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bunal civil de Rennes, de la terre du Lou, située sous l'arrondissement du tribunal de première instance de Montfort, et astreinte, par l'art. 12 du cahier des charges, à se servir de Me Loysel, avoué près le tribunal civil de Rennes et commissaire de la faillite Boulanger, pour faire aux créanciers inscrits les notifications prescrites par la loi pour l'ordre et la purge des hypothèques, a avisagé, devant le tribunal civil de Rennes, M Loysel et Me Lebret, ce dernier avocat-avoué près le tribunal de Montfort, pour voir juger: « Ou que le mémoire dudit Loysel, en ce qui concerne les notifications faites aux créanciers >> inscrits sur la terre du Lou, serait réputé non-avenu, et qu'en >> conséquence Me Loysel serait condamné à restituer à la dame >> Lorgeril la somme de 804 fr. 63 cent. qu'il avait reçue des >> mains du sieur Duclos, son procurateur; ou que la réclamation » de Me Lebret, qui prétendait avoir droit aux mêmes émolu» mens et pour les mêmes notifications, serait retranchée de son » mémoire; »

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Considérant, en fait, que Me Lebret est institué avoué de la dame de Lorgeril près le tribunal civil de Montfort, dans les actes notifiés aux créanciers inscrits; que l'original et les copies, imprimés à Rennes par les soins de M Loysel, sont certifiés vrais et revêtus de la double signature des sieurs Loysel et Lebret; que l'un et l'autre prétendent avoir droit aux mêmes émolumens et pour les mêmes actes;

Considérant que les premiers juges, en admettant d'un côté le déclinatoire proposé par Me Lebret, fondé sur l'art. 60 C. P. C., et en renvoyant en conséquence la dame de Lorgeril procéder contre lui devant le tribunal civil de Montfort, et d'un autre côté, en retenant devant eux la connaissance de la réclamation de la dame de Lorgeril contre Me Loysel, ont méconnu l'intérêt et le droit qu'avait la dame de Lorgeril de faire statuer, par les mêmes juges et par le même jugement, sur la contestation élevée par les prétentions réciproques des sieurs Lebret et Loysel aux mêmes émolumens et pour les mêmes actes; qu'une pareille décision lui cause par conséquent un préjudice réel, en la forçant de suivre deux instances devant des tribunaux différens, et l'expose à des contrariétés de jugemens, contrairement aux vœux des art. 59 et 181 C. P. C.;

D'où il suit qu'il y a lieu de réformer leur décision sous ce rapport;

Considérant, en fait, que la cause est en état de recevoir jugement au fond;

Considérant, en droit, qu'aux termes de l'art. 473 C. P. C., la Cour, en infirmant, est autorisée à statuer définitivement entre parties;

Considérant, en fait, que les notifications dont il s'agit ont été faites sous la juridiction du tribunal de Montfort, et par un huissier commis par ce tribunal;

Considérant, en droit, qu'aux termes des art. 38 et 72 du Tarif, les émolumens accordés, par ces articles, aux avoués qui ont fait les copies et garanti par leurs signatures leur exactitude, ne peuvent appartenir qu'aux avoués institués par les parties ou leurs mandataires et ayant droit et qualité d'occuper pour elles dans les ressorts où les actes se font;

Considérant, en fait, que le sieur Loysel, mandataire obligé de la dame de Lorgeril, et ne pouvant occuper pour elle devant le tribunal de Montfort, s'est vu dans la nécessité de recourir au ministère de Me Lebret pour les actes de notification, en l'instituant avoué de cette dame, et de s'en rapporter à sa bonne foi pour l'usage qu'il ferait de son institution et de sa signature, pour garantir des actes de notification; que s'il paraît, par la correspondance, que l'intention de Me Lebret était d'abord de laisser Me Loysel recueillir des émolumens auxquels le sieur Lebret seul pouvait prétendre, toutefois est-il constant que M'Loysel ne justifie d'aucune renonciation précise et formelle de la part. de M Lebret, et qu'en droit cette renonciation ne peut se déduire de simples présomptions;

Qu'il suit de ces faits et principes que Me Lebret seul a rigoureusement le droit de réclamer les émolumens qui font l'objet du litige, et que d'ailleurs, dans aucune hypothèse, la loi n'autorisait Me Loysel à se les approprier;

Par ces motifs, après avoir entendu à ses audiences des 7, 13, 14 el 27 décembre dernier, les avoués et avocats des parties dans leurs conclusions et plaidoiries, et l'avocat-général dans ses conclusions, faisaut droit sur l'appel de la dame de Lorgeril, dit qu'il a été mal et incompétemment jugé par les premiers juges; corrigeant et réformant, décharge la dame Lorgeril des condamnations prononcées contre elle; évoquant et statuant au fond, condamne Me Loysel à restituer à la demanderesse la somme de 804 fr. 63 cent. qui lui a été payée par Me Duclos, pour les frais et émolumens dont il s'agit; déclare que M. Lebret, avoué de la dame de Lorgeril, est seul fondé en droit à réclamer lesdits émolumens, sauf à lui à tenir compte à Me Loysel de ses déboursés pour frais d'impression et autres, conformément à ses offres; condamne M Loysel dans tous les dépens des causes principale et d'appel envers toutes les parties.

Du 3 janvier 1831.. 1 re chambre.

OBSERVATIONS,

On a vu que dans cette cause Me Loysel, de Rennes, soutenait que les actes qu'il avait confiés à Me Lebret, de Montfort, n'étaient pas du ministère forcé des avoués, et qu'en conséquence ce dernier ne pouvait rien demander pour les avoir surveillés. Nous pensons bien que les notifications prescrites par l'artiele 2183 C. C. peuvent être faites sans recourir au ministère

d'un avoué, et sous ce rapport la prétention de Me Loysel était fondée; mais Me Lebret s'étant déclaré avoué de la dame de Lorgeril, il avait, comme tel, présenté requête au président du tribunal de Montfort pour faire commettre un huissier à l'effet de faire les notifications dont s'agissait, et de plús avait signé les copiés à lui envoyées. Il était donc, aux yeux des tiers, légalement constitué pour la dame de Lorgeril, et comme tel responsable de l'exactitude des copies. L'on peut dire même que son ministère était nécessaire, du moins en ce qui concernaît la requête, à l'effet d'obtenir la commission d'un huissier de Montfort. Cette requête ne pouvait assurément être présentée que par un avoué de cette ville. Il est vrai que, quant aux extraits et au tableau à notifier, il n'en était pas de même; mais puisque dans l'acte de notification il signait comme avoué de la dame de Lorgeril, celle-ci n'était débitrice que de lui et non de M° Loysel, qui, légalement, ne l'avait représentée que pour la notification relative à la vente des biens situés à Rennes. En un mot, ainsi que l'a très-bien dit la Cour de Rennes, Me Loysel, en instituant Me Lebret pour avoué de la dame de Lorgeril, s'était rapporté complètement à sa bonne foi, pour l'usage qu'il ferait de son institution, et Me Lebret seul avait rigoureusement le droit de réclamer les émolumens relatifs aux notifications faites et garanties par lui dans l'arrondissement de son tribunal. Il fau-` drait juger de même dans toute hypothèse semblable. La loi l'exige; mais en quel cas la bonne foi prescrirait elle de décider autrement? On ne peut rien induire sur ce point de la décision de la Cour de Rennes. Or, il nous semble que toute la question se réduit, sur ce point, à savoir quelle a été l'intention des deux avoués correspondans.

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Une Cour peut condamner une partie aux dépens dus par une autre à une troisième qui n'a point été en procès avec la première, si celle-ci a occasioné toute la procédure par sa conduite. (Art. 130 C. P. C.)

(Collin C. Sohné.)

La veuve Sohné achète du sieur Collin un hôtel à Paris. A la transcription de la vente, point d'inscription. Les trois-quarts du prix sont payés; le restant devra l'être dans deux ans. Un sieur Voyer d'Argenson prend inscription sur l'hôtel vendu, comme ayant appartenu au sieur Legendre, contre lequel il a des répétitions à exercer. La dame Sohné assigne Collin, son vendeur, en main-levée d'inscription. S'engage alors une instance sur la validité de l'inscription prise par Voyer d'Argenson, et

l'on appelle en cause les héritiers du sieur Legendre. Cependant la dame Sohné, voulant se libérer, fait des offres au sieur Collin, à la charge de rapporter main-levée de l'inscription de Voyer d'Argenson.

En cet état de choses, arrêt du 4 décembre 1828 qui juge que Legendre n'a jamais été propriétaire de l'hôtel vendu à la dame Sohné, et qui ordonne la radiation de l'inscription de son chef. Jugement qui déclare valables les offres de la dame Sohné, et l'autorise à consigner. 14 avril 1829, arrêt confirmatif de la Cour de Paris, qui accorde cette autorisation à la charge de toutes les inscriptions grevant la transcription, lesquelles tiendront sur la somme consignée. L'arrêt termine par condamner Collin aux dépens, tant à l'égard de la veuve Sohné qu'envers les héritiers Legendre.

Pourvoi en cassation pour violation notamment de l'art. 130 C. P. C., en ce que l'arrêt avait condamné le demandeur en cassation non-seulement aux dépens envers la dame Sœhné, mais encore envers les héritiers Legendre, qui, durant tout le cours du procès, lui étaient restés étrangers.

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ARRÊT.

La Cour; Sur les concl. conf. de M. Lebeau, av.-gén.; Attendu qu'il est obéi à l'art. 130 C. P. C. toutes les fois que celui qui succombe est condamné aux dépens; que, du reste, la plus grande latitude doit être laissée aux juges, pour les mettre en état de satisfaire à tout ce que l'équité peut demander, suivant les diverses circonstances; que, dans l'espèce, la Cour royale, considérant sans doute que Collin ayant occasioné, par sa mauvaise contestation, toute cette procédure, méritait d'en supporter tous les dépens, a pu, pour éviter un vain circuit, arriver par une voie plus courte au résultat qu'elle aurait obtenu, en condamnant la veuve Sohné aux dépens envers la veuve et les enfans Legendre, puis en condamnant Collin aux dépens envers la veuve Sohné, dans lesquels entreraient ceux qu'elle aurait payés aux veuve et enfans Legendre; — Rejette.

Du 8 novembre 1830. — Ch. req.

OBSERVATIONS.

Le moyen de cassation tiré de la violation de l'art. 130 C. P.C. paraissait bien fort. Il est certain que si la plus grande latitude est accordée aux tribunaux en matière de condamnation aux dépens, cette latitude ne peut être telle qu'ils aient droit de condamner aux dépens une des parties envers celle qui n'était pas en procès avec elle. La loi veut formellement qu'on succombe pour qu'une pareille condamnation ait lieu, et il est de toute évidence qu'on ne succombe point envers une partie contre laquelle on n'a pas plaidé. Ainsi donc il semble que la Cour de Paris n'avait pu,

dans l'espèce ci-dessus, condamner Collin, envers les héritiers Le gendre qui lui étaient restés étrangers durant tout son procès avec la dame Sohné. Mais lorsque l'on considère qu'il devait garantir la dame Soehné de tous les dépens à elle causés par la mauvaise contestation qu'il avait suscitée, on conçoit que la Cour de Paris l'ait condamné à payer lui-même les dépens dus aux héritiers Legendre. En droit strict, ces dépens devaient, d'après l'art. 130 C. P. G., être mis à la charge de la dame Sohné. Mais si la Cour eût condamné la dame Sohné aux dépens envers les héritiers Legendre, il eût fallu qu'ensuite elle y condamnat Collin envers la dame Sohné, et qu'elle déclarât que dans ces derniers dépens entreraient ceux payés par elle aux héritiers Legendre. Or, elle a évité ce circuit en condamnant directenient Collin à tous les dépens, qui étaient tous occasionés par lui. Ainsi la Cour de Paris, tout en s'écartant de la marche tracée par la loi, a atteint le but du législateur, qui veut qu'un dommage soit supporté totalement par celui qui l'a causé en entier.

COUR ROYALE DE BORDEAUX.

Dépens. Receveur des finances. - Condamnation.

Les préposés aux dépôts et consignations doivent être condamnés personnellement aux dépens, si, sans aucun fondement, ils soulèvent des difficultés pour procurer une plus grande sûreté pour le paiement des sommes consignées entre leurs mains.

(Receveur de la Gironde C. Laporte.) — ARRÊT.

La Cour; Attendu que la veuve Laporte a démontré, sans même qu'on ait essayé de la contredire à cet égard, qu'elle était encore créancière pour des sommes assez considérables de la succession de son mari;

Attendu qu'un jugement contradictoire, rendu entre la dame veuve Laporte et les héritiers du sieur Huguet et autres, le 31 août 1827, par le tribunal civil de Bordeaux, a fait main-levée à la dame Laporte de la somme de 2,400 francs, déposée par feu Huguet dans la caisse des consignations, ensemble des intérêts qui avaient couru;

Attendu qu'il n'était nullement nécessaire d'appeler dans l'instance, qui fut terminée par le jugement de 1827, le sieur Carayon-Latour, receveur-général des finances et préposé de la caisse des dépôts et consignations, dont le rôle, entièrement passif, devait se borner à exécuter les décisions de la justice;

Attendu que la veuve Laporte est porteur d'un certificat constatant que le jugement du 31 août 1827 n'a été attaqué ni par opposition ni par appel;

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