relatant les possessions du Temple devenues les propriétés des Chevaliers Hospitaliers. A ce titre, elle est intéressante pour nous et nous devons la consulter pour y relever les noms de localités se rapportant au cadre de notre étude. Ainsi, nous trouvons mentionnés dans cette charte: Nantes, Ancenis, la Hanne en Doulon, Maupertuis, Faugaret et Saint-Hilaire de Chaléons, comme étant des lieux du pays nantais où les Templiers avaient des biens.

Un siècle après la fondation de leur ordre, les Templiers

(1) D. Morice, Preuv. de l'Hist. de Bret., I, 836.

(2) Voy. Geslin de Bourgogne et de Barthélemy, Anciens Evêchés de Bret., VI, 136, et Bibliothèque de l'Ecole des Chartes, tome XXXIII.

reçurent des chartes, authentiques cette fois, par lesquelles les princes bretons leur assurèrent la propriété des biens dont ils avaient été gratifiés dans notre contrée.

C'est ainsi qu'en 1201, la duchesse Constance de Bretagne confirma aux Templiers de Nantes la donation de son aïeul Conan III, et qu'en 1217, le duc Pierre Mauclerc et Alix de Bretagne, sa femme, approuvèrent solennellement tous les dons princiers faits au Temple, en Bretagne, avant eux (1).

A Nantes même les aumônes faites aux Templiers par de simples seigneurs ou par d'humbles particuliers se multiplièrent durant le XIIIe siècle. En 1202, Geoffroy, baron de Châteaubriant, leur donne cinq sols angevins de rente payables à Pâques-Fleuries sur les revenus de ses moulins de Châteaubriant (2). — Eu 1212, un chevalier appelé Olivier Rajolle et Levine, sa femme, leur concèdent ce qu'ils ont dans l'île Boitie en Bouguenais et à l'écluse de Chantenay, plus des vignes, des prés et les moulins de la Roche (3). - En 1214, Regnault Bosel, Raoul Brun, Pierre Ledo et Geffroy Bravart leur abandonnent tout ce qu'ils possèdent eux-mêmes en l'île Boitie (4). En 1233, Daniel Le Bariller, sa femme, et Geoffroy, leur fils, leur font don de vingt sols de cens sur une aire située sur le pont neuf d'Erdre en Saint-Nicolas de Nantes (5). La même année 1233, Guillaume de Saffré, chevalier, leur abandonne la possession des fiefs Brésic, au village de Marinac en Saffré (6). En 1246, un autre chevalier, nommé Alain de la Roche, leur cède un four

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D. Morice, Preuv. de l'Hist. de Bret.,

(1) Arch. de la Vienne, 3 H, 764. I, 836.

(2) Arch. de la Vienne, 3 H, 764.

(3) Ibidem, 3 H, 541 et 764.

(4) Anciens Evêches de Bret., VI, 155.
(5) Archiv. de la Vienne, 3 H, 541.
(6) Ibidem, 3 H, 764.

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banal à Coueron (1). Enfin, en 1254, Guillaume Jagu, sa femme et son fils Geoffroy, leur donnent tout ce qu'ils possèdent en l'île Boitie (2).

Outre ces donations, bien d'autres aumônes furent faites aux Templiers de Nantes dans leurs annexes de Faugaret, Maupertuis et Grée, nous les signalerons en parlant de ces établissements secondaires.

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C'est qu'en effet, à cette époque, grande était chez nous la situation des Templiers; on leur demandait de sceller les actes les plus importants et leur témoignage était invoqué dans les circonstances solennelles; ainsi, en 1220, le commandeur ou plutôt comme on disait alors le précepteur du Temple de Nantes fut appelé dans l'enquête dirigée par le sénéchal du Poitou pour fixer les droits du duc de Bretagne sur le sel, et en 1262, le grand prieur d'Aquitaine fut l'exécuteur testamentaire du baron de Châteaubriant (3).

On vit bien à Nantes ce qu'était la puissance des Templiers quand le duc Pierre Mauclerc agrandit l'enceinte murale de cette ville. Le prince fit alors ses forfications franchir l'Erdre là même où cette rivière se jette dans la Loire et englober le Bourg-Main ou quartier de Saint-Nicolas. Il enferma donc nécessairement dans ses nouveaux murs l'établissement du Temple, posé, avons-nous dit, au confluent de la Loire et de l'Erdre; mais loin de nuire aux Chevaliers, il leur donna la partie des remparts qu'il faisait construire autour de leur enclos, leur permettant même d'y élever les bâtiments qui leur sembleraient nécessaires, sans néanmoins les obliger à entretenir ses propres fortifications (4).

(1) D. Morice, Preuv. de l'Hist. de Bret., I, 929.

(2) Archiv. de la Vienne, 3 H, 541.

(3) D. Morice, Preuv. de l'Hist. de Bret., I, 847 et 985.

(4) D. Morice, Preuv. de l'Hist. de Bret., 1, 850.

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