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ce tableau aussi parfait et aussi exact qu'il est permis de le désirer, cette exploration pourra du moins servir d'aperçu sommaire et d'indications utiles pour le plus grand développement de notre commerce maritime dans cette partie du Nouveau Monde.

Nous nous trouvons heureux, d'ailleurs, du retard qu'a éprouvé la publication de ce volume, puisqu'il nous a mis à lieu de pouvoir combattre les principes de l'arrêt qui vient d'échapper aux lumières de la Cour suprême, sur l'application des articles 216 et 234 du Code de commerce. Si jamais une telle jurisprudence pouvait triompher, ce serait, selon nous, le coup le plus mortel porté à nos armemens commerciaux, à nos expéditions lointaines. (Voyez l'addition à la fin de ce volume, pag. 650).

Enfin, comme dans cet ouvrage nous n'avons eu d'autre but que de mettre Émérigon en harmonie avec le nouveau Code de commerce et la jurisprudence des Cours, nous n'avons pu nous occuper d'une espèce d'assurance inconnue au tems où écrivait ce célèbre jurisconsulte, et même avant la promulgation de la loi nouvelle. Nous voulons parler des assurances mutuelles, dont le systême, pris dans les usages de nos voisins, a été appliqué à des choses étrangères à notre sujet, comme aux incendies, etc. Les principes qui doivent régir cette matière neuve et importante sont de nature à être examinés dans un traité particulier ; mais, en attendant, voyez les Bulletins des lois, 1818, no. 229; 1819, no. 299; 1821, no. 482, et 1822, no. 529.

Nous observerons cependant ici que les compagnies d'as

surances mutuelles sur les incendies ne sauraient être regardées comme des sociétés de commerce, justiciables des tribunaux qui portent cette qualification. Ainsi jugé par arrêt de la Cour de Douai, du 4 décembre 1820, rapporté par Laporte, tom. 21, seconde partie, pag. 86, et par arrêt de la Cour de Rouen, du 9 octobre 1820, Sirey, 1822, seconde partie, pag. 225. D'abord, dans ces sortes de contrats, il ne s'agit, en général, d'aucune spéculation de bénéfices; mais seulement d'une diminution de perte. Mais quand l'assurance contre l'incendie serait à prime, elle ne pourrait pas plus, selon nous, être de la compétence des tribunaux de commerce, malgré la décision de la Cour royale de Paris, du 23 juin 1825, Dalloz, 1825, seconde partie, pag. 216, laquelle paraît avoir jugé la question par la question même.

En effet, quoique les assurances à prime sur l'incendie aient bien de l'analogie avec les contrats d'assurances maritimes dont parle le Code de commerce, cependant elles ne sont pas textuellement comprises dans l'art. 633. Or, les attributions de compétence étant éminemment d'ordre public, ne peuvent être réglées que par le texte formel de la loi. L'analogie plus ou moins exacte d'un cas prévu avec un cas qui ne l'est point, ne peut jamais attribuer à un tribunal de commerce, qui est une jurisdiction d'exception, une matière que la loi n'a point placée formellement dans ses attributions. C'est une lacune peut-être dans la loi, qui demande à être comblée par une loi précise; mais toutes les fois que la loi n'a pas décidé la compétence, le droit commun ramène les parties devant les juges naturels. C'est une con

séquence nécessaire du principe qu'on ne peut introduire aucune exception qui n'est pas positivement établie par la loi. Ainsi, les assurances mutuelles contre l'incendie, même à prime, ne peuvent être regardées que comme des sociétés purement civiles, de la compétence des tribunaux ordinaires.-(Voyez d'ailleurs les judicieuses observations de M. Dalloz, dans son excellent Recueil de jurisprudence générale du royaume, tom. 2, pag. 740, aux notes).

DES ASSURANCES.

SUITE DU CHAPITRE XII.

DES RISQUES MARITIMES.

SECTION XLIV.

Obligation des assureurs au sujet des avaries.

L'ART. 26, titre des assurances, met aux risques des assureurs toutes pertes et dommages qui arriveront sur mer par le jet; ce qui comprend la perte des effets assurés, s'ils sont jetés, ou la contribution à laquelle les effets sauvés sont soumis à cause du jet. Pothier, n°. 52. Marquardus, lib. 2, cap. 13, n°. 55. D'après le principe établi par ce même art. 26, les assureurs répondent de toute autre avarie qui procède de fortune de mer. Pothier, no. 115, titre des assurances. Valin, art. 1, titre des avaries. Targa, cap. 60. Guidon de la mer, ch. 5, art. 5 et 25. Roccus, not. 34 et 70. Casaregis, disc. 1, no. 119 et 140; disc. 3, no. 2; disc. 45, n°. 15.

$1. pondent du jet et

Les assureurs ré

autres avaries.

Pourvu que l'accident soit arrivé par

Mais si les effets assurés qui étaient sur le tillac sont jetés, la contribution ne pourra être demandée, art. 13, titre du jet, et les assureurs n'en répon- fortune de mer. dront pas.

Il en est de même, si les effets jetés avaient été embarqués sans qu'on en eût dressé de connaissement. Art. 12, tit. eod.

TOM. II.

1

$ 2.

L'avarie se régale entre les assureurs et les assurés.

Comment estimer

le dommage,

Vis-à-vis des assureurs, faut-il prendre pour régle la va gement, ou celle du lieu de la decharge?

leur du lieu du char

$ 3.

Les assureurs peu

vent-ils différer tout

Si, par le connaissement, la qualité des marchandises avait été déguisée, les assureurs ne répondraient du jet que relativement à la somme qui serait fixée par le réglement d'avarie grosse. Art. 9 et 10, tit. eod.

En un mot, les assureurs sont en droit d'exciper de la faute de l'assuré, de celle du maître et des mariniers. Suprà, sect. 2 et suivantes.

« L'avarie sera régalée entre les assureurs et les assurés, à proportion de » leurs intérêts. Art. 46, titre des assurances. Guidon de la mer, ch. 5, article 4. Ibig. Cleirac, pag. 253. Cette règle est très-juste, car, par rapport à son découvert, l'assuré est comme assureur à lui-même. Infrà, ch. 17, sect. 12. On ne doit passer en avarie, à la charge des assureurs, que la valeur réelle du dommage souffert; « car l'assurance n'oblige pas les assureurs de faire bon » la valeur donnée au navire ou aux effets indistinctement, mais seulement »'de réparer les pertes et les déchets soufferts par fortune de mer. » Valin, art. 46.

D

D'après le principe rappelé suprà, ch. 9, sect. 5, l'estimation de l'avarie doit se faire entre les assurés et les assureurs, en prenant pour base la valeur des marchandises au tems et lieu du chargement. Valin, art. 47, titre des assurances. Cependant, en matière de jet et de contribution, il est d'usage de dresser le réglement d'avarie à l'égard des assureurs, dans le même goût qu'on le dresse vis-à-vis de l'universalité des consignataires ; et l'on se dirige par la décision de l'art. 6, titre du jet, qui veut que les marchandises jetées et sau» vées soient estimées suivant le prix courant dans le lieu de la décharge du bâ»timent. » En quoi les assureurs ne sont pas lésés, attendu que l'augmentation proportionnelle de valeur que l'on donne aux effets jetés et aux effets sauvés, opère une juste balance.

Și tous les effets assurés avaient été jetés à la mer, l'assuré pourrait en faire abandon aux assureurs, qui seraient obligés de payer la somme assurée, sauf paiement jusqu'à ce à eux d'exercer les actions de l'assuré contre ceux qui sont tenus de la contribuque le réglement d'avarie ait été fait? tion. Pothier, no. 52.

Mais si l'on n'est pas au cas d'abandon, il faut nécessairement attendre que le réglement d'avarie soit fait, pour pouvoir contraindre les assureurs à payer leur contingent.

Le marchand, dont partie des marchandises a été jetée pour le salut commun, doit en réclamer la valeur vis-à-vis de ceux dont les effets ont été sauvés, sauf d'exiger de ses assureurs le contingent de la perte réelle et effective qui reste à son lot : Si assecuratus recuperat pretium rerum jactarum, non potest agere contrà assecuratores; tamen tenentur assecuratores ad reficiendum

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