Page images
PDF
EPUB

de plus de lui quelques opuscules sur des matières économiques.

DANEMARK. —L'histoire primitive des Danois, de même que celle de toutes les populations scandinaves, malgré l'intérêt qu'elle inspire et les traditions qui s'y rattachent, offre trop d'obscurité pour que nous devions nous y arrêter ici. Ce n'est qu'au temps de Charlemagne et à la suite des rapports qui s'établirent entre ce grand empereur et les tribus sauvages du Nord que cette histoire acquiert quelque certitude. A l'époque de Charlemagne, on voit régner dans le Jutland un prince puissant, Godefroi, qui cependant est obligé de reconnaître la suzeraineté de la France. Après lui, et comme un véritable fondateur danois, apparaît Gorm l'ancien, prince de la Seelande, et qui soumet le Jutland, le Sleswig et toutes les îles (863). Les Danois formaient à cette époque la partie la plus redoutable de ces envahisseurs barbares qui, sous le nom de Normands en France, sous leur véritable nom de Danois en Angleterre, venaient par mer porter la désolation dans les contrées civilisées et, ne se contentant pas de ravager les côtes, remontaient les fleuves et jetaient la terreur au fond des provinces les plus reculées. La religion chrétienne pouvait seule transformer ces peuples, les asseoir sur le sol et les rattacher à la civilisation moderne. L'œuvre de la conversion entreprise sous Louis le Débonnaire par saint Ansgar, n'avança que lentement. Ĉependant, vers 972, le roi Harold II accepta la foi chrétienne, qui devint définitivement la religion dominante sous Kanut le Grand, Ce grand prince, qui régna de 1015 à 1032, étendit au loin la gloire du Danemark. Il conquit l'Angleterre et la Norwége, et se rendit célèbre non-seulement par la puissance de ses armes, mais aussi par les efforts qu'il fit pour donner à ses peuples des habitudes sédentaires, et pour mettre en honneur l'agriculture et les arts de la paix. Son empire fut dissous après sa mort. Le fils de sa sœur, Suenon Magnus Estritson fouda en 1047 la dynastie royale du Danemark, qui régna jusqu'au milieu du xv siè

cle.

Jusque-là, l'organisation du Danemark avait peu différé de celle des tribus barbares de la Germanie. Le peuple était divisé en classes, en tribus presque indépendantes les unes des autres, et ne formant pour ainsi dire qu'une confédération. Chaque tribu avait son chef ou son roi propre. Le roi supérieur ne possédait qu'une autorité morale due en partie à la possession du sanctuaire le plus vénéré. Peu à peu, cependant, la force prépondérante qu'acquit le roi supérieur, puis les mœurs plus sédenlaires qui suivirent l'introduction du Christianisme donnèrent plus de consistance à la population et plus d'influence au pouvoir. Déjà sous Gorm l'Ancien l'indépendance des clans primitifs avait subi de fortes atteintes. Sous Kanut le Grand, la société prit un aspect nouveau. Déjà, autérieure

ment, la propriété privée avait été introduite, et la masse de la nation se composait de guerriers propriétaires qui faisaient cultiver le sol par des esclaves et diverses classes de serfs. Kanut imita à cet égard les institutions qu'il avait trouvées établies en Angleterre, coutumes qui étaient celles du système bénéficiaire (voy. FEODalité), qui alors devenait général en Europe. Il concéda à titre viager des parties du domaine public à ses hommes d'armes, en leur accordant divers priviléges; et ainsi se constitua la première différence entre les simples propriétaires et ceux qui devaient former plus tard l'aristocratie danoise.

Les deux premiers siècles de la dynastie des Estritites se passèrent dans les troubles et les agitations. De seize rois qui régnèrent pendant ces deux premiers siècles, neuf périrent de mort violente, et les règnes les plus glorieux, ceux de Waldemar I et de Waldemar II, ne laissèrent aucun fruit. Waldemar I fit de grandes conquêtes; il soumit l'ile de Rugen et une partie de la Poméranie avec la ville de Stettin. Son fils Kanut étendit ses possessions en Pomeranie et y ajouta le Mecklenbourg et le Holstein. Enfin, sous Waldemar II, fils de Kanut, toute la côte aujourd'hui allemande et russe de la Baltique, depuis le Holstein jusqu'à l'Esthonie appartint au Dauemark. Mais cette grandeur disparut du vivant même de Waldemar II. En 1223 le comte de Schwerin parvint à s'emparer de la personne de ce prince, et à le retenir prisonnier. Toutes les provinces soumises se soulevèrent aussitôt. Le comte Adol, he de Schaueubourg se rendit indépendant dans le Holstein, les princes de Mecklenbourg et de Pomeranie secouèrent le joug; les villes de Hambourg et de Lubeck, etc., se constituèrent en villes libres, et quand Waldemar, après avoir recouvré sa liberté, voulut reconquérir ces possessions par les armes, la défaite de Bornhowède scella définitivement l'indépendance des provinces émancipées.

Déjà des modifications importantes s'étaient opérées dans l'organisation sociale. L'introduction de la chevalerie et de l'organisation militaire de l'Europe centrale, organisation en vertu de laquelle la force des armées résidait dans la cavalerie, tandis que l'infanterie se trouvait reléguée au dernier rang, avait achevé de séparer l'aucien corps des propriétaires guerriers en deux classes distinctes: celle des nobles qui formaient presque exclusivement l'armée, et celle des paysans presque uniquement voués à l'agriculture. D'autres modifications introduites dans l'organisation judiciaire avaient conduit au même résultat. Au point de vue judiciaire, le pays était divisé en harreds, et les harreds en quartiers. Chaque harred, de même que chaque quartier, avait son tribunal (ding ou thing), devant lequel se débattaient les causes de tous les habi-tants du district. Ce fut bientôt l'une des prérogatives des serviteurs et des officiers attachés directement à la personne royale

d'être exemptés de cette juridiction ordinaire et de relever de tribunaux spéciaux. Le clergé également était exempté de la juridiction ordinaire, et les évêques formèrent bientôt un corps puissant, à la tête duquel se trouvait le primat du Nord, l'archevêque de Lund. Comme il arriva souvent à cette époque dans plusieurs contrées de l'Europe, ce furent surtout les familles aristocratiques qui surent s'emparer des fonctions épiscopales, et malgré les efforts de la papauté, les prélats attachèrent souvent plus d'importance à leurs droits temporels qu'à leurs devoirs ecclé siastiques. Les grands propriétaires et les officiers de la cour joinis aux évêques formèrent ainsi une aristocratie puissante qui disposa longtemps de la couronne toujours élective dans la famille des Estritites. De même que dans les autres Etats de l'Europe, les grands du royaume avec les évêques et les députés de tous les guerriers libres se réunissaient annuellement auprès du roi el formaient la diète ou le thing du royaume. Des députés des villes furent admis dans cette diete, dès le milieu du XIIe siècle. Mais, en même temps, s'établit une séparation dans la classe auparavant une de propriétaires libres. Les uns, ceux qui possédaient des fiefs et faisaient le service des chevaliers, formèrent avec les officiers royaux l'ordre de la noblesse; les autres qui passaient à l'état de simples cultivateurs constituèrent l'ordre des paysans. Comme dans les autres Etats scandinaves, la nation se subdivisa donc en quatre ordres représentés dès la fin du x siècle à la diète générale: le clergé, la noblesse, les villes, les paysans.

Les capitulations, que bientôt la noblesse imposa aux rois lors de leur avénement au trône, ne tardèrent pas à donner une nouvelle force à l'aristocratie. La première de ces capitulations, de 1282, ne fit que constater des droits déjà acquis. Mais déjà, dans celle que fut obligé de souscrire le roi Christophe II, on voit que la noblesse tend à s'emparer de tout le pouvoir et de tous les revenus. Sous ce prince d'ailleurs la Suède et les autres voisins du Danemark s'emparèrent des plus belles provinces. L'Etat se releva sous le fils de Christophe Waldemar III (1340). Non-seulement les provinces perdues furent reconquises, mais des possessions suédoises furent rattachées au Danemark. Avec Waldemar s'éteignit la branche mâle des Estritites; mais sa fille Marguerite, mariée au roi de Norwége Hakon VII réunit les deux couronnes de Norwége et de Danemark, et fit tant que les Suédois élurent pour roi son fils adoptif, Eric, duc de Poméranie.

La célèbre Union de Colmar fut le résultat des efforts de Marguerite. Cet acte stipulait trois points principaux: 1° Les trois royaumes de Danemark, de Suède et de Norwége ne devaient avoir qu'un seul roi qui serait élu tour à tour dans les trois royaumes par quarante électeurs des trois royaumes; savoir trois prélats, un bailli, un maréchal,

quelques gentilshommes, les bourgmestres des principales villes et deux des plus anciens paysans de chaque juridiction, sans que la dignité royale pût être affectée à aucun de préférence aux autres, à moins que le prince n'eût des enfants ou parents que les trois Etats assemblés jugeassent dignes de lui succéder. 1° Le souverain était tenu de partager tour à tour sa résidence dans les trois royaumes et de consommer dans chacun le revenu de chaque couronne, sans en pouvoir transporter ailleurs les deniers ni les employer à autre chose qu'à l'utilité particulière de l'Etat dont ils seraient tirés; 2° chaque royaume devait conserver sa diète, ses lois, ses priviléges, et les officiers, les magistrats, les généraux devaient être pris dans chaque pays, sans qu'il pût être permis au roi de recevoir d'étrangers ni de sujets de ses autres royaumes qui seraient réputés étrangers dans le gouvernement de l'Etat où ils ne seraient pas nés. Cette union fut conclue le 12 juillet 1397. Elle dura au milieu des troubles et des guerres civiles jusqu'en 1520, grâce aux efforts du clergé et à la séparation administrative qui mettait le gouvernement de chaque royaume entre les mains de ministres nationaux. L'histoire de la rupture qui eut lieu sous Gustave Wasa est bien connue, et nous n'avons pas besoin de la raconter ici. A Eric de Pomeranie avait succédé Christophe de Bavièr; puis le comte Christian d'Oldenbourg, souche de la maison qui règne encore aujourd'hui, avait été élu en 1448. Ce fut sous son petit-fils Christian II, qu'éclata l'insurrection suédoise, mais la Norwége ne cessa, à partir de ce moment jusqu'en 1815, de faire partie de la monarchie danoise.

Le tyrannique Christian II songea à renverser le pouvoir de l'aristocratie, dont les priviléges avaient de plus en plus grandi par les capitulations imposées à ses prédécesseurs. Il crut parvenir à son but en introduisant le protestantisme en Danemark et en exerçant le despotisme le plus odieux. Il fut chassé du trône et eut pour successeur Frédéric 1, son oncle, duc de Schleswig et de Holstein, qui dans sa capitulation fut obligé de reconnaître de nouveau tous les droits que Christian avait arrachés à l'aristocratie. Sous ce prince et son fils et successeur Christian III, le luthérianisme fut définitivement introduit en Danemark. Le clergé fut dépouillé de ses biens, surtout au profit de la noblesse. La capitulation imposée à Frédéric II, qui succéda à Christian Il fut plus dure encore que celle à laquelle avait été soumis son prédécesseur. Il fut défendu au roi de conférer la noblesse à qui que ce fût; l'immunité d'impôts et de dîmes fut stipulée pour tous les biens nobles; les enfants nés d'un noble et d'une femme de classe bourgeoise devaient être privés de tous droits. En même temps furent restreintes considérablement les libertés commerciales des villes marchandes de la Norwége,

Nous ne parlerons pas des guerres généralement peu heureuses auxquelles prit part

le Danemark sous les longs règnes de Christian IV et de Frédéric III (voy. EUROPE). Sous le premier de ces princes les Danois formè rent leurs premiers établissements dans les Indes Orientales, et constituèrent plusieurs compagnies de commerce. Sous le second il s'accomplit une révolution fondamentale dans la constitution danoise.

Lors de son avénement au trône en 1648, Frédéric III avait signé une capitulation en vertu de laquelle les prérogatives de l'aristocratie avaient encore été augmentées et qui réduisait presque à rien les pouvoirs de la royauté; la nomination à toutes les fonctions importantes de l'Etat étant dévolue au conseil impérial de la noblesse. En 1660, l'année même où fut terminée à Roscoë une guerre avec la Suède, des nécessités financières avaient provoqué la réunion de la diète, et dès les premières séances il s'éleva des dissensions violentes entre les ordres privilégiés et les ordres non privilégiés à l'occasion de projets de lois sur les impôts. La couronne dont les intérêts étaient gérés par un ministre habile, le secrétaire du cabinet Christophe Gabel, sut alors nouer des négociations heureuses avec le clergé et la bourgeoisie, et il en résulta un acte qui, dépassant de beaucoup l'intention de ses auteurs, établit la monarchie la plus absolue en Danemark. Par une décision du 16 octobre 1660, la diète statua que la couronne serait héréditaire dans la descendance mâle et féminine de Frédéric III, que les capitulations consenties jusque-là seraient abolies, et qu'on n'en établirait pas de nouvelles. Mais l'acte même, qui fut rédigé en vertu de ces décisions (10 janvier 1661), les étendit démesurément, et la loi royale du 14 novembre 1665, et publiée seulement en 1670, lors de l'avènement du nouveau roi Christian V, alla plus loin encore. Cette loi contenait quarante articles dont voici la substance:

1 Frédéric II recommande particulièrement à ses enfants et à toute sa postérité le culte protestant conforme à la confession d'Augsbourg.

2o Le roi de Danemark et de Norwége sera désormais réputé par tous ses sujets indépendant sur la terre; il sera au-dessus de toutes les lois humaines et ne reconnaissant de puissance au-dessus de la sienne que celle de Dieu.

3° A lui appartiendra l'autorité de faire, de changer et de révoquer les lois aussi bien que d'en disposer comme il le jugera convenable.

4 Les charges, les offices, les emplois seront remplis de l'autorité absolue du roi.

5° Il aura la puissance de faire la paix et la guerre, de conclure des alliances et d'imposer des taxes.

6° exercera une autorité absolue sur les affaires de l'Eglise et sur toutes les assemblées religieuses.

7° Tous les actes qui ont rapport au gouvernement seront expédiés seulement au nom du roi, qui lorsqu'il sera d'âge com

pétent, les signera de sa propre main. 8° Aussitôt que le roi sera entré dans sa quatorzième année, il se déclarera majeur. 9° La tutelle du roi mineur sera réglée par le dernier testament de son prédécesseur. Mais si le roi décédé n'y a pas pourvu et que la reine sa veuve lui ait survécu, elle sera régente du jeune roi, son fils, et sera assistée de sept des principaux conseillers du roi qui administreront le gouvernement entre eux. Tout y sera décidé à la majorité des suffrages, la reine ayant deux voix et chacun des sept conseillers une. Toutes les dépêches et ordonnances seront expédiées au nom du roi et signées par la reine et les sept conseillers.

10° Si la reine est morte ou remariée et que le premier prince du sang ait atteint sa dix-huitième année et puisse toujours demeurer dans le royaume, ce prince sera ré÷ gent et aura deux voix.

11° Si le prince du sang n'est pas dans sa dix-huitième année, les sept principaux conseillers du roi administreront la régence et n'auront chacun qu'une voix et une autorité égale.

12° Si l'un de ces sept conseillers meurt ou, si par quelque accident, il est rendu incapable de sa place, un autre lui sera substitué.

13° Les sept régents ou gardiens prêterout serment d'être fidèles au roi et d'employer tous leurs soins à conserver le pouvoir absolu dans toute sa vigueur.

14 Ils feront un inventaire exact de tous les effets du roi, tant sur la mer que sur la terre, de tous ses revenus et de toutes ses dépenses, afin qu'ils puissent dans la suite rendre au roi un bon compte de leur administration ou être punis pour avoir prévariqué.

15 Dans l'instant qu'un roi mourra, le prince du sang le plus proche sera roi sans aucune formalité.

16° Le roi sera oint solennellement. 17° 1! ne fera de serment d'aucune espèce à ses sujets ni verbalement ui par écrit.

18 Il peut se faire oindre même pendant sa minorité et règle le cérémonial de son onction suivant les circonstances.

19° Frédéric IIl veut que ses royaumes de Danemark et de Norwége avec toutes les provinces, fles, seigneuries et forteresses, joyaux, argent comptant, magasins militaires et généralement tous les autres biens qu'il possédait ou que ses successeurs pourraient acquérir par la suite, demeurent indivis dans la possession d'un seul roi.

20° 11 veut que ses autres enfants se contentent de l'espérance de régner quand leur tour viendra, n'aient qu'un entretien honorable en argent ou en terres dont ils toucheront le revenu, mais dont la propriété demeurera au roi. Le même règlement est fait pour l'entretien de la reine douairière.

21 Aucun prince du sang ne doit se marier, ni sortir du royaume, ni s'engager au service d'un prince étranger sans la permission du roi.

22 Les filles et les sœurs du roi seront entretenues convenablement jusqu'à ce qu'elles se marient avec son approbation. Le roi leur donnera alors la dot qu'il trouvera hon, et elles déclareront en même temps, par un écrit signé d'elles, qu'elles n'en attendent pas davantage et se bornent au droit de parvenir au trône le cas échéant.

23 Si à la mort du roi le plus proche héritier de la couronne est hors du Danemark, il y reviendra immédiatement prendre les rênes du gouvernement; mais s'il ne s'y rend point dans l'espace de trois mois, à compter du jour qu'il aura appris la mort de son prédécesseur, et qu'il ne soit ni dans le cas d'une maladie, ni dans un autre légitime empêchement, alors le plus proche héritier apparent sera déclaré vice-gérant jusqu'à l'arrivée du roi dans ses Etats héréditaires, conformément à ce que la présente loi royale a décidé pour les cas de minorité el de régence.

24 Les princes et les princesses auront rang immédiatement après le roi et la reine et entre eux suivant la proximité de leur ligne et la succession de la couronne.

25 Ils ne prêteront jamais de serment devant aucun juge, mais devant le roi seu lement ou devant un commissaire délégué par le roi lui-même.

26° Les rois héréditaires de Danemark et de Norwége jouiront d'un pouvoir non circonscrit ni limité, dans le sens le plus fort qu'aucun autre roi chrétien héréditaire et absolu puisse être dit en jouir. Cela doit être entendu aussi des reines lorsque la succession tombera dans la ligne féminine. Les rois qui succéderont à Frédéric III seront exhortés à examiner avec attention la conduite de leurs ministres, relativement à son absolue souveraineté, de manière qu'elle puisse être transmise dans toute sa vigueur. Il vent que quiconque dira ou fera quelque chose pour y donner atteinte soit puni, comme traître à la couronne, de la peine réservée au crime de haute trahison.

27° Aussi longtemps qu'un des héritiers mâles né de légitime mariage sera vivant, aucune femme descendue d'un mâle, ni aucune femme descendue d'une femelle, ne seront appelées à la succession. Aucun prince ni aucune princesse du côté maternel n'y auront droit tant qu'on trouvera un prince et une princesse du côté paternel; de sorte qu'une princesse de la ligne masculine sera préférée à une princesse de la ligne féminine.

28 Lorsque la succession écherra aux princesses du sang, celle qui sera descendue de l'aîné des mâles aura la préférence, et ainsi de suite, aussi longtemps que quelqu'un de la ligue masculine survivra; mais Jorsque la ligne masculine sera entièrement éteinte, les princes et les princesses de la ligne féminine succéderont et le même ordre sera observé, c'est-à-dire que le mâle doit être préféré à la femelle, et l'aîné au cadet.

29 Pour ôter, dit Frédéric, par un exem

[ocr errors]

ple, toute occasion de dispute parmi nos enfants à notre mort, le prince Christian, notre fils aîné, parviendra au trône; et, tant qu'il se trouvera un de ses descendants mâles, quoique lui-même vint à mourir avant nous, ni le prince Georges, ni aucun de sa famille, ni la princesse sa sœur, ni la famille de sa sœur n'auront aucun droit à la cou

ronne.

30 Mais lorsque la ligne de la famille du prince Christian sera entièrement éteinte, la ligne masculine de notre fils, le prince Georges, montera sur le trône, observant les règlements ci-dessus, c'est-à-dire que le male ira devant la femelle et le plus âgé devant le plus jeune, quoique né avant que son père montât sur le trône. S'il plaît à Dieu de nous donner un grand nombre d'enfants, la même règle sera observée entre

eux.

31° Si la ligne masculine vient à manquer, la succession regardera le fils de la fille du dernier roi, si elle en a. Que si elle n'en a point, la succession regardera la fille aînée du roi et de ses descendants l'un après l'autre, ligne après ligne, le mâle toujours préféré à la femelle et le plus âgé au plus jeune.

32° Si le dernier roi ne laisse ni fils ni fille, le plus proche prince du sang succédera au gouvernement.

33° Immédiatement après, la princesse la plus proche parente du roi, dans la ligne masculine, parviendra au trône, et ses descendants y monteront dans l'ordre marqué ci-dessus.

34° Mais si les familles de notre fils s'éteignent entièrement, alors la princesse Anne Sophie et ses héritiers prendront le sceptre de ces royaumes.

35° La fille d'une fille aînée sera préférée au fils d'une plus jeune fille afin que l'ordre. généalogique ne soit pas troublé, que le second succède au premier, le troisième au second, le quatrième au troisième, et ainsi

de suite.

36° Si la succession tombe au fils d'une fille, et qu'il y ait des héritiers mâles, le même ordre doit être observé eu égard à ses descendants, comme il a été prescrit pour notre ligne masculine.

37° Le mari de la reine n'aura point d'autorité dans ces royaumes, quelque puissant prince qu'il puisse être dans son pays; il lui cédera la préséance en toutes choses, et lui obéira comme à la reine souveraine de Danemark et de Norwége.

38° On doit compter les enfants posthumes parmi les princes et les princesses qui ont droit de parvenir à la couronne. Ils succéderont à leur tour comme les autres.

39° Lorsqu'un prince ou une princesse naîtront dans quelqu'une des branches de la famille royale, leurs parents transmettront au roi le nom de ce prince ou de cette princesse avec le jour de cette naissance, et le prieront de leur accorder un acte portant qu'il a été informé de celle naissance. Un

double de cet acte sera gardé soigneusement dans nos archives.

40° Tout ce qui a été dit ici des fils et des filles doit être entendu de ceux qui viennent d'un légitime mariage.

Beaucoup de modifications de détail furent opérées conformément à cette institution dans l'organisation et la constitution intérieures de l'Etat par Christian V. Ce prince créa ure classe de comtes et de barons et fonda l'ordre des chevaliers de Danebrog pour jeter un appât aux ambitieux mécontents. A la mort du dernier comte d'Oldenbourg, les principautés d'Oldenbourg et Delmenhorst échurent au Danemark, mais donnèrent lieu à beaucoup de contestations avec la maison de Gottorp, branche cadette de la maison royale, qui, ainsi que nous le verrons, possédait une partie du Sleswig et du Holstein. A Christian V succédèrent Frédéric IV, Christian VI, Frédéric V, Christian VII. Sous ce dernier fut opérée (à partir de l'année 1766) l'abolition du servage et une modification profonde dans l'état des paysans. Sous ce prince aussi fut conclu un traité avec le prince Paul, fils de Catherine II de Russie, par lequel ce prince, qui était l'héritier de la maison de Gottorp, céda au Danemark tous ses droits sur le Sleswig et le Holstein, en échange des comtés d'Oldenbourg et Delmenhorst (1667). L'élévation et la chute du ministre Struenzée, Ja maladie mentale du roi, l'émancipation de son fils nommé corégent, une tentative de conquête sur la Suède; plus tard, lorsque la révolution française eut éclaté, l'alliance du Danemark avec la France contre les prétentions exorbitantes de l'Angleterre à l'égard des petites puissances maritimes, la destruction de la marine danoise et le bombardement de Copenhague marquèrent la suite de ce règne qui dura jusqu'en 1808. A cette époque le corégent monta sur le trône sous le nom de Frédéric VI. En 1811, le Danemark fut puni de sa fidélité constante à la France, par la perte de la Norwége et de l'île d'Héligoland, en échange desquelles il obtint la Poméranie suédoise avec l'ile de Rugen. Peu après cependant ces dernières provinces furent cédées à la Prusse, pour le duché de Lauenbourg. Le Holstein, pays allemand possédé par la couronne de Danemark, ayant toujours fait partie de l'empire d'Allemagne, fut encore compris dans la confédération germanique, lors de la formation de celle-ci, et le roi de Danemark devint à ce titre membre de cette confédération.

La grande modération que les rois de Danemark avaient montrée dans l'exercice de Jeur pouvoir absolu avait fait tolérer ce pouvoir plus patiemment que dans aucun autre Etat de l'Europe. Cependant après 1815, l'exemple des monarchies constitutionnelles éveilla également l'esprit public en Damark. La royauté prit à cet égard l'initiative des concessions, et en 1831, Frédéric VI institua les états provinciaux qui formèrent une sorte de représentation nationale. Le pays était divisé en quatre provinces dont

chacune nommait des délégués qui se rénnissaient au chef-lieu. Tout projet de loi ayant pour objet un changement dans les droits des personnes ou des propriétés ou dans les impôts on charges publics devait être soumis à leur délibération. Les événements de 1848 devaient transformer ces institutions et faire du Danemark une monarchie représentative proprement dite. Mais cette transformation devait se faire au milieu de complications nées de circonstances particulières, qui, pendant un moment, ont manqué de faire de ce qu'on a appelé la question danoise une question européenne.

Ainsi qu'on l'a vu dans l'exposé rapide que nous avons donné de l'histoire du Danemark, les duchés de Sleswig et de Holstein, formèrent de tous temps des possessions importantes pour les rois de ce pays. Les discussions qui se sont élevées au sujet de ces possessions nous forcent à entrer dans quelques détails sur la nature des droits qu'y prétendent les monarques danois

Le duché de Sleswig, borné au sud par l'Eider, forma dès l'origine la partie la plus méridionale du Danemark. Il fut constitué en duché l'an 1115 par le roi Niels de Danemark, au profit de Canut Laward, neveu de ce prince. Bientôt Canut marchant sur les traces de tous les seigneurs féodaus de l'époque, essaya de se rendre indépendant dans son pays; des luttes éclatèrent mais furent terminées en 1157, par l'avènement du duc de Sleswig au trône de Danemark.

A la même époque, le Holstein formait un comté allemand possédé par la maison de Schauenbourg, sous la souveraineté des ducs de Saxe. Ce comté fut conquis par le Danemark en 1202 et resta au Danemark jusqu'en 1227, année de la bataille de Bornhöved qui brisa la puissance de Waldemar II. Le Sleswig eut alors de nouveau des ducs de la famille royale de Danemark, le Holstein devint indépendant. En 1252, les dues de Sleswig étant mineurs, le Danemark essaya de réunir ce pays à la couronne. Mais Gérard de Schauenbourg, comte de Holstein, allié aux ducs de Sleswig, attaqua les Danois, et après une guerre prolongée, il intervint un traité en vertu duquel les ducs de Sleswig étaient réintégrés dans leurs possessions, et il était stipulé qu'en cas d'extinction de cette maison ducale, la maison de Holstein succéderait dans le duché de Sleswig (1330).

En 1373 en effet, les comtes de Schauenbourg, possesseurs du Holstein, devinrent ducs de Sleswig.

Cette maison s'éteignit en 1459, et le 3 mars 1460, les Etats de Sleswig et de Holstein élurent par duc le roi Chrétien I" de Danemark de la maison d'Oldenbourg. Dans l'acte conclu à ce sujet, il fut stipulé que le roi Chrétien était élu non comme roi de Danemark, mais comme prince du duché de Sieswig et du comté de Holstein, que ce duché et ce comté devaient rester unis, que

« PreviousContinue »