Page images
PDF
EPUB

Attendu que ce jugement est passé en force de chose jugée, et que par conséquent les héritiers Huguet n'ont aucun moyen de se soustraire à ses dispositions; qu'il suit de là que le sieur Carayon-Latour ne peut raisonnablement rien craindre des réclamations des héritiers Huguet, en ce qui regarde la somme déposée par leur auteur dans la caisse publique, et dont main-levée a été faite à la veuve Laporte; que c'est donc avec une grande justice que, par jugement du 13 juillet dernier, le tribunal civil a condamné le sieur Carayon-Latour, en la qualité qu'il était pris, à payer à la dame veuve Laporte la somme de 2,412 fr. 50 C., et ensemble les intérêts concourus;

Attendu, à l'égard des dépens, qu'ils furent toujours considérés comme la peine des téméraires plaideurs;

Attendu qu'il suit de ce qui vient d'être reconnu que la résistance du sieur Carayon-Latour n'était fondée sur aucun motif Valable, et que dès-lors il doit être condamné aux dépens;

Statuant sur l'appel interjeté par le sieur Carayon-Latour, du jugement rendu par le tribunal de première instance de Bordeaux, le 13 juillet 1831, met ledit appel au néant; ordonne que ledit jugement sera exécuté selon sa forme et teneur ; condamne l'appelant à l'amende, en raison de son appel, et aux dépens.

Du 6 septembre 1831.

OBSERVATIONS.

le pré

Cet arrêt a bien jugé. Il était de toute évidence que posé à la caisse des consignations n'avait aucun motif plausible pour refuser le paiement qu'on lui demandait. Ce paiement était ordonné par une décision passée en force de jugée. Il n'y avait point à craindre que ceux par qui la somme à payer était déposée ne vinssent le contester. Leurs héritiers avaient laissé passer les délais nécessaires pour attaquer le jugement qui le prescrivait. Point d'opposition ni d'appel possible de leur part. La caisse des dépôts et consignations ne pouvait donc se dispenser de payer en vertu de ce jugement. Il y avait donc lieu de condamner aux dépens son préposé, qui avait refusé de l'exécuter. La loi n'a point laissé à l'arbitrage des préposés aux consignations le point de savoir en quel cas ils pourraient refuser de rembourser les sommes à euxconfiées. L'art. 10 de l'ordonnance du 3 juillet 1816 sur les dépôts volontaires porte formellement : « Le caissier et autres préposés qui, sans motifs fondés sur les dispositions de la présente ordonnance, refuseraient de faire un remboursement, seront personnellement condamnés à bonifier les intérêts à la partie prenante sur le pied de 5 p. 100, et poursuivis par voie de contrainte par corps, tant pour le capital que pour les intérêts, sans préjudice du recours du créancier contre la caisse, qui devra elle-même ladite bonification du retard, comme garante des faits de ses préposés,

et sauf recours contre eux.» D'un autre côté, l'art. 16 d'une autre ordonnance du 3 juillet 1816 déclare que les préposés ne pourront refuser les remises que dans les deux cas suivans: 1o le fondement d'opposition dans leurs mains; 2° le défaut de régularité des pièces produites à l'appui de la réquisition. Lors donc qu'une décision judiciaire, passée en force de chose jugée, a prononcé la main-levée des oppositions faites sur des sommes consignées, aucun motiflégal n'autorise les préposés à refuser le paiement de ces sommes; car cette remise ne peut nullement compromettre leur administration. Aussi nous approuvons complètement l'arrêt de la Cour de Bordeaux.

[merged small][ocr errors][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small]

Quand un fermier est condamné non pas à restituer des fruits, mais bien à payer à diverses époques des fermages arriérés à son bailleur, ces fermages doivent être évalués sans avoir égard aux saisons ni aux prix communs de l'année, mais d'après les mercuriales des époques auxquelles les livraisons de fermages devaient avoir lieu. (Art. 129 C. P. C.)

(Jausion C. Ricomes.)

14 juillet 1827, arrêt de la Cour de Montpellier, qui déclare le sieur Ricomes, fermier de la dame Jausion, libéré envers celleci de fermages en nature formant le prix du bail passé entre les parties. Cet arrêt et le jugement qu'il confirmait prenaient pour base des évaluations de ces fermages les fourteaux ou mercuriales de l'époque de chaque échéance.—Pourvoi par la dame Jausion pour violation de l'art. 129 C. P. C., en ce que la Cour royale aurait dû dans cette évaluation avoir égard aux saisons et au prix commun des années dans lesquelles Ricomes lui devait les fermages. ARRÊT.

La Cour; - Sur le moyen fondé sur la violation de l'art. 129 C. P. C.:-Attendu qu'il ne s'agit pas dans la cause d'une restitution de fruits, mais du paiement des ferinages arriérés, et que sous ce rapport l'art. 129 C. P. C. était sans application dans la

cause;

Attendu que si chacune des parties a produit à l'appui du compte par elle présenté des fourteaux différens, rien ne constate qu'il se soit élevé aucun débat sur les époques auxquelles l'appréciation des denrées devait être faite;

Attendu enfin qu'en élevant les portions de denrées qui n'avaient pas été fournies en nature, d'après le prix des mercuriales aux époques auxquelles chaque livraison devait être faite, l'arrêt attaqué n'a violé aucune loi;—Rejette, etc.

Du 29 nov. 1830.-Ch. req.

[blocks in formation]

On ne peut demander à un tribunal qu'il ajoute ou retranche des articles d'un compte, sur lesquels il a statué, sous prétexte qu'on a découvert des pièces nouvelles, et que l'art. 541 C. P. C. permet de rectifier les erreurs qui peuvent avoir été commises.

(Defaillens C. Hennet.) ARRÊT.

La Cour; Considérant que l'art. 541 C. P. C. défend de procéder à la révision d'aucun compte, sauf aux parties, s'il y a erreurs, omissions, faux ou doubles emplois, à en former leur demande devant les mêmes juges; — Qu'en vain la demanderesse prétend que la loi n'ayant pas déterminé l'espèce d'erreurs contre lesquelles elle permet de se pourvoir, a nécessairement autorisé les parties à se plaindre, en matière de comptes, de toutes les erreurs commises par le juge; que s'il en était ainsi, les mêmes juges auraient le droit de rétracter leurs propres décisions, en jugeant des difficultés sur lesquelles ils auraient déjà statué, et de réviser un compte pour y comprendre ou pour en retrancher des articles admis ou rejetés par une décision antérieure ; Qu'un pareil système serait contraire au principe qui interdit aux magistrats le droit de modifier leurs jugemens; qu'au surplus, l'art. 541 défendant de réviser un compte, et permettant cependant de coter les erreurs, omissions, faux ou doubles emplois qui s'y rencontrent, n'a pu entendre que les erreurs de calcul, les omissions d'articles admis par le jugement, le double emploi d'une somme allouée, ou le faux emploi d'une somme rejetée; — Qu'en faisant application de ces principes aux demandes principale et incidente, il devient évident qu'elles sont non-recevables; qu'en effet, la demande de la demoiselle Defaillens se compose de six chefs; Que le premier a pour objet la répétition des fermages de Saint-Franchy, depuis le 24 juin 1805 jusqu'au 9 juillet 1807, dont elle prétend que la dame Defaillens, sa mère, avait déjà rendu compte, et dont elle aurait versé le montant au bureau des consignations, aux termes d'un arrêt du 14 juillet 1821; mais que l'arrêt du 6 janvier 1829, lors duquel on n'a produit ni l'arrêt du 14 juillet 1821, ni la quittance du bureau des consignations, n'a point eu à statuer sur le mérite de cette prétention; et qu'il a jugé au contraire que la demoiselle Defaillens devait tenir compte de

[ocr errors]

les

tous les fermages, même de ceux de Saint-Franchy, pendant années 1806 et 1807; que c'est par suite de cette décision que la totalité des fermages a été portée en ligne de compte; que dèslors le compte ne contient à cet égard ni erreur, ni faux emploi, et n'est que le résultat exact de l'autorité de la chose jugée ; qu'au surplus la Cour n'a rien statué sur le mérite du paiement la demoiselle Defaillens aurait fait à des tiers pour que le compte de la dame Hennet et consorts, et que la demanderesse peut toujours présenter sa quittance, si elle la libère d'une partie des fermages, et la faire valoir en acquit des condamnations par elle prononcées; Que le deuxième chef a pour objet de faire rejeter du compte les fermages de l'an 5; mais qu'il résulte des dispositions de l'arrêt du 6 janvier 1829, que cette année de fermages doit entrer dans le compte; qu'ainsi l'erreur, s'il en existe, se rencontrerait dans la décision de la Cour, et non dans le matériel du compte;-Que le troisième chef a pour objet de faire admettre des pièces nouvelles, à l'aide desquelles la demoiselle Defaillens prétend établir que sa mère a payé en contribution une somme plus forté que celle allouée par l'arrêt du 6 janvier 1829; mais qu'à cet égard il y a encore autorité de la chose jugée; qu'en effet, la Cour a déclaré, par l'arrêt susdaté, que dans l'impossibilité de calculer, d'après les pièces produites, le montant des contributions payées par la dame Defaillens, il y aurait lieu de diminuer le cinquième des revenus; que c'est par suite de cette décision que le compte a été délivré, et que le mode adopté par la Cour ne pourrait être changé qu'en réformant l'arrêt du 6 janvier 1829, ce qui serait contraire à la loi. — (Les autres chefs présentaient des questions de fait ou étrangères à celle qui nous occupe maintenant.)-En ce qui touche les conclusions reconventionnelles de la dame Hennet et consorts: qu'elles sont également repoussées par l'autorité de la chose jugée; qu'en effet, la Cour, par son arrêt du 6 janvier 1829, a formellement décidé que la dame Hennet n'avait demandé compte que de la moitié des revenus; qu'ainsi on ne pouvait lui en adjuger au-delà de sa demande; que sa prétention actuelle ayant pour objet de faire réformer cette décision, n'est pas recevable; --Déclare la demande de la demoiselle Defaillens et celle de la dame Hennet purement et simplement non-recevables. Du 10 août 1831. 1re chambre.

OBSERVATIONS.

Cet arrêt nous paraît avoir exactement fixé l'étendue qu'on doit donner à l'application de l'art. 541 C. P. C. Tant qu'une partie invoque cet article pour faire rectifier les erreurs, faux ou doubles emplois glissés dans un compte judiciaire, sa réclamation doit être écoutée par les juges qui ont réglé ce compte. Mais lorsque sa prétention ne tend à rien moins qu'à faire ajouter ou

supprimer des articles du compte, évidemment les juges, en l'accueillant, réformeraient leur décision au lieu de la rectifier. La loi veut bien qu'ils corrigent les erreurs qui y figurent, mais en telle sorte qu'ils ne changent point les bases de leur sentence. C'était pourtant ce qu'on demandait à la Cour de Bourges, dont l'arrêt expose les faits sur lesquels il est intervenu. Au lieu de lui demander à rectifier quelques erreurs de détail, on youlait qu'elle modifiât un arrêt qu'elle avait déjà rendu : elle devait done juger ainsi qu'elle l'a fait. Il est vrai que la partie qui voulait obtenir le redressement du compte en litige exhibait de nouvelles pièces à l'appui de sa réclamation. Mais sa demande n'en était pas moins principale; elle ne pouvait donc la présenter que sous la forme de la requête civile, si toutefois elle se trouvait dans un des cas où cette voie est ouverte. (Voy. au surplus nos observations, J. A. t. 18, p. 678 et 716, v Reddition de compte, n° 17 et 68. Voy. encore t. 41, p. 402.)

COUR ROYALE DE PARIS.

Référé. - Pension alimentaire. -Opposition. -Paiement. - Compétence.

Un juge peut ordonner en référé le paiement d'une rente viagère insaisissable établie par un arrêt, lorsque l'opposition faite à ce paiement est pratiquée sans titre, sans autorisation, et frappée de nullite, comme non suivie d'une demande en validité. (Art. 806 C. P. C.) (1)

(Dame Rouffio C. Langlois.)

Divers jugemens avaient condamné le sieur Langlois à payer une pension alimentaire à la dame Rouffio. Le mari de celle-ci fait opposition au paiement, mais sans titre, sans autorisation, et de plus n'assigne pas sa femme en validité de cette saisie-arrêt... La dame Rouffio introduit un référé devant M. le président du tribunal de la Seine, qui ne croit pas pouvoir en cet état ordonner le paiement de la pension malgré une opposition dont la connaissance appartient au tribunal seul. Appel.

ARRÊT.

La Cour; — Attenda que la provision est due au titre; qu'il s'agit d'une pension alimentaire, et dès-lors insaisissable, constituée et reconnue par jugemens et arrêts même, rendus en partie contre Langlois; que d'ailleurs Rouffio n'aurait ni titre ni autorisation judiciaire pour former opposition; Infirme, ordonne la continuation des poursuites, nonobstant la prétendue opposition de Rouffio, et condamne Langlois aux dépens. Du 4 juin 1831. -5° chambre.

(1) Kogi, J. A., t. 18, p. 769, vo Référé, no 24.

« PreviousContinue »