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ges avec les Pays-Bas, qui traitent déjà si volontiers avec nous. Elle ne présente, en somme, qu'une difficulté, celle de déterminer quel serait le tiers arbitre appelé à vider les conflits et intérêts qui s'élèveraient entre les deux peuples.

D'autres publicistes ont aussi mis en avant l'idée d'une union douanière entre la Belgique, la Hollande et l'Angleterre. Nous ne croyons point cependant pouvoir nous ranger à cette idée, parce que nous n'en voyons pas la grande utilité. L'Angleterre a ses douanes; elle a, en quelque sorte, le monopole de l'importation de certains articles exotiques; elle est indispensable, pour ainsi dire, à la consommation européenne continentale. Certes, elle ne renoncera pas de gaieté de cœur à tous ces avantages que ne lui enlèvera pas une union douanière même en dehors de laquelle elle resterait, mais où elle aurait toujours la faculté d'entrer.

Cette faculté devrait nécessairement, en effet, être laissée à notre industrieuse voisine de crainte qu'elle ne voie, dans une restriction à cet égard, une restauration déguisée de ce blocus continental dirigé jadis contre elle. Mais, à notre avis, il suffirait momentanément de laisser la porte ouverte à l'Angleterre sans l'engager trop vivement à entrer. La raison de penser ainsi est simple.

Grâce à sa situation géographique, grâce à sa prodigieuse fécondité, grâce aux divers monopoles que ses colonies et son génie progressif lui ont assurés, l'Angleterre a pu prendre la tête du mouvement libre-échangiste, non-seulement en théorie, mais aussi en pratique. Les droits d'entrée dans ses ports, seuls accès de son territoire, frappent un nombre de denrées ou de produits extrêmement restreint et de provenance généralement exotique. Or, supposez que l'Angleterre entre dans le concert douanier continental, elle devra peut-être réduire, pour uniformiser ses tarifs avec ceux de l'Union,- certaines perceptions dont elle frappe ces denrées. Mais par contre, et pour équilibrer la balance, elle pourrait se trouver dans le cas de taxer d'autres produits. Est-il bien sûr que ce ne seraient pas les nôtres, ceux que la Belgique et la France importent là-bas, et faut-il courir au devant de ce danger, alors que la situation actuelle ne nous présente que des avantages. Mais ces avantages sont tellement précieux que nous nous demandons même s'il n'y aurait pas des risques sérieux à courir si l'Angleterre se décidait à entrer dans ce mouvement, que nous croyons d'utilité bien plus pratique et bien plus fructueuse pour le continent!

Cette union douanière, nous en avons l'espoir, se réalisera quelque jour, et nous devons nous estimer fiers et heureux, Messieurs, d'avoir présidé à l'éclosion de cette idée féconde. Mais est-ce bien à nous qu'il importe ou qu'il convient de lancer cette idée dans la circulation, et notre petit pays peut-il, sans sortir du ròle modeste que lui imposent

les circonstances, se mettre à la tête d'un mouvement aussi important, aussi considérable? Nous n'hésitons pas à répondre : Oui. Si le projet de M. de Molinari doit réussir, comme il unit dans une même solidarité d'intérêts deux grands pays, encore aussi antagonistes que la France et l'Allemagne, il n'aura jamais plus de chances d'être accueilli que s'il part d'un tiers désintéressé dans la question; tout au moins ayant un intérêt bien moindre que celui de ses puissants voisins; ceux-ci se tiennent en suspicion mutuelle; quant à nous, ils n'éprouveront point ce sentiment de défiance et se montreront plus disposés à examiner les propositions.

Notre passé économique légitime, du reste, l'attitude que nous prenons dans cette affaire; notre pays a été le premier qui ait, en Europe, construit des chemins de fer, introduit la réforme de l'affranchissement postal réduit, supprimé les octrois. Il a toujours été à la tête de tous les mouvements qui ont visé à la réalisation, à la mise en pratique des idées économiques les plus progresives et les plus élevées. Il faillirait à son renom en ne patronnant pas chaleureusement le projet de M. de Molinari.

Vous aurez à examiner, Messieurs, quels sont les moyens pour que ce patronage soit efficace et de nature à nous procurer le plus tôt possible une solution qui constituera un acheminement certain vers le libre échange universel.

Agréez, Messieurs, l'assurance de nos sentiments les plus distingués.
Le Rapporteur,
Le Président du Comité,

J. SOUBRE.

C. MULLENDORff.

Lés Membres du Comité,

C. CENTNER, M. CHATTEN fils, J. TASTE.

STATISTIQUE DU SALON DE 1879 (1).

Le Salon ouvert le 12 mai dernier est le 8° de la république actuelle, le 55 du siècle courant, le 60° depuis 1793 (2).

Le livret, de plus en plus massif (644 pages), contient la « distribution des récompenses du 11 juillet 1878, » — la « liste des artistes récompensés, français et étrangers, vivant au 15 avril 1879, » — - et le « règlement rectifié de l'Exposition pour 1879. » De plus en plus rétréci, le caractère et l'aspect de ce triste livret font vraiment peu d'honneur à l'Im

(1) Pour les Salons antérieurs, voir le Journal des Economistes numéros de mai 1874, mai 1875, mai 1876, mai 1877, juin 1878.

(2) Voir, numéro de mai 1875, les détails sur la « grave erreur officielle » qui continue à ne tenir aucun compte des Salons qui ont eu ostensiblement et officiellement leur place au Louvre.

primerie nationale, qui saisit à chaque instant l'occasion de faire pis que le dernier venu des établissements typographiques de Paris ou de la banlieue.

Le catalogue contient, comme les années précédentes, sept divisions, comprenant 7,895 numéros, ainsi répartis entre 4,293 artistes:

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En tenant compte, comme il est juste de le faire, des noms qui se répètent dans plusieurs divisions, le chiffre réel doit se réduire à 3,997 artistes, car il faut soustraire les 296 faisant double et triple emploi, savoir: 222 dans les dessins, 11 dans la sculpture, 4 dans l'architecture, 59 dans la gravure.

Comparé au seul point de vue numérique à tous les salons antérieurs, celui de cette année les dépasse d'un chiffre imposant.

Sans parler du salon exceptionnel de 1848, Exposition libre s'il en fut (5,180 numéros), de l'Exposition universelle de 1855 (un peu moins, 5,128 numéros) et du dernier salon de l'Empire (5,434 numéros), on ne comptait, en effet, que 11 salons ayant dépassé le chiffre, longtemps fabuleux, de 3,000 numéros.

Voici, d'ailleurs, les dates et les totaux de ces salons féconds :

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Comparé seulement aux sept derniers, le salon de 1878 présente avec

eux les différences suivantes pour chacun des genres:

Années 1872 1873 1874 1875 1876 1877 1878 1879 Peinture et dessins. 1.536 1.491 2.628 2.827 3.029 3.554 3.987 4.746 Sculpt. et médailles. 334 419 633 666 666 673 685 716 Architecture. .... Gravure et lithogr.. 142 189 Total.... 2.067 2.142

55

43

104 105 76 83 56 94 292 264 262 306 257 339 3.657 3.862 4.033 4.616 4.985 5.895

Différence en plus :

Sur le Salon de 1878...

910 ouvrages.

Sur le Salon de 1872... 3.228

Total des huit salons ou des huit années, 31,257 ouvrages exposes Moyenne annuelle: 3,907.

Les 3,997 artistes de 1879 présentent les variétés suivantes, comme sexe et comme origine.

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Les 566 étrangers appartiennent à 18 pays ou nationalités et se clas

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L'Alsace-Lorraine est représentée par 715 artistes; - les Alpes-Mari

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la Savoie par 12; - l'Algérie par 17; la Corse par 2.

EDMOND RENAUDIN.

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Un questionnaire vient d'être soumis à la Société nationale d'agriculture de France par le ministre de l'agriculture et du commerce, qui tient et a raison de tenir à ce que la lumière se fasse au milieu des controverses économiques du moment.

Il demande des chiffres, il demande des preuves indiscutables, et nous espérons bien que les partisans de la protection ne seront pas en peine de lui donner complète satisfaction et d'établir que leurs adversaires ont absolument tort. Cela vaudra mieux que d'introduire de gros mots et de petites perfidies dans les discussions.

Il importe que l'on sache une fois pour toutes pourquoi certains cultivateurs affirment que, même dans la crise actuelle, ils produisent le blé à bénéfice, tandis que d'autres soutiennent qu'on ne peut le produire qu'à perte.

Il faut que l'on sache si ces derniers ont l'espoir d'arriver, dans un délai plus ou moins rapproché, à rendre la production lucrative, ou si, ne l'espérant pas, ils ont la prétention d'éterniser les taxes qu'ils sollicitent et d'assurer en tous temps des prix élevés.

Toutes les fois que les intérêts moraux et intellectuels d'un pays sont en jeu, il est à remarquer que les discussions s'engagent dans des termes à peu près acceptables; quand, au contraire, nous avons affaire aux intérêts matériels, les têtes s'échauffent aisément, les colères éclatent et l'argumentation laisse toujours à désirer. Nous en savons quelque chose, nous qui voudrions que, en ce qui regarde les céréales et la viande, ces produits n'éprouvassent jamais de gêne dans la circulation. Dans cette circonstance, nous avons en vue l'intérêt général avant tout.

S'il nous était démontré qu'en faisant fléchir les principes l'intérêt général en question y gagnerait, il est évident que nous ne nous obstinerions pas à rester dans l'absolu; mais cette démonstration n'est pas faite, et aussi longtemps qu'elle ne le sera pas et que nous croirons à la possibilité de la lutte, nous resterons partisan de la libre entrée des matières de première nécessité. Nous y serons d'autant plus autorisé, que nous n'arrivons pas à les produire en suffisante quantité pour notre consommation.

Et la preuve de ceci, c'est que, dans l'espace de dix-huit ans (1859 à 1876), déduction faite de nos exportations, les importations de grains. et farines se sont élevées à près de 3,635,000 quintaux métriques, soit plus de 200,000 quintaux par année. Ce n'est guère, sans doute, mais c'en est assez pour constater l'insuffisance de notre rendement, qui ne

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