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devant la Cour d'appel de Metz. Faute d'en avoir fait enregistrer l'acte dans le délai, la régie de l'enregistrement a décerné contre lui, le 6 mai 1809, une contrainte en paiement de la somme de 33 francs pour le droit, le double droit et la subvention. Me Mangin a formé opposition à cette contrainte, et a soutenu qu'ayant prêté son serment d'avocat, avant le décret impérial du 31 mai 1807, il n'était point passible du droit d'enregistrement établi (disait-il) par ce décret. Il a cependant offert le droit fixe d'un franc et le double droit, conformément au no 51 du § 1er de l'art. 68 de la loi du 22 frimaire an vii.

Le 11 avril 1810, jugement du tribunal civil de Metz, qui donne acte à Ma Mangin de son offre, et, vu l'art. 2 du Côde civil, le décharge de la contrainte.

par

La régie se pourvoit en cassation, et par arrêt du 11 septembre 1811, au rapport de M. Cassaigne : — « LA COUR, vu l'art. 1er de la loi du 27 ventose an ix, et l'art. rer du décret impérial du 31 mai 1807; attendu que l'art. 2 du Code civil a pour objet le droit privé, et est étranger aux droits d'enregistrement, qui se régissent par des lois spéciales; que l'art. 1er de la loi du 27 ventose an ix veut impérieusement que les droits d'enregistrement soient liquidés et perçus, suivant les fixations établies la loi du 22 frimaire an vi, et celles postérieures, quelle que soit la date ou l'époque des actes à enregistrer; que, d'après ces mêmes lois, et aux termes du décret du 31 mai 1807, les actes de prestation de serment des avocats doivent être enregistrés au droit de 15 francs sur la minute, dans les délais prescrits; que, de là, il résulte que l'acte de prestation de serment dont il s'agit doit les droits sur le pied réglé par ce décret; et qu'en décidant le contraire, le jugement attaqué a contrevenu à ce décret et à l'art. 1er de la loi du 27 ventose an ix; Casse et annule, etc. »

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Nota. V. M. MERLIN, qui rapporte ces diverses décisions, vo Avocat, t. 1, p. 460; un arrêt du 24 février 1808, vo Avoué, et infrà, no 39.

13. Le conseil donné par un avocat dans le secret du cabinet, ne peut autoriser contre lui une poursuite correctionnelle, lorsque, d'ailleurs, le fait qu'il a conseillé ne constitue point par lui-même un délit. 14. Dans ce cas, il a le droit de prendre à partie le magistrat qui, après l'avoir fait arrêter, l'a poursuivi correctionnellement.

La veuve Padiece vend au sieur Foulon, son neveu, moyennant une rente viagère, une maison qu'elle avait vendue, quelques jours auparavant, au sieur Chabaille. Foulon fait de suite transcrire son contrat, précaution que Chabaille n'avait pas prise. Au lieu de poursuivre sa venderesse comme stellionataire, ce dernier l'assigne en police correctionnelle, ainsi que le sieur Foulon, second acquéreur, les accusant de lui avoir escroqué le prix de la vente. Dans le cours des débats, les prévenus allèguent, pour leur défense, que l'avocat Deboileau leur avait conseillé la revente. Celui-ci se présente à l'audience, sur le mandat d'amener décerné d'office par le juge remplissant les fonctions de directeur du jury, et convient avoir réellement donné le conseil qu'on lui reprochait; mais il déclare qu'ayant su de la veuve Padiece qu'elle avait été circonvenue par Chabaille, pour lui faire souscrire la vente de sa maison au préjudice de son neveu, il avait cru, dans cette supposition, être autorisé à dire que la revente au sieur Foulon serait valable, puisque Chabaille n'avait point rempli les formalités prescrites par la loi du 11 brumaire an vii, sauf à se régler ensuite avec ce dernier , pour le remboursement de ses frais. Néanmoins, un mandat d'arrêt est décerné contre lui. Traduit devant le tribunal, De

boileau persiste dans son explication; il ajoute qu'il pourrait se retrancher dans le moyen de droit et les prérogatives de sa profession; qu'au surplus il persiste à croire que la maison pouvait être revendue; qu'en énonçant cette opinion, il n'était que l'organe de la loi; que cette considération suffisait pour repousser toute idée de délit. Le sieur Deboileau est renvoyé de la plainte.

C'est en cet état que, voulant obtenir une réparation solennelle, il intente, devant la Cour de cassation, l'action de prise à partie contre le magistrat directeur du jury, en se fondant 1° sur ce qu'il n'y avait eu ni délit, ni apparence de délit, puisque la seconde vente ne pouvait présenter qu'un stellionat qui donnait lieu seulement à une action civile; 2° sur ce que le mandat d'arrêt avait été conséquemment l'effet de la haine ou d'une erreur grossière, aussi répréhensible que le dol.

Vainement le juge pris à partie a-t-il produit un certificat des autres membres du tribunal, attestant la sagesse et la pureté de sa conduite; vainement a-t-il prétendu qu'il ne s'était conduit avec tant de rigueur contre l'avocat Deboileau, que d'après un avis verbal qui lui avait été donné par M. le procureur-général près la Cour d'Amiens, un arrêt de la section criminelle, rendu le 23 juillet 1806, au rapport de M. Botton-Castellamonte, sur les conclusions de M. Thuriot, a prononcé en ces termes : « LA COUR, vu le titre 5 de la loi du 3 brumaire an iv, d'après lequel les mandats d'amener et d'arrêt ne peuvent être décernés que lorsqu'il existe des preuves ou des présomptions de délit, et dans les cas y exprimés; Vu enfin les art. 15 et 16 de la loi du 7 pluviose an Ix; et attendu qu'aux termes de l'art. 565 du Code des délits et des peines, la prise à partie est autorisée, lorsqu'il y a eu dol de la part d'un juge; que lorsqu'il s'agit d'instances civiles en dommagesintérêts, les lois assimilent la faute grave au dol; que, dans

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l'espèce, la revente faite par la veuve Padiece n'a pu donner lieu à des poursuites correctionnelles, quand bien même on voudrait l'envisager comme un stellionat; que le conseil donné par le demandeur, dans les termes allégués par le défendeur, ne renferme pas même l'apparence d'un délit ; d'où la conséquence, que le mandat d'amener, la traduction à la police correctionnelle, et le mandat d'arrêt, constituent une faute grave de la part du défendeur; Attendu que cette faute ne peut être atténuée, ni par un prétendu avis verbal du procureur-général près la Cour de justice criminelle d'Amiens, ni par le certificat des juges et du greffier du tribunal d'Abbeville, délivré au défendeur, pendant l'instance en prise à partie; - déclare le défendeur bien intimé et pris à partie; le condamne, en conséquence, en la somme de six mille francs de dommages-intérêts envers le demandeur, etc. »

15. Le président d'une Cour de justice criminelle ne peut interrompre les débats contre l'accusé, pour entendre des témoins et ouvrir de nouveaux débats contre l'avocat chargé de sa défense, sur une inculpation qui est personnelle à ce dernier.

Le sieur Baboie, avocat, s'était chargé de la défense du sieur Denys Duval, prévenu de tentative d'homicide. Le zèle qu'il employa dans cette défense ne le mit pas à couvert d'une inculpation d'autant plus pénible, qu'elle devait blesser sa délicatesse.

Ce fut par l'un des accusateurs de sa partie, que cette inculpation lui fut adressée, et dès cet instant, l'avocat Baboie ne parut plus aux yeux de la Cour qué comme un prévenu dont elle devait apprécier la conduite.

Des témoins furent entendus contre lui; et M. le président de la Cour, après avoir statué sur le sort de l'accusé,

reprocha amèrement à son défenseur les torts vrais ou faux qui lui étaient imputés.

Ce magistrat déclare, en effet, dans le procès-verbal des débats, sous la date du 18 brumaire an XIV: « que les débats de l'affaire n'ont pas donné de la délicatesse du sieur Baboie l'opinion que ses honorables fonctions devaient commander; que la justice, les jurés et le public étaient convaincus qu'il avait spéculé sur la position fâcheuse du condamné; que le zèle qu'il a paru mettre dans sa défense était l'effet d'une cupidité honteuse; que la proposition qu'il avait faite à Duval était affligeante pour la morale et la justice; que sa conduite est trop répréhensible, blesse trop la délicatesse, dégrade trop évidemment le plus beau ministère, pour qu'à l'avenir il pût porter l'audace jusqu'à se présenter dans le sanctuaire de la justice.

neur,

Le sieur Baboie a demandé à la Cour suprême la cassation de ce procès-verbal, comme attentatoire à son honet caractérisant un excès de pouvoir manifeste. L'autorité d'un tribunal ou d'une Cour, a-t-il dit, se borne à la partie soumise à son jugement ou à son arrêt. Ce n'est que dans le cas de trouble ou d'irrévérence, que les personnes composant l'auditoire et le barreau peuvent être ramenés à l'ordre et punies, s'il y a lieu. Hors de ces circonstances, tout acte judiciaire qui porte atteinte à l'honneur d'un citoyen (et particulièrement d'un avocat, dont l'existence est toute dans l'opinion), est irrégulier, abusif, et ne peut échapper à la censure de la Cour su prême.

au

25 janvier 1806, arrêt de la section criminelle rapport de M. Lombard, sur les conclusions de M. Lecoutour, qui prononce en ces termes : « La Cour, vu l'article 456 du Code des délits et des peines, du 3 brumaire an Iv; considérant que,

d'après les

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