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lerie, a déjoué cette tentative criminelle. Officers, sous-officers et soldats, tous ont fait leur devoir. On s'est assuré de l'arsenal et des portes, qui ont été gardés avec du canon. Le reste de la garnison était formé en battaille sur l'esplanade, les armes chargées et les canons en batterie. Les traîtres n'ont pas osé exécuter leur complot, et ils se sont retirés. Leur force consiste en quatre escadrons de chasseurs royaux de France, 150 chasseurs non montés, et 150 hommes d'infanterie grenadiers et chasseurs. En partant ils ont voulu faire crier aux canonniers de la garuison vive l'Empereur! mais les braves canonniers sont restés fidèles à leur poste, et ont répondu par le cride vive le Roi!

Paris, le 12 Mars, quatre heures du matin.

Il vient d'arriver trois officiers des chasseurs à cheval dits royaux, chez Mgr, le duc de Berry; ils sont envoyés, par le colonel Lions et les officiers du régiment, pour dire à S. A. R, qu'ils n'ont connu qu'à La Fère la démarche dans laquelle on voulait les engager; qu'ils se sont rassemblés à Compiegne, ont manifesté leur façon de penser au général Lefebvre-Desnouettes, et que sur-le-champ le général Lions a pris le commandement du régiment, fait sonner à cheval, et a repris la route de Cambrai, lieu de leur garnison,

Ces officiers sont un major, un chef d'escadron et un capitaipe.

13 Mars, 1815. Paris, le 12 Mars,

6. A. S. Mgr. le duc d'Orleans est arrivé aujourd'hui à Paris, envoyé par MONSIEUR pour prendre les ordres du Roi sur les changemens qu'exige l'impossibilité où l'on s'est trouvé de réunir sur Lyon les forces suffisantes à l'époque précise qui aurait été nécessaire pour la défense de cette ville. L'opinion ne peut prendre le change sur les effets de la rapidité de la marche de l'ennemi; en la précipitant il s'affaiblit; 'il ne présente de forces réelles sur aucun point; rien n'annonce que les troupes dont il est suivi se soient accrûes, et pour l'arrêter, les nôtres arrivent dans toutes les directions aux divers points qui leur ont été assignés,

14 Mars, 1815. Paris, le 13 Mars.

Lettre du baron Lions, maréchal-de-camp, major des chas, seurs-royaux de France, à S. Exc. le ministre de la guerre. Ham, le 12 Mars 1815,

Monseigneur,

Je vais avoir l'honneur de vous soumettre le rapport de ce

qui c'est passé au régiment depuis le 9 du courant, jour de notre départ pour Cambrai. A 7 heures du matin, M. le général Lefebvre-Desnouettes arriva de Lille: il fit monter son régiment à cheval; nous nous mîmes en route, et nous vinmes coucher à La Fère. Le lendemain matin, 10, il eut une scène assez fâcheuse avec le général commandant l'artillerie, sur la demande qu'il lui fit de mettre de l'artillerie et des artilleurs à sa disposition, et sur le refus formel que lui fit ce général, nous partimes, et nous dépassâmes les postes.

Il y eut quelques cris de vive l'empereur, qui furent provoqués par le général Lefebvre, ce qui nous a donné lieu de soupçonner dès lors qu'il avait conçu quelque projet coupable. Nous continuâmes notre route sur Noyon; là il nous dit pour la première fois que nous devions nous trouver douze à quinze mille hommes de toutes armes, sans nous dire le sujet de ce rassemblement. Nous fûmes étonnés de n'y trouver personne, ce qui nous confirma dans nos soupçons. Le 11, il partit au trot, à la tête de deux escadrons, et arriva à Compiègne à cinq heures du matiu: il fit demander au colonel du 6e de chasseurs s'il voulait le suivre avec son régiment; ce colonel refusa, comme bien vous pensez. Cet entretien eut lieu pendant que j'étais de deux lieues en arrière avec le reste du régiment. J'appris cet événement dans la journée. J'étais sur pied ainsi que le corps d'officiers. Ce sentiment nous força à demander au colonel ce qu'il voulait de nous, où il voulait nous conduire; ajoutant que notre intention était qu'il s'expliquât nettement et que nous soupçonnions qu'il venait de compromettre l'existence du régiment de la manière la plus forte, et qu'il ne nous restait qu'à implorer la clémence du Roi. Nous fùmes bien plus étonnés alors lorsqu'il nous proposa de nous jeter en partisans sur Lyon. Aussi nous n'hésitâmes pas, et nous lui déclarâmes que nous ne pouvions le suivre. Ce qui le dé termina à nous quitter à l'instant, et à fuir. Aussitôt je fis sonner à cheval, et nous rétrogradâmes sur Cambray, où j'arrivai demain.

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Puissiez-vous, M. le maréchal, être notre interprète auprès du Roi, pour l'assurer de notre fidélité, et daignez me donner un mot de réponse pour nous retirer de notre cruelle incertitude sur l'avenir.

J'ai l'honneur d'être, etc.

(Signé)

LIONS.

P.S. M. Brice, capitaine adjudant-major, est le seul qui ait

suivi le sort du général Lefebvre,

C2

15 Mars, 1815.

Paris, le 14 Mars.

Le prince de la Moskwa était le 11 à Lons-le-Saulnier, dirigeant sur Lyon un corps de troupes de ligne et de gardes nationales animées du meilleur esprit, et impatiens de se mesurer avec les troupes de Bonaparte.

Quelques coureurs de cette troupe ont paru dans les environs de Mâcon et de Châlons. Les uns étaient errans, d'autres paraissaient chercher à prendre des renseignemens sur les dispositions des habitans et les mouvemens des troupes dirigées contre eux. Des voyageurs arrivés de Lyon ont annoncé que le 11 au soir Bonaparte était encore avec sa troupe dans cette ville, qu'elle était exténuée de fatigue, qu'elle paraissait s'être diminuée beaucoup plus qu'accrûe: on ne l'évalue à plus de 4000 hommes et quelques cents chevaux.

S. M. prenant en considération la multiplicité des occupations de M. le directeur-général de la police du royaume, a décidé de rétablia la place de préfet de police de Paris. Elle a nommé à cette place M. Bourrienne, chargé d'affaires à Hambourg.

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Bonaparte calculant le petit nombre d'hommes qui l'entourent, reconnaissant l'insuffisance de ses moyens, pour couvrir son front et ses flancs, pour se garantir des troupes qui le poursuivent et pour suppléer à sa faiblesse réelle, a recours à des moyens qui vont achever d'exciter au plus haut degré contre lui l'indiguation publique. Il vient de chercher un appui dans le système d'anarchie, de désorganisation et de terreur auquel nous avons dû les années les plus affreuses de la révolution. Ses coureurs, ou plutôt ses émissaires, sont parvenus à soulever à Mâcon, à Tournus, à Châlons cette lie de la populace, à laquelle il ne faut présenter que l'occasion du brigandage pour la porter à tous les excès.

La garnison de Mâcou avait été dirigée sur Moulins; le commandant militaire se trouvait sans troupes: ce moment a été choisi, et la multitude excitée par les moyens les plus odieux, s'est livrée à un mouvement séditieux. Le préfet et les membres des autorités principales ont été les premiers en butte à ce mouvement désorganisateur; tous ont déployé antant de courage et de fermeté que de présence d'esprit et de sagesse dans les mesures qu'ils avaient à prendre; mais ils ont été obligés de céder à l'orage et de se retirer à Châlons.

Là, les mêmes moyens, les mêmes provocations incendiaires

avoient déjà excité les mêmes scènes; quelques pièces d'artillerie qui se trouvaient abandonnées, étaient, par les ordres du préfet, emmenées par des chevaux de réquisition: la populace s'est jetée sur ces pièces avec fureur, et les a préci pitées dans la Saône. Le préfet n'ayant point de troupes à opposer à cette multitude égarée, s'est retiré à Autun.

Les mêmes événemens se sont passés à Dijon, au même moment, et toujours par les mêmes moyens insurrectionnels. M. Terray, préfet du département de la Côte-d'Or, dont les dispositions avaient hâté le départ des troupes qui étaient à Dijon et qui s'étaient dejà dirigées contre Bonaparte, s'est trouvé sans secours, hors d'état de résister à la sédition, et s'est rendu à Châtillon-sur-Seine.

Nous répétons que les dernières classes du peuple ont seules pris part à ces actes criminels. Ils ont porté la terreur et la désolation dans l'âme de tous les propriétaires, qui sont en ce moment victimes d'une affreuse anarchie; ils voient, prêt à se réorganiser contre eux, ces mesures de violence et de spoliation, ces actes oppressifs et tyranniques de la législation révolutionnaire; ils se voient une seconde fois en butte aux fureurs démagogiques, et demandent à grands cris l'appui de la force publique, et des secours qui fassent rentrer dans le devoir une populace mutinée, rétablissent promptement l'ordre et le respect des lois.

Bonaparte, pour étendre l'insurrection, a fait répandre le bruit de sa marche à Troyes, où il a demandé 10 mille rations, et même à Provins. Le sous-préfet de cette ville en a rendu compte à M. le préfet de l'Aube. Toutes les mesures ont été concertées pour garantir ce département.

Des lettres de Lyon annonçent qu'aussitôt qu'il a été instruit de la marche du maréchal Ney, Bonaparte a retiré précipitamment ses avant-postes des environs de Mâcon et les avait fait replier sur Lyon. Le mouvement du maréchal Ney se dirigeait sur Bourg. Le maréchal est en marche à la tête d'un corps d'environ dix mille hommes de troupes de ligne et de gardes nationales régulièrement formées dans les places de la Franche-Comté; ces troupes sont animées d'un esprit excellent, de cette énergie et de courage que le maréchal Ney ne pouvait manquer de leur communiquer.

Les mêmes lettres font connaître que la plus grande partie da 13e régiment de dragons, qui, un instant avait été entraîné par les séductions de l'enuemi, avait senti toute l'horreur de sa position, et que, préférant même la punition la plus sévère au nom de traîtres armés contre la patrie, ils s'étaient rangés du côté du maréchal Ney, qui les avait reçus comme des hommes un moment égarés, auxquels un sincère repentir mérite de l'indulgence.

Ce dernier événement a fait la plus vive impression sur la

troupe de Bonaparte; depuis ce moment, elle paraît encore plus qu'auparavant inquiète, incertaine et consternée; aussi les défections y sont-elles déjà nombreuses.

D'après les calculs, les plus positifs sur le nombre des hommes débarques, et de ceux que Bonaparte a pu corrompre et entrafuer sur sa route, sa plus grande force n'a pu aller audelà de 8000 hommes de toutes armes. Il est dès-lors démontré qu'il a éprouvé des défections et des abandons considérables. En effet des témoins oculaires ont rendu compte des revues qu'il a passées à Lyon; et il est constant qu'il n'avait pas réuni dans cette ville au-delà de 4000 hommes d'infanterie et de 6 à 700 chevaux.

Le général Mouton-Duvernet est parti de Valence, où il a réuni un corps de 2500 hommes d'excellentes troupes. Il marchait sur Die, pour faire sa jonction avec le général Miollis et se diriger par Gap sur Grenoble. Le corps du général Miollis, composé de volontaires dévoués et de gardes natio nales, se fait remarquer par un enthousiasme et une exaltation toute provençale. Il brûle d'atteindre l'ennemi. Ces deux divisions réunies forment un corps cousidérable sur les derrières de Bonaparte. Marseille et toute la Provence, Bordeaux et tout le Midi continuent à brûler de cette heureuse agitation qui crée des soldats nombreux au Roi et à la patrie. Tout s'arme pour la sauver.

Les lettres de Vienne, en date du 8, annonçent qu'au moment où on a appris dans cette capitale l'évasion de Bonaparte, et son débarquement sur les côtes de Provence, les puissances réunies au congrès ont adopté l'opinion que Bonaparte ayant rompu son ban, les traités conclus avec lui seraient désormais regardés comme nuls, et qu'il ne peut plus être considéré par toutes les puissances que comme un brigand, désormais hors de la loi commune des nations.

Extrait d'une déclaration faite par devant M. le maréchal prince d'Essling, par une personne qui a suivi Bonaparte, depuis l'tle d'Elbe jusqu'à Digne.

Le 26 de Février, Napoléon ordonna des préparatifs de départ; tout le monde était dans la croyance que c'était pour aller à Naples.

A 4 heures du soir, je reçus l'ordre de m'embarquer; je partis sans voir ma famille. Quelques jours auparavant, j'avais dit à Napoléon que jamais je ne porterais les armes contre ma patrie.

Ce départ fut ordonné aussi précipitamment, d'après les nouvelles qu'avait apportées un colonel venu du Continent; je n'ai point vu cet officier.

Le 27, nous vimes plusieurs bâtimens de guerre, mais personne ne nous dit rien; nous forçâmes de voiles.

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