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ralement de tous les droits dont le propriétaire peut jouir, et elle en jouit comme le propriétaire lui-même.

Elle jouit aussi, et de la même manière, des mines et carrières qui sont en exploitation à l'ouverture de l'usufruit; mais elle n'a aucun droit aux mines et carrières non encore ouvertes, ni aux tourbières (ou lieu d'où l'on tire une terre bitumineuse propre à brûler) dont l'exploitation n'est point encore commencée, non plus qu'au trésor qui pourrait être découvert pendant la durée de l'usufruit.

Elle peut jouir par elle-même, ou donner à ferme à un autre, ou même vendre, ou céder son droit à titre gratuit; mais, si elle donne à ferme, elle doit se conformer, pour les époques où les baux doivent être renouvelés, et pour leur durée, aux règles établies pour le mari à l'égard des biens de la femme, règles énoncées sous les n° 101 et 102, auxquels nous renvoyons.

330. Maintenant, voici la nomenclature des OBLIGATIONS de la veuve, usufruitière, en dehors de l'obligation dont nous avons parlé sous le numéro 328 :

Elle prend les choses dans l'état où elles sont, et ne peut entrer en jouissance qu'après avoir fait dresser, en présence des héritiers, nus propriétaires, ou eux dûment appelés, un inventaire des meubles et un état des immeubles sujets à l'usufruit.

Elle n'est tenue qu'aux réparations d'entretien (1); les grosses réparations (2) demeurant à la charge des nus propriétaires, à moins qu'elles n'aient été occasionnées par le défaut de réparations d'entretien depuis l'ouverture de l'usufruit: auquel cas, l'usufruitier en est aussi tenu.

Elle n'est pas tenue, non plus que le nu propriétaire, de rebâtir ce qui est tombé de vétusté, ou ce qui a été détruit par cas fortuit.

(1-2) Les grosses réparations sont celles des gros murs et des voûtes, le rétsblissement des poutres et des couvertures entières; celui des digues et des murs de soutènement et de clôture aussi en entier. Toutes les autres réparations sont d'entretien (art. 606 C. N.).

Elle est tenue, pendant sa jouissance, de toutes les charges annuelles de l'héritage, telles que les contributions et autres qui, dans l'usage, sont censées charges des fruits; mais, à l'égard des charges accidentelles ou temporaires qui peuvent être imposées sur la propriété pendant la durée de l'usufruit, il s'établit entre l'usufruitier et le nu propriétaire une contribution, ainsi qu'il suit :

Le nu propriétaire est obligé de les payer, et l'usufruitier doit lui tenir compte des intérêts; si elles sont avancées par l'usufruitier, il y a lieu à répétition du capital à la fin de l'usu

fruit.

Légataire en usufruit, soit universelle, soit à titre universel, la veuve devrait contribuer avec les héritiers nus propriétaires au payement des dettes, ainsi qu'il suit :

On estimerait la valeur du fonds sujet à usufruit, on fixerait ensuite la contribution aux dettes à raison de cette valeur ; et si la veuve usufruitière ne voulait pas faire l'avance de la somme pour laquelle le fonds devrait contribuer, les nus propriétaires auraient le choix, ou de payer cette somme (et, dans ce cas, l'usufruitière leur tiendrait compte des intérêts pendant la durée de l'usufruit), ou de faire vendre, jusqu'à due concurrence, une portion des biens soumis à l'usufruit.

Elle ne serait tenue que des frais des procès qui concerneraient sa jouissance et des autres condamnations auxquelles ces procès pourraient donner lieu.

Elle devrait dénoncer au nu propriétaire toute usurpation sur le fonds, ou tout attentat aux droits du nu propriétaire; à défaut de quoi, elle serait responsable de tout le dommage qui pourrait en résulter pour le nu propriétaire, comme elle le serait de dégradations commises par elle-même.

Si l'usufruit n'était établi que sur un animal qui vint à périr sans la faute de l'usufruitière, elle ne serait pas tenue d'en rendre un autre, ni d'en payer l'estimation.

Enfin, si le troupeau sur lequel l'usufruit aurait été établi périssait entièrement, par accident ou par maladie, et sans la

faute de l'usufruitière, elle ne serait tenue envers le nu propriétaire que de lui rendre compte des cuirs et de leur valeur; que si le troupeau ne périssait pas entièrement, elle serait tenue de remplacer, jusqu'à concurrence du croît, les têtes des animaux qui auraient péri.

331. Légataire d'un droit d'usage ou d'habitation, la veuve devrait en jouir en bonne mère de famille; et d'après le titre qui aurait établi ce droit, et, dans le silence de ce titre, investie qu'elle serait du droit d'usage des fruits d'un fonds, elle ne pourrait en exiger qu'autant qu'il lui en faudrait pour ses besoins et ceux de sa famille.

y

Elle ne pourrait céder ni louer son droit d'usage à un autre. Investie du droit d'habitation dans une maison, elle pourrait demeurer avec sa famille.

Le droit d'habitation ne peut être ni cédé ni loué.

La veuve usagère qui absorbe la totalité des fruits et celle qui occupe la totalité de la maison par suite de son droit d'habitation sont assujetties aux frais de culture, aux réparations d'entretien et au payement des contributions, comme l'usufruitière.

Que si la veuve ne prend qu'une partie des fruits, ou si elle n'occupe qu'une partie de la maison, elle contribue au prorata de ce dont elle jouit (art. 582 et suivants C. N.).

332. Les donations entre époux faites pendant le mariage donnaient ouverture aux droits d'enregistrement suivants, savoir sur les biens meubles, 1 fr. 50 c. par 100 fr., et sur les biens immeubles, 3 fr. par 100 fr. (art. 53 de la loi du 28 avril 1816); mais l'article 10 de la loi du 18-22 mai 1850 a porté ces droits à 3 fr. par 100 francs, sans distinction des biens meubles ou immeubles, et en ne distinguant pas non plus si la donation était en propriété ou en usufruit seulement.

TITRE V.

DU CAS OU LA VEUVE EST APPELÉE A RECUEILLIR LA SUCCESSION DE SON MARI.

333. L'enfant naturel légalement reconnu, et en cas de prédécès, ses enfants ou descendants, ont droit à la totalité des biens, lorsque le père ne laisse pas de parents au degré successible (1) (art. 723, 756, 758 et 759 C. N. combinės).

Lorsque le mari ne laisse ni parents au degré successible, ni enfants naturels légalement reconnus, ni descendants de ces derniers, les biens de sa succession appartiennent à sa veuve (art. 767 C. N.) (2).

334. La veuve qui prétend droit à la succession de son mari, doit faire apposer les scellés, et faire faire inventaire dans les formes que nous avons indiquées sous les n° 111, 131 et suivants; notamment sous le no 143.

Elle doit ensuite s'adresser au tribunal dans le ressort duquel la succession est ouverte, et lui demander l'envoi en possession.

Le tribunal ne peut statuer sur cette demande qu'après trois publications et affiches dans les formes usitées (3), et qu'après avoir entendu le ministère public en ses conclusions.

335. La veuve est, en outre, tenue de faire emploi du mobilier en achat de rentes sur l'État, ou par placement hypothécaire, en premier rang d'hypothèque, ou de donner caution suffisante pour assurer la restitution de la succession, dans le cas où il se présenterait des héritiers du défunt, dans l'intervalle de trois

(1) On a vu plus haut et sous le n° 112, aux notes, ce qu'on entend par parents au degré successible, et par enfant naturel légalement reconnu. Nous y renvoyons.

(2) Voir aux nos 831 (à la note), et 844, ce que nous dirons de la nature de ce droit.

(3) La demande d'envoi en possession doit être insérée dans le Moniteur; les trois affiches sont apposées dans le ressort du tribunal d'ouverture de la succession, de trois en trois mois, et le jugement d'envoi en possession n'est prononcé qu'un an après la demande (Circulaire du Grand-Juge du 8 juillet 1808).

ans; après ce délai, la caution est déchargée (1) : ce qui n'implique pas que la veuve soit à l'abri d'une demande en réclamation de l'hérédité de la part des y ayant-droit qui surviendraient. Cette réclamation, au contraire, pourrait être exercée pendant trente ans, à partir de la date du décès du mari (argument tiré des art. 137 et 2262 C. N. combinés).

336. La veuve qui n'aurait pas rempli les formalités ci-dessus énoncées, pourrait être condamnée aux dommages-intérêts envers les héritiers, s'il s'en représentait (art. 772 C. N.).

TITRE VI.

DES CAS OU LA VEuve est dans L'OBLIGATION D'ACQUITter les DROITS DE MUTATION PAR SUITE DU DÉCÈS DU MARI (2).

337. L'obligation de faire les déclarations nécessaires à la perception des droits de mutation auxquels donne ouverture le décès du mari, et l'obligation d'acquitter ces droits, sont imposées à la veuve à deux titres différents, savoir:

1. En son nom personnel, lorsqu'elle est donataire ou légataire de son mari, ou appelée à recueillir sa succession; le tout ainsi qu'on l'a vu sous les titres 4 et 5o, ou enfin, lorsque, par le décès de son mari, la femme recueille une rente viagère stipulée réversible sur sa tête dans un contrat de vente de biens propres à celui-ci.

2o En qualité de tutrice de ses enfants mineurs, appelés à recueillir la succession de leur père.

338. La veuve n'est pas dispensée de faire les déclarations nécessaires à la perception des droits de mutation, non plus que d'acquitter ces droits, par le défaut d'acceptation, soit de la

(1) Voir au no 328 ce qui a été dit sur la nature et le mode de présentation de la caution.

(2) Les droits de mutation sont ceux qui prennent ouverture dans tous les cas où la propriété ou l'usufruit de biens meubles ou immeubles sont transmis d'une personne à une autre. Les lois qui s'y appliquent sont celles des 22 frimaire an VII (ou 12 décembre 1798), 28 avril 1816, 15 mai 1818, 16 juin 1824, 21 avril 1832, 24 mai 1834, 18 juillet 1836, et 18-20 mai 1850.

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