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nicipal eût imposé la première de ces conditions à l'exercice du pâturage par l'habitant d'origine étrangère, le jugement attaqué n'a violé aucune loi; REJETTE.

Du 21 juin 1861. (MM. Vaïsse, pr.; Legagneur, rapp.; Guyho, av. gen., c. conf.)

N° 150.

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COUR IMPERIALE DE PARIS (Ch. corr.).

11 janvier 1862. Pêche, délit, exception préjudicielle, droit réel, bail verbal. Au cas de prévention de délit de pêche commis dans un cours d'eau, l'exception proposée par le prévenu, et tirée d'un bail verbal qui lui conférerait le droit de pêche dans ce cours d'eau, à titre de fermier d'un héritage riverain, ne constitue pas une exception fondée sur un droit réel dont la connaissance appartienne à la juridiction civile; le tribunal correctionnel doit statuer lui-même sur l'exception (1).

(Delon c. Feray.)

Le sieur Delon, fermier d'un pré appartenant au sieur Feray, a été traduit, à la requête de ce dernier, devant le tribunal correctionnel de Corbeil, pour avoir pêché, sans autorisation, dans la partie de la rivière non navigable d'Essonnes, qui est contigue au pré dont il s'agit. Devant le tribunal, le prévenu a soulevé une exception préjudicielle, tirée de ce qu'en lui donnant à bail son pré, le sieur Feray lui avait implicitement affermé le droit de pêche sur les parties de l'Essonnes qui en dépendent. Il a, en conséquence, demandė son renvoi à fins civiles. Cette exception a été rejetée par jugement ainsi conçu: « Le tribunal; Attendu qu'il est de principe que le prévenu en matière de délit ou de contravention ne peut arrêter le cours de la justice par des exceptions préjudicielles qui n'auraient d'autre but que de retarder la répression; Qu'il suit de la que le juge ne doit admettre l'exception et surseoir jusqu'à ce qu'il ait été statue par le tribunal competent, qu'autant que cette exception est fondée sur un titre ou sur une articulation précise de nature à enlever au fait, si elle était prouvée, son caractère de criminalité;

« Attendu que Delon ne justifie d'aucun titre spécial au fait qui lui est reproché; Que la circonstance que des pièces de terre à lui louées par Feray bordent la rivière d'Essonnes ne saurait constituer par elle-même un droit à la jouissance d'une partie quelconque de cette rivière; - Que Delon n'articule aucun fait de possession ou jouissance de ladite rivière; Sans s'arrêter ni avoir égard à l'exception, dit qu'il sera passé outre au débat. » Le sieur Delon a interjeté appel de ce jugement.

ARRÊT.

LA COUR ; Considérant que Delon, poursuivi pour fait de pêche sur la rivière d'Essonnes, demande qu'il soit sursis à statuer jusqu'à ce que le tribunal civil ait décidé la question de savoir si, comme locataire d'un pré riverain

(1) Il a été jugé dans le mème sens, en matière de chasse, que l'exception tirée soit d'une permission, soit d'un bail du droit de chasse, ne peut donner lieu à un renvoi à fins civiles et doit être appréciée par la juridiction correctionnelle. Crim. cass., 22 janvier 1833, affaire Bergeret, et 8 janvier 1853, affaire de Ruzé (*). Voir, dans le même sens, MM. Meaume, Comment., n° 1295; Mangin, Act. publ., no 203 et 204; Le Sellyer, Droit crim., t. IV, no 1499.

(*) Ce dernier arrêt, qui est rapporté à la date du 7 janvier 1853 dans le Bulletin officiel de la Cour de cassation, porte la date du 8 janvier dans la Table générale de cet ouvrage, vis QUESTION PREJUD., no 67, ainsi que dans la plupart des recueils de jurisprudence.

de ladite rivière sur lequel a été accompli le fait incriminé, il n'a pas implicitement le droit de pêcher sur ledit pré;

LÉGISLATION ET JURISPRUdence.

Considérant que le juge de l'action est juge de l'exception, sauf les cas prévus par les articles 182 du Code forestier et 59 de la loi du 15 avril 1829; Considérant que Delon n'est pas dans les cas prévus par ces lois; qu'en fondée effet, en premier lieu, il ne prouve pas sa location qui, d'après lui-même, ne serait que verbale, et qu'en conséquence son exception n'est pas sur un titre apparent; qu'en second lieu, le prétendu droit qu'il invoque serait un simple droit de jouissance temporaire qui, par sa nature, est essentiellement mobilier et non un droit réel:

Considérant que Delon n'articule d'ailleurs aucun autre fait précis, dont l'appréciation appartienne exclusivement et préjudiciellement au tribunal civil;-CONFIRME.

Du 11 janvier 1862. bert et Sorel, av.)

-

(MM. de Gaujal, pr.; Marie, av. gén., c. conf.; Gi

No 151. COUR DE CASSATION (Ch. civ.). ·

-28 juillet 1862.

Bois communal, délimitation générale, procès-verbal, application,

erreurs matérielles, tribunaux, sursis.

Le Tribunal qui constate en fait, d'après une expertise administrative, que le procès-verbal et le plan de délimitation générale d'un bois communal renferment des erreurs matérielles qui en rendent l'application impossible sur le terrain, peut, sans méconnaître l'autorité attachée à ces actes par l'article 12 du Code forestier, et par conséquent sans violer cet article et sans commettre un excès de pouvoir, délaisser les parties à se pourvoir devant qui de droit, pour qu'il soit procédé à une nouvelle délimitation générale.

(Guillemard-Drouhin c. commune de Méloisey.

Pendant le courant des années 1847 et suivantes, il a été procédé par le sieur Doucey, arpenteur forestier, à la délimitation générale de la forêt communale de Méloisey. Le procès-verbal de l'opération, clos le 2 décembre 1850, n'ayant été l'objet d'aucune opposition dans le délai légal, fut homologué par le gouvernement, et le 6 février 1853, on procéda au bornage sans réclamations de la part des propriétaires riverains.

En 1856, l'un de ces propriétaires, le sieur Guillemard-Drouhin, ayant cru reconnaître que le bornage n'avait pas été opéré en ce qui touche son héritage, conformément au procès-verbal et aux plans de délimitation, forma une réclamation devant le préfet qui, par arrêté du 11 avril, chargea M. Leblan, garde général des travaux d'art à Dijon, de procéder à la rectification du bornage. D'après le procès-verbal dressé par cet agent dans le courant du mois de mai, il y aurait eu lieu de reporter certaines bornes à l'intérieur de la forêt, et d'attribuer ainsi au sieur Guillemard-Drouhin une parcelle boisée d'environ 44 ares.

La commune de Méloisey protesta contre l'opération, et par un nouvel arrêté du 24 décembre 1856, le préfet, rapportant celui qu'il avait pris le 11 avril précédent, ordonna qu'il serait purement et simplement procédé à la reconnaissance des limites de la forêt communale, dans la partie contiguë à la propriété du sieur Guillemard-Drouhin.-Ancune des parties ne poursuivit l'exécution de cet arrêté, mais le sieur Guillemard-Drouhin ayant coupé quelques arbres sur le terrain litigieux, fut poursuivi devant la juridiction correctionnelle. Il excipa de son droit de propriété, et fut en conséquence

renvoyé devant le Tribunal civil de Beaune, qui rendit, le 13 janvier 1859, un jugement, avant faire droit, par lequel il chargea des experts de reconnaître et indiquer la place que devaient occuper les bornes qui n'auraient pas été placées conformément au procès-verbal de délimitation générale.

Sur l'appel de la commune de Méloisey, la Cour impériale de Dijon, par arrêt du 26 mai 1859, prononça un sursis de six mois, pendant lequel les parties se retireraient devant le préfet, pour être procédé à l'exécution de l'arrêté du 24 décembre 1856. - Puis, sur le vu du procès-verbal de délimitation partielle dressé le 15 septembre 1859, par M. le garde général Leblan, il est intervenu, le 25 janvier 1860, un second arrêt qui infirme en ces termes la décision dont appel :

« Considérant que l'expert Leblan ayant procédé à l'opération (prescrite par l'arrêté du 11 avril 1856) sans que les parties aient pu se mettre d'accord, il a été dressé, à la date du 15 septembre 1859, un nouveau procèsverbal, duquel il résulte que le procès-verbal et le plan de délimitation du 2 décembre 1850, renferment évidemment des erreurs matérielles de telle nature qu'il est impossible d'en faire l'application sur le terrain, sans changer et déplacer complétement le but et la portée de l'opération de 1850, laquelle était purement et simplement la délimitation générale, notamment du canton de bois, lieu dit des Pins perdus, ayant pour communes limitrophes, est-il dit, celles de Méloisey et d'Echarnant;-Qu'en effet, et abstraction faite de cette circonstance de fait, que si les bornes primitivement plantées en février 1853, l'ont bien été en lieu et place des piquets primitifs, ces piquets eux-mêmes n'ont jamais été plantés aux points indiqués par le plan de délimitation, en sorte que l'opération matérielle inscrite sur le terrain, dès le principe, ne permettait pas de supposer que le plan et les lignes tracés sur le papier ne dussent pas être conformes, ce plan de délimitation qui ne pouvait et ne devait porter que sur les bois de Méloisey, situés naturellement sur le territoire de cette commune, aurait pour résultat dans son application au terrain, d'entamer le territoire de la commune d'Echarnant, et même de planter une partie des bornes dans l'intérieur d'une parcelle de terre dont on n'avait jamais pensé à appeler le propriétaire à l'opération de délimitation de 1859;

« Considérant que si les tribunaux doivent se conformer rigoureusement aux plans et proces-verbaux de délimitation devenus définitifs, aux termes de l'article 12 du Code forestier, lorsqu'il s'agit d'asseoir le bornage et les droits respectifs des propriétés contigues, ce ne peut être cependant qu'autant que les plans et les procès-verbaux invoqués ne sont pas empreints de défectuosités qui fassent matériellement obstacle à la possibilité de leur application sur le terrain; Mais, lorsque l'ensemble du plan de délimitation générale d'un canton de bois se présente dans des conditions de défectuosité et d'impossibilité d'application matérielle, comme dans l'espèce de la cause actuelle, il ne reste à la justice, en reconnaissant et déclarant cette impossibilité, qu'à délaisser les parties à se pourvoir comme de droit, pour arriver à une délimitation générale et régulière du canton de bois dont il s'agit de fixer les limites;

«Par ces motifs, la Cour met le jugement dont est appel au néant, en ce qu'il ordonne, avant faire droit, une vérification par expert des lieux contentieux, pour la fixation des bornes, du plan de délimitation du 2 dėcembre 1850; réformant et reconnaissant que ledit plan est matériellement défectueux, non susceptible d'application régulière sur le terrain, délaisse en conséquence les parties à se pourvoir conformément à la loi, afin qu'il soit procédé à une nouvelle délimitation générale du canton de bois dont il s'agit, pour ensuite, et à la vue de la nouvelle délimitation, être statué au fond ce qu'il appartiendra. »

Le sieur Guillemard-Drouhin s'est pourvu en cassation contre cet arrêt,

pour violation de l'article 12 du Code forestier, et excés de pouvoir, en ce que l'arrêt attaqué aurait refusé d'appliquer purement et simplement un procès-verbal de délimitation devenu définitif, et auquel l'article précité attache tous les effets d'un titre de propriété, et aurait ainsi critiqué, comme entaché d'erreur, non-seulement le proces-verbal lui-même, mais aussi le décret d'homologation par lequel le chef de l'Etat s'était approprié toutes les constatations qui s'y trouvaient contenues.

ARRÊT.

LA COUR; Sur le moyen unique du pourvoi :

Attendu que l'arrêt attaqué n'a point méconnu, en principe, qu'une délimitation régulièrement faite par l'administration forestière et devenue définitive, aux termes de l'article 12 du Code forestier, dût recevoir exécution; Mais que cet arrêt a constaté, en fait, d'après l'expertise à laquelle il a été procédé en exécution de l'arrêté du préfet de la Côte-d'Or, du 24 décembre 1836, que le procès-verbal et le plan de délimitation dresses par l'administration forestière, le 2 décembre 1850, renferment évidemment des erreurs matérielles de telle nature qu'il est impossible d'en faire l'application sur le terrain sans dépasser complétement le but et la portée de la delimitation telle qu'elle a été opérée sur les lieux; - Qu'en effet, le plan de délimitation qui ne pouvait et ne devait porter que sur les bois de la commune de Meloisey, aurait pour résultat, dans son application au terrain, d'entamer le territoire de la commune voisine, et même de planter une partie des bornes dans l'intérieur d'une parcelle de terre dont le propriétaire n'a pas été appelé à cette délimitation;

Attendu qu'en présence de cet acte administratif, dont l'exécution a été reconnue matériellement impossible, et qu'il n'appartenait pas à l'autorité judiciaire d'interpréter ou de rectifier, la Cour impériale de Dijon en délaissant les parties à se pourvoir conformément à la loi, afin qu'il soit procédé à une nouvelle délimitation générale du bois dont il s'agit, n'a ni commis un excès de pouvoir, ni violé l'article 12 du Code forestier; Par ces motifs, REJETTE. Du 28 juillet 1862. - (MM. Pascalis, pr.; Mercier, rapp.; de Marnas, 1er av. gén., c. conf.; Mazeau et Collet, av.)

N° 152.

TRIBUNAL CIVIL de Villefranche.

28 mars 1862.

Chasse, gibier, poursuite, lièvre forcé.

Le gibier doit être réputé en la possession du chasseur du moment où celui-ci l'a mis dans l'impossibilité de lui échapper (1).

Il en est ainsi notamment lorsque les chiens d'un chasseur ont forcé un lièvre et sont sur le point de l'atteindre (2).

En conséquence, celui qui, par un moyen quelconque, s'empare de ce gibier sur le terrain d'autrui, est passible de dommages-intérêts envers le chasseur (3).

(Morel c. Godard.)

Les chiens du sieur Morel étaient sur le point d'atteindre un lièvre qu'ils poursuivaient depuis trois heures et qu'ils avaient forcé, lorsqu'un chien de

(1-2) Voir, sur la question, les observations consignées à la suite de l'arrêt de cassation du 29 avril 1862, affaire Cooper, ci-après, p. 284.

(3) Il en serait autrement si, au moment où il a été capturé, le gibier se trouvait sur le terrain de celui qui se l'est approprié. Voir les deux arrêts qui sui

vent.

berger, appartenant au sieur Duperret, se jeta en travers de la chasse et courut sus au lièvre qu'il étrangla. Le sieur Godard, qui était occupé à des travaux agricoles à quelques pas du lieu où cette scène se passait, alla ramasser ce lievre et refusa de le rendre au sieur Morel, sous le prétexte que le gibier appartient au premier occupant.

Le sieur Morel lui ayant répliqué par des injures, le sieur Godard l'actionna en dommages-intérêts devant le juge de paix de Tarare. Le sieur Morel forma, de son côté, une demande reconventionnelle en payement de la valeur du liévre. Une sentence du juge de paix renvoya les plaideurs dos à dos. Cette sentence fut frappée d'un double appel.

Laissant de côté tout ce qui a trait au chef d'injures, nous reproduisons, comme intéressante pour les chasseurs, la partie de la décision du tribunal de Villefranche qui concerne la demande du sieur Morel.

JUGEMENT.

LE TRIBUNAL; Attendu, en droit, qu'il est incontestable que les animaux sauvages, dans leur état de liberté naturelle, n'appartiennent à personne, et qu'ils deviennent la propriété du premier occupant; que c'est, en d'autres termes, par droit d'occupation réelle que se fait cette espèce d'acquisition; Attendu que la seule difficulté qui divise les auteurs est celle de savoir à quel moment précis doit s'opérer, pour le chasseur notamment, l'occupation suffisante pour lui faire acquérir, d'une manière définitive le gibier poursuivi;

Qu'il est toutefois généralement admis que, pour qu'un chasseur soit réputé s'être emparé d'un animal, il n'est pas précisément nécessaire qu'il ait mis la main dessus, et qu'il suffit que, de quelque façon que ce soit, l'animal soit tombé en sa puissance, de manière à ne pouvoir s'échapper;

Attendu, en fait, qu'il n'est pas douteux, dans l'espèce, que le lièvre pris par le chien de Duperret, et dont s'est emparé Godard, est en réalité le même que celui que Morel prétend avoir été poursuivi par ses chiens pendant plus de trois heures; Qu'en effet, Godard lui-même n'a pas sérieusement contesté aux débats cette identité dont il a, au contraire, reconnu la vraisemblance; Que si l'enquête, qui n'avait d'ailleurs pour objet que de prouver les injures adressées par Morel à Godard, n'établit pas positivement que le lievre ait été lancé par les chiens de Morel, elle ne contredit point non plus le système et les allégations de ce dernier que rien dès lors ne vient détruire, et qui doivent subsister;

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Attendu, en outre, qu'il résulte, soit de l'enquête, soit de tous les documents de la cause, que le lievre avait été non-seulement poursuivi, mais encore forcé par les chiens de Morel; que la preuve évidente de ce fait résulte de la facilité et de la promptitude avec laquelle un chien de berger, celui de Duperret, est parvenu à le saisir; que, dans cette situation, il faut reconnaitre que ce gibier, ainsi forcé par les chiens de Morel, étant dans l'impossibilité de pouvoir échapper à ce dernier, était, en conséquence, tombé en sa puissance, et que Godard était sans droit pour se l'approprier;

Par ces motifs, condamne Godard à payer à Morel la somme de 6 francs, pour la valeur du lièvre dont il s'agit.

Du 28 mars 1862. (M. Sauzet de Fabrias, pr.)

N° 153.

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COUR IMPÉRIALE DE DIJON (Ch. civ.).—2 août 1859.
Chasse, gibier, chevreuil, poursuite, terrain d'autrui.

Le chasseur qui a lancé une pièce de gibier sur sa propriété n'a pas le droit de la poursuivre sur un terrain dont la chasse ne lui appartient

pas.

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