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cette volonté déterminée dont je vous parle quelquefois. Alors on sent qu'il n'y a plus rien à chercher, et qu'on est arrivé à ce qui seul est bon sur la terre. On a des chagrins, mais on a aussi une solide consolation et la paix au fond du cœur au milieu des plus grandes peines.

SE

LETTRE XXIII.

A la même.

peut-on faire dévote quand on veut ? oui, ma ma chere fille, on le peut et il ne nous est pas permis de croire que Dieu nous manque. Cherchez et vous trou verez heurtez à la porte, et on vous l'ouvrira: ce sont ses paroles: mais il faut le chercher avec humilité et simplicité. St. Paul pouvoit bien en savoir plus qu'Ananie. Il va pourtant le trouver, et apprendre par lui ce qu'il faut qu'il fasse. Vous ne le saurez jamais par vous-même. Il faut vous humilier: vous avez un reste d'orgueil que vous vous déguisez à vous-même sous le goût de l'esprit : vous n'en devez plus avoir; mais vous devez encore moins chercher à le satisfaire avec un confesseur. Le plus simple

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est le meilleur pour vous, et vous devez Vous y soumettre en enfant. Comment surmonterez-vous les croix que Dieu vous enverra dans le cours de votre vie? si un accent normand ou picard vous arrête; ou si vous vous dégoûtez d'un homme, parce qu'il n'est pas aussi sublime que Racine: il vous auroit édifiée, le pauvre homme, si vous aviez vu son humilité dans sa maladie et son repentir sur cette recherche de l'esprit. Il ne demanda point dans ce tempslà un directeur à la mode: il ne vit qu'un bon prêtre de sa paroisse. J'ai vu un autre bel esprit, qui avoit fait de très-beaux ouvrages, sans les avoir fait imprimer, ne voulant pas être sur le pied d'auteur: il brûla tout, et il n'est resté de lui que quelques fragments dans ma mémoire. Ne nous occupons point de ce qu'il faudra tôt ou tard abjurer. Vous n'avez encore guere vécu, et vous avez pourtant à renoncer à la tendresse de votre cœur, et à la délicatesse de votre esprit. Allez à Dieu, ma chere fille, et tout vous sera donné. Adressezvous à moi tant que vous voudrez. Je vou. drois bien vous mener à Dieu : je contribuerois à sa gloire; je ferois le bonheur d'une personne que j'ai toujours ai

mée particuliérement; et je rendrois un grand service à un institut qui ne m'est pas indifférent.

LETTRE XXIV.

Aux Dames de Saint-Louis.

1699

E vous ai dit souvent

JE

mes cheres filles, que je suis incapable et indigne de vous exhorter, et que je ne le fais que par obéissance. Depuis que j'ai vu les écrits de Me. de Chantal, j'ai cru n'avoir plus rien à vous dire: j'y ai trouvé tout ce que je pense, et mille fois mieux que je ne le pourrois exprimer. Je vous l'ai dit; mais, l'amitié que vous avez pour moi vous prévenant, vous désirez que je vous dise mon avis sur les choses qu'elle a écrites, et dont j'ai fait copier ce que j'ai cru qui vous étoit propre et convenable à votre institut. J'obéis à ce que vous avez voulu : mais je ne puis qu'approuver tout ce que vous trouverez dans ce recueil, et vous conjurer de vous y conformer. Vous ne pouvez prendre un meilleur esprit que celui de St. François

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'de Sales; et rien ne m'a donné plus d'espérance, que votre goût pour les maximes de ce grand saint. Lisez et relisez ses écrits: c'est un excellent directeur. Me. de Chantal, qui en avoit si bien profité, entre dans un détail très-propre à votre communauté. Il me semble qu'avec ces livres et des filles de bonne volonté, on peut faire un monastere bien régulier et bien parfait. Le chapitre des fondations ne vous regarde point: il faut vous bien fortifier avant de vous étendre plus loin vous ferez assez de bien, si vous vous acquittez saintement et fidélement des obligations de votre institut.' Mais si jamais les rois et les reines vouloient multiplier les maisons de SaintLouis, (et pourquoi ne le voudroient-ils pas un jour?) je pense que vous ne pourriez mieux faire que d'imiter les filles de la Visitation; et d'observer dans les fondations tout ce qui est prescrit dans ce chapitre, et dans ceux qui le suivent. Vous trouverez toujours des gens éclairés et vertueux à consulter: je crois que les avis d'un Saint et l'expérience de ces saintes filles, vous feroient marcher plus sûrement que vous ne feriez pas des chemins tout-nouveaux. Quand je vous parle des rois et des reines pour des fon

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dations; c'est qu'il vous est défendu par la vôtre, de recevoir de toute autre personne, sous quelque prétexte que ce soit, ni augmentation, ni présent.

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Soyez fidelles à votre institut: il est singulier et vous n'avez pu imiter en tout les filles de la Visitation; parce que le vœu d'instruire, de même que plusieurs articles de votre établissement, ne pouvoient s'accommoder avec le leur : mais imitez cette fidélité, cette exactitude, cette obéissance, qui les a soutenues jusqu'ici dans la ferveur et dans l'uniformité. N'oubliez jamais que celles qui vous ont instruites Vous ont dit qu'elles ne changeroient pas la moindre de leurs pratiques, même pour en établir de meilleures: soyez donc, comme elles, inébranlables, quoi qu'on vous propose, et dites pour toute raison: C'est notre institut, c'est l'esprit de notre maison c'est l'intention de notre fondateur et de nos supérieurs. Tout ce qui s'est passé dans les commencements de votre fondation, vous a fait voir qu'on trouve toujours à changer dès qu'on veut écouter, et qu'il y a des raisons pour soutenir tout ce que l'on propose. Cette fermeté à demeurer fidelle à ses regles, à ses coutumes, à ses pratiques, est un excellent exercice de

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