Page images
PDF
EPUB

judiciaire du ressort. Nous verrons plus loin le caractère et les effets de cette surveillance.

Mais l'art. 9 ne les a point compris au nombre de ses officiers et aucune autre disposition de la loi ne leur a attribué, en général, les fonctions de la police judiciaire. Ils la dirigent, ils ne l'exercent pas par eux-mêmes, ils en surveillent et en prescrivent les actes, ils ne les exécutent pas. L'art. 27 porte: « Les procureurs de la République seront tenus, aussitôt que les délits parviendront à leur connaissance, d'en donner avis au procureur général et d'exécuter ses ordres relativement à tous actes de police judiciaire. » Les art. 274 et 275 ajoutent: «Le procureur général, soit d'office, soit par les ordres duministre de la justice, charge le procureur de la République de poursuivre les délits dont il a connaissance. » — « Il reçoit les dénonciations et les plaintes qui lui sont adressées directement, soit par la Cour d'appel, soit par un fonctionnaire public, soit par un simple citoyen, et il en tient registre. Il les transmet au procureur de la République. » Ainsi, le procureur général, qui a la haute direction de l'action publique, trace également à la police judiciaire la voie qu'elle doit suivre, il provoque ses actes, il lui donne l'impulsion qu'il juge convenable; il autorise même, dans certains cas, des opérations que seul il doit permettre'. Mais la loi, en lui conférant les pouvoirs supérieurs, n'a pas pensé qu'il fût nécessaire de lui conférer le pouvoir de faire lui-même les actes qu'il peut provoquer ; il

[merged small][ocr errors]

a le droit de poursuivre, mais il n'a pas le droit de

constater.

La Cour de cassation a consacré le principe de cette distinction dans une espèce où le procureur général, en l'absence de toute ordonnance du président et dans une affaire renvoyée devant les assises, avait ordonné une mesure d'instruction qui consistait à vérifier les lieux où le crime avait été commis. L'arrêt a été cassé: « Attendu que la loi n'attribue au ministère public que le droit de réquisition et que les procureurs généraux ne peuvent, sans violer les règles de la compétence et sans intervertir l'ordre des juridictions, faire aucun acte d'instruction, ni par conséquent déléguer, pour faire ces actes, aucun magistrat ni officier de police judiciaire 1. »

La loi a cependant admis, dans des cas spéciaux, quelques exceptions à cette règle. En matière de poursuite contre les membres de l'ordre judiciaire, le procureur général remplit, dans les cas prévus par l'art. 484, les fonctions de son substitut, et peut être appelé à faire ou à déléguer des actes de police judiciaire. Cet article porte, en effet: « Lorsque des fonctionnaires de la qualité exprimée en l'article précédent, seront prévenus d'avoir commis un crime emportant la peine de forfaiture ou autre plus grave, les fonctions ordinairement dévolues au juge d'instruction et au procureur de la République seront im

Arr. Cass. 27 août 1840 (Bull., n° 859), rapp. M. de

Saint-Marc.

médiatement remplies par le premier président et le procureur général près la Cour d'appel, en ce qui le concerne, ou par tels autres officiers qu'ils auront respectivement et spécialement désignés à cet effet. Jusqu'à cette délégation, et dans le cas où il existerait un corps de délit, il pourra être constaté par tout officier de police judiciaire. » Dans une autre hypothèse, également spéciale, prévue par l'art. 404, le procureur général est encore autorisé « à continuer, hors de son ressort, les visites nécessaires chez les personnes soupçonnées d'avoir fabriqué, introduit, distribué de faux papiers royaux, de faux billets de la banque de France ou des banques de département. >> La même disposition a lieu pour le crime de fausse monnaie eu de contrefaçon du sceau de l'Etat. Enfin, quelques dispositions réglementaires chargent, en général, les procureurs généraux, en même temps que les officiers ordinaires de la police, de constater les contraventions qu'elles ont prévues '. Mais il est évident que ces attributions spéciales, dont les unes sont motivées par des circonstances particulières et les autres par l'ignorance des principes de la législation, n'altèrent sous aucun rapport la règle générale que nous avons posée.

Ord. 16 juillet 1828, sur la police des voitures publiques,

art. 39.

$ 225.

Du concours des Cours, tribunaux et autorités constituées dans les actes de la police judiciaire.

Le Code d'instruction criminelle appelle, dans des cas qu'il a prévus et réglés, les cours, tribunaux et même quelques fonctionnaires publics, à concourir à des actes de police judiciaire. Nous devons, pour compléter notre exposé, rechercher quelles sont les autorités désignées par la loi, dans quels cas elles peuvent agir et à quels actes elles peuvent procéder.

Ce concours est permanent ou purement accidentel.

Les cours d'appel apportent à la police judiciaire un concours permanent. En effet aux termes de l'art. 9, la police judiciaire est exercée sous leur autorité. Elles sont donc investies d'un pouvoir qui peut continuellement s'exercer et qui n'est pas limité à certains actes et à certaines affaires.

Quel est ce pouvoir? La loi, en plaçant la police judiciaire sous l'autorité des Cours d'appel, n'a point défini cette autorité. Il faut donc recourir, pour expliquer le sens de cette attribution, aux dispositions de la loi qui établissent les attributions générales des Cours et réglent les cas où elles peuvent intervenir dans les informations criminelles. L'art. 235

[ocr errors]

Voy., sur ce point, notre tome II, p. 152 et 285.

du C. d'inst. crim. dispose qu'elles peuvent, dans toutes les affaires et d'office, soit qu'il y ait ou non une instruction commencée par les premiers juges, ordonner des poursuites et faire apporter les pièces, informer ou faire informer; et l'art. 11 de la loi du 20 avril 1810 leur donne le pouvoir d'entendre, chambres assemblées, les dénonciations de crimes et délits qui leur sont faites par un de leurs membres, mander le procureur général pour lui enjoindre de poursuivre, ou pour entendre le compte qu'il leur rendra des poursuites commencées. Il suit de ces textes que les Cours ont le pouvoir non-seulement de se faire rendre compte des poursuites commencées, mais d'ordonner des poursuites nouvelles, et par conséquent de provoquer des actes de police judiciaire, soit à l'égard de faits qui ont déjà été l'objet d'une information, soit à l'égard de faits nouveaux. Elles peuvent donc signaler par leurs arrêts, et par cela seul qu'elles ordonnent tels ou tels actes, la négligence ou l'impéritie de la police judiciaire, et c'est ainsi qu'elles exercent leur autorité. Mais, nous l'avons déjà dit ', elles n'appliquent cette autorité qu'aux actes, elles ne l'étendent pas aux agents; elles se bornent à rechercher si, dans les affaires qu'elles instruisent ou dans les procédures qui leur sont soumises, la police judiciaire a suffisamment éclairé l'information ou si elle a tout à fait mécon⚫ nu ses devoirs. Ainsi leur pouvoir exclusivement judiciaire ne s'étend ni sur l'administration de la

Voy., suprà, notre § 212, p. 66.

« PreviousContinue »