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cas, il se fut fait autoriser par la justice, et que la vente ait eu lieu par officier public, après les affiches et publications réglées par les lois sur la procédure (art. 796 C. N., 946 et 986 C. de proc. civ. combinės).

910. L'héritier bénéficiaire est chargé, comme il a été dit plus haut, d'administrer les biens de la succession, c'est-à-dire de poursuivre le recouvrement des sommes dues, d'affermer temporairement les héritages, d'y faire faire les réparations nécessaires, de soutenir les procès intentés par ou contre le défunt, ou ceux qui viendraient à naître depuis le décès, interrompre les prescriptions (1), acquitter les charges courantes, etc., etc.

Cette administration doit être empreinte de bonne foi. La loi demande à l'héritier bénéficiaire d'y apporter la diligence et le soin dont il est capable et qu'il mettrait dans ses propres affaires; aussi, n'est-il tenu que des fautes graves, c'est-à-dire des fautes lourdes et grossières, qui seraient impardonnables dans l'administration de son bien personnel (art. 804 C. N.).

911. Il ne peut vendre les meubles de la succession que par le ministère d'un officier public, aux enchères, et après les affiches et publications accoutumées (2).

S'il les représente en nature, il n'est tenu que de la dépréciation ou de la détérioration causée par sa négligence (art. 805 C. N.).

912. Il ne peut vendre les immeubles que dans les formes prescrites par les lois sur la procédure, sous peine d'être réputé héritier pur et simple, et il est tenu d'en déléguer le prix aux créanciers hypothécaires qui se sont fait connaître, soit par la production d'inscriptions régulières, soit en excipant d'une dispense légale d'inscription (art. 806 et 2135 C. N. et art. 988 C. de proc. civ. combinés).

(1) La prescription ne court pas contre l'héritier bénéficiaire, à l'égard des créances qu'il a contre la succession (art. 2258 C. N.).

(2) Il y a, toutefois, une exception à ce principe général, en ce qui touche les rentes de 50 fr. et au-dessous, et l'héritier bénéficiaire peut les vendre sans formalités de justice. (Avis du conseil d'État du 17 novembre 1807, approuvé le 11 janvier suivant.)

913. Il est tenu, si les créanciers ou autres personnes intéressées (1) l'exigent, de donner caution bonne et solvable de la valeur du mobilier compris dans l'inventaire, et de la portion du prix des immeubles non déléguée aux créanciers hypothécaires.

Cette caution est exigée par une sommation du ministère d'un huissier, et doit être présentée dans les trois jours de la sommation, par un acte dressé au greffe du tribunal de l'ouverture de la succession, avec dépôt en ce greffe des titres constatant la solvabilité de la caution.

Faute par l'héritier bénéficiaire de fournir cette caution, les meubles sont vendus et leur prix est déposé dans une caisse publique, ainsi que la portion non déléguée du prix des immeubles (2), pour être employée à l'acquit des charges de la succession (art. 807 C. N., 518, 992 et 993 C. de proc. civ. combinés.) 914. Une précaution essentielle et propre à sauvegarder sa responsabilité doit être prise par l'héritier bénéficiaire.

Ainsi, lorsqu'il a reçu des oppositions de la part de créanciers de la succession, il ne peut payer que dans l'ordre et de la manière réglés par le juge.

Dans le cas contraire, il paye les créanciers et les légataires à mesure qu'ils se présentent (art. 808 C. N.).

915. Il emploie en dépense, dans son compte, les frais de scellés, s'il en a été apposé, ceux d'inventaire et de ce compte. Ces frais sont à la charge de la succession (art. 810 C. N.).

916. L'héritier bénéficiaire ne peut être contraint sur ses biens personnels qu'après avoir été mis en demeure (par un acte d'huissier), de présenter son compte, et faute d'avoir satisfait à cette obligation.

(1) Les légataires, par exemple.

(2) Les sommes provenant de la vente de meubles ou d'immeubles ayant appartenu à une succession bénéficiaire doivent être versées dans la caisse des dépôts et consignations, lorsque le tribunal a ordonné cette consignation sur la demande d'un ou plusieurs créanciers. (Ordonnance du 3 juillet 1816, relative aux attributions de la caisse des dépôts et consignations, créée par la loi du 28 avril précédent, no 10 et 12 de l'art. 2 de cette ordonnance.)

Après l'apurement du compte, c'est-à-dire après l'établissement par la justice des recettes et des dépenses, l'héritier bénéficiaire ne peut être contraint sur ses biens personnels que jusqu'à concurrence seulement des sommes qu'il redoit en définitive (art. 803 C. N., et 540 C. de proc. civ. combinės).

917. Si des créanciers, qui n'auraient point formé d'opposition entre les mains de l'héritier bénéficiaire, ne se présentaient qu'après l'apurement du compte et le payement du reliquat, ils n'auraient de recours à exercer que contre les légataires, s'il en existait (1).

918. Dans l'un et l'autre cas, ce recours se prescrit (ou s'éteint) par le laps de trois ans, à compter du jour de l'apurement du compte ou du payement du reliquat (art. 809 C. N.).

CHAPITRE VI.

DU PARTAGE ET DES RAPPORTS.

SECTION Ire. De l'action en partage et de sa forme.

919. Dans la vue d'agrandir la circulation des biens et de rendre plus libre l'exercice du droit de propriété, la loi proclame en principe que ceux qui ont une chose commune entre eux ne peuvent être contraints de la posséder toujours indivisément.

Nul, dit-elle, ne peut être contraint à demeurer dans l'indivision, et le partage peut être toujours provoqué, nonobstant prohibitions et conventions contraires (art. 815, § 1o, C. N.).

Ainsi, admettant que le défunt, fût-ce même le père ou la mère, ait, par une disposition testamentaire, défendu à ses héritiers de partager, cette défense serait réputée non écrite, comme contraire à la loi (art. 815 et 900 C. N. combinés).

Admettant, d'un autre côté, que les héritiers fussent convenus de demeurer perpétuellement en état d'indivision, cette

(1) Il paraît évident qu'en l'absence de légataires, non-seulement l'héritier bénéficiaire serait complétement déchargé, mais encore que les créanciers non opposants, ayant à imputer à eux seuls les suites de leur négligence, n'auraient pas de recours contre les autres créanciers qui, ayant reçu de bonne foi, ne sauraient être astreints à rapporter.

convention ne les lierait point, parce qu'il n'y a que les conventions légalement formées qui tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites (art. 815 et 1134 C. N. combinés).

920. On peut cependant convenir de suspendre le partage pendant un temps limité; mais cette convention ne peut être obligatoire au delà de cinq ans; seulement, elle peut être renouvelée (art. 815, § 2, C. N.), pourvu que la nouvelle suspension n'excède pas cinq années. Dans le cas contraire, la durée excédante n'obligerait point.

921. Le principe général posé plus haut, admettrait une exception, si les biens indivis avaient été apportés dans une société à laquelle on aurait donné une durée excédant cinq années. Dans ce cas, la dissolution des sociétés à terme ne pouvant être demandée l'un des associés avant le terme convenu, par l'indivision, à moins de justes motifs, devrait subsister pendant cette durée (argument tiré de l'art. 1871 C. N.).

922. Si, par l'effet de conventions verbalement intervenues entre des cohéritiers, l'un d'eux avait joui séparément de partie des biens de la succession, cette circonstance ne ferait point obstacle à ce que le partage pût être demandé, parce que la jouissance séparée n'établit qu'une présomption de partage qui ne saurait l'emporter sur le droit de le demander, et qu'il n'y a qu'un acte de partage qui puisse faire cesser l'indivision, ou une possession suffisante pour acquérir la prescription, c'est-àdire une possession pendant trente ans (art. 816 et 2262 C. N. combinés).

Du reste, cette prescription ne courrait pas contre des cohéritiers mineurs ou interdits (art. 2252 C. N.), et le cohéritier qui l'invoquerait contre des majeurs, serait exclu du partage des autres biens restés indivis.

923. L'action en partage d'une succession et la forme de cette action ont, l'une et l'autre, une analogie parfaite avec celles qu'on dirige ou qu'on observe à l'égard de la communauté de biens entre époux, après qu'elle a été acceptée.

Aussi, pour éviter des redites qui, sans utilité, viendraient

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élargir le cadre de cet ouvrage, nous ne saurions mieux faire, pour indiquer à la veuve qui aurait à diriger une demande en partage d'une succession à elle échue, que de la renvoyer à ce que nous avons dit sous la section 1 du chapitre 4, titre 1er, au n° 189 et suivants, sur l'action en partage de la communauté et sur sa forme. Elle devra seulement substituer le mot succession au mot communauté, et ne point admettre le renvoi aux règles indiquées dans la 2 section, celles particulières à l'opération de liquidation et de partage des successions devant être exposées ci-après sous le n° 927 et suivants.

924. S'il s'agissait d'une succession échue à ses enfants mineurs, placés sous sa tutelle, la veuve qui, dans leur intérêt, voudrait en provoquer le partage, ne pourrait valablement le faire qu'après avoir obtenu l'autorisation du conseil de famille convoqué et composé ainsi qu'il a été dit sous les n° 127 et 128.

Cette autorisation est d'autant plus indispensable que la loi répute simplement provisionnels, les partages qui auraient été faits sans l'observation de cette formalité.

La veuve, tutrice, n'est dispensée d'y recourir que dans le cas où elle a à répondre à une demande en partage dirigée contre le mineur (art. 465, 817 et 840 C. N. combinés).

925. Du reste, la veuve, tutrice, doit retenir que le partage d'une succession dans laquelle seraient intéressés ses enfants mineurs, ne saurait obtenir à l'égard de ceux-ci l'effet qu'il aurait entre majeurs, qu'autant qu'il serait fait en justice, avec l'observation de toutes les formalités spéciales prescrites par la loi, et que tout autre partage ne serait considéré que comme provisionnel (art. 466, 838, 839 et 840 C. N. combinés).

926. Il n'est qu'un seul cas où il soit permis de procéder à un partage dit amiable, c'est celui où tous les héritiers sont majeurs et jouissent de leurs droits civils, sont présents ou dûment représentés, consentent au partage et adoptent un mode pour y procéder, ainsi, d'ailleurs, qu'on l'a vu sous le n° 188.

Hors ce cas, le partage prend la dénomination de partage judiciaire.

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