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Code civil, les articles 2 et 3 de la loi du 20 août 1881, l'article 23 du Code de procédure civile; -Vidant notre délibéré :-Attendu que le fait d'avoir fermé par des barrières depuis moins d'un an et jour, la sente qui conduit du lieudit le Pontenay au lieudit la Falaise (ou gare de Nesles-la-Vallée), constitue de la part de Mme Blaziooski une voie de fait pouvant donner lieu de la part de la commune de Nesles-la-Vallée, possesseur dudit sentier, à une action en complainte possessoire; Attendu qu'un sentier d'une commune doit être considéré comme public alors que, reliant deux voies publiques, il a été depuis de nombreuses années utilisé par les habitants de la commune (Dalloz 1895, 11, 336) et qu'il a été mis au nombre des chemins ruraux sous le n° 44, non seulement dans l'état de classement approuvé par le préfet le 29 octobre 1897, mais encore par une délibération du conseil municipal de ladite commune en date du 19 octobre 1845, et que depuis cette époque très reculée, aucun des nombreux propriétaires qui longent ledit sentier ne s'est avisé d'englober dans sa propriété la partie du sentier lui faisant face; que seule Mme Blaziooski, depuis moins d'un an et jour, s'est permis de le faire et a empêché ainsi la circulation dudit sentier et a troublé tous les habitants de la commune;-Attendu qu'il est de jurisprudence de rechercher si la sente dont s'agit est d'une indispensable nécessité pour l'exploitation des terres qui la bordent; Attendu qu'il résulte de l'enquête et des explications fournies par la commune représentée par son maire à l'audience du

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1er août, que ce sentier a toujours existé et qu'il a servi aux besoins de l'exploitation des propriétés rurales qui le longent et que la commune réclame sa maintenue; Attendu, sur le moyen tiré de ce que ladite sente serait indiquée dans des actes comme limitrophe de la propriété Blaziooski qui l'avoisine; que ces sortes de dénominations ne sont jamais faites que comme constatation des lieux et non comme appréciation de leur nature; et que si elles pouvaient être prises à la lettre elles engendreraient continuellement des revendications et donneraient lieu à une foule de procès; Attendu que le juge qui a le droit d'interpréter les titres, ne peut, en la circonstance, le faire dans le sens indiqué par la défenderesse; Attendu qu'il résulte de l'enquête que les habitants de la commune de Nesles-la-Vallée ont, de temps presque immémorial, passé sans aucune difficulté ni sans contradiction sur la sente reliant le Pontenay à la Falaise; qu'en effet les témoins entendus, dont deux octogénaires de quatre-vingt-six et de quatre-vingts ans, nous ont déclaré que depuis leur plus tendre enfance eux ou leurs parents se servaient de la sente en question; que le nommé Amelot, âgé de quatre-vingt-six ans, a même déclaré qu'il a vu parfois le cantonnier de la commune, le nommé Quatorze, réparer la sente qui était en mauvais état en certains endroits; qu'un autre témoin, le nommé Petit, dépose également en ce sens et ajoute quefc'est le maire, M. Caffin, qui lui a fourni des matériaux pour réparer un passage dangereux qu'il lui avait signalé; que d'autres témoins âgés

de quatre-vingts, soixante-dix-huit, soixante- seize, soixante- quinze, soixante-deux, cinquante-cinq et cinquante ans déposent dans le même sens;-Attendu que plusieurs d'entre eux ont des prés le long du Sausseron et transportent leurs foins au moyen de brouettes qu'ils déchargent dans des charrettes stationnées au Pontenay. Or jamais, disent-ils, ni Mme Blaziooski ni ses auteurs ne les ont empêchés de passer; Qu'enfin un autre témoin déclare que l'entrée de ladite sente du côté de la Falaise étant en très mauvais état, il a entendu un jour M. Caffin, alors maire de Nesles, donner l'ordre de construire un ponceau partant de la route jusqu'à l'entrée de la sente; Attendu que toutes ces petites réparations ordonnées par le maire, quoi qu'en dise la défense, nous démontrent clairement que la commune considérait bien cette sente comme étant un chemin public qu'elle se fût bien gardée d'entretenir s'il ne l'avait pas été ; qu'elle s'intéressait au contraire à la bonne viabilité de cette sente, laquelle, il faut le dire aussi, est une promenade ravissante en été non seulement pour les habitants, mais aussi pour les nombreux étrangers qui ont des propriétés à Nesles-la-Vallée.

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présence de ce tourniquet ne sert qu'à nous démontrer, une fois de plus, la publicité de la sente, car si Mme Blaziooski s'était considérée véritablement comme propriétaire de la partie de la sente qui longe son jardin, ce n'est pas un tourniquet qu'elle eût fait établir, mais bien une barrière immobile; Attendu que la défense objecte encore que cette sente est dangereuse pour les piétons qui ont ailleurs un chemin vicinal qui n'allonge le trajet du Pontenay à la Falaise que de 13 mètres; que cet argument ne prouve rien, si ce n'est que la commune a deux chemins à sa disposition; que, du reste, le danger n'est pas aussi grand qu'on veut bien le faire croire, puisque le Sausseron, qui n'est qu'un ruisseau, a à peine 50 centimètres de profondeur; - Il est certain, cependant, que si tous les propriétaires riverains entretenaient la sente comme le fait Mme Blaziooski, cela vaudrait infiniment mieux pour tout le monde; mais comme ces riverains n'y ont pas, comme Mme Blaziooski, une habitation, mais seulement des prés ou des jardins, ils se contentent alors de boucher les ornières s'il s'en produit, de façon à pouvoir passer sans difficulté avec leurs brouettes chargées de foin, de bois ou de légumes; - Ils n'ont pas non plus de gravats à leur disposition comme leur voisine, et il s'ensuit que la sente, nous le reconnaissons, n'est pas aussi bien entretenue de leur côté ; — Attendu qu'il résulte encore de l'enquête, que des lavoirs étaient établis le long du Sausseron (six, nous dit un des octogénaires) et que tout le monde s'y rendait; que le lavoir dit Caffin était également public et

que jamais Mme Blaziooski ni ses auteurs ne l'ont interdit à personne; qu'il ne faut pas s'imaginer cependant qu'il s'agit ici d'un lavoir avec toiture, mais seulement de cinq ou six pierres plates posées en pente le long du ruisseau, de distance en distance, jusqu'à la Falaise, ce qui donne encore à la sente un caractère de propriété communale; Attendu que l'influence due à l'enquête, composée de témoins qui presque tous n'habitent plus Nesles-la-Vallée, est d'autant plus certaine, doit être d'autant plus positive, que la contre-enquête ne l'a combattue que très faiblement par des allégations contraires;que même plusieurs témoins de cette contreenquête ont déposé presque dans le même sens que ceux de l'enquête, à savoir, par exemple, que pour se rendre de la. Falaise au Pontenay, le chemin de la sente est plus court, plus direct que par le chemin vicinal; que les gens de Labbeville qui se rendent deux fois par semaine au marché de L'Isle-Adam, prennent cette sente en descendant du train pour aboutir plus vite à la route de L'Isle-Adam; Qu'un de ces mêmes témoins a même fait cette déposition capitale : que Mme Blaziooski faisait déposer les pierres et les autres matériaux qui l'encombraient sur ladite sente que l'on considérait, dans le village, comme un lieu de décharge publique; Attendu qu'il est suffisamment démontré que la possession, telle qu'elle a été exercée par la commune de Nesles-la-Vallée, sur cette sente, remonte à plus de quatrevingt-six ans ; qu'elle a toujours été paisible, publique, non équivoque et suffit en tout cas pour opé

rer la prescription; - Par tous ces motifs, faisant droit à la commune de Nesles-la-Vallée, représentée par son maire; sans nous arrêter aux fins, moyens et conclusions de la défenderesse dans lesquels elle est mal fondée; jugeant contradictoirement en premier ressort; — Déclarons recevable l'action en complainte possessoire intentée par ladite commune à Mme Blaziooski;

Maintenons la commune de Nesles-la-Vallée en sa possession, faisons défense à Mme Blaziooski de l'y troubler à l'avenir; - Ordonnons que Mme Blaziooski sera tenue, dans le délai de quarante-huit heures à partir de la signification du présent jugement, de rendre la sente à son état primitif en enlevant les barrières qu'elle y a fait édifier; et faute par elle de ce faire, autorisons la commune de Neslesla-Vallée à faire ce travail aux frais de la défenderesse, par les moyens d'un homme de l'art qui sera payé sur mémoire par nous taxé, et condamnons Mme Blaziooski en tous les dépens. »

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tes en fait et en droit. Voir notamment en ce sens Cass., 6 août 1888, ANNALES 1890, p. 286. Cet arrêt décide qu'un chemin est présumé appartenir à une commune lorsqu'il relie un lieu ou chemin public à un autre lieu ou chemin également public; qu'il existe de temps immémorial avec le caractère de voie publique, et qu'il a été constamment pratiqué par les habitants de cette commune. Voir aussi dans ce même sens Cass., 18 février 1889, ANNALES 1891, p. 82.

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Attendu que le sieur Mannevy prétendant que la lettre litigieuse a été délivrée à un faussaire et que, dès lors, l'Administration des postes est responsable du préjudice qu'il éprouve, a cité cette dernière pardevant nous pour la faire con damner à lui payer la somme de 150 francs, montant de la valeur

Ainsi décidé par le jugement sui- déclarée, les intérêts de droit et

vant :

At

« Nous, Juge dE PAIX : Vu la citation introductive d'instance; Ouï les parties et leurs conseils en leurs dires, moyens et conclusions; - Vidant notre délibéré; tendu, en fait, que Mannevy a déposé le 10 octobre 1900, au bureau de poste de Joigny, une lettre chargée, valeur déclarée 150 francs, à l'adresse d'un sieur Dupré, courtier en bois, demeurant à Paris, boulevard Beaumarchais, no 69; - Attendu que le lendemain 11 octobre, au matin, cette lettre a été présentée, par le facteur des postes, au domicile du destinataire ;

Que

ce dernier étant absent, sa concierge donna l'ordre au facteur de mettre cette lettre en instance au bureau de Paris n° 12, situé boulevard Beaumarchais, conformément aux

FÉVRIER 1902.

aux dépens; Attendu, en droit, que, d'après l'article 3 de la loi du 4 juin 1859 sur le transport par la poste des valeurs déclarées, l'Administration des postes « est res« ponsable jusqu'à concurrence de «< 2000 francs et sauf le cas de force « majeure des valeurs insérées dans «<les lettres, et déclarées conformé<«<ment aux dispositions des artiQu'elle «cles 1 et 2 de cette loi; « est déchargée de cette responsa<«<bilité par la remise des lettres <<< dont le destinataire ou son fondé << de pouvoir a donné reçu; - Qu'en «< cas de contestation, l'action en << responsabilité est portée devant At«<les Tribunaux civils >>; tendu que, pour se soustraire à la responsabilité édictée par cette loi, l'Administration des postes se base sur ce qu'aucune faute n'aurait été commise par ses agents, sur ce

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qu'ils auraient appliqué strictement l'instruction générale sur le service des postes et des télégraphes, et particulièrement l'article 729 relatif à la livraison des objets chargés ou recommandés adressés poste restante, et, enfin, sur ce que, en admettant que la livraison de la lettre litigieuse ait été faite à un faussaire, cela constitue un véritable cas de force majeure; Attendu qu'il y a lieu d'examiner successivement ces différents moyens présentés par la défense; Attendu que, d'après l'article 729 précité de l'instruction générale, les objets chargés ou recommandés poste restante ne peuvent être livrés que sur le vu d'une des pièces suivantes : carte électorale, diplôme universitaire, patente, permis de chasse, passeport, titre de propriété, etc.;

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Que cet article dit « ne peuvent >> être livrés et non pas doivent être livrés, ainsi qu'il est écrit dans les conclusions de l'administration; Qu'il semble bien résulter de cette rédaction que l'employé a une certaine latitude d'appréciation et que, si la pièce produite lui paraît d'une authenticité douteuse, il a le droit et le devoir d'exiger une autre preuve de l'identité du réclamant; - Attendu que, dans l'espèce, le destinataire Dupré réside boulevard Beaumarchais, à Paris, à quelques pas du bureau de poste no 12, situé également sur le même boulevard ;

Que se présentant au bureau pour réclamer la lettre chargée en question, il paraît naturel qu'il devait produire une toute autre pièce d'identité qu'un passeport allemand soit sa patente, soit une carte d'électeur (ainsi qu'il l'avait fait d'ailleurs quelque temps aupa

ravant à ce même bureau), soit un

titre de propriété ou autre; — Qu'il est évident que, lorsque l'individu disant se nommer M. Dupré produisit ledit passeport allemand, ce fait aurait dû éveiller les soupçons de l'employé et l'inciter à demander au faussaire une autre preuve de son identité; — Qu'il est donc hors de doute que, dans cette circonstance, l'employé a manqué de discernement et a fait preuve d'une légèreté inconcevable; - Que, si ayant appliqué sinon dans son esprit, du moins à la lettre, l'instruction générale, il n'a pas commis une lourde faute, il ne s'ensuit pas que son administration soit exempte de la responsabilité qui lui incombe, et qu'elle ne peut décliner, d'après la loi précitée, qu'en cas de force majeure; Que c'est même pour bénéficier de l'exception fixée par la loi, que cette administration prétend, dans ses conclusions, que, même en admettant que la livraison de la lettre litigieuse ait été faite à un faussaire, ce fait constituerait pour elle un véritable cas de force majeure, l'exonérant de toute responsabilité vis-à-vis du demandeur, dans les termes de l'article 3 de la loi du 4 juin 1859; Attendu qu'il est impossible d'admettre une pareille interprétation dudit article 3; - Qu'en effet, lorsque la loi du 4 juin fut discutée, MM. les commissaires du gouvernement, consultés sur l'étendue de l'exception, ont déclaré à la commission qu'elle était restreinte au cas de vol à main armée; - Attendu que s'il est vrai que, postérieurement, la Cour suprême a étendu cette définition de la force majeure à tous les événements (incendie,

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