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cisément les nouveautés condamnées, ou comme si l'abus qu'on a pu faire de la saine doctrine devoit la faire abandonner. Le célèbre Nicole, tout habile théologien qu'il étoit, n'a pas su éviter cet écueil dans sa réfutation des principales erreurs des quiétistes... Les illustres prélats qui s'élevèrent avec tant de force contre les erreurs de la nouvelle mysticité, yers la fin du 17°. siècle, s'appliquèrent en même temps à prémunir les fidèles contre un écueil si dangereux. Non contens d'autoriser, dans les articles d'Issy, l'amour pur et désintéressé, aussi bien que l'oraison de contemplation ou de quiétude, et les autres oraisons extraordinaires, même passives, géné. ralement approuvées par les auteurs mystiques, ils condamnèrent hautement, dans leurs ordonnances, l'excessive timidité, qui fait souvent regarder la contemplation comme un exercice dangereux, sous prétexte de l'abus qu'on en a fait, ou qu'on en peut faire ».

Pour éviter les deux extrémités, et distinguer avec précision les erreurs condamnées des opinions libres et des véritables maximes de la spiritualité, l'habile éditeur a partagé son Analyse en trois parties, dont la première expose en quoi consiste la doctrine du quiétisme; la seconde offre le précis de la doctrine spirituelle de Fénélon, et la troisième explique les principales questions agitées sur cette matière entre deux illustres prélats. Il commence par tracer les maximes de la véritable spiritualité d'après l'enseignement des auteurs mystiques les plus sûrs, et distingue ensuite trois sortes de quiétisme, le quiétisme grossier de Molinos, le quiétisme moins révoltant de Mme. Guyon, et le quiétisme radouci de Fénélon. Il donne le pré

cis de chacune de ces doctrines; mais il s'attache surtout à faire bien connoître celle de Fénélon. Les erreurs du livre des Maximes peuvent, au jugement de Bossuet, se réduire à quatre principales, savoir: 1o. un état de pur amour qui exclut le désir du salut; 2o. le sacrifice absolu de la béatitude éternelle ; 3o. l'indifférence des parfaits pour leur avancement spirituel; 4°. la contemplation d'où Jésus-Christ est exclu par état. Mais Fénélon étoit bien éloigné de prendre à la rigueur les propositions répréhensibles de son livre; il les explique dans ses écrits apologé tiques, et l'on peut rapporter ses principes sur la vie intérieure à trois chefs, les différens degrés ou états d'oraison, les divers degrés ou états de la per fection chrétienne, et les épreuves de l'état passif. Quatre difficultés principales s'élevèrent entre Bossuet et Fénélon; elles rouloient sur la nature de la charité, sur la nature de l'oraison ou de la contemplation passive, sur l'oraison passive par état, et sur les épreuves de l'état passif.

Telles sont les questions que l'auteur de l'Analyse examine successivement; il expose les raisons allé guées de part et d'autre, sans prétendre prononcer entre deux illustres rivaux; mais il pense que, pour le fond, ils n'étoient pas aussi opposés qu'on le croit communément, et il conclut que celle controverse qu'on a si souvent affecté de caractériser avec une sorte de dédain, étoit vraiment digne d'occuper les méditations de deux esprits supérieurs. Nous devons dire que l'éditeur a porté dans cette discussion un esprit d'analyse et de méthode, une finesse et une sagacité qui répandent la clarté sur ce sujet. Ce morceau donue une idée nette d'une grande controverse,

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rectifie les jugemens hasardés à cet égard par la légèreté et ignorance, et nous paroît un véritable service rendu à la mémoire de deux grands hommes. Il ajoute un nouveau prix à cette édition : une entreprise dirigée avec tant de sagesse et de discernement ne peut qu'être utile à la religion, et agréable au public éclairé, et n'a point à craindre de fâcheuse

concurrence.

Nous nous sommes arrêté trop long-temps sur cette Analyse, pour pouvoir nous étendre sur les écrits mêmes de Fénélon qui remplissent les tomes IV, V et VI de cette édition. Nous nous réservons d'en parler en rendant compte des volumes suivans, qui sont sous presse, et qui termineront ce qui concerne le quiétisme.

NOUVELLES ECCLÉSIASTIQUES.

PARIS. La retraite annuelle pour les hommes a eu lieu à Notre-Dame, dans l'octave de l'Ascension. Les exercices du soir, qui commençoient à sept heures, ont attiré bon nombre de vertueux fidèles. M. l'abbé Borderies, qui a remplacé M. d'Astros, aujourd'hui évêque de Bayonne, dans la direction de ces retraites, a fait chaque jour, avant et après le sermon, quelque glose ou instruction sur des sujets de morale ou de piété. Les discours ont été prononcés par de zélés missionnaires. La retraite a été close le 8 au soir.

-Le jour de l'Ascension, il y eut, chez les Dames du Sacré-Cœur, rue de Varennes, une première communion très-nombreuse. M. l'abbé Frayssinous fit la cérémonie du matin, et présida, le soir, au renouvellement des vœux du baptême; M. Jauffret, évêque de Metz, donna le salut. Mme, la duchesse de Bourbon

assista aux exercices du matin et du soir, ainsi que beaucoup de parens des élèves, qui appartiennent aux familles les plus distinguées de la capitale. Après la consécration à la sainte Vierge, on fit une procession dans le jardin, ct on chanta, devant un autel préparé à cet effet, des prières pour le Prince qui vient d'être donné à la France, et pour sa mère. Čes prières doivent être continuées par les élèves. Puisse une si louable pratique être adoptée dans les maisons d'éducation, et ces voeux de l'innocence attirer des grâces spéciales sur une auguste famille, et sur un précieux rejeton!

-M. Jean-Thomas Paris, anciennement de la communauté des prêtres du Mont-Valérien, est mort dans ce lieu, le 25 mai dernier, à l'âge de 77 ans ; il étoit né au diocèse de Coutances, et étoit recommandable par sa piété et sa douceur. Avant la restauration, il demeuroit au séminaire des Missions-Etrangères, et rendoit des services dans l'exercice du ministère. Il retourna habiter le Calvaire, en 1815, et a fini ses jours sur cette montagne, toujours occupé des choses de Dieu, et du soin de se préparer à la mort.

Un malheur, aujourd'hui trop fréquent, est arrivé, la semaine dernière, à Versailles. Un jeune pompier s'est donné la mort; il n'a point été porté à l'église, et le convoi s'est rendu directement de la maison de deuil au cimetière. L'autorité avoit pris des mesures pour prévenir les troubles, et faire respecter les règles de l'Eglise. La gendarmerie et la garde royale étoient sous les armes; les amis du défunt ont accompagné son corps, et ont récité pour lui les prières des morts au cimetière; mais aucune scène fâcheuse n'a eu lieu. On ne peut qu'applaudir à la bonne volonté et au zèle qu'a montrés en cette occasion l'autorité, et espérer que de semblables mesures seront adoptées ailleurs en pareil cas.

-L'esprit d'irréligion travaille toujours avec ardeur à corrompre l'opinion par la fabrique des mauvais livres; on fatigue es presses à reproduire les anciennes attaques de l'impieté, et on y ajoute de nouveaux pam.. phlets dans le même esprit. Nulle manufacture n'est plus occupée que celle-là, nul commerce n'est plus actif. Les uns se chargeront d'insulter à la religion, dans des vers frivoles, ou dans des pamphlets tristement facétieux; les autres dénatureront l'histoire, et insulteront, dans de lourdes compilations, à la pieuse simplicité de nos pères. Tel paroît entr'autres le but d'une Histoire physique, civile et morale de Paris, depuis les premiers temps jusqu'à nos jours; ouvrage que l'on propose par souscription, et qui doit former 6 vol. in-8°. Il y en a déjà 2 volumes publiés; nous ne les avons point lus, et, s'il plaît à Dieu, nous ne les lirons pas. Nous nous contenterons d'avoir vu le Prospectus de l'ouvrage, qui suffit pour donner une idée de l'esprit qui a présidé à cette entreprise. L'auteur, M. J.-A. Dulaure, paroît plein de mépris pour les temps passés; s'il ne peut arracher aux humains le bandeau de l'erreur, il signalera du moins l'ignorance et les impostures qu'elle engendre comme une source féconde d'immoralité, et il peindra, sous les couleurs les plus sombres, l'état du royaume et de la capitale dans les siècles que la philosophie n'avoit pas encore illuminés. Il veut lui-même que l'on juge de l'esprit de son livre par le passage suivant, qu'il cite avec complaisance dans son Prospectus Je dois parler des évêques de la Gaule, qui, pour prix de leurs intrigues en faveur des Francs, de leur trahison envers leurs souverains, obtinrent des richesses dont jamais ils n'avoient joui... Dès-lors la morale méconnue fut séparée de la religion, et celle-ci dénaturée reçut des règles opposées à celles que son divin fondateur avoit prescrites. Jésus avoit prohibé l'exercice du pouvoir

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