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mais je doute que les lettres lui soient parvenues. D. Avez-vous écrit au duc de Bassano ?

R. Oui; je lui ai écrit par ordre de Bertrand, à l'effet de faire respecter tous les membres de la famille royale.

D. Avez-vous écrit au commandant d'Auxonne de rendre la place à Bonaparte?

R. Non. Les bourgeois étaient maîtres de la place.

Cet interrogatoire terminé, on a entendu les

témoins.

Premier témoin, M. le duc de Duras.

M. le président. Vous jurez et promettez, etc.? Le témoin. Je le jure.

M. le président. Vos noms, prénoms, âge, qualité et domicile ?

Le témoin. Amédée Bretagne Malo de Durfort, duc de Duras, pair de France, premier gentilhomme de la chambre du Roi, maréchaldes-camps et armées du Roi, âgé de quarante quatre ans, chevalier de Saint-Louis, domicilié à Paris.

D. Connaissiez-vous l'accusé avant les faits qui ont donné lieu à l'acte d'accusation ? 1 R. Je l'avais vu quelquefois chez le Roi. D. Êtes-vous parent, allié ou au service de

Faccusé ?

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R. Non.

D. Déposez ce que vous savez des faits contenus dans l'acte d'accusation:

R. Je persiste dans ma précédente déposition

écrite.

D. Vous devez, devant la chambre, répéter les mêmes faits qui sont contenus dans cette dé- • position.

R. Le 7 mars dernier j'ai introduit M. le maréchal Ney dans le cabinet du Roi, de onze à onze heures un quart. Le maréchal s'est avancé d'un pas ferme vers le Roi, et, en s'inclinant, il a remercié Sa Majesté de la confiance dont elle venait de lui donner un témoignage par des paroles pleines de bonté. Après avoir baissé la main que le Roi a daigné lui tendre, il a dit à Sa Majesté que, s'il pouvait prendre Bonaparte, il le lui ramenerait dans une cage de fer,

Le président a demandé au maréchal : Avez-vous quelques observations à faire sur la déposition du

témoin ?

R. Je n'ai point dit cela. Je croyais avoir dit l'inverse; que l'entreprise de Bonaparte était si extravagante que, si on le prenait, il mériterait d'être amené dans une cage de fer.

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Le témoin a répondu : Je ne sais si ce sont les termes positivement; mais c'est bien le sens de ce qu'il a dit.

Deuxième témoin, M. le prince de Poix.

Après les formules d'usage, M. le prince de Poix a déclaré s'appeler Philippe-Louis-Marc-Antoine de Noailles, prince de Poix, grand d'Espagne ⚫ de première classe, capitaine des gardes du Roi, lieutenant-général de ses armées, gouverneur de Versailles, etc., chevalier de Saint-Louis, etc., âgé de soixante-deux ans, domicilié à Paris; il a persisté dans sa déposition écrite.

Sur l'observation de M. le président, de rappeler devant la chambre les faits relatifs à l'accusation, il a déposé ainsi qu'il suit :

Le 7 mars, jour de son départ, le maréchal Ney fut introduit chez le Roi pour prendre congé de Sa Majesté; le Roi le fit entrer sur-le-champ, et lui dit à peu près ces mots : Partez; je compte bien sur votre dévouement et votre fidélité."

Le maréchal s'inclina, baisa avec affection la main que le Roi lui tendit, et dit: Sire, j'espère bien venir à bout de le ramener dans une cage · de fer. Après quoi il sortit.

Le troisième témoin, le comte de Scey, se nomme Pierre Georges, comte de Seey-Montbelliard, maréchal des camps et armées du Roi,

chevalier de Saint-Louis, ancien préfet du département du Doubs, âgé de quarante-quatre ans, domicilié à Besançon, ne connaissant pas l'accusé avant les faits qui ont donné lieu à l'acte d'accusation, a déposé à peu près en ces termes, après les interpellations d'usage:

« A l'arrivée du maréchal à Besançon, entre neuf et onze heures, le 10 mars, j'allai prendre ses ordres. Il me dit qu'il n'en avait aucun à me donner. Il me demanda de lui procurer des chevaux de selle et de l'argent sur la caisse publique. Il tenait des discours véhémens contre Napoléon; cependant, en ce moment, il existait un grand enthousiasme de fidélité pour le Roi à Besançon. Les voitures de Monseigneur le duc de Berri avaient été menées au cri de vive le Roi!

>> Je lui demandai des munitions et des armes

pour les volontaires royaux et les gardes nationales; il me répondit qu'il n'y en avait pas. Il me donna des inquiétudes sur les entreprises de Bonaparte, en me disant que S. A. R. Monseigneur le duc de Berri ne viendrait pas, qu'il l'en avait détourné.

>> J'avais vu partir des canons et dégarnir la place. J'en demandai raison au général d'artillerie, qui me répondit que cela ne me regardait pas, et qu'il agissait en vertu des ordres qu'il avait reçus.'

» Au moment de son départ pour. Lons-leSaulnier, M. le maréchal me fit demander par M. Passinges de Préchamp, son chef d'état-major, un mandat de 15,000 francs sur le receveur général. Je fis observer à cet officier que je ne pouvais le délivrer, vu le peu de fonds qu'il y avait dans les caisses, et qu'il était de mon devoir de conserver. pour assurer le prêt à la garnison; que M. le maréchal se procurerait facilement ailleurs l'argent qui pouvait lui être nécessaire pour une campagne aussi courte. M. de Passinges, mécontent de mon refus, me répliqua avec vivacité : Cela n'ira pas comme vous le pensez. Les partisans des Bourbons sont sans énergie.

} >> Depuis le départ du maréchal Ney, je n'ai reçu de lui qu'une lettre du 13 mars, par laquelle il me demandait les contrôles de la garde nationale à pied et à cheval.

». Le 15 au matin, la proclamation du maréchal arriva à Besançon. >>

Le président a demandé au maréchal s'il avait des observations à faire.

Le maréchal a répondu au témoin : « Je ne vous ai jamais parlé d'argent à Besançon ; je vous ai dit de faire diligence pour avoir des chevaux pour le train d'artillerie, et vous n'en avez rien fait. On n'a point dégarni Besançon; on a au

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