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ciations et les détenteurs d'armes, lois qui ne sont qu'une partie séparée de ce Code, et qui permettent de prononcer la surveillance depuis un mois jusqu'à deux ans. Et pourquoi, en effet, cette peine demeurerait-elle seule inflexible dans sa durée, tandis que les autres peines s'assouplissent suivant les degrés si variables de la culpabilité des prévenus? Les inquiétudes que leur conduite future peut faire naître, les périls qu'elle peut susciter, sont-ils donc toujours les mêmes? Pourquoi la peine resterait-elle uniforme et sans degrés ?

La rédaction assez bizarre des articles 47, 48, 49 et 50 peut suggérer quelques incertitudes. Aux termes des articles 47 et 48, la surveillance suit de plein droit les peines des travaux forcés à temps, de la détention, de la réclusion et du bannissement, c'est-à-dire qu'elle doit être appliquée lors même que l'arrêt de condamnation ne l'a pas prononcée. D'après l'article 50, au contraire, elle ne peut être attachée aux peines correctionnelles qu'en vertu, non seulement d'un texte positif de la loi, mais encore d'une disposition formelle du jugement. Or, entre ces deux articles si différens, se trouve l'article 49 qui dispose simplement que « les condamnés pour crimes ou délits qui intéressent la sûreté intérieure ou extérieure de l'Etat (1), devront être ren

(1) Ces crimes et délits font la matière du chap. I, tit. I, du liv. III du Code pénal.

voyés sous la même surveillance. » Dans ce dernier cas, la surveillance est-elle de plein droit? Est-il nécessaire qu'elle soit formulée dans l'arrêt? Cette omission en entraînerait-elle l'annulation ?

Il est inutile de faire observer que la surveillance est de plein droit, toutes les fois que l'attentat politique est puni de l'une des peines afflictives auxquelles elle est nécessairement attachée. Mais dans les autres cas, il est indispensable qu'elle soit prononcée, car les peines de droit ne peuvent être étendues au-delà des termes précis de la loi pénale. Les cours d'assises doivent donc l'exprimer lorsque le crime ou le délit rentre dans la disposition de l'article 49; l'omission de cette disposition dans l'arrêt constituerait même un droit acquis au condamné, si cet arrêt n'était pas attaqué en temps utile; car un pourvoi fondé sur cette omission le ferait nécessairement annuler sur ce chef. Ainsi, on peut remarquer cette différence entre la surveillance de droit et celle que prescrit l'article 49; que, dans le premier cas, elle existe indépendamment de la condamnation, et que, dans le dernier, les juges sont tenus de la prononcer ; l'omettent, et que cette omission soit couverte par la chose jugée, elle profite au condamné. La même solution s'appliquerait à tous les cas où la loi a rendu la surveillance, l'accessoire obligé de certains délits.

mais que s'ils

M. Carnot pense que cette mesure, dans le cas de l'article 49, ne doit avoir d'autre durée que celle de

da peine principale (1). Il fonde cette opinion sur ces terines, sous la même surveillance, qui semblent assimiler cette peine à celle de l'article 48, qui précède immédiatement, et qui limite, en effet, la durée de la surveillance à la durée du bannissement. Mais on doit remarquer que ce dernier article renvoie lui-même les condamnés au bannissement sous la même surveil lance. Il faut donc remonter à l'article 47, qui prononce la surveillance de la haute police à vie. A la vérité, l'article intermédiaire 48 formule une exception, une limite; mais dès qu'elle n'est pas répétée dans celui qui le suit, on ne peut l'y suppléer (2).

Enfin, la mise en surveillance échappe à la prescription. En effet, qu'elle soit à vie, qu'elle soit temporaire, son exécution est indépendante des mesures facultatives attribuées par la loi à l'autorité administrative la suspension de ces mesures ne peut donc constituer un droit en faveur du condamné: la peine est continue, et par conséquent imprescriptible. Elle n'a d'autre terme que celui marqué par le jugement ou par la loi (3).

Il est impossible de passer sous silence plusieurs

(1) Comment. sur l'art. 49 du Code pénal.

(2) Cette solution rencontre toutefois une exception à l'égard des délits contre la sûreté de l'Etat prévus par la loi du 24 mai 1834, laquelle rend la surveillance facultative et limitée. Voyez Journ. du droit crim., 1834, pag. 179.

(3) V. Arr. cass., 31 janv. 1834; Journ. du droit crimin., p. 156.

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questions transitoires, mais d'un interêt actuel, que les variations de la législation ont soulevées. La première est relative aux condamnés aux fers qui, antérieurement au Code pénal, ont été soumis à une surveillance locale, en vertu des décrets du 19 ventôse an 13 et 17 juill. 1806. Ils ont pu, sous le régime de l'ancien art. 44 du Code pénal, réclamer le bénéfice du cautionnement, d'après ce principe consacré par l'art. 6 du décret du 23 juillet 1810, que ceux qui sont atteints par la loi antérieure doivent jouir du bénéfice de la loi postérieure qui modifie et adoucit la première. D'après la même régle, ils doivent encore, s'ils n'ont pas fourni ce cautionnement, recevoir l'application de la nouvelle loi. Les précautions formulées par cette loi suffisent à la protection de l'ordre social: il serait donc trop rigoureux de se servir à l'égard de quelques condamnés, d'anciennes armes que le législateur lui-même a jugées inutiles.

Une difficulté plus grave se présente à l'égard des individus condamnés sous le Code pénal de 1810, soit qu'ils aient dejà subi leur peine, soit qu'ils l'exécutent encore. Quels doivent être leurs droits, leur position légale, leurs obligations? Ces condamnés peuvent être partagés en deux classes: ceux qui ont fourni un cautionnement, et ceux qui ne présentent pas cette garantie. Les premiers doivent rester dans la position qu'ils ont acquise; la loi nouvelle pour eux n'introduit aucun bénéfice, elle aggraverait au contraire

leur position, puisque par l'effet du cautionnement ils sont libres de toute entrave; il y aurait alors effet rétroactif. Il en est de même pour tous ceux qui n'ont pas encore achevé de subir leurs peines, et dont le jugement a fixé le montant du cautionnement; enfin pour tous les condamnés actuellement libérés qui demanderaient à jouir de cette faculté du cautionnement; car à l'égard de tous, c'est un droit acquis, et la loi postérieure étant dans ce cas plus rigoureuse, on ne pourrait leur en faire l'application.

Mais quant aux condamnés qui n'ont pu fournir caution et qui ont maintenant une résidence obligée, quant à ceux qui, au fur et à mesure qu'ils achèveront de subir des condamnations aujourd'hui prononcées, ne réclameront pas cette faculté, il est évident que les dispositions de la loi nouvelle les atteignent et les soumettent à leur empire, d'après le principe d'humanité et de raison que nous avons rappelé.

Telles sont, au surplus, les règles que les comités de législation et de justice administrative du conseil d'État ont consacrées dans un avis du 7 novembre 1832, portant: « Qu'il est convenable que le gouvernement, usant de la faculté que lui confère l'art. 44, et dirigé par les motifs qui l'ont porté à provoquer les modifications qu'a reçues cet article, par la loi du 28 avril 1832, substitue lui-même le simple éloignement de certains lieux, à la résidence obligée dans un lieu déterminé, pour les individus déjà condamnés...

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