PROPOSITIONS faites au Tribunat immédiatement après la lecture du message (ci-dessus) des consuls. (Le 21 floréal.) 1o. Par SIMEON. « Je vois dans l'arrêté qui vient de nous être communiqué une mesure digne de l'assentiment le plus exprès du Tribu nat. » Bonaparte a acquis par d'éclatans et d'innombrables services des droits à la reconnaissance nationale. » Le Tribunat a émis le vœu qu'il lui en soit donné des témoignages. » Le Sénat a décerné non ceux que l'opinion publique, dirigée par le sentiment, prononçait, mais ceux qu'il a cru autorisés par ses attributions. >> Bonaparte a pensé que le fardeau d'une élection anticipée, quoique dans l'acte du Sénat, est principalement dans les pouvoirs du peuple, auquel seul il appartient dé le lui imposer; ce n'est que du peuple, comme ce n'est que pour le peuple, qu'il accepterait la prorogation de la suprême magis→ trature. » Alors ses collègues au consulat ont avec raison arrêté que le peuple sera consulté ; ils ont usé de l'initiative qui appartient au gouvernement, et ils ont posé la question telle que l'indique l'opinion générale: Napoléon Bonaparte sera-t-il consul à vie? » Le peuple décidera ; et j'espère qu'il se déterminera moins encore d'après sa reconnaissance que par le besoin qu'il a de repos et de stabilité. » Il est juste que ce peuple, qui s'est levé avec tant de succès contre ses ennemis, puisse, à présent qu'il n'en a plus, se lever à son propre profit pour le plus grand de ses amis et de ses défenseurs; qu'il juge, comme le disait hier un de nos honorables collègues, si son vœu est rempli, ou comment il veut le remplir lui-même. » Je demande « l'impression du message du gouvernement, » et qu'il lui en soit fait un pour le remercier d'avoir pris le moyen le plus convenable et le plus constitutionnel de remplir le vœu que le Tribunat avait émis relativement au pre"mier consul.» (Adopté.) ་་ 2o. Par CHABOT (de l'Allier ). Citoyens collègues, le Tribunat avait émis le vœu qu'il fût donné au général Bonaparte, premier consul de la République, un gage éclatant de la reconnaissance nationale: le Sénat conservateur n'a pas pensé que la Constitution lui permît de remplir dans toute sa latitude ce vœu, qui était aussi dans son cœur. Nous pouvons maintenant, nous devous l'énoncer tout entier devant le peuple français, appelé à le consacrer. » Je demande que « les membres du Tribunat expriment » leur vœu sur la question proposée par l'arrêté du gouverne»ment comme les principales autorités de la République l'ont » exprimé sur la Constitution de l'an 8; qu'en conséquence il » soit ouvert sur le champ, au secrétariat de la commission administrative, un registre sur lequel chaque membre du » Tribunat inscrira son vote, et que le résultat en soit présenté » au gouvernement par une députation. » (Adopté.) >> 3o. Le président. Quel jour le Tribunat véut-il fermer le registre des votes?» Boissy-d'Anglas. « Je demande qu'il reste trois jours ouvert, afin de donner aux membres absens le temps de venir voter. » Gillet-Lajacqueminière. « Les membres de la commission administrative feront prévenir les absens; je demande en conséquence que le registre soit clos demain au soir.» (Adopté.) PROPOSITIONS faites au Corps législatif immédiatement après la lecture du message des consuls du 21 floréal an 10. (Séance du même jour.) 1o. Par RABAUT-POMMIER. Citoyens législateurs, vous méditez en ce moment sur l'arrêté que le gouvernement vient de vous communiquer par un message. Vous vous demandez sans doute si la mesure qu'il ordonne tournera au profit de la République ; vous réfléchissez comme moi sur les conséquences qui pourraient en être le résultat. En effet, c'est vers l'intérêt public que doivent se reporter toutes les pensées du législateur; c'est aussi sous ce rapport que je veux le considérer. » Deux ans et demi de gloire et de bonheur se sont écoulés depuis le 18 brumaire ; et dans ce court intervalle de temps la constante sollicitude du gouvernement s'est portée sur tout ce qui pouvait fermer les plaies du corps social, rétablir l'ordre, maintenir la tranquillité publique, et faire rendre à la grande nation le rang qu'elle doit occuper dans le monde politique. Ses efforts ont été couronnés par les plus glorieux succès. Vous avez entendu hier le Sénat conservateur vous en faire le récit, et présenter au premier consul, comme un gage de la reconnaissance publique, une prolongation de ses fonctions, que déjà le peuple avait devancée par ses vœux, mais dont il n'appartient qu'à lui seul de mesurer la durée sur l'étendue de sa reconnaissance et de ses besoins. » Le premier consul désire que le peuple soit consulté. Vous voyez comme moi dans cette honorable conduite du premier consul un hommage rendu à la souveraineté du peuple français, à ce grand principe que notre révolution a si solennellement consacré, et qui a survécu à tous les orages politiques. Le Corps législatif, lui-même soumis à cette volonté suprême, par qui et pour qui il existe, ne saurait exprimer trop solennellement sa reconnaissance pour cette grande marque de respect pour la volonté nationale. En conséquence je propose qu'une députation, composée d'un membre de chacun des départemens de la République, soit chargée de porter au gouvernement l'expression de ses sentimens.» (Adopté. On choisit le plus ágé des membres de chaque députation.) 20. Par VIENNOT-VAUBLANG. (Il expose que le Corps législatif doit mettre dans toutes ses démarches une méditation et une lenteur qui leur donnent de l'aplomb ét leur concilient les suffrages publics; en conséquence il demande que le président nomme une commission de six membres qui se joindront au bureau, examineront avec lui la proposition adoptée, et en feront leur rapport. - Le Corps législatif adopte cette proposition, et nomme membres de la commission Vaublanc, Lagrange, Marcorelle, Fulchiron, Pictet-Diodati et Lobjoy.) RAPPORT fait par Vaublanc dans la séance extraordinaire du 22` flo ་་ réal an 10. La commission m'a chargé de vous présenter le résultat de ses méditations. Elle a cherché à concilier ce qui est dû à la dignité du Corps législatif et à celle du gouvernement. Les motifs de sa détermination seront suffisamment énoncés dans le projet d'arrêté que j'ai l'honneur de vous présenter en son nom. » Le Corps législatif, ayant entendu la commission nom>>mée dans sa séance du 2 1 floréal pour lui proposer les moyens. » de régulariser les mesures qu'il avait prises sur le message » du gouvernement du même jour; » Considérant que, tandis que les citoyens émettaient leur » vœu pour l'acceptation de la Constitution, les commissions législatives existantes alors ouvrirent des registres sur lesquels les membres des deux Conseils inscrivirent leur vœu » individuel; » Considérant en outre que dans la circonstance actuelle les » membres du Corps législatif pourraient n'être pas arrivés » aux lieux de leur domicile assez à temps pour y inscrire leur >> vœu sur les registres publics; arrête : » 1°. La députation d'un membre par département, nom»mée dans la séance d'hier, se rendra au palais du gouverne»ment pour présenter aux consuls l'expression des sentimens » du Corps législatif. 2. Un registre sera ouvert à la commission administra»tive pour y recevoir le vœu individuel des membres du " Corps législatif sur l'objet énoncé dans l'arrêté du gouvernement, et le résultat en sera transmis au gouvernement » avant la fin de la session actuelle. » " DISCOURS de Ségur. (Méme séance.) « Législateurs, quoique mon opinion soit conforme à celle de la commission, il me semble qu'elle n'a pas assez précisé l'ouverture immédiate du registre; je prends la parole pour la motiver. Lorsque le Tribunat émit un vœu dicté par la reconnaissance nationale pour le premier magistrat de la République, le Corps législatif, qui éprouvait le même sentiment, crut avec regret que la Constitution lui interdisait la faculté de l'exprimer, et de prendre à cet égard aucune initiative. Je craignis dès lors, d'après les entraves imposées par la Constitution, qu'aucune des autorités établies ne pût remplir complétement un vœu que je crois général. Dans une aussi grande circonstance, lorsqu'il s'agit de décider si la gloire de nos armes, les douceurs de la paix, la restauration de l'ordre public, la compression de toutes les factions, seront durables ou passagères; lorsqu'il faut imprimer le sceau de la constance à nos institutions, et enlever aux ennemis du peuple français le funeste espoir de voir renaître les troubles et les orages qui tourmentaient la République avant le 18 brumaire; lorsqu'il s'agit enfin de donner à l'homme que la France admire, et que l'Europe nous envie, une récompense digne de nous et de lui, c'est au peuple souverain seul qu'il faut s'adresser; c'est lui seul qui peut réaliser complétement nos vœux, et, par un acte de sa volonté libre et suprême, assurer solidement son bonheur et son repos en donnant à Bonaparte la marque la plus éclatante de sa confiance, et le digne prix de ses travaux et de ses périls. La réponse du premier consul au Sénat est parfaitement conforme à cette opinion. Cet illustre citoyen, à l'esprit duquel aucune grande pensée n'échappe, exprime à la fois sa reconnaissance pour cette grande autorité et son respect profond pour la majesté du peuple souverain. Enfin les consuls et le Conseil détat, en convoquant la nation, nous donnent le juste espoir de voir disparaître ces tristes bornes que le vrai patriotisme regardait avec inquiétude, et l'envie avec une joie basse et perfide. Cet arrêté des consuls qui nous est communiqué citoyens législateurs, nous laisse une entière liberté d'exprimer nos sentimens ; ce n'est point ici l'un de ces actes sur lesquels le silence impartial d'un juge nous est imposé; c'est un appel au peuple, dont nous faisons partie, et dont nous sommes les représentans. » Il me semble, citoyens législateurs, que cette double position de citoyens et de représentans de la nation nous indique naturellement les deux résolutions que doit prendre le Corps législatif. Comme législateurs, nous devons envoyer au premier consul une nombreuse députation, pour lui exprimer la satisfaction que nous fait éprouver sa réponse, où nous admirons tous les sentimens qui justifient si bien la confiance nationale; et, comme citoyens, nous devons ouvrir à l'instant, dans le bureau de notre commission, un registre où chacun de nous souscrira son vou. Ce vou, je n'en doute pas, répété bientôt dans toute la République, rassurant tous les amis de la patrie, enlevant toute espérance aux factions, liera constamment notre sort aux destinées glorieuses du conquérant de l'Italie et de l'Egypte, du citoyen courageux qui à terrassé l'anarchie, du héros dont le génie audacieux a franchi les Alpes, désarmé tous nos ennemis, vaincu tous nos préjugés, calmé toutes les consciences, et qui vient enfin de donner la paix au monde. » Je propose donc au Corps législatif l'envoi de la députation nommée à la séance d'hier, et l'ouverture immédiate d'un registre pour inscrire individuellement notre vœu, et enfin que le résultat de cette inscription soit transmis au gouvernement par la députation, » Vaublanc. « Cet amendement a été discuté et écarté par la commission; elle a examiné ce qui serait le plus convenable, que le vœu fût porté au premier consul ou par un message ou par la députation, ou qu'il lui fût envoyé par la commission administrative. Elle a pensé qu'il ne s'agissait pas d'un acte législatif, mais de l'émission du vou individuel de chaque |