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pas requise pour completter les actes de la législation, en les déclarant conformea à la volonté générale.

» Cette prérogative du monarque est particulièrement essentielle dans tout état où le pouvoir législatif ne pouvant, en aucune manière,être exercé par le peuple lui-même, il est forcé de le confier à des représen

tans.

» La nature des choses ne tournant pas nécessairement le choix de ces représentans vers les plus dignes, mais vers ceux que leur situation, leur fortune et des circonstances particulières désignent comme pouvant faire le plus volontiers le sacrifice de leur tems à la chose publique, il résultera toujours du choix de ces représentans du peuple, une espèce d'aristocratie de fait, qui, tendant sans cesse à acquérir une consistance légale, deviendra également hostile pour le monarque à qui elle voudra s'égaler, et pour le peuple qu'elle cherchera toujours à tenir dans l'abaisse

ment.

» De là cette alliance naturelle et nécessaire entre le prince et le peuple, contre toute espèce d'aristocratie; alliance fondée

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sur ce quayant les mêmes intérêts, les memes craintes, ils doivent avoir un même but, et par conséquent une même volonté.

» Si, d'un côté, la grandeur du prince dépend de la prospérité du peuple, le bon heur du peuple reposé principalement sur la puissance tutélai e du prince..

» Ce n'est donc point pour son avantage particulier que le monarque intervient dans la législation, mais pour l'intérêt même du peuple, et c'est dans ce sens que l'on peut et que l'on doit dire que la sanction royale n'est point la prérogative du monarque, mais la propriété, le domaine de la na tion.

» J'ai supposé jusqu'ici un ordre de choses vers lequel nous marchons à grands pas, je veux dire une monarchie organisée et constitué; mais comme nous ne sommes point encore arrivés à cet ordre de choses, je dois m'expliquer hautement. Je pense que le droit de suspendre, et même d'ar rêter l'action du corps législatif, doit ap partenir au roi, quand la constitution sera faite, et qu'il s'agira seulement de la maintenir. Mais ce droit d'arrêter, ce veto ne sauroit s'exercer quand il s'agit de créer

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la constitution. Je ne conçois pas comment on pourroit disputer à un peuple le droit de se donner à lui-même la constitution, par laquelle il lui plaît d'être gouverné dé sormais.

>> Cherchons donc uniquement si, dans la constitution à créer, la sanction royale doit entrer comme partie intégrante de la législature.

» Certainement, à qui ne saisit que les surfaces, de grandes objections s'offrent contre l'idée d'un veto exercé par un individu quelconque, contre le vœu des représentans du peuple. Lorsqu'on suppose que l'assemblée nationale, composée de ses vrais élémens, présente au prince le fruit de ses délibérations par tête, lui offre le résultat de la discussion la plus libre et la plus éclairée, le produit de toutes les commoissances qu'elle a pu recueillir, il semble que c'est-là tout ce que la prudence humaine exige pour constater, je ne dis pas seulement la volonté, mais la raison générale ; et sans doute, sous ce point de vue abstrait, il paroit répugner au bon sens d'admettre qu'un homme seul ait le droit de répondre Je m'oppose à cette volonté, à cette raison

générale. Cette idée devient même plus choquante encore, lorsqu'il doit être établi par la constitution, que l'homme armé de ce terrible veto, le sera de toute la force publique, sans laquelle la volonté générale ne peut jamais être assurée de son exé→ cution.

>> Toutes ces objections disparoissent devant cette grande vérité, que, sans un droit de résistance dans la main du dépositaire de la force publique, cette force pourroit souvent être réclamée et employée malgré lui à exécuter des volontés contraires à la volonté générale.

» Or, pour démontrer, par un exemple, que ce danger existeroit, si le prince étoit dépouillé du veto sur toutes les propositions que lui présenteroit l'assemblée nationale je ne demande que la supposition sur un mauvais choix de représentans, et deux règlemens intérieurs, déja proposés et autorisés par l'exemple de l'Angleterre ;

savoir :

» L'exclusion du public de la chambre nationale, sur la simple requisition d'un membre de l'assemblée, et l'interdiction

aux papiers publics de rendre compte de ses délibérations.

» Ces deux règlemens obtenus, il est évident qu'on passeroit bien tôt à l'expulsion de tout membre indiscret, et la terreur du despotisme de l'assemblée agissant sur l'assem blée même, il ne faudroit plus, sõus un prince foible, qu'un peu de temps et d'adresse pour établir légalement la domination de douze cents aristocrates, réduirė l'autorité royale à n'être que l'instrument passif de leurs volontés, et replonger le peuple dans cet état d'avilissement qui accompagne toujours la servitude du prince.

» Le prince est le représentant perpétüel du peuple, comme les députés sont ses représentans élus à certaines époques. Les droits de l'un, comme ceux des autres, ne sont fondés que sur l'utilité de ceux qui les ont établis

» Personne ne réclame contre le veto de l'assemblée nationale, qui n'est effectivement qu'un droit du peuple confié à ses représentans, pour s'opposer à toute proposition qui tendroit au rétablissement du despotisme ministériel. Pourquoi donc récla

iner

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