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et grands efforts, plus il est déterminé à vous offrir tous les moyens, toutes les preuves de dévouement qui peuvent vous mettre en état de dicter à vos ennemis une paix glorieuse et durable.

"

Sire, à l'instant le Tribunat vous répond de l'ardeur et de la constance des Français pour la cause du prince et de la patrie, il a la conscience d'exprimer le sentiment national aussi fidèlement qu'à l'époque où il pressa Votre Majesté de placer sur tant de lauriers la couronne impériale.

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Arrivé à Strasbourg le 4 vendémiaire, le 9 l'empereur passa le Rhin. Le 14 l'armée française entrait en Bavière. L'empereur avait annoncé sa présence à l'armée par deux proclamations, l'une à ses soldats, l'autre aux Bavarois. Il fit hommage à sa capitale des premières dépouilles de l'ennemi.

L'EMPEREUR à l'armée.

« Soldats, la guerre de la troisième coalition est commencée. L'armée autrichienne a passé l'Inn, violé les traités, attaqué et chassé de sa capitale notre allié.

>> Vous-mêmes vous avez dû accourir à marches forcées à la défense de nos frontières. Mais déjà vous avez passé le Rhin; nous ne nous arrêterons plus que nous n'ayons assuré l'indépendance du corps germanique, secouru nos alliés, et confondu l'orgueil des injustes agresseurs. Nous ne ferons plus de paix sans garantie; notre générosité ne trompera plus notre politique.

>>

Soldats, votre empereur est au milieu de vous. Vous n'êtes que l'avant-garde du grand peuple; s'il est nécessaire, il se levera tout entier à ma voix pour confondre et dissoudre cette nouvelle ligue, qu'ont tissue la haine et l'or de l'Angleterre.

» Mais, soldats, nous aurons des marches forcées à faire, des fatigues et des privations de toute espèce à endurer. Quelques obstacles qu'on nous oppose, nous les vaincrons, et nous ne prendrons de repos que nous n'ayons planté nos aigles sur le territoire de nos ennemis. Signé Napoléon. »

L'EMPEREUR des Français à l'armée bavaroise.

<< Soldats bavarois, je me suis mis à la tête de mon armée pour délivrer votre patrie des plus injustes agresseurs.

» La maison d'Autriche veut détruire votre indépendance et vous incorporer à ses vastes états. Vous serez fidèles à la mémoire de vos ancêtres, qui, quelquefois opprimés, ne fu

rent jamais abattus, et conservèrent toujours cette indépendance, cette existence politique qui sont les premiers biens des nations, comme la fidélité à la maison Palatine est le premier de vos devoirs.

» En bon allié de votre souverain, j'ai été touché des marques d'amour que vous lui avez données dans cette circonstance importante. Je connais votre bravoure; je me flatte qu'après la première bataille je pourrai dire à votre prince et à mon peuple que vous êtes dignes de combattre dans les rangs de la grande armée. »

LETTRE de l'empereur aux préfet et maires de la ville

de Paris.

« Messieurs les préfet et maires de notre bonne ville de Paris, nos troupes ayant, au combat de Wertingen, défait douze bataillons de grenadiers, l'élite de l'armée autrichienne, toute son artillerie étant restée en notre pouvoir, ainsi qu'un grand nombre de prisonniers et huit drapeaux, nous avons résolu de faire présent des drapeaux à notre bonne ville de Paris, et de deux pièces de canon pour rester à l'Hôtel-deVille. Nous désirons que notre bonne ville de Paris voie dans ce ressouvenir et dans ce cadeau, qui lui sera d'autant plus précieux que c'est son gouverneur (Murat) qui commandait nos troupes au combat de Wertingen, l'amour que nous lui portons. Cette lettre n'étant à d'autre fin, nous prions Dieu qu'il vous tienne en sa sainte et digne garde.

» Au quartier impérial d'Augsbourg, ce 18 vendémiaire an 14. Signé NAPOLÉON. (1)

L'armée avait pour chefs, sous les ordres de l'empereur, les généraux Bernadotte, Murat, Ney, Soult, Lannes, Augereau, Vandamme, Mortier, Davoust, Marmont, Bessières, Oudinot, etc. Massena commandait en Italic. Sur tous les points on comptait de rapides victoires. Le cinquième bulletin de la grande armée, daté du 20 vendémiaire, annonçait « qu'avant quinze jours les destins de » la campagne et des armées autrichiennes et russes seraient fixés. L'empereur avait fait former en cercle chaque régiment pour leur » parler de la situation de l'ennemi, de l'imminence d'une grande >> bataille, et de la confiance qu'il avait en eux. Cette harangue eut » lieu pendant un temps affreux; il tombait une neige abondante; » la troupe avait de la boue jusqu'aux genoux, et éprouvait un froid

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(1) A la réception de cette lettre, une députation des maires de Paris se rendit auprès de l'empereur, qui la reçut à Schoenbrunn.

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» vif. Mais les paroles de l'empereur étaient de flammes; en l'écou» tant le soldat oubliait ses fatigues et ses privations, et était impa» tient de voir arriver l'heure du combat. » Bientôt elle sonna, même temps que l'heure du triomphe. Le sixième bulletin restera comme un document historique : il est compris dans la séance sénatoriale qui suit.

SÉNAT. Message de l'empereur; envoi de quarante drapeaux. Séance du 2 brumaire an 14 (24 octobre 1805), présidée par le prince Joseph, grand électeur.

DISCOURS du président.

« Sénateurs, au milieu de ses triomphes, Sa Majesté l'empereur a éprouvé le besoin de donner au Sénat une nouvelle marque de son affection; c'est l'objet du message que Sa Majesté m'ordonne de mettre sous vos yeux.

» Vous verrez, messieurs, qu'il tarde à Sa Majesté que la jeunesse française puisse prendre part aux nouveaux succès qui l'attendent.

» Mais déjà nos jeunes conscrits sont en mouvement; tous partent ou sont partis.

» Toutes les familles savent que lorsque leurs enfans se rendent à la grande armée ils vont se ranger sous l'égide du père commun des Français, plus avare encore de leur sang qu'avide de leur gloire.

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L'empereur et son armée ont dépassé les espérances de la nation je suis heureux de pouvoir vous dire qu'elle répond ⚫ d'une manière digne d'elle à l'appel glorieux de son chef. »

MESSAGE de l'empereur.

« Sénateurs, je vous envoie quarante drapeaux conquis par mon armée dans les différens combats qui ont eu lieu depuis celui de Wertingen. C'est un hommage que moi et mon armée faisons aux sages de l'Empire; c'est un présent que des enfans font à leurs pères. Sénateurs, voyez-y une preuve de ma satisfaction pour la manière dont vous m'avez constamment secondé dans les affaires les plus importantes de l'Empire. Et vous, Français, faites marcher vos frères; faites qu'ils accourent combattre à nos côtés, afin que, sans effusion de sang, sans efforts, nous puissions repousser loin de nous toutes les armées que forme l'or de l'Angleterre, et confondre les auxiliaires de l'oppresseur des mers! Sénateurs, il n'y a pas encore un mois que je vous ai dit que votre empereur et son armée feraient leur devoir; il me tarde de pouvoir dire que mon peuple a

fait le sien. Depuis mon entrée en campagne j'ai dispersé une armée de cent mille hommes; j'en ai fait près de la moitié prisonnière; le reste est tué, blessé ou déserté, et réduit à la plus grande consternation. Ces succès éclatans je les dois à l'amour de mes soldats, à leur constance à supporter la fatigue. Je n'ai pas perdu quinze cents hommes, tués ou blessés. Sénateurs, le premier objet de la guerre est déjà rempli; l'électeur de Bavière est rétabli sur son trône. Les injustes agresseurs ont été frappés comme de la foudre, et, avec l'aide de Dieu, j'espère, dans un court espace de temps, triompher de mes autres ennemis.

» De mon camp impérial d'Elchingen, le 26 vendémiaire an 14. Signé NAPOLÉON. »

SIXIÈME BULLETIN de la grande armée. (Lu par le prince Joseph.)

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Elchingen, le 26 vendémiaire an 14. (18 octobre 1805.)

« La journée d'Ulm a été une des plus belles journées de l'histoire de France. La capitulation de la place est ci-jointe, ainsi que l'état des régimens qui y sont enfermés. L'empereur eût pu l'enlever d'assaut ; mais vingt mille hommes, défendus par des ouvrages et par des fossés pleins d'eau, eussent opposé de la résistance, et le vif désir de S. M. était d'épargner le sang. Le général Mack, général en chef de l'armée, était dans la ville. C'est la destinée des généraux opposés à l'empereur d'être pris dans des places on se souvient qu'après les belles manœuvres de la Brenta le vieux feld maréchal Wurmser fut fait prisonnier dans Mantoue; Mélas le fut dans Alexandrie; Mack l'est dans Ulm.

» L'armée autrichienne était une des plus belles qu'ait eue l'Autriche elle se composait de quatorze régimens d'infanterie formant l'armée dite de Bavière, de treize régimens de l'armée du Tyrol et de cinq régimens venus en poste d'Ita lie, faisant trente-deux régimens d'infanterie, et de quinze régimens de cavalerie.

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L'empereur avait placé l'armée du prince Ferdinand dans la même situation où il plaça celle de Mélas. Après avoir hésité longtemps, Mélas prit la noble résolution de passer sur corps de l'armée française; ce qui donna lieu à la bataille de Marengo Mack a pris un autre parti. Ulm est l'aboutissant d'un grand nombre de routes; il a conçu le projet de faire échapper ses divisions par chacune de ces routes, et de les réunir en Tyrol et en Bohême. Les divisions Hohenzollern

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et Werneck ont débouché par Heydenheim; une petite division a débouché par Memmingen. Mais l'empereur, dès le 20, accourut d'Augsbourg devant Ulm, déconcerta sur le champ les projets de l'ennemi, et fit enlever le pont et la position d'Elchingen, ce qui rémédia à tout.

» Le maréchal Soult, après avoir pris Memmingen, s'était mis à la poursuite des autres colonnes. Enfin il ne restait plus au prince Ferdinand d'autre ressource que de se laisser enfermer dans Ulm, ou d'essayer par des sentiers de rejoindre la division de Hohenzollern : ce prince a pris ce dernier parti; il s'est rendu à Aalen avec quatre escadrons de cavalerie.

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Cependant le prince Murat était à la poursuite du prince Ferdinand. La division, Werneck a voulu l'arrêter à Langenau; il lui a fait trois mille prisonniers, dont un officier général, et lui a enlevé deux drapeaux. Tandis qu'il manœusa droite à Heydenheim, le maréchal Lannes marchait par Aalen et Nordlingen. La marche de la division ennemie était embarrassée par cinq cents charriots, et affaiblie par le combat de Langenau. A ce combat le prince Murat a été très satisfait du général Klein. Le vingtième régiment de dragons, le neuvièine d'infanterie légère, et les chasseurs. de la garde impériale, se sont particulièrement distingués. L'aide de camp Brunet a montré beaucoup de bravoure.

>> Ce combat n'a point retardé la marche du prince Murat. Il s'est porté rapidement sur Neresheim, et le 25, à cinq heures du soir, il est arrivé devant cette position. La division de dragons du général Klein a chargé l'ennemi. Deux drapeaux, un officier général et mille hommes ont été de nouveau pris au combat de Neresheim. Le prince Ferdinand et sept de ses généraux n'ont eu que le temps de monter à cheval on a trouvé leur dîner servi. Depuis deux jours ils n'ont aucun point pour se reposer. Il paraît que le prince Ferdinand ne pourra se soustraire à l'armée française qu'en se déguisant ou en s'enfuyant avec quelques escadrons par quelque route détournée d'Allemagne.

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L'empereur traversant une foule de prisonniers ennemis, un colonel autrichien témoignait son étonnement de voir l'empereur des Français trempé, couvert de boue, autant et plus fatigué que le dernier tambour de l'armée. Un de ses aides de camp lui ayant expliqué ce que disait l'officier autrichien, l'empereur lui fit répondre Votre maître a voulu me faire ressouvenir que j'étais un soldat; j'espère qu'il conviendra que le trône et la pourpre impériale ne m'ont pas fait oublier mon premier métier.

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» Le spectacle que l'armée offrait dans la journée du 23

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