Page images
PDF
EPUB

eiens que Roguenaut.Richer voïant que malgré fon oppofition & celle des vingt-cinq Docteurs qui le défendoient, fes ennemis vouloient le déposer, fit venir deux Notaires dans l'affemblée, protesta contre tout ce que l'on feroit à fon préjudice, & recufa la plupart des quarante quatre Docteurs qui étoient contre lui, en alleguant les causes de cette recufation. Quelques jours après, le Chancelier chargea les Gens du Roi d'appaifer l'émotion de Sorbonne, & d'ordonner à Richer de ne point pourfuivre fon appel comme d'abus. Le premier Préfident manda auffitôt le Doïen avec cinq autres Docteurs, & leur ordonna de ne point inquiéter Richer, parce que le Roi alloit terminer l'affaire. Quelques jours après, ce Magiftrat dit à Richer, que fon innocence appuïée du crédit de ses amis ne lui ferviroit de rien; qu'on ne pouvoit plus empêcher l'injuftice de triompher; que la Reine & les Miniftres étoient fans ceffe obfedés par le Nonce & les Evêques, & que l'Ambaffadeur de France à Rome mandoit que le Fape lui avoit refufé audience jufqu'à ce qu'on eût fait un autre Syndic.

On tiroit toujours l'affaire en longueur XXXIV. pour porter Richer à quitter volontairement. Courage du On lui fit parler par tous ceux qu'on croioit Doien des propres à l'y déterminer. Mais quand la Docteurs. Cour fçut qu'il étoit inébranlable, on tenta Lettres-papar toute forte de moïens de gagner le tentes pour Doïen Roquenaut. Ce nouvel expédient dépofer Ri. n'aïant pas réuffi, le Chancelier fit venir de teftation de Meaux Gronce Finé le plus ancien de tous les Docteurs. Il lui fit mille careffes & les promeffes les plus magnifiques pour le sé

cher. Pro

ce Syndic.

duire. Finé quoiqu'accablé de vieilleffe, eur affez de force pour ne pas fuccomber. Il dit au Chancelier que rien ne pouvoit le porter à donner atteinte aux Libertés de l'Eglife Gallicanne, à l'ancienne doctrine de l'Univerfité & à l'autorité du Roi. Qu'il étoit honteux pour un Chancelier, qui étoit en même temps Miniftre, de s'attirer une réponfe fi humiliante ! Alors le Chancelier fit expédier des Lettres Patentes du Roi pour obliger l'affemblée du premier de Septembre de proceder à l'élection d'un nouveau Syndic. Elles furent fignifiées en pleine affemblée en présence de Richer, qui produifit fur le champ une proteftation en bonne forme contre tout ce qu'on alloit faire contre lui. Il perfifta dans fon appel comme d'abus de laCenfure de fon Livre, & demanda Acte de tout ce qui s'étoit paffé à fon fujet, pour faire connoître à la poftérité qu'il étoit dépofé injuftement à la pourfuite du Nonce & par les follicitations des Jefuites & de leurs confidens. On proceda enfuite à l'execution des Lettres Patentes du Roi, & le Docteur Filefac fut nommé Syndic. On arrêta qu'à l'avenir la charge de Syndic ne feroit poffedée que pendant deux ans, & qu'on remercieroit Richer des fervices qu'il avoit rendus pendant les quatre années & demi qu'il avoit eu le Syndicat. Les ennemis de ce Docteur ne furent point encore fatisfaits, & fe flatterent de lui faire perdre fa place de Grand Maître du Collège du Cardinal le Moine. Mais le Chancelier leur fit dire de ne plus inquiéter Richer, qui avoit des amis & des défenfeurs à la Cour. L'un des principaux étoit le Comte de Soiffons Prince

du

du fang, qui fe plaignit hautement qu'on eût mis dans les Lettres-Patentes, que le Roi avoit pris l'avis des Princes du fang, ce qui étoit une fauffeté infigne. Il en fit de vifs reproches au Chancelier; & le Prince de Condé garda encore moins de ménagemens avec ce Miniftre, qui rejetta tout fur le Nonce. Pour le malheur de la France, le Comte de Soiffons mourut peu de jours après, regretté de ceux qui aimoient le bien de l'Etat & la tranquillité du Roïaume.

XII.

Richer. Ils

Les partifans de la Cour de Rome peu fa- XXXV. tisfaits de tout ce qu'ils avoient entrepris Nouveaux contre la perfonne de Richer, crurent devoir excès des s'efforcer de détruire fa doctrine. Il fe tint ennemis de fur ce fujet un Confeil fecret de plufieurs établiffent Prélats chez le Cardinal du Perron. On y prit une espece la réfolution d'anéantir ce que les Ultramon- d'Inquifitains appelloient le Richérifme, & même tion. de ruiner la Sorbonne & toutes les Facultés de Théologie, fi c'étoit le feul moïen d'en venir à bout. On convint de ne point épargner les deniers du Clergé dans une pareille occafion, & d'élever à des Prélatures ceux des Docteurs qui favoriferoient une fi belle entreprise. On conclut auffi dans ce même Confeil fecret d'exclure des bénéfices, & même des fonctions Eccléfiaftiques, ceux qui feroient du fentiment de Richer fur la Puiffance Eccléfiaftique & politique. Un de ceux qui avoient affifté à ce Conseil, découvrit à Richer toutes les délibérations qui y avoient été formées. On les connut auffi par le zele indifcret de Duval, qui fembloit ambitionaer l'emploi d'inquifiteur, d'efpion & de déTome X.

M

lateur. Le premier qu'il accufa de Richérifine, fut Jerôme Parent, Docteur recommandable par fa fcience & par fa piété. Le Roi l'avoit nommé Profeffeur Roïal en langue Hébraïque, qu'il poffédoit parfaitement. La cabale du Nonce le fupplanta, & le Cardinal du Perron fit fceller fes lettres en faveur d'un autre on fit le même traitement à un trèsgrand nombre d'autres Docteurs & Bacheliers, à qui l'on promettoit les meilleurs bénéfices, & que l'on menaçoit des plus mauvais traitemens pour leur faire abandonner l'ancienne doctrine. Les perfonnes éclairées gémiffoient de voir s'établir en France une véritable Inquifition. Ce qu'il y avoit de plus déplorable, c'eft que les ennemis de l'autorité du Roi emploïoient cette même autorité contre ceux qui la défendoient avec le plus de zele. Le nouveau Syndic de concert avec Duval, avoit promis au Nonce d'anéantir le Richérisme en moins de deux ans ; mais trouvant plus de résistance qu'ils n'avoient crû, ils jugerent qu'ils ne pourroient réuflir qu'en renouvellant la Sorbonne, & qu'en faifant abroger fes ftatuts. C'est ainsi que pour établir en France les opinions ultramontaines, on fouloit aux pieds toutes les regles, fans emploier d'autre moïen que les voies de fait les plus odieuses & les injuftices les plus criantes.

XXXVI, Pendant que les Prélats & les Cardinaux Richer travailloient à faire exécuter la réfolution nommé à qu'ils avoient prife de ne point donner de un Canoni- bénéfices aux Richériftes, Dieu permit qu'ils cat de No- euffent le chagrin de voir Richer même malgré les pourvu d'un Canonicat de Notre-Dame qu'il ennemis. n'avoit pas recherché. L'Evêque de Paris

tre-Dame

me fon

pour

Jefuite.

devenu Cardinal, comme il l'avoit fi ar- Condam demment defiré, fit ce qu'il put pour éloi- nation du gner Richer; mais l'Univerfité prit fait & livre perni caufe ce Docteur qu'elle regardoit com- cieux d'un pere. Il auroit poffédé le bénéfice, fi fon défintéreffement ne le lui eût fait abandonner peu de temps après. 11 femble que fa modération auroit dû faire impreffion fur fes ennemis, & les porter à le laiffer en repos; mais ils ne cefferent jamais de le pourfuivre, & de lui donner de nouvelles occafions de fignaler fa patience & fon courage. Les Jefuites qui étoient la caufe fecrete de tant de maux, accoutumés à lui attribuer tout ce qui fe failoit contr'eux en Sorbonne lui imputerent la cenfure que l'on y méditoit pour le 1 Février 1613, contre un Livre pernicieux de leur Pere Becan, intitulé : De la controverfe d'Angleterre touchant la puissance du Roi & du Pape. C'étoit Filefac qui s'étoit plaint en Sorbonne de cette nouvelle production de la Société, & Richer ne s'étoit donné aucun mouvement. Les partifans de la Cour de Rome en France furent plus prudens que les Jefuites, & obtinrent un decret de l'Inquifition qui empêcha celui de Sorbonne. Ils ne vouloient pas que l'on pût dire que le Pape autorife des fentimens fi injurieux aux Puiffances féculieres.

XXXVII.

L'entreprife du nouveau Syndic & de DuRicher val pour abroger les principaux ftatuts de donne de Sorbonne, fournit une nouvelle matiere au nouvelles zele de Richer. Ces factieux efpérerent qu'ils preuves de

fon zéle.Ses démêlés a

vec M. de

réuffiroient à faire tomber l'ancienne doctrine de la Faculté, s'ils y faifoient entrer indifféremment toutes fortes de perfonnes, & Berulle defur-tout la nouvelle Congrégation de l'O- puis CardiMij

nal.

« PreviousContinue »