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Les créanciers ont le même droit sur le mobilier qui serait échu aux époux pendant la communauté, s'il n'a pas été constaté par un inventaire ou état authentique.

72. Si la communauté avait été poursuivie pour dettes du mari, déclaré, par le contrat de mariage, franc et quitte de toutes dettes antérieures au mariage, la femme aurait droit à une indemnité qui se prendrait soit sur la part de communauté revenant à l'époux débiteur, soit sur les biens personnels de cet époux, et, en cas d'insuffisance, cette indemnité pourrait être poursuivie, par voie de garantie, contre le père, la mère, l'aïeul ou le tuteur qui l'auraient déclaré franc et quitte. Ces dispositions pourraient être invoquées par les héritiers du mari, à raison d'une dette provenant du chef de la femme (art. 1510 et suivants C. N.).

SECTION Ve.

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- De la faculté accordée à la femme de reprendre son apport franc et quitte. 73. Cette faculté, personnelle à la femme, lui permet, dans le cas où elle renonce à la communauté, de reprendre tout ou partie de ce qu'elle y a apporté, soit lors du mariage, soit depuis, lorsqu'elle a déclaré, par le contrat, entendre ainsi exercer la reprise de son apport.

74. Elle a dû, toutefois, s'expliquer catégoriquement, c'està-dire d'une manière précise, sur ce point.

Ainsi, la faculté de reprendre le mobilier que la femme a apporté lors du mariage ne s'étend pas à celui qui lui serait échu pendant le mariage.

75. L'apport, du reste, ne peut être repris que déduction faite des dettes personnelles à la femme et que la communauté aurait acquittées (art. 1514 C. N.).

76. De la stipulation de reprise de son apport franc et quitte nait pour la femme une faveur tout exceptionnelle, puisqu'elle peut avoir part aux bénéfices, si la communauté prospère, et se décharger de toute perte, dans le cas contraire. Cette faveur, du reste, lui est attribuée par le motif qu'elle n'a eu aucune part à l'administration de la communauté.

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77. Cette stipulation, très-usitée dans les contrats de mariage et qui constitue une véritable donation de survie (1), autorise la veuve à prélever avant tout partage une certaine somme ou une certaine quantité d'effets mobiliers en nature (2).

Ce prélèvement ne lui est accordé, toutefois, qu'autant qu'elle accepte la communauté, à moins que le contrat de mariage ne lui en ait réservé le droit, même en cas de renonciation.

Hors le cas de cette réserve, le préciput ne s'exerce que sur la masse partageable de la communauté (3), et non sur les biens personnels du mari.

78. La mort naturelle ou civile donne ouverture au préciput (4). 79. Les créanciers de la communauté ont toujours le droit de faire vendre les effets compris dans le préciput, sauf le recours de la veuve sur le prix provenant de la vente et jusqu'à concurrence de la quotité du préciput (art. 1515 et suivants C. N.). 80. La femme a une hypothèque légale (5) pour le préciput qui lui a été constitué (n° 2 de l'article 2135 C. N.).

SECTION VIIe.. -

Des clauses par lesquelles on assigne à chacun des époux des parts inégales dans la communauté.

81. Les époux peuvent déroger au partage égal (6) établi par la loi :

(1) Donation faite à celui des époux qui survit à l'autre.

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(2) Limitativement, comme par exemple, jusqu'à concurrence d'une somme déterminée d'une manière illimitée, comme, par exemple, tout le linge, toute l'argenterie, etc.

(3) Il faut donc distraire, au préalable, les reprises des époux, les remplois, les indemnités, les récompenses, les deniers propres à l'un ou à l'autre des époux, les dettes de la communauté, ses charges.

Si, après ces prélèvements, il ne reste rien, la femme perd ses droits au préciput à moins que le contrat de mariage n'ait stipulé que la femme aurait droit au préciput même en renonçant; dans ce dernier cas, les biens personnels du mari seraient atteints.

(4) La mort naturelle ou civile seulement (voir aux nos 1406 et 1407 ce qui sera dit touchant les effets de la séparation de corps. Voir au no 104, à la note, ce qu'on entend par mort civile).

(5) Voir aux nos 753 et 754 ce qu'on entend par une hypothèque légale.

(6) On verra plus bas et sous les nós 211 et 212 qu'en cas d'acceptation de

1. En ne donnant à l'époux survivant ou à ses héritiers dans la communauté qu'une part moindre que la moitié;

2o En ne lui donnant qu'une somme fixe pour tout droit de communauté;

3o En stipulant que la communauté entière, en certains cas, appartiendra à l'époux survivant;

4° Et enfin qu'elle n'appartiendra qu'à l'un d'eux seulement. Ces deux dernières stipulations ne sont point réputées un avantage sujet aux règles relatives aux donations, soit quant au fond, soit quant à la forme, mais simplement une convention de mariage et entre associés (§ 2 de l'article 1525 C. N.).

Les règles dont il s'agit seront exposées sous le titre qui les

concerne.

82. La stipulation d'après laquelle l'un des époux ne devrait avoir qu'une part moindre que la moitié est le résultat de la liberté donnée aux époux de faire toutes les conventions matrimoniales non prohibées par la loi.

83. Si donc, l'un des époux ou ses héritiers ne devaient avoir, d'après cette stipulation, qu'un tiers ou un quart, ils ne supporteraient les dettes de la communauté que dans cette proportion, et la convention serait nulle si elle obligeait l'époux ainsi réduit ou ses héritiers à supporter une plus forte part ou si elle les dispensait de supporter une part dans les dettes, égale à celle qu'ils prendraient dans l'actif.

84. Lorsqu'il a été stipulé que l'un des époux ou ses héritiers ne pourraient prétendre qu'à une somme fixe pour tout droit de communauté, cette clause est un forfait (1) qui oblige l'autre époux ou ses héritiers à payer la somme convenue, que la communauté soit bonne ou mauvaise, suffisante ou non pour acquitter cette somme.

la communauté par la femme, l'actif se partage par moitié entre les époux ou ceux qui les représentent; et que les dettes de la communauté sont à la charge de chacun d'eux, dans la même proportion.

(1) Le forfait est une convention réciproque dont les effets, quant aux avantages et aux pertes, soit pour toutes les parties, soit pour l'une ou plusieurs d'entre elles, dépendent d'un événement incertain (art. 1964 C. N.).

Les héritiers du mari ne pourraient donc être admis à s'affranchir vis-à-vis de la veuve de l'obligation de lui payer la somme convenue, dans le cas même où cette somme ne se trouverait pas dans les biens de la communauté.

85. Si la clause n'établissait le forfait qu'à l'égard des héritiers de la femme, la veuve aurait droit au partage légal par moitié (art. 1474 et 1523 C. N. combinés).

86. Du reste, la clause d'après laquelle la femme serait réduite à ne prétendre qu'une certaine somme pour tout droit de communauté équivaut à une renonciation à cette communauté, et les créanciers n'ont, dans ce cas, aucune action contre elle, à moins qu'elle ne se fût obligée solidairement (1) avec son mari, ou que la dette, devenue dette de la communauté, ne provînt originairement de son chef.

87. Lorsqu'il a été stipulé que la communauté entière appartiendrait à l'époux survivant moyennant une somme convenue, la veuve a le droit de retenir toute la communauté (2) contre les héritiers du mari, et elle a le choix ou de leur payer cette somme, en demeurant obligée à toutes les dettes, ou de renoncer à la communauté et d'en abandonner aux héritiers du mari les biens et les charges.

Cette faveur particulière à la femme est la conséquence de la faculté que lui donne la loi d'accepter la communauté ou d'y renoncer, et qui déclare nulle toute

(art. 1453 C. N.).

convention contraire

88. Si, d'après la stipulation, la totalité de la communauté devait appartenir au mari seul, ses héritiers, qui la retiendraient, seraient obligés d'en acquitter toutes les dettes, dont la femme se trouverait entièrement déchargée: ils seraient tenus, en outre, de subir la reprise par la veuve des apports et capi

(1) C'est-à-dire qu'elle se fût obligée à une même chose que son mari, de manière qu'elle et lui pussent être contraints pour la totalité.

(2) Il faut supposer qu'après avoir pris conseil d'elle-même ou d'autres, la veuve a reconnu que la communauté présentait un avoir supérieur à ses dettes et charges.

taux tombés (1) de son chef, c'est-à-dire provenant d'elle, dans la communauté.

SECTION VIIIe. De la communauté à titre universel (2).

89. Les époux peuvent établir par leur contrat de mariage une communauté universelle de leurs biens, tant meubles qu'immeubles, présents et à venir (3), ou de tous leurs biens présents seulement, ou de tous leurs biens à venir seulement (art. 1526 C. N.).

Ce sont des stipulations qu'autorise la liberté qui préside aux conventions matrimoniales.

90. Celle d'après laquelle tous les biens meubles et immeubles présents et à venir entrent dans la communauté amène un partage égal par moitié, lors de la dissolution, et la femme qui renonce à la communauté n'a droit à aucune reprise.

DISPOSITIONS COMMUNES AUX HUIT SECTIONS CI-DESSUS.

91. Nous avons vu, sous les no 1 et 51, que les conventions matrimoniales n'avaient d'autres limites que celles assignées par les bonnes mœurs et l'ordre public. Il en résulte que les stipulations dont est susceptible la communauté conventionnelle ne sont pas limitées par les dispositions précises des huit sections ci-dessus.

92. Toutefois la liberté qui préside aux conventions matrimoniales reçoit une restriction particulière, lorsqu'il existe des enfants d'un précédent mariage.

Dans ce cas, toute convention qui tendrait, dans ses effets, à donner à l'un des époux au delà d'une part d'enfant légitime

(1) Il s'agit ici des apports et capitaux qui n'avaient point été mis par la femme en communauté et qui, cependant, se sont confondus parmi les meubles de la communauté, ou qui sont tombés dans la caisse de celle-ci.

(2) Cette stipulation a une ressemblance complète avec la clause d'ameublissement général ou indéterminé, suivant laquelle les époux qui n'ont pas exclu leur mobilier présent et futur de la communauté y comprennent tous leurs immeubles présents et futurs par la voie de l'ameublissement.

(3) La femme s'est ainsi dépouillée de tout droit de propriété et d'administration pour la conférer à son mari.

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