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constitutionnel. Il ne fallut rien moins qu'une puissante intercession, et le désir de la paix, pour engager M. de Maillé à faire M. L. chanoine titulaire; mais qu'il l'ait recherché, qu'il lui ait donné des marques d'estime, et qu'il soit mort regrettant d'avoir écouté des préventions qu'il avoit reconnues mal fondées, c'est ce dont M. L. ne donne et n'auroit pa donner aucune preuve; et, pour quiconque a connu M. de Maillé, ces allégations paroîtront, comme elles sont en effet, destituées de toute vraisemblance.

Mais du moins M. L. n'a fait aucune rétractation; car, dit-il, M. de Maillé lui-même avoit annoncé qu'il n'exigeroit aucune rétractation, et qu'il puniroit ceux qui en parleroient. Il faut que M. L. ait bien peu mémoire. Tout le monde a su à Rennes, et bien des de gens se rappellent encore, que M. de Maillé, peu après son arrivée dans cette ville, assembla tout son clergé, et lui proposa une profession de foi dirigée spécialement contre les erreurs enseignées par les constitutionnels; qu'il la fit signer par tous les membres de l'assemblée, sans aucune distinction, et que M. L. et ses amis, à l'exception d'un seul, la signèrent comme les autres, après une assez vive contestation. On se flattoit que cette démarche avoit mis fin au schisme précédent; mais la plupart des constitutionnels protestè rent, quelques jours après, contre leur signature. Le prélat, justement mécontent de cette versatilité, leur refusa des pouvoirs, jusqu'à ce que, ramenés chez lui par le préfet, ils déclarèrent qu'ils adhéroient de cœur et d'esprit à la profession de foi qu'ils avoient signée; et c'est à quoi M. L. se soumit comme les autres.

Ces faits sont notoires à Rennes, et nous en trouvons la preuve dans une lettre de M. de Maillé à feu M. Emery, en date du 11 août 1802. Il nous est tombé entre les mains une copie de cette lettre, copie faite par le prélat lui-même, et qui est toute entière de son

écriture. Nous avons cette lettre sous les yeux, et nous y lisons:

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« Un de mes premiers devoirs étoit de faire disparoître le schisme. Presque tous les raembres des différens corps administratifs s'étoient déclarés ouvertement en faveur des constitutionnels, et le gouvernement ne se montroit pas moins favorable. J'imaginai un moyen de satisfaire à ma conscience sans heurter de front cette masse imposante d'adversaires; et, pour n'avoir rien à me reprocher, ni pour la nature du moyen, ni pour les conséquences, je le proposai à un vénérable conseil, que je m'étois formé dès mon arrivée. Ce moyen, qui a complètement réussi, étoit de faire signer par tout mon clergé une déclaration qui contenoit cinq proposi tions contradictoires aux principales erreurs de la constitution civile du clergé. Il y étoit dit entr'autres que l'Eglise a reçu de Jésus-Christ un pouvoir entièrement indépendant pour les choses spirituelles, et qu'elle seule a le droit de donner ou d'ôter, d'étendre ou de restreindre la juridiction; que les évêques sont supérieurs aux simples prêtres à raison de l'ordre et de la juridiction; que le Pape a reçu de Jésus-Christ la primauté d'honneur et de juridiction sur toute l'Eglise, et qu'il peut seul, suivant les lois actuelles de l'Eglise, donner aux évêques l'institution canonique; qu'on doit une parfaite soumission aux jugemens dogmatiques de l'Eglise, soit assemblée, soit dispersée, et en particulier à tous les jugemens des souverains pontifes reçus par l'Eglise... Je fis assembler mon clergé, et je lui adressai le discours dont la copie est ci-jointe. Tous les constitutionnels présens, à l'exception d'un seul (1), signèrent la formule; mais la plupart ne se soumirent qu'a près avoir résisté long-temps..... N.

Plus bas, M. l'évêque de Rennes dit encore :

« Pour mettre un terme à toutes ces dissentions, nous convînmes, le préfet et moi, qu'il me rameneroit lui-même ceux des constitutionnels dont la moralité étoit intacte et la capacité suffisante ; qu'il les engageroit à adhérer de cœur et d'es

(1) M. Du...., ancien tambour de la garde nationale, ordonné prêtre par Le Coz

prit à la déclaration qu'ils avoient signée et qu'ils promettoient de suivre dans la pratique, et à me promettre pour l'avenir une pleine et entière obéissance. Ils vinrent, mais dans l'intention de m'adresser un long discours à leur manière sur ce qui s'étoit passé entr'eux et moi. Le préfet, qui en craignoit les résultats, leur prescrivit lui-même les termes dont ́ils devoient se servir. Ils se comportèrent dans cette entrevue avec décence et soumission, et je ne crus pouvoir leur refuser les pouvoirs qu'ils demandoient jusqu'à l'organisation définitive. Ils se sont depuis conformés aux ordres que je leur ai donnés ».

Il est donc constant que M. L. a signé la déclaration ci-dessus. Il a donc reconnu que le Pape peut seul, suivant les règles actuelles de l'Eglise, donner aux évêques l'institution canonique; ce qui est saper la constitution civile du clergé par la base. Qu'il prétende après cela ne s'être pas rétracté, c'est ce qu'on a peine à concilier avec une déclaration si précise. Quelle idée ces variations donneroient elles de sa candeur et de sa bonne foi?

Nous n'avons examiné qu'une partie de la brochure de M. L.; savoir, ce qui a rapport à l'épiscopat de M. de Maillé, Les inexactitudes que nous y trouvons sur cette seule époque nous paroissent suffisantes pour inspirer une défiance fondée sur les autres assertions de cet écrit, et nous pouvons bien appliquer encore ici l'épigraphe même qu'on lit à la tête de la brochure: Ab uno disce alios; ce qui ne laisse pas que d'infirmer singulièrement les éloges que M. L. se donne, et les témoignages honorables qu'il cite en sa faveur. Au surplus, qu'il se tranquillise, nous n'enverrons point ces observations aux deux chambres; nous n'avons point la vanité de vouloir que les grands corps de l'Etat s'occupent de nos écrits, ni la malice d'appeler l'attention des puissances sur les méprises, les forfanteries et les erreurs d'une assez misérable brochure.

NOUVELLES ECCLÉSIASTIQUES.

PARIS. Le lundi. 4, S. M. a reçu, en audience particulière, le père Bastiani, religieux né en Corse, et qui est venu en France dans l'intention de solliciter le rétablissement de quelques couvens dans sa patrie. Il a remis au Roi un Mémoire où il expose que ces institutions seroient un moyen efficace pour arrêter les désordres. L'exemple et les prédications de bons religieux combattroient les vices, appaiseroient les ressentimens, et préviendroient des excès que toute la rigueur des lois n'a pu jusqu'ici empêcher. Chez un peuple qui n'a pas perdu la foi, dix missionnaires feroient plus, pour la tranquillité publique, que vingt brigades de gendarmerie.

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M. l'évêque de Metz a officié, soir et matin, la chapelle du château, le jour de la Pentecôte; M. l'abbé de Montès a prêché, l'après-midi, sur la foi. Monsieur, Mr. le duc d'Angoulême et M. la duchesse de Berri, ont assisté à l'office, avec les personnes de leur maison. - M. l'abbé Badin, missionnaire au Kentucky, qui avoit eu l'honneur d'être reçu précédemment par S.M., a eu aussi une audience des Princes et Princesses, et leur a remis son écrit, où il expose les besoins de la mission. LL. AA. RR. l'ont écouté avec intérêt, et MONSIEUR a bien voulu lui envoyer une somme de 500 fr. pour la mission.

-Le jeudi 14, à neuf heures du matin, M. l'évêque de Chartres, premier aumônier de MONSIEUR, donnera la confirmation, dans l'église des MissionsEtrangères, aux jeunes Savoyards qui ont fait précédemment leur première communion. Le soir, un ecclésiastique de la paroisse fera une instruction pour ces enfans, et Mme. la comtesse de Senft quêtera pour je soutien des établissemens créés en leur faveur.

On a publié, il y a quelque temps, une réponse qu'un membre de la chambre des députés a faite, le 25 mai dernier, à une provocation en duel. Quel que soit l'empire des préjugés, nous croyons que l'honneur véritable comme la religion applaudiront à la déclaration franche et loyale par laquelle le député terminoit sa lettre :

Je suis chrétien, je suis magistrat; un seul de ces titres suffiroit pour m'interdire de m'engager de dessein prémédité dans un combat singulier. Je ne donnerai point l'exemple de la violation des plus saintes lois de la religion, ni de celle des lois de l'Etat, que je suis chargé de faire observer. Je ne laisserai point volontairement pour héritage à mes enfans la mémoire d'un meurtre, soit que j'en fusse l'auteur ou la victime. Ma conduite et mes démarches sont publiques; ceux qui croient que leur honneur est attaché à m'ôter la vie, peuvent l'attaquer aisément; je la défendrai avec courage quand je pourrai la défendre; je l'abandonnerai avec résignation, je l'espère, quand il plaira à Dieu de me la redemander »

a

Ce n'est pas seulement à Berne que la Lettre de M. de Haller à fait une vive sensation. La forme naive de cet écrit, le ton affectueux qui y règne, la candeur avec laquelle l'auteur expose ses sentimens, et en même temps la solidité du fond, les réflexions si justes de l'estimable écrivain sur les avantages de l'unité catholique, cette foi ferme et éclairée qu'il montre dans cet écrit, ont frappé les esprits droits, et touché les cœurs ouverts aux plus douces impressions de la religion et de la nature. Les protestans, comme les catholiques, n'ont pu refuser leur estime à des vues si pures, et exprimées avec tant de franchise. La première édition de cette Lettre ayant été enlevée en peu de temps, M. Méquignon vient d'en donner une seconde. L'auteur, qui a consenti à cette publicité, d'après le conseil de personnes éclairées, a fait à cette nouvelle édition quelques additions, qui ne peuvent qu'accroître l'intérêt de l'ouvrage. Sa démarche, et les raisons dont il l'ap

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