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Brissaud, l'agrégé érudit donnant des consultations rétrospectives sur les infirmités de Scarron ou de Couthon, quand il ne se laisse pas aller au plaisir, dans un livre où il se défend pourtant de prétention à l'érudition linguistique et historique, de recueillir les expressions populaires relatives à la médecine.

J'allais oublier de vous nommer Maurice Regnault, le savant professeur d'histoire de la médecine à la Faculté, qui donne comme thèse de docteur ès-lettres un gros volume sur la médecine au temps de Molière, qui suffirait à la réputation de bien des littérateurs de profession.

Comment oublierai-je encore le feuilletoniste médical qui, dans le bulletin du rez-de-chaussée d'un journal scientifique, sous la forme d'une causerie légère, traite les questions d'enseignement, d'hygiène, de déontologie, saisit au vol des conversations les impressions du public sur les questions médicales, ridiculise quelque grotesque mesure administrative, prend parti dans une controverse médicale ou confraternelle et en amuse la galerie, fréquente les Congrès et les Académies et d'une plume familière et badine nous donne la physionomie d'une séance mouvementée, revêt du charme de son esprit et de son style ces mille sujets qui, sans être de la médecine scientifique pure, touchent à l'exercice de la médecine, à sa dignité ou à ses intérêts, le critique médical enfin et même quelquefois le pamphlétaire médical.

Le type en a été dans le docteur Amédée Latour qui, sous le nom de docteur Simplice, a pendant cinquante ans, sans jamais lasser le lecteur, versé sa verve intarissable, légèrement gouailleuse, rarement sévère, jamais très méchante, dans les feuilletons de la Gazette des Hôpitaux ou de l'Union médicale. Il a eu bien des imitateurs, et notre confrère, que je veux bien ne pas nommer pour épargner sa modestie, qui écrit les bulletins de la Gazette médicale de

Nantes, semble avoir retrouvé sa manière avec, en plus, une pointe d'ironie mordante que lui envierait un polémiste.

Après tant d'exemples, ne suis-je pas en droit de conclure que nos plus grands médecins ont été doublés d'humanistes distingués.

Je vais plus loin, on ne s'imagine guère un médecin parfait sans la supériorité intellectuelle que donne l'étude des philosophes et des écrivains.

Ce serait en effet comprendre bien mal le rôle du médecin que de se l'imaginer un guérisseur ayant une formule thérapeutique contre chaque maladie et de croire que son rôle doit se borner à griffonner sur un bout de papier l'ordonnance traditionnelle.

Sa mission est d'un ordre autrement élevé.

Les conseils qu'il donne, l'influence qu'il exerce autour de lui et dans les conseils, la persuasion qu'il sait imposer, la suggestion par laquelle il guérit plus souvent que par une vaine formule, les consolations dont il calme les désespoirs et les angoisses, les avertissements qu'il donne en temps utile pour sauver une situation, les pieux mensonges dont il entoure, pour y préparer, les catastrophes inévitables, la confiance absolue qu'il doit inspirer, demandent pour le médecin des qualités qui ne s'apprennent pas au cours de clinique et de pathologie.

Ges qualités, il doit les trouver dans son éducation première et les humanités seules lui donneront l'autorité dont il a besoin; il trouvera de plus dans le culte des lettres une consolation pour lui-même; il y puisera un peu de cette douce philosophie qui lui est plus nécessaire qu'aux autres hommes.

Nous ne devons point être enfermés dans les limites d'une spécialité jalouse, le droit de penser et l'art d'écrire

ne sont point des monopoles réservés à quelques-uns. L'art d'écrire n'est point un art frivole: il n'atteint sa perfection que lorsque l'expression est l'image transparente, mais simple, de la pensée et quand, dans le domaine médical, un homme aura rencontré une pensée juste et forte et qu'il aura donné à cette pensée l'expression qui lui convient, il aura fait œuvre d'écrivain véritable.

J'ai voulu vous montrer que la médecine a fourni à la littérature d'illustres disciples, j'espère y avoir réussi.

Heureux si j'ai pu resserrer les liens de cette solidarité intellectuelle qui nous relie les uns aux autres et nous réunit pendant quelques instants dans le culte commun du vrai et du beau.

RAPPORT

SUR LES

TRAVAUX DE LA SOCIÉTÉ ACADÉMIQUE

DE LA LOIRE-INFÉRIEURE

PENDANT L'ANNÉE 1896-1897

PAR M. A. MAILCAILLOZ, SECRÉTAIRE GÉNÉRAL.

MESSIEURS,

Mon premier mot sera, si vous le voulez bien, un remerciement. Vous m'avez fait, il y a un an, l'honneur de me désigner comme Secrétaire général de votre Société pour 1897 tous en auraient comme moi été fiers; mes prédécesseurs vous ont à cette même place exprimé leur reconnaissance et vous vous attendez bien sans doute à ce que je suive cette tradition si complètement justifiée. Mais, si je rappelle qu'il s'agit là d'un ancien usage, c'est pour vous déclarer de suite que, cette fois, j'y vois pour moi une plus directe obligation, j'y vois une véritable dette. de cœur que j'ai hâte d'acquitter envers vous. Votre choix, en effet, est venu me trouver à un moment où j'étais tout entier sous le coup de la perte cruelle de celui qui avait été jusque-là mon guide et mon conseiller de tous les

instants. Il faut avoir subi le choc de ces douleurs si profondes pour comprendre la valeur consolante d'un témoignage de sympathie, d'une marque d'estime et d'affection. Ce témoignage, vous me l'avez donné, mes chers Confrères, et voilà pourquoi ma reconnaissance envers vous prend un caractère spécial de plus vive cordialité. Voilà pourquoi je suis si particulièrement heureux de m'acquitter dans une faible mesure en rendant compte de mon mieux de vos intéressantes études. Vous comprendrez, j'en suis certain, les sentiments qui me font mettre ce rapport sous le patronage du père tant aimé et regretté aux conseils éclairés de qui je dois le privilège d'avoir été jugé par vous digne de prendre part à vos travaux.

Je n'assistais pas, Messieurs, à votre séance générale de l'année dernière. Aussi sera-ce sous la garantie de leurs précédents succès et de vos applaudissements dont les échos sont venus jusqu'à moi que je féliciterai ici les artistes, musiciens et chanteurs, qui ont bien voulu nous prêter leur concours en cette occasion. Le programme comprenait l'exécution de plusieurs fragments de l'œuvre de Wagner encore trop peu connue à Nantes. En votre nom je tiens à remercier tout spécialement Mules Marteau, Sylvestre et Cardot, MM. Chapron, Torrent de Blanxart et E. Varnier, d'avoir donné l'appui de leur talent à notre tentative artistique.

Si je n'ai pas entendu le M. Gadeceau, j'ai eu, du satisfaction de le lire et je commun plaisir en en disant aujourd'hui quelques mots. « Nous vous avons aimé parce que vous êtes aimable, • disait mon prédécesseur en terminant son rapport et s'adressant à M. Gadeceau. Cette amabilité, toute faite de courtoisie et de simplicité, se double chez notre ancien

discours de notre président, moins, depuis, la très vive suis heureux de rappeler notre

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