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levées de troupes, étoit certainement difficile à tenir; mais l'Empereur croyoit y avoir fuffifamment pourvu, en ne nommant pour Chefs de l'une & de l'autre armée, que des Officiers d'expérience, qui fçavoient parfaitement la guerre.

Sage Un des grands moyens que le condui-fage Monarque mit encore en œul'Empe- vre durant les troubles de cette reur. année (1673) & des fuivantes,

pour ne recevoir aucun échec confidérable, fut fon application conftante aux affaires, qu'il pouffa jufqu'aux moindres détails; voulant être inftruit de tout, fans ja-mais confondre les objets, & fans paroître rebuté d'un fi long travail. Ceux qui étoient chargés des vivres, lui rendoient compte des foins qu'ils fe donnoient, pour que les places & les camps ne manquaffent de rien. Il ne fe faifoit aucune marche, aucun fourrage aucune entreprise, quelque petite qu'elle fût, dont il ne reçût auparavant le projet, ou dont on ne

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lui fît un rapport exact après l'exécution. Il joignoit quelquefois fes remarques, en forme d'apoftilles, aux lettres de fes Généraux; & ceux-ci à qui il les communiquoit enfuite avec bonté, ont avoué fouvent qu'ils ne pouvoient affez admirer la profonde intelligence de ce jeune Prince, & fa facilité à faifir le vrai.

D'un autre côté, les Chinois venant à comparer cette activité foutenue de l'Empereur régnant avec l'indolence exceffive des derniers Mings, fe voyoient forcés de lui donner toute leur eftimè; & par une gradation ordinairement infaillible, ils paffoient de cette estime à l'attachement le plus fincére pour la perfonne du Souverain. Du moins comprenoientils aifément que fous un Monarque de ce caractère, il n'y avoit pas la moindre apparence de pouvoir chaffer les Mancheoux de la Chine; quelque forte d'ennemis qu'euffent ces Conquérans au dehors de l'Em-pire, ou dans fon fein..

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Sachar Au commencement de l'année Prince 1674, Kanghi en eut effectiveforme ment de très-dangereux que la réune li- volte d'Oufankouei lui fufcita en tre l'Em divers endroits. Le premier dont pereur il découvrit les intrigues, fut un Prince Mongou, nommé Sachar. Ce Tartare fier de fa defcendance, vraie ou fauffe de la famille du célébre Gingiskan, fentit réveiller toute fon ambition, quand il apprit que le Monarque Chinois avoit dégarni de troupes fa Capitale. On lui avoit fait entendre que les neuf portes de cette grande Ville n'étoient gardées que par des enfans, & que le palais même fe trouvoit réduit à un très-petit nombre de défenfeurs. L'occa

fon lui parut belle pour revendiquer en faveur de fa nation un Empire qu'elle avoit autrefois conquis & poffédé durant tant d'années fous la Dynaftie, des Yuen. Plein de ces grandes idées, il s'appliqua d'abord à gagner les -autres Princes Mongoux, fes voifins, dont plufieurs s'engagèrent

avec plaifir à joindre leurs troupes aux fiennes, pour avoir part aux conquêtes qu'il méditoit. L'Empereur averti de bonne heure des projets de ce nouvel ennemi, fentit vivement la grandeur du péril qui le menaçoit; mais il n'en fut point effrayé : du moins ne parut-il point déconcerté dans les mesures qu'il convenoit de prendre. L'effentiel pour lui étoit d'ufer de tant de diligence, que Sachar fût furpris lui-même & écrasé, avant que fes Partifans euffent pu le joindre. Kanghi l'entreprit avec toute l'activité dont il étoit capable, & malgré les contradictions qu'il fallut vaincre, fon deffein s'exécuta comme il le fouhaitoit.

Une armée de Mancheoux fe L'Emformoit justement alors dans le pereur préLeaotong: elle alloit entrer dans vient l'intérieur de la Chine, pour Sachar. prendre fa marche vers le Foukien; mais au premier avis qu'eut l'Empereur des intrigues du Prince Mongou, il changea la deftination

de ces troupes, & réfolut de s'en fervir contre ce Tartare. Le Général qui les commandoit ne fçut rien d'abord de ce changement. Kanghi, fans fe découvrir encore là-deffus, fe contenta de lui marquer l'endroit où il devoit fe rendre inceffamment avec tout fon monde, & y attendre de nouveaux ordres de fa part. Pour être même plus fûr de fon coup, le Monarque ne craignit point de tirer de Pekin la plupart des foldats qui y étoient reftés. Il les fit partir pour la nouvelle armée du Leaoton, qu'ils devoient joindre à l'extrémité du Chanfi.

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Cette jonction faite, un Courier impérial apporta au Général Mancheou l'ordre fuivant : Partez au plutôt pour le pays de Sachar fans perdre le temps à me faire des repréfentations inutiles; je n'en veux écouter aucune: partez, franchiffez tous les obftacles qui arrêteroient tout autre Général que vous. En faisant diligence, vous surprendrez infailliblement l'ennemi. Je veux l'avoir

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