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En effet, supposez qu'on délibere ici, et qu'il ne faille qu'une voix pour décider une loi provisoire; si la voix de ce votant provisoir déide la loi, il se trouve qu'une voix provisoire décidera une loi fixe; ainsi je concluds tout simplement à ce que les députés qui apportent un extrait de leur procès-verbal et avec lui l'éloge de leur conduite, aient la séance ; mais ils ne peuvent pas, ni selon la loi, ni selon les principes, avoir le droit provisoir de voter.

M. Fauchet: il n'est pas question de provisoire. Une vérification est absolue ou elle ne l'est pas ; et la seule chose dont il s'agisse maintenant, c'est de décider si le seul extrait du procès-verbal qui se trouvera en forme suffira pour donner définitivement la qualité de représentant:

Plusieurs voix: Non, non.

M. Fauchet: Ou s'il faut qu'on attende l'arrivée du procès-verbal.

M. Calvet: Les services que je pourrois rendre à la patrie, dans le sein de cette assemblée, ne vaudroient jamais le tems que je fais perdre à l'assemblée. Vous voulez me punir d'être venu à mon poste, je m'en vais. ( Non, non ).

M. Cambon: Si l'assemblée électorale n'avoit pas prêté le serment, par exemple, ses nominations seroient nulles, son procès-verbal seroit nul; mais, Messieurs, dans le cas actuel, il me paroît que M. Calvet doit être admis provisoirement.

( murmures ).

M. Carré : Nous votons actuellement sur les difficultés qui se présentent; et nous n'avons pas plus de droit que ceux que nous voulons rejetter, car nous ne somines constitués que provisoirement.

La discussion est fermée.

M. . . . . . : Je demande la priorité pour la motion de M. Cerutti.

M.... : Je demande que la question soit ainsi posée: lorsque le procès-verbal n'est pas produit, lorsqu'il n'est présenté qu'un simple extrait relatif nuement à la nomination, doit-on admettre définitivement ou provisoirement?

M. Garran-Conlon: Il n'est pas possible que nous délibérions sur une question métaphisique, quand nous avons à délibérer sur la vérification de tel ou tel pouvoir. Je demande que, quoique nous devions bien nous déterminer par les élémens de la méthaphisique et du raisonnement, l'on ne pose point la question de cette maniere. Je demande que la question soit réduite à son véritable point, qui est, d'une part, de savoir si le membre, qui n'a qu'un simple extrait, doit être admis, soit définitivement, soit

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provisoirement. C'est à cela évidemment que se réduit l'état de la question.

Quant à la motion qu'on a présentée, de savoir si ceux qui seront vérifiés provisoirement auront ou n'auront pas la séance, il est clair que cela est d'abord préjugé contre eux. D'un autre côté, nous ne sommes point ici, du moins jusqu'à ce que nous soyons constitués, dans le cas d'accorder ou de refuser la séance à personne autre qu'à ceux qui sont membres de cette assemblée. Ainsi, d'une part, je demande la question préalable sur les honneurs de la séance; ct, de l'autre, je demande la priorité pour la motion d'accorder provisoirement la séance à M. Calvet: et, à cet égard, messieurs, je prendrai la liberté de vous dire que, dans toutes les assemblées délibérantes, et notamment en Angleterre, Charles Fox a siegé pendant longtems au parleinent d'Angleterre, en vertu d'une vérificătion présumée, quoiqu'il y eût cette circonstance qui n'existe pas ici, que ses pouvoirs fussent contestés. Cela arrive jour nellement au parlement d'Angleterre. Cela, si je ne me trompe, a été ainsi à la premiere assemblée nationale. Je demande donc la priorité pour l'admission provisoire de M. Calvet.

M. . . .

Je demande la parole, pour exposer un motif qui peut mériter l'indulgence de l'assemblée pour M. Calvet.

Plusieurs voix Il ne s'agit pas d'indulgence.

L'assemblée refuse la priorité aux motions de MM. Fauchet et Garran, et elle adopte celle de M. Cerutti (applaudi).

·

M. le rapporteur du troisieme bureau: Messieurs, je suis chargé par votre troisieme bureau, formé pour la vérification des pouvoirs, de vous rendre compte du résultat de son travail. A

Les procès-verbaux envoyés aux archives de l'assemblée nationale par les assemblées électorales des départemens de l'Aude, de l'Aveiron, des Bouches-du-Rhône, etc., ont été trouvés réguliers. Le troisieme bureau n'a trouvé de difficulté que relativement au département du Calvados. Je dois mettre sous les yeux de l'assemblée une dénonciation que contient le procès-verbal.

Du 4 septembre. Un de MM. les électeurs ayant demandé et obtenu la parole, a éveillé l'attention et même la sollicitude des électeurs sur le compte de M. Fauchet, évêque du Calvados, à l'occasion du décret lancé contre lui par le tribunal du district de Bayeux. Les raisons qu'il a déduites

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et qui ont été fortement appuyées par d'autres électeurs, ont été généralement applaudies. En conséquence, les électeurs ont résolu de rappeller sur-le-champ M. l'abbé Fauchet à l'exercice de ses fonctions d'électeur, et pour rendre un hommage plus solemnel à son innocence reconnue, de se transporter tous chez lui, pour le ramener triomphant à la salle des séances; ce qui a été sur le-champ exécuté.

MM. les électeurs, de retour à la salle, ont repris leurs opérations, et le résultat a été que M. Fauchet a été nommé député à la législature avec la majorité absolue des suffrages.

il est aisé de prévoir, messieurs, les questions qui peuvent naître de cette dénonciation, et quelle est leur importance. Ces questions ont été agitées dans le bureau; plusieurs des membres ont exposé les raisons qui pouvoient militer pour et contre l'élection; mais l'opinion du bureau a été que, n'étant point composé en comité pour vous proposer un avis, mais formant une simple commission pour mettre sous vos yeux l'énonciation des procès-verbaux qui pouvoient donner lieu à des difficultés, cette mission étoit remplie par la lecture que je venois de vous faire.

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M. . . . . : Je demande d'abord, que l'assemblée déclare si les pouvoirs des huit départemens qui n'ont pas souffert de contestation resteront définitivement vérifiés. (oui, oui.)

La vérification est adoptée.

M. . . . . : Il y a des réclamations contre les élections des Bouches-du-Rhône..... (nan, non.)

M... : L'assemblée électorale du Calvados n'est infectée d'aucun vice radical qui puisse annuller son procèsverbal, parce que, aux termes de la loi, l'assemblée électorale ne peut être annullée que quand elle a chassé de son sein, ou quand elle admet des citoyens non actifs; or, dans l'affaire actuelle, le Calvados n'a chassé de son sein aucun citoyen, n'a admis aucun citoyen non actif; c'est du moins ce que nous allons examiner.

Aucune réclamation ne s'est fait entendre, c'est spontanément, c'est d'un voeu unanime que M. Fauchet a été admis dans le sein de l'assemblée électorale. Deux loix principales sont relatives à l'activité des citoyens. La premiere est la loi constitutive des municipalités; la seconde celle qui régle l'organisation des corps administratifs. Or dans aucune de ces deux loix vous ne trouvez pour cause de suspension de l'activité, les décrets d'ajournement ou de prise-de-corps, Depuis les troubles survenus dans les assemblées primaires, l'assemblée nationale constituante jugea à propos de rendre encore différens décrets sur la police de ces assemblées, un

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entr'autres dans le mois de mai qui fut suivi d'une proclamation du roi. Dans un de ces décrets il est dit formellement que l'on ne pourra objecter aux citoyens d'autres titres d'exclusion que ceux qui sont contenus dans les décrets. En effet, messieurs, lorsque les deux premieres loix constitutionnelles des corps administrasifs furent rendues, l'ancien ordre judiciaire existoit encore et l'assemblée nationale n'avoit garde de remettre dans la main des corps judiciaires une arme aussi dangereuse que celle des décrets. Vous pouvez voir quel danger il en seroit résulté, par l'usage même que les tribunaux de la constitution en ont fait contre le plus irréprochable patriotisme. (applaudi).

Par cet article du décret que je viens de vous citer, se trouve écartée l'ordonnance de 1670, qui prononçoit que les décrets d'ajournemens et de prise-de-corps suspendoient de toutes fonctions. Je cite cette ordonnance parce que j'en ai entendu parler, mais jamais sans surprise, par mes concitoyens. Il est assez étrange que l'on cite une ordonnance du tems de l'esclavage, contre la création de la liberté. Quoiqu'il en soit, elle est totalement écartée par la loi que je viens de citer.

Reste l'acte constitutionel, mais il n'est point applicable à l'affaire de M. Fauchet. Cette loi sacrée, le principe de toutes loix, n'étoit encore qu'un projet de loi, lors de la tenue de l'assemblée électorale du Calvados. Il n'étoit alors revêtu d'aucune des formalités requises, et peut-être même. n'est-il pas encore officiellement promulgué dans notre département, Vous ne pouvez donc donner aucun effet ré : troactif à cette loi, au préjudice de M. Fauchet. Je crois, messieurs, qu'ils n'est pas nécessaire de passer plus de tems à cette discussion. Ce n'est point dans l'assemblée nationale, où brille le patriotisme; ce n'est point dans cette salle, où je vois un des monumens de la Bastille, que nous devons délibérer si nous écarterons l'un des vainqueurs de cette forteresse.

M. Lagrevol: Messieurs, il y a un moyen pour concilier les avis, pour sauver l'intérêt de la soumission à la loi, et l'avantage d'avoir pour député M. Fauchet.

C'est dans la constitution comme dans les loix anciennes que je trouve la preuve de ma proposition. D'après les loix anciennes le décret de prise de corps, le décret d'ajournement personnel n'anéantissoit pas le titre, n'empêchoit pas qu'on pût acquérir le titre. Il falloit pour opérer cet effet un jugement de condamnation et des peines infâmantes. Les décrets empêchoient seulement qu'on pût exercer les fonctions publiques,

"

Un article de la constitution a dit que, pour perdre la qua- · lité de citoyen, il falloit un jugement; et un autre article... ( murmures. ) Je conclus à l'admission de M. Fauchet.

M... . . : Je n'ai rien à ajouter en faveur de M. Fauchet, si ce n'est qu'ayant été soumis à un décret pour cause relative à la révolution, l'amnistie qui a été donnée sur cet objet ( murmures) efface absolument toutes les traces des délits relatifs à la révolution. J'entends dire que l'amnistie est postérieure ; mais cela ne fait absolument rien: c'est tout le contraire, parce que la loi ayant déclaré tous ces délits comme non avenus, elle a nécessairement un effet rétroactif. Delà il suit que dans le fond et dans la forme la cause de M. Fauchet est bonne et que la défense qui a eu lieu en sa faveur ne peut être contestée. ( Aux voix. )

M..... .....: Comme membre du troisieme bureau, je vous prie de vouloir bien me permettre de vous soumettre quelques réflexions qui ont été faites dans le bureau. Messieurs, pour juger l'affaire de M. Fauchet, il faut faire une distinction précise sur la loi, parce que la loi doit toujours être notre guide. Si M.Tabbé Fauchet avoit été décrété en vertu d'un délit quelconque, s'il avoit été frappé par l'ordonnance de 1670, comme on vovs l'a dit dans cette tribune, s'il avoit été réintégré dans son état d'activité, j'estime que dans ce cas une élection intermédiaire seroit nulle, et que ce qui auroit été nul ne pourroit pas être validé ; mais, messieurs observez que M. Fauchet n'a été frappé d'un décret qu'en vertu d'un délit que l'on qualifie ou de révolution où de contre révolution, comme on voudra. Toujours est il qu'une loi a aboli ce délit, a accordé une amnistie générale, d'où je conclus que la nomination de M. Fauchet est valable. : Je demande que l'assemblée aille sur-lechamp aux voix sur la quest on, et qu'elle s'empresse de recevoir dans son sein M. Fauchet.

M..

M. d'Ochier: Vous n'avez entendu parler que pour M. l'abbé Fauchet; il est de votre justice et, j'ose le dire, de votre devoir (applaudi) d'entendre quelles sont les raisons qu'on pourroit lui opposer (applaudi). L'objet de la vérification des pouvoirs, messieurs, est d'assurer l'assemblée que toutes les formes prescrites pour la nomination des députés à la législature ont été remplies par les assemblées électorales: c'est-là, messieurs, le principe qui doit vous guider dans l'examen de la question soumise à votre délibération. Or, voyons si les électeurs du Calvados se sont soumis aux loix qu'ils devoient observer. Je trouve dans la section 2 du chapitre premier du titre 3 de la constitution françoise, cet article-ci :

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