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certains cas en désaccord avec les dispositions des articles 16 et 17 de la même loi, el surtout, ce qui est inadmissible, sans mettre obstacle à ce que le tribunal pùt ordonner un supplément d'information au moyen duquel il croirait pouvoir arriver à la fixation d'une juste indemnité;

Attendu que les lois des 8 mars 1810 et 17 avril 1835 ne contiennent aucune disposition dérogeant aux lois relatives à la compétence des Cours et tribunaux; qu'il s'ensuit que, suivant les règles établies par la loi du 25 mars 1841, les tribunaux de première instance jugent même en matière d'expropriation pour cause d'utilité publique, en premier et dernier ressort, les questions relatives au montant de l'indemnité, lorsque la valeur réclamée ne dépasse pas les limites du dernier ressort;

Attendu qu'il n'est pas contesté et qu'il résulte même du rapport de la commission à la chambre des représentants, que nonobstant les dispositions des articles 9, 10 et 11 de la loi de 1855, les Cours d'appel peuvent recourir à l'enquête du droit commun pour déterminer le montant de l'indemnité, qu'il faudrait une disposition formelle et précise (et qui n'existe pas) pour interdire la même faculté aux tribunaux de première instance, parfois appelés à juger en dernier ressort des contestations qu'ils ne pourraient vider en connaissance de cause sans le secours d'une enquête ;

Attendu que de tout ce qui précède il résulte que l'arrêt de la Cour de Liége, en réformant le jugement du tribunal de première instance, en tant que ce jugement

avait déclaré non recevable et contraire à la loi la preuve des faits concernant la valeur du terrain, les clôtures et les raccordements, n'a pas contrevenu aux articles invoqués à l'appui du moyen de cassation;

Par ces motifs, rejette le pourvoi, etc.

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-C. POUSSART.)

ARRÊT.

LA COUR; Attendu que le jugement du tribunal de simple police du canton de Spa, confirmé par le jugement attaqué qui en a adopté les motifs, constate que le défendeur s'est rendu coupable, envers le bourgmestre de Theux, d'injures constituant une contravention de police prévue par l'article 471, no 11, du Code pénal, et qu'il est en état de récidive;

Attendu que les contraventions prévues par ledit article sont punies d'une amende d'un jusqu'à cinq francs et que l'art. 474 du même Code statue que la peine d'empri sonnement contre toutes les personnes mentionnées en l'article 471 aura toujours lieu, en cas de récidive, pendant trois jours au plus;

qu'il existe des circonstances attenuantes el Attendu que ledit jugement, fondé sur ce sur l'article 6 de la loi du 15 mai 1849, n'a condamné le défendeur qu'à une amende de cinq francs;

Attendu que cet article statue expressément que la disposition qu'il renferme remplace l'article 463 du Code pénal; d'où il suit qu'elle prend, dans ce Code, la place de ce dernier article, auquel elle est substituée et qu'elle devient ainsi la dernière disposition du livre III, intitulé: Des crimes et délits et de leur punition;

(') Cette conséquence est commandée par la rédaction seule de la partie finale de l'article 465. En ce sens, Théorie du Code pénal, par Chauveau et Hélie, t. 2, p. 650, édition du Commentaire des commentaires, note de M. Nypels; conclusions de M. Decuyper, Bulletin de cassation de Belgique, 1839, p. 384, et note de la notice

analytique. En France, en 1852, la question a été résolue législativement par l'addition d'un paragraphe à l'article 483. Le législateur belge, en 1849, a conservé à l'article 6 de la loi du 15 mai 1849 la rédaction de la dernière partie de l'article 463; la question est donc restée ce qu'elle était sous l'empire de ce dernier texte.

Attendu que tout ce qui concerne la répression des contraventions de police est réglé par le livre IV du même Code, intitulé: Contravention de police et peines;

Attendu que, d'après son texte comme d'après la place qu'il occupe dans le Code pénal, le nouvel article 463 n'est pas appli cable aux contraventions de police; qu'il se borne, en effet, à statuer que, dans tous les cas où le Code pénal prononce la peine d'emprisonnement ou d'amende, les tribunaux, si les circonstances sont atténuantes, sont autorisés à réduire l'emprisonnement au-dessous de six jours et l'amende au-dessous de seize francs, à substituer l'amende à l'emprisonnement, ou à appliquer séparément l'une ou l'autre de ces peines, sans que dans aucun cas elles puissent être audessous des peines de simple police; que cette rédaction indique clairement que l'emprisonnement et l'amende que les tribunaux peuvent réduire ou appliquer séparément sont exclusivement l'emprisonnement de six jours au moins, et l'amende de plus de quinze francs, prononcés par le Code pénal pour délits correctionnels;

Attendu qu'il résulte des considérations qui précèdent que le jugement attaqué, en confirmant le jugement du tribunal de simple police de Spa qui n'a pas prononcé contre le défendeur la peine de l'emprisonnement comminée par l'article 474 du Code pénal, a faussement appliqué l'article 6 de la loi du 15 mai 1849 et expressément contrevenu auxdits articles 6 et 474;

Par ces motifs, casse et annule le jugement rendu entre parties par le tribunal de Verviers, jugeant sur appel en matière de simple police, le 11 juill. 1851, ordonne, etc. Du 22 août 1851. 1re Ch. 1er Prés. M. De Gerlache. Rapp. M. Fernelmont. Concl. conf. M. Delebecque, avoc. gén.

-

(1) Sont d'avis que les rivières sont du domaine public: Proudhon, Dom. pub., nos 933 et 1285; Rives, Revue des Revues de droit, t. 8, p. 57, où il analyse la doctrine et les travaux parlementaires; Solon, Rép. des jurid., t. 3, no 41; Foucart, t. 3, p. 417; Merlin, Répert., yo Rivière, S2, no 1er, et no 5, in-8o, t. 30, p. 87; Laferrière, Droit adm., p. 135; Husson, Trav. pub., t. 2, p. 235; Chevalier, t. 1, p. 312; Fournel, Voisinage, t. 1, p. 372; de Valserres, Droit rural, p.396; Carou, Act. possess., no 162; Nadaut de Buffon, t. 2 (Brux., 28 avril 1827, 7 mars 1822; Gand, 7 juillet 1835; Cour de cassation de France, 14 février 1853; Br., 28 décem. bre 1844).

Opinent dans le sens de la propriété des riverains: Toullier, no 144; Pardessus, no 77; Du

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Il n'y a point décision en fait dans le jugement qui s'est fondé non sur une convention, mais sur un principe de droit pour prononcer une condamnation à charge d'une partie.

Spécialement: Quand le tribunal pour condamner l'Etat à payer le prix d'une emprise s'est fondé sur ce qu'en droit la propriété des rivières non navigables, ni floltables, fait partie du domaine public. Ces cours d'eau doivent être rangés dans le domaine public municipal.

La dépense des travaux relatifs à ces cours d'eau constitue une charge locale, et ne peut être mise à charge de l'État (1). (Loi du 24 floréal an x1; loi du 16 sept. 1807, art. 29. et 35; décret du 16 décembre 1811, art. 16 et 17; loi du 30 mars 1856, article 151, § 9, et 90, § 12; règlement provisoire du Brabant, du 23 juillet 1842, art. 2, 6, 7, 8 et 17.)

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(MINISTRE DES TRAVAUX PUBLICS, C. ROOSEN.)

Par exploit du 8 juin 1849, le nommé Henri Roosen, de Molenbeck St-Jean, défendeur au pourvoi, avait assigné l'Etat devant le tribunal de Bruxelles, à l'effet de s'entendre condamner à lui payer la somme de 503 fr. 45 centimes, montant de 29 mètres 45 centimètres de terrain cédé à l'Etat, le 20 juin 1847, pour être incorporé à la Senne, par suite de l'alignement adopté pour l'élargissement dudit cours d'eau; cette demande était fondée sur la réalité de la cession, sur ce que l'Etat a effectivement incorporé à la Senne le terrain cédé... sur les lois de la matière et tous autres moyens à faire valoir en temps et lieu.

ranton, nos 421 et 208; Marcadé, art. 561; Garnier, no 50; Magnitot, Eaux, p. 466; Daviel, no 529; Chardon, Alluvion, no 45; Troplong, Prescription; Vaudoré, Droit rural; Carré, Justices de paix; Favard de Langlade, Rép., vo Rivière et Servitude; Hennequin, Traité, no 1; Cotelle, Droit adm.; Cormenin, Cours d'eau; Curasson. Cour de cassation de France, 21 fév. 1810. Championnière, Revue des Revues de droit, t. 8, p. 109, cherchant historiquement dans quel sens les petits cours d'eau dépendaient du seigneur, découvre dans les documents qu'il invoque la trace d'une servitude féodale et non un titre de propriété. Dufour, Droit adm. appliqué, considère l'eau comme res nullius, le lit, comme dépendance de la propriété privée, t. 2, no 1198.

Devant le tribunal on soutint pour le gouvernement que la Senne, n'étant ni navigable ni flottable, ne faisait pas partie du domaine de l'Etat, et que dès lors celui-ci ne pouvait être débiteur du prix du terrain dont s'agit; que cela était d'autant plus évident que l'alignement, par suite duquel la cession doit avoir eu lieu, n'a pu être prescrit que par l'autorité communale, par application de l'article 17 du règlement provincial du 25 juillet 1842, et qu'il n'a pu dès lors engendrer une obligation à charge de l'Etat.

Le demandeur répondit que son action étant fondée sur ce qu'il avait cédé à l'Etat le terrain dont s'agit, il importait peu de savoir si la Senne appartenait ou non au domaine public ou quelle était l'autorité qui avait fixé l'alignement, qu'il s'agissait uniquement de savoir si la convention vantée avait eu lieu, et pour établir cette convention il fit signifier une série de faits, avec invitation aux défendeurs de les reconnaitre ou de les dénier dans les trois jours, à peine de les voir tenus pour confessés et avérés.

Le gouvernement ne s'expliqua point sur cette sommation, et à l'audience du 15 mars 1851, où l'affaire fut plaidée, Roosen, considérant les faits comme confessés et avérés, soutint qu'ayant contracté, non avec la commune, mais avec l'Etat, celui-ci devait exécuter la convention que lui-même avait exécutée, sauf son recours contre la commune, si la cession avait réellement profité à cette dernière. Il offrit subsidiairement la preuve des faits articulés en invoquant quelques documents comme commencement de preuve par écrit. Plus subsidiairement il demanda un délai pour mettre en cause le conducteur de travaux publics, qui, prétendait-il, avait traité avec lui au nom de l'Etat.

Pour l'Etat on soutint que les faits articulés, qu'on déniait au besoin dans leur ensemble, étaient irrelevants et qu'ils ne pouvaient servir à établir une convention contestée et dont la preuve testimoniale n'était pas admissible; par ces moyens et ceux précédemment indiqués, on conclut à ce que la demande fùt déclarée non recevable et dans tous les cas non fondée.

Le 11 avril, le tribunal rendit son jugement dans les termes suivants :

«Attendu que la propriété des rivières non navigables ni flottables réside dans le chef du domaine public aussi bien que la propriété des rivières navigables et flotta

bles; que cela résulte de la loi du 1or janvier 1790, articles 2, 5 et 6, section 1, qui charge les administrations des départements de l'administration relative à la conserva. tion des rivières, chemins et autres choses communes, du décret du 22 janvier 1808, qui autorise le gouvernement à déclarer navigable une rivière qui ne l'est point, sans devoir payer à qui que ce soit une indemnité quelconque, soit à raison du cours d'eau, soit à raison du lit même de la rivière, et enfin de l'article 565 du Code civil, qui envisage le lit abandonné comme terrain public, même à l'égard des rivières non navigables ni flottables;

<«< Attendu que si, aux termes du règlement provincial du Brabant approuvé par arrêtés royaux, en dates des 25 août 1842, 1er septembre 1843 et 8 août 1844, les autorités communales sont chargées de veiller à l'entretien des cours d'eau non navigables ni flottables, et des digues et talus qui les enferment, et ce aux frais des riverains et autres intéressés, il n'en résulte nullement que la propriété desdits cours d'eau ou rivières réside dans le chef de la commune ou des riverains, mais seulement que IEtat a délégué à la commune, aux termes de la loi communale, article 90, l'entretien et la surveillance des rivières non navigables; que si cet entretien se fait aux frais des riverains, c'est que ceux-ci jouissent des avantages que la rivière leur procure, tels que le droit de pêche et autres;

« Attendu que si la cession de terrain dont il s'agit a eu lieu par suite d'un alignement donné par l'autorité communale conformément au règlement provincial prémentionné, on ne peut en conclure que cette cession n'a pas été faite au profit de l'Etat; qu'en effet l'Etat, en déléguant à la province ou à la commune l'administration d'une partie du domaine public, n'a point aliéné ce domaine, et qu'ainsi, comme propriétaire de celui-ci, il doit payer une cession de terrain à son profit;

<< Attendu qu'il est suffisamment établi, par les documents versés au procès et notamment par une dépêche de M. le gouverneur de Brabant, en date du 14 mars 1848, enregistrée par Bregentzer, le 11 avril courant, vol. 92, folio 14, case 9, aux droits de 2 francs 21 centimes, qu'une partie de la propriété du demandeur a été emprise pour l'élargissement de la Senne, dont la propriété, ainsi qu'il a été établi plus haut, réside dans l'Etat comme étant du domaine public.

« En ce qui concerne le prix de ladite cession :

«Attenda que le demandeur a articulé et signifié, conformément à l'article 252 du Code de procédure civile, une série de faits relatifs au prix de cette cession, avec sommation à Me Dansaert de reconnaître ou de dénier lesdits faits;

« Attendu que cette sommation a été faite le 4 juillet 1850, et que l'Etat n'y a fait aucune réponse;

« Attendu qu'il existe un commencement de preuve par écrit dans la missive prémentionnée de M. le gouverneur du Brabant, représentant, pour l'espèce dont il s'agit et dans le cercle de ses attributions administratives, l'Etat belge qui, ainsi qu'il a été dit plus haut, a délégué à la province l'administration et la surveillance des rivières et de leurs cours, que par suite il y a lieu, dans les circonstances de la cause, de tenir pour confessés et avérés les faits articulés par le demandeur, en ce qui concerne au moins le prix de cession convenu;

«Par ces motifs, le tribunal, ouï M. Maus, substitut du procureur du roi, en son avis, déclare le défendeur non fondé en ses conclusions et, sans qu'il soit besoin d'autres preuves, déclare tenir pour confessés et avérés les faits non déniés concernant le prix de la cession du terrain dont il s'agit, par suite condamne l'Etat belge, défendeur, à payer au demandeur la somme de 503 fr. 45 centimes, avec les intérêts à dater du 20 juin 1848, condamne le défendeur aux dépens taxés à 167 francs 21 centimes.

"

Jugé et prononcé au audience publique de la première chambre du tribunal de première instance, séant à Bruxelles, le 11 avril 1851. »

Pourvoi par M. le ministre des travaux publics.

On invoque un seul moyen de cassation, fondé sur la violation des articles 558, 561 el 714 du Code civil; des articles 29 et 55 de la loi du 16 septembre 1807; de l'art. 90 de la loi communale, et des articles 2, 6, 7, 8 et 17 du règlement provincial du Brabant, du 23 juillet 1842, approuvé par arrêtés royaux des 25 août 1842, 1er septembre 1845 et 8 août 1844 (1); enfin sur la fausse application et par suite la violation des articles 2, 5 et 6. section 11, de la loi du 22 décembre 1789-1er janvier 1790.

() Voyez ce règlement au Mémorial administratif de 1842, 2e partie, p. 524.

Le tribunal, dit le demandeur, ne s'est attaché aux faits posés par le défendeur, que pour déterminer le prix du terrain empris; et pour décider que l'Etat était débiteur de ce prix, il s'est uniquement fondé sur des considérations de droit. Le pourvoi est donc recevable.

Le système du tribunal ne tend à rien moins qu'à mettre à la charge exclusive de l'Etat les dépenses relatives à l'élargissement et à la rectification du cours de toutes les rivières non navigables ni flottables, et cela sous prétexte que ces rivières font partie du domaine public.

Le demandeur entre d'abord dans des détails assez étendus sur la question de savoir à qui appartient le lit des petites riviè

res.

Les travaux de rectification ou d'élargissement des rivières non navigables ni flottables se font, dit-il, sinon dans l'intérêt exclusif des riverains, au moins dans un intérêt purement local; les dépenses n'en peuvent dès lors tomber à charge du trésor public. Les rivières ne peuvent être comparées qu'aux chemins vicinaux à l'égard desquels aucune loi ne détermine non plus à qui en appartient la propriété, mais dont les dépenses ont toujours été mises à charge des communes parce qu'ils leur profitent spécialement. C'est ce qu'a fait en Belgique l'article 15 de la loi du 10 avril 1841, combiné avec les articles 151, § 19 et 152 de la loi communale, sans distinguer entre les dépenses ordinaires d'entretien et celles que pourrait occasionuer l'élargissement du chemin.

Proudhon enseigne, au no 1050 de son Traité du domaine public, qu'en cas d'élargissement d'un chemin vicinal, c'est la commune qui doit payer le prix du terrain empris, par la raison que tous les habitants sont également appelés à profiter du chemin, et il ajoute que le même principe de justice s'applique lorsqu'il s'agit de l'élargissement du lit d'une petite rivière, mais d'une manière plus restrictive, en ce que les seuls propriétaires voisins du cours d'eau doivent supporter la dépense de l'élargissement, parce qu'il est exécuté dans leur intérêt particulier.

Dans l'espèce il est inutile de rechercher si c'est à la commune ou aux riverains que la dépense incombe; dans le silence de la loi le principe de justice que la dépense doit être supportée par ceux qui en profitent suffit déjà pour en dispenser l'Etat.

Mais il existe des dispositions de loi qui

excluent l'idée que cette dépense puisse être mise à charge de l'Etat. Le demandeur cite ici et commente les textes invoqués à l'appui du pourvoi.

L'erreur du tribunal provient de ce qu'il n'a pas compris le caractère de domanialité que la jurisprudence et les auteurs allachent quelquefois aux petites rivières, et de ce qu'il a confondu le domaine public avec le domaine de l'Etat. Or le domaine public, en tant qu'il embrasse les choses qui, asservies à l'usage de tous, ne sont la propriété de personne, est ou national ou munici pal (1), et c'est toujours dans le domaine public municipal qu'il ne faut pas confondre avec le domaine communal proprement dit, qu'on a rangé les chemins vicinaux et qu'on doit ranger les petites rivières, si tant est que la propriété n'en appartient pas aux riverains. Peu importe maintenant que la loi du 1er janvier 1790 ait chargé les administrations départementales de la conservation des rivières en général ; que l'article 563 du Code civil, prévoyant le cas où unc rivière se forme un nouveau cours, attribue l'ancien lit, non aux riverains, mais, à titre d'indemnité, aux propriétaires des fonds nouvellement occupés, et ce sans distinguer entre les grandes et les petites rivières; qu'enfin le gouvernement puisse, sans indemnité, déclarer navigable une rivière qui ne l'était pas jusque-là ; car de ces dispositions on ne peut pas déduire que ces rivières, tant qu'elles ne sont pas navigables ou flottables, fassent partie du domaine de l'Etat proprement dit, et encore moins qu'on doive considérer comme faites au profit de l'Etat les rectifications de leur cours.

Le demandeur conclut de ces diverses considérations que le jugement attaqué a fait à la cause une fausse application des textes de loi qu'il invoquait, comme il a fait une fausse application et commis une violation des textes cités à l'appui du pourvoi. I en demande en conséquence l'annulation.

Le défendeur répond en résumé :

L'action était basée sur le fait d'une cession intervenue entre l'Etat et le défendeur et malgré les soutenements de l'Etat, on a persévéré à prétendre que celui-ci était débiteur en vertu de cette convention.

Si le tribunal a motivé son jugement sur ce qu'en droit la propriété des petites riviè

(1) Voy. Proudhon, nos 528, 529et 476. (2) Voy. Merlin, Rép., vo Rivière, 3; Rives,

res réside dans le chef de l'Etat, il l'a motivé aussi en fait sur ce que le terrain du défendeur a été empris pour l'élargissement de la Senne, et sur ce qu'il y a lieu de tenir pour confessés et avérés les faits articulés par ce dernier, en ce qui concerne au moins le prix de la cession convenue.

En supposant donc que le tribunal ait mal interprété la loi, les motifs de fait subsistent et rendent le pourvoi non recevable.

Ce pourvoi d'ailleurs n'était pas fondé.

De nombreux auteurs et de nombreux arrels se sont prononcés en France pour l'opinion que les rivières non navigables ni flottables appartiennent au domaine de l'Elat (2).

En Belgique, cette question ne peut pas même être controversée. Surtout à l'égard de la Senne, l'influence du droit antérieur au régime de 1789 est incontestable. Avant notre réunion à la France, toutes les rivières non navigables ni flottables faisaient partie du domaine du souverain, surtout en Brabant. On cite, pour justifier cette thèse, ce qui concerne la particulièrement en Senne, diverses passages de l'ouvrage de Martinez Domanial regt van Brabant, et une ordonnance de 1596 émanée du souverain relativement à la Senne, qu'elle qualifie: onze riviere de Senne, et un placard du 7 juillet 1704, où le roi proclame qu'il possède les voies publiques et les rivières à titre exclusif du droit de propriété d'un tiers, privatlyck, et comme régale; enfin un arrêt de la Cour d'appel de Bruxelles, du 28 décembre 1844 (1845, 2, 290).

Par suite de la réunion de la Belgique à la France, le domaine des anciens souverains du pays est devenu partie intégrante du domaine national français et s'est trouvé régi par les mêmes principes que ce dernier. Cela résulte encore de la publication faite en Belgique, le 7 pluviose an v, de plusieurs articles du décret des 22 novembre et 1er décembre 1790, relatif aux domaines nationaux, et notamment des articles 2 et 3 dont le premier considère comme dépendances du domaine public les chemins publics, les fleuves et rivières navigables, les rivages... et en général toutes les portions du territoire national qui ne sont pas susceptibles d'une propriété privée, et dont l'autre déclare appartenir à la nation

Revue des Revues, t. 8, p. 59 et 60; Proudhon, du Domaine public, 2, nos 956 à 973.

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